Chapitre 18




Les nuages gris qui parcouraient le ciel de la Sicile ne pouvaient pas être aussi orageux que l'étaient les yeux du mafieux qui se dirigeait vers ce bar miteux. Poing serré, il traversa la route sans se préoccuper de la circulation dense, le regard rivé sur l'entrée du bar. Après le détail rapporté par la jeune femme et qui avait tout changé, Lazaro était dans une rage incontrôlable. Edwardo qui le suivait à distance n'avait pas prononcé un seul mot depuis qu'ils avaient quitté la villa.

Car il connaissait les risques.

Rictus aux lèvres, il poussa violemment la porte du bar et y pénétra d'un pas menaçant. Il balaya le comptoir sillonné de personnes ivres qui passaient leur journée à boire. La musique était toujours aussi facilement reconnaissable avec ces notes de tentation. Il s'avança et traversa la salle pour tirer le rideau rouge qui renfermait l'espace réservé aux clients plus portés sur des shows privés.

À cette heure, la salle était vide et quelques danseuses répétaient en boucle cette danse lascive. Il braqua son regard noir sur la patronne de l'établissement dos tourné à lui.

- Est-ce que tu te souviens de mes lois ! Gronda-t-il si fort que la salle entière se figea dans l'horreur.

Les danseuses sursautèrent avant de se rassembler sur la piste de danse.

Le temps se glaça tandis que l'intéressé s'était retournée le visage blême, tentant de faire bonne figure. Elle esquissa un sourire tremblant, essayant de tromper l'instant comme une sauvegarde à sa survie.

- Lazaro ! Quelle bonne surprise de te voir ici ! S'exclama-t-elle d'une voix mielleuse.

- Est-ce que oui ou non tu te souviens de mes lois ! Répéta-t-il plus fort en s'approchant d'un pas menaçant.

Edwardo qui était resté en retrait sentait que la situation pouvait déraper à tout moment. Il connaissait suffisamment Lazaro pour affirmer que le danger qu'il représentait à cet instant pouvait terminer en bain de sang. Impitoyable, il s'avançait vers l'ennemie avec une démarche volontairement lente. Edwardo s'approcha lui aussi et décida d'intervenir.

- Olga il est temps de parler, nous savons que c'était toi sur la plage avec ton frère.

Elle fit mine de pas comprendre et poussa un rire trahi par une nervosité grandissante.

- Trésor tu te trompes de personne et je ne vois pas de quoi tu parles.

Lazaro étudia le comportement d'Olga avec colère et plaisir mêlées. Il savait pertinemment qu'il s'agissait d'elle et de son abruti de frère Aldo. Le seul qui portait des casquettes avec des symboles tribaux.

- Je te l'ai pourtant dit Olga, n'essaye jamais de trahir ma confiance, dit-il sombrement.

- Je te considère trop pour ça, glissa-t-elle en se mordant les lèvres avec appétit.

Lazaro esquissa un sourire diabolique qui avait pour but de la faire craquer.

- Je me souviens de cette nuit-là quand tu as soudoyé l'un des hommes de mon oncle pour qu'il te donne l'accès à la plage, rétorqua Lazaro en s'arrêtant à quelques centimètres d'elle. Au fait il est mort, j'espère que tu n'es pas trop triste.

Olga pâlit, mais c'est la colère et son arrogance qui la firent parler.

- Cet idiot de m'intéressait pas !

- Oh non, toi ce que tu voulais c'est un moyen de te faufiler sur ma plage privée dans l'espoir de pénétrer dans ma villa. Et ce soir-là c'est exactement ce que tu as fait. Malheureusement, je ne t'ai pas donné ce que tu voulais, seulement un avertissement sur les conséquences qu'ils pourraient y avoir si jamais tu essayais à nouveau de venir dans mon domaine sans permission.

Comme elle ne répondait rien, l'air bravache, le menton levé, Lazaro déclara :

- Même si tu me suppliais à genoux jamais je ne te prendrais Olga, que ce soit sur ce bar ou sur ma plage privée.

La colère croissante lui monta au visage.

- Tu préfères cette petite...puttana !

Lazaro tiqua, les yeux noirs.

- Répète ?

- Puttana ! Répéta la Sicilienne en reculant les yeux fous. Depuis quand le célèbre Lazaro Santi s'intéresse à une américaine qui sort de l'école.

Lazaro bondit pour lui serrer les bras et la colla contre le mur, mâchoires serrées.

- Tu n'aurais jamais dû faire ça Olga, tu n'aurais jamais dû l'approcher, chuchota Lazaro d'une voix menaçante en savourant l'expression douloureuse de son visage.

- Je ne lui ai rien fait !

- Toi et ton frère vous avez tenté de lui faire peur en l'empêchant de passer ! Rugit Lazaro les yeux noirs. Elle aurait pu mourir et ça tu vas le regretter.

- Depuis quand tu te donnes tant de mal pour une femme qui bientôt ne sera plus qu'un prénom à ta longue liste hein ?

- C'est ma femme ! Siffla-t-il simplement.

- Tu te lassera d'elle comme avec les autres, répliqua Olga avec un sourire en coin. Tu es réputé pour ça Lazaro. Tu chasses mais tu te lasses très vite !

Lazaro la saisit à la gorge pour aiguiser sa domination et savoura la peur qu'il lisait dans ses yeux.

- Tu oublies un détail très important ma chère Olga, chuchota-t-il à son oreille d'un voix diabolique. Je n'ai jamais eu besoin de chasser, elles sont toutes venues à moi, comme tu l'as fait en rampant à mes pieds. Hannah elle, n'est pas venue à moi, je suis venu à elle, et c'est là toute la différence.

Il la lâcha violemment et sortit son arme.

- Attend...qu'est-ce que tu fais, bégaya-t-elle en le dévisageant effrayée. Je croyais que tu ne tuais pas les femmes.

- C'est le cas, je ne tue pas les femmes, confirma Lazaro les mâchoires férocement serrées. Ton frère en revanche...

Olga se jeta sur lui, attrapant sa veste, les yeux suppliants.

- Attends ! Pitié ! C'était stupide je le reconnais, j'étais folle de jalousie ! Je ne le ferais plus.

Lazaro n'éprouva aucune satisfaction à la voir le supplier et il attrapa sa nuque afin qu'elle soit forcée à ne pas lâcher son regard.

- Une seule erreur, et je le tuerai sans la moindre hésitation est-ce que tu as compris ? Articula-t-il d'une voix menaçante.

- Ou...oui, j'ai compris, souffla-t-elle la respiration coupée, se retenant à sa veste avec insistance.

Lazaro la relâcha et la força à retirer ses mains de sa veste.

- Si tu t'en prends encore une fois à ma femme je te ferais vivre un enfer dont tu te souviendras toute ta vie, lança-t-il avant de quitter la salle de striptease son arme toujours en main.

Edwardo n'avait pas bougé, observant Olga d'un œil mauvais.

- Arrête de fantasmer sur quelque chose que tu n'auras jamais Olga ou tu vas finir par le regretter.

- Ça ne lui ressemble pas et tu le sais aussi bien que moi ! Siffla Olga.

- Tu as raison, ce qui me laisse penser que tu devrais faire extrêmement attention à toi, insista Edwardo alors que l'une des filles s'était rapprochée de lui pour glisser ses mains sous sa chemise.

- Cette fille n'est qu'un amusement pour lui ! Il va se lasser ce n'est qu'une question de temps ! Ce mariage est une triste...

- Assez ! Gronda Edwardo en saisissant les poignets de la stripteaseuse pour qu'elle s'éloigne de lui. Reste loin de cette jeune femme ou tu vas le regretter.

Edwardo quitta à son tour la salle et disparut dans l'épaisse fumée qui embaumait le bar.

Lazaro jeta sa veste sur l'un des fauteuils et se mit à arpenter le salon comme un lion tenu en cage. Les portes fenêtre ouvertes donnaient sur un concert de vagues qui frappaient les rochers et dans son esprit il ne put s'empêcher d'imaginer ce qui aurait pu devenir le pire des scénarios. Si son instinct ne l'avait pas poussé à vérifier la plage, Hannah serait peut-être morte à l'heure qu'il est.

Il abattit son poing sur la table en bois et celle-ci se fendit au centre. La fissure faisait état de sa colère qui ne s'était pas calmer. Il passa une main sur son visage, la respiration lourde alors qu'il ne se reconnaissait pas lui-même.

Depuis quand une femme suscitait en lui en envie de meurtre aussi radicale ?

Lazaro rejeta la tête en arrière et prit une profonde inspiration. Un bruit résonna dans le salon et aussi vif qu'un prédateur il braqua son regard sur l'intrus qui venait le déranger.

La jeune femme avait les mains agrippées sur le vase posé sur la console comme si elle l'avait empêché de tomber.

- Je...j'ai entendu un énorme bruit et...

- Tu ne devrais pas être ici mais au lit ! Gronda-t-il d'une voix bien plus sévère qu'il l'aurait imaginé.

La jeune femme pâlit aussitôt, les épaules tremblantes mais ne bougea pas pour autant.

Lazaro serra les mâchoires, essayant de calmer les sourdes respirations qui soulevaient son torse. Il ne bougea pas, réprimant au mieux cette colère avant qu'il ne l'abatte sur elle sans réellement le vouloir.

" Je suis venu à elle "

La vérité était là, et il était temps de l'accepter. Les femmes venaient à lui sans qu'il ne fasse rien. Pour Hannah c'était lui qui était venu à elle en la soumettant à ses règles.

- Que s'est-il passé ? Demanda-t-elle.

- J'ai réglé la situation, tout simplement, dit-il sans d'autres détails en allant se servir un verre.

- Tu as trouvé qui a fait ça ?

- Oui, grâce à tes indications, désormais tu n'as plus rien à craindre, je contrôle la situation.

Conscient de sa froideur, Lazaro resta de marbre et se retourna en laissant tomber son regard noir sur son genou.

- Mais...c'était qui ?

- Tu tiens vraiment à le savoir ? S'enquit le mafieux rictus aux lèvres.

- Eh bien oui, répondit la jeune femme en boitant jusqu'à lui.

- Remonte Hannah, je ne plaisante pas, lança-t-il en guise d'avertissement.

Elle leva son regard et s'arrêta à mi-chemin, les yeux remplis de lueurs incertaines.

- Pas avant de savoir qui était la personne qui m'a empêché de rentrer.

- Olga, une femme qui ne supporte pas mon indifférence, laissa-t-il tomber sèchement. Elle attends désespérément que je lui demande d'écarter les jambes. Elle a appris pour toi et voulait se venger.

Bien que sa voix sombre était redescendue d'un octave elle ne paraissait pas moins menaçante alors Hannah resta sur ses gardes. Il semblait dans un état de rage inquiétante et la fissure sur la table en témoignait.

- C'est son frère que tu as vu avec cette casquette, reprit-il en la dévisageant avec un regard énigmatique.

Hannah déglutit, étrangement envahie par une myriade de pensées contradictoires. Après tout à quoi s'attendait-elle ?

Lazaro était un homme de pouvoir à la beauté froide et viril. Elle osait à peine imaginer le nombre incalculable de femmes qui avaient dû passer dans son lit.

- Est-ce que...est-ce que je dois m'attendre à voir une autre femme débarquer avec un goût de vengeance dans la bouche ? Lança-t-elle avec un petit rire nerveux.

Impassible, le mafieux serra son verre sans rien dire et cela dura plusieurs secondes.

- Olga est tenace parce qu'elle n'a pas eu ce qu'elle voulait, les autres savent où se trouve leur place dans mon passé.

- Pourquoi sembles-tu si en colère contre moi ? S'emporta Hannah incapable de supporter plus longtemps sa froideur. C'est moi qui devrait être en colère pas toi.

Un éclair passa dans ses yeux bleus.

- J'ai cru que tu t'étais enfuie alors qu'il n'en était rien, tu aurais pu mourir ! Dit-il entre ses dents.

- Et ça te bouleverse à ce point ? Répliqua Hannah le cœur battant à la chamade. Rappelle-toi que je suis seulement une volonté, une exigence de ta part. Tu l'as dit toi-même, tu n'es pas un enfant de cœur, tu n'as aucune pitié pour personne alors pourquoi en avoir pour moi ?

- Hannah...fais attention à ce que tu dis ou je pourrais te faire voir comment je suis quand je n'ai pas de pitié.

Elle frémit sous le regard sombre du mafieux.

- Je ne fais que relater tes propres dires.

- Tu es...

- ...À toi, la coupa-t-elle la respiration affaiblie par la crainte d'aller trop loin. Je crois l'avoir compris, c'est bien ancré dans ma tête.

- Pas suffisamment sinon tu ne me poserais pas des questions aussi stupides cara, lâcha-t-il froidement.

Hannah voulut rétorquer mais une petite voix bienveillante la poussa à se taire. Il était si mystérieux qu'il était impossible de le comprendre.

- Vas-tu arrêter de me tester ?

- J'ai mes raisons à ce sujet-là, mais il semblerait que j'ai fait une erreur de jugement. Tu n'as visiblement pas l'intention de fuir.

- Non, comme je te l'ai déjà dit mais tu...

- Je fais une erreur et je le reconnais, la coupa-t-il en s'avançant vers elle si vite qu'elle n'eut pas le temps de réagir. Tu étais blessée et effrayée alors que je voulais à tout prix t'accuser de t'être enfuie.

- Pourquoi ? Murmura-t-elle en le dévisageant incrédule. Pourquoi est-ce que tu tiens tant à me voir m'enfuir tout en sachant que tu sauras me rattraper ?

Il la dévisagea à son tour, rictus aux lèvres puis déclara d'une voix rauque :

- Parce que je suis un monstre et en général, les monstres ont tente de les fuir, quel qu'en soit le prix...

Hannah fronça des sourcils, alors que des frissons courraient dans sa nuque. Le ventre noué elle soutenait le regard menaçant de l'italien.

- Je ne vois pas l'intérêt de faire ça si ce n'est te mettre hors de toi davantage, la preuve, quand tu m'as trouvé derrière le rocher j'ai vu ton regard et on aurait dit celui d'un assassin.

- Tu es la femme la plus étrange qu'il m'est donné de voir cara.

- Ah oui ?

- Oh que oui, affirma-t-il en la dévorant du regard.

- Et toi tu es l'homme le plus mystérieux que j'ai rencontré jusqu'à présent, répliqua Hannah en s'éloignant pour poser ses mains sur le haut du fauteuil. Cela fait à peine deux jours que je suis ici et ton seul désir c'est de me voir fuir pour partir à la chasse.

- À la vérité aucune femme n'a jamais franchie le seuil de mon domaine pour y rester plus d'une heure, lâcha le mafieux. Tu es la première à investir les lieux de cette façon, et je ne sais pas ce qui passe dans cette adorable tête. Comme je te l'ai dit, j'ai un lieu pour enfermer les femmes or toi, en étant ma femme, tu jouis d'une liberté qui met mes nerfs à rude épreuve.

Ainsi donc il s'agissait de ça ? Songea Hannah en se pinçant les lèvres.

Il était sur ses gardes car la liberté qu'elle avait en n'étant pas une prisonnière comme les autres lui donnait de multiple opportunités de s'enfuir et il ne semblait pas le supporter.

- J'aime ma mère plus que tout au monde, murmura Hannah en baissant les yeux. Jamais je pourrais trahir ma promesse est-ce suffisant ?

Il inspira profondément en posant son verre sur la table.

- Pour l'instant ça me suffit, lui dit-il en s'approchant. Mais nous ignorons de quoi demain est fait, la preuve aujourd'hui.

- Dans ce cas enferme-moi dans cet endroit tenu secret et la situation sera réglée, répliqua Hannah en testant à son tour le mafieux.

Un sourire ourla ses lèvres dures.

- Non tesoro, j'ai encore mieux que ça...

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top