Chapitre 17
Le regard assombri, le pied écrasé sur l'accélérateur, Lazaro fixait la route qui semblait s'éterniser.
- Sincèrement Lazaro, je vois pas pourquoi elle se serait enfuie tout en sachant les risques qu'elle fait courir à sa mère, lança Edwardo en se tenant à la portière.
Lazaro se passa une main rageuse sur le visage.
- La peur peut t'encourager à faire n'importe quel folie même s'il y a un prix à payer, dit-il simplement d'une voix qui ruisselait de colère.
- Elle l'aurait fait hier, répliqua Edwardo.
- Il y avait trop de monde, elle se trouvait sur un terrain dangereux et le savait parfaitement.
- Pourquoi tu as fait ça Lazaro ? Insista-t-il. Pourquoi lui avoir délibérément donné toutes les opportunités de se sauver, ça ne te ressemble pas.
Lazaro serra les dents avant de lui répondre.
- D'ordinaire mes ennemis sont enfermés, les femmes détenues là où tu sais, sans aucun moyen de fuir. Hannah est chez-moi.
Edwardo finit enfin par comprendre.
- Tu détiens Hannah par le mariage et par conséquent, elle vit dans le domaine et peut se trouver avec toi n'importe où et n'importe quand. Ce qui te laisse incertain de ce qu'elle pourrait faire avec autant de liberté que les autres n'ont pas. C'est pour ça que tu la testes. Tu veux savoir à quoi t'attendre pour les douze prochains mois. Va-t-elle chercher à s'enfuir chaque fois qu'une opportunité se présentera ? Vas-tu devoir lui courir après pour la ramener ? Qui plus est, c'est la première femme à investir le domaine et y tenir une place.
- Bravo Edwardo pour se résumé limpide, dit-il entre ses dents alors que le domaine n'était plus très loin.
- Maintenant je comprends, glissa Edwardo sur un ton inquiet.
Hannah avait une liberté qui le menaçait lui. Bien qu'il ne mettrait pas longtemps à la retrouver, Lazaro ne voulait pas que cela le pousse à devoir faire un choix extrêmement dangereux et radicale. Hélas, cela faisait plus d'une heure que la jeune femme ne donnait aucun signe de vie.
Elle s'était enfuie, mettant à mal sa propre mère et Lazaro savait pourquoi.
Malgré ses nombreuses bravades à lui tenir tête, la jeune femme n'était toujours pas parvenue à effacer cette lueur apeurée qui se lisait dans le miel de ses yeux.
La peur pouvait motiver n'importe quel humain pour sa survie même quand ce dernier avait conscience des risques.
Lazaro fit gronder les pneus pour se garer dans l'allée et y trouva l'un de ses hommes en compagnie de Bianca dont le visage était dévoré d'inquiétude.
- Alors ! Aboya-t-il tandis que le reste de son équipe semblait fouiller la propriété.
- Il n'y a rien, nous avons fouillés les hectares, la forêt qui jonche la route de campagne, elle n'est nulle part patron, répondit Darco le front perlant de sueurs.
Un rictus déformait ses lèvres et il avait bien conscience que son visage était dévoré par la colère.
- Attendez Signore ! Elle n'est pas partie c'est impossible ! Intervint Bianca en secouant la tête. Quand je l'ai quitté elle était dans sa chambre en train de se préparer et son téléphone est toujours sur la table de nuit. Si elle s'était enfuie elle aurait pris son téléphone non ?
Lazaro nota l'information mais elle se dissipa dans les ténèbres aussitôt et il les contourna pour fouiller à son tour chaque recoin des jardins.
- Bloque les aéroports, ordonna-t-il froidement en sortant son arme. Si dans dix minutes les recherches dans les alentours ne donnent rien alors c'est la Sicile entière qu'il faudra fouiller.
Lazaro serra les mâchoires en empruntant la passerelle en bois qui menait sur la plage, arme à la main car malgré sa fureur, les dires de Bianca restaient dans un coin de sa tête. Il ne fallait écarter aucune piste.
Il descendit la passerelle et balaya la plage déserte le poing serré. La marée était en train de monter et les rouleaux frappaient le sable à cause du vent chaud qui se levait bien plus fort que la veille.
Rictus aux lèvres il fit demi-tour avant que ses yeux d'aigle soient attirés par un détail deux cents mètres plus loin.
Lazaro marcha jusqu'à ce détail et plus il avançait plus il put le distinguer. Au pied de l'escalier, une paire de sandales était abandonnée, et à cet instant, la tempête dans ses yeux prit un autre sens. Sur ses gardes il suivit les traces de pas dans le sable qui n'étaient presque plus visible.
Ils se dirigeaient vers la mer et à ce moment-là un maelstrom d'émotions sombres se mirent rugir en lui.
Lazaro avait condamné les sorties, les deux grandes portails infranchissables avaient été fermé à son départ. Il avait voulu tester Hannah mais pas sans lui rendre la tâche compliquée. Ce qui signifiait qu'elle avait peut-être échoué et choisi de s'enfuir par la mer pour rejoindre les côtes voisines. Une tentative trop dangereuse.
Lazaro ne voulait pas y penser mais pourtant...
Il s'avança d'un pas rapide et nerveux jusqu'à ce que les vagues frappent ses jambes et parcouru l'horizon d'un regard inquiet par crainte de voir une silhouette inerte en surface.
Son torse se souleva violemment insufflé par l'inquiétude croissante et cette colère qui s'y mêlé. Il tourna la tête vers la droite et balaya ce côté avec plus de concentration à cause des rochers. Sa paire d'yeux aiguisée aperçut derrière cette écran de rage quelque chose se plaquer contre l'un des rochers par la force du vent. C'était comme un fil rougeoyant qui suivait la trajectoire de la brise marine.
Lazaro s'approcha du rocher en ignorant les vagues, l'arme pointée vers ce dernier et le contourna sur ses gardes jusqu'à ce que son regard atteigne une silhouette frêle qui sursauta.
Lazaro sentit un bref soulagement s'emparer de lui mais qui s'estompa rapidement. La jeune femme leva son avant-bras devant son visage comme pour se protéger...
De lui et de son arme pointé sur elle.
Alors il l'abaissa très lentement sans la quitter des yeux, rictus aux lèvres. Elle était trempée, reposant sous l'eau qui lui arrivait bientôt jusqu'à la poitrine. Elle claquait des dents, l'air complètement désorienté et apeuré.
- Tu espérais tout de même pas partir à la nage sans avoir quelques problèmes, lâcha-t-il en se dressant en face d'elle afin que l'ombre qu'il projetait sur elle lui offre la pleine possibilité de voir sa silhouette épuisée et fautive de sa propre imprudence.
- Je n'ai pas...voulu m'enfuir ! Parvint-elle à dire entre deux claquement de dents.
Lazaro rangea son arme à la hâte pour la sortir de l'eau.
- Tu auras tout le temps de m'expl...
Il s'arrêta brutalement quand ses genoux émergèrent de l'eau. L'un d'eux portait une entaille profonde et quand il la bloqua contre son torse la jeune femme gémit de douleur alors que le sang continuait de couler.
- Dio ! Que s'est-il passé !
Elle souffrait, le visage grimaçant et pâle. Ses mains fines se retenaient à lui mais son regard était tourné vers la plage.
- Ils sont restés pour m'empêcher de renter...
- Hannah...gronda-t-il doucement en s'empressant de rejoindre la plage.
Elle l'ignorait mais ce n'était pas délibérément. Elle fixait la plage et les alentours d'un regard anxieux, s'accrochant à lui comme si elle n'avait jamais été aussi soulagé de voir le diable...
Lazaro s'empressa de remonter l'escalier pour rejoindre la villa.
- Dio ! S'écria Bianca en se précipitant vers eux.
- Bon sang ! Que s'est-il passé ? S'enquit Edwardo.
- Je l'ignore encore, siffla Lazaro en montant l'escalier rapidement pour qu'elle se réchauffe.
Hannah était partagée entre le soulagement et la peur. Le mafieux l'avait retrouvé, mais elle pouvait sentir ses muscles saillants tendus et le torse contre lequel elle reposait se soulevait brutalement.
L'arme qu'il avait pointée sur elle était l'un des pires souvenirs qu'elle garderait de cet enfer. Hannah n'avait pas mis longtemps à comprendre qu'il la soupçonnait d'avoir essayé de fuir.
- Laissez-moi regarder cette plaie, dit Bianca en se précipitant vers le lit avec une trousse de secours. Le sel de la mer a fait des dégâts, il faut immédiatement désinfecter.
Lazaro ouvrit le placard avec brutalité pour prendre une couverture puis revint vers la jeune femme qui continuait de claquer des dents. Il s'approcha un peu trop vite et elle recula, creusant sa tête dans l'oreiller en le dévisageant l'air effrayé. C'est avec amertume qu'il ignora cette peur qui noyait ses yeux et tenta de la réchauffer. Lazaro savait parfaitement qu'il avait commis une énorme erreur en pointant cette arme sur elle.
- Que s'est-il passé Hannah ? Lança-t-il sur un ton impérieux et sévère quand Bianca eut terminé les soins.
Elle ferma les yeux une seconde la bouche complètement asséchée par le sel de la mer.
Il se leva du fauteuil pour lui servir un verre d'eau et tenta une nouvelle approche. Sur ses gardes elle suivit ses mouvements avec une appréhension dans les yeux mais le mafieux l'ignora pour l'aider à boire. Elle se laissa faire puis inspira profondément en se redressant sur le lit pour s'y assoir.
- Tu as essayé de t'enfuir ? La questionna-t-il en allant se rasseoir dans le fauteuil.
- Non ! Répondit-elle sur un ton désespéré.
- Dans ce cas dis-moi ce que tu faisais derrière un rocher en pleine marée montante comme si tu essayais de te cacher.
Sa voix exigeante et dure fit briller les yeux de la jeune femme qui commençait à reprendre sursaut d'énergie. Ses cheveux humides étaient d'une grande beauté car le roux avait prit des tons foncés. Son visage pâle renforçait le feu qui se dégageait de ce roux captivant et Lazaro dut reporter son regard dans le sien pour se concentrer.
- Je t'ai dit que je ne n'étais pas assez stupide pour faire ça !
- La peur peut conduire à faire des folies, cela s'appelle l'instinct de survie.
- La seule folie que j'ai pu faire jusqu'à maintenant c'est devenir la femme d'un homme impitoyable qui n'a pas hésité à pointer une arme sur moi ! Riposta la jeune femme froidement, les lèvres tremblantes.
- Je ne pensais pas que c'était toi sur le moment, je suis désolé si j'ai pu t'effrayer ce n'était pas mon intention, s'excusa-t-il d'une voix plus amène.
Elle baissa les yeux, les doigts entremêlés nerveusement.
- Si tu n'as pas essayé de fuir dans ce cas que s'est-il passé ?
- Tu n'essayeras même pas de me croire alors à quoi...
- Hannah...la coupa-t-il d'une voix sombre.
Elle releva les yeux dans les siens en inspirant difficilement.
- Après le départ de Bianca je suis partie dehors pour explorer les jardins et je suis tombée sur l'escalier en bois. Je l'ai descendu pour découvrir ce qu'il y avait au bout. C'était magnifique je n'avais rien vu d'aussi beau alors j'ai ôté mes chaussures pour m'avancer vers les rochers. Je suis monté dessus et je me suis installé sur l'un d'eux pour admirer le paysage.
Elle marqua un temps d'arrêt dans lequel elle grimaça à cause de son genou.
- Puis tout à coup je me suis retournée vers la plage et j'ai vu deux personnes au loin caché derrière les arbres.
Lazaro fronça des sourcils.
- Cette plage est privée cara, seuls les membres de mon clan peuvent y accéder par une grille sécurisée en haut de la côte rocheuse.
- Tu vois ! À quoi ça sert de t'expliquer !
- Je te fais juste savoir les faits Tesoro, gronda Lazaro en bondissant du fauteuil pour écraser ses poings sur le matelas pour lui faire face, la bouche à quelques centimètres de la sienne. Ne me raconte pas d'histoire Hannah je ne suis pas d'humeur ! D'autant plus que tu aurais pu te tuer !
Elle se mit à battre des cils, alors qu'il pouvait sentir battre son cœur de peur contre son cou.
- Je ne suis pas folle espèce...de fou ! S'emporta-t-elle en essayant de lui tenir tête.
Rictus aux lèvres Lazaro resta de marbre.
- Il y avait deux personnes qui m'observaient je ne les ai pas inventé, reprit-elle les larmes aux yeux, ce qui laissa à Lazaro un goût de remord dans la bouche...lui qui n'en éprouvait jamais. Je me suis levée précipitamment prise de panique et je n'ai pas vu la vague arriver. Elle m'a fait tomber du rocher et j'ai dû me débattre pour remonter à la surface.
Elle secoua imperceptiblement de la tête les yeux dans le vague.
- Ensuite j'ai réussi à rejoindre le bord des rochers et ils étaient toujours là. Ils ont vu que j'étais blessée et ils sont tout simplement resté immobile à cinquante mètres de l'escalier en bois comme s'ils voulaient m'empêcher de partir. Ils voulaient m'empêcher de remonter l'escalier et j'ai eu tellement peur que je me suis cachée. La marée a commencé à monter et mon genou était tellement douloureux que je n'arrivais plus à bouger puis tu es arrivé.
Lazaro serra les dents en la dévisageant. Il ne connaissait pas suffisamment Hannah mais savait qu'elle n'était pas douée pour mentir. Son histoire avait été narrée avec beaucoup d'émotions et de peur ce qui laissa place au doute.
- Tesoro, il n'y a personne qui peut...
- L'un d'eux portait une casquette noir avec des symboles étranges dessus et ils étaient blanc ces symboles j'en suis sûre, le coupa-t-elle en plongeant son regard dans le sien. Comme pourrais-je inventer ça ?
Lazaro se figea, les muscles tétanisés alors que ses poings enfoncés dans le matelas faisaient trembler ce dernier.
- Tu as dit des symboles ! Siffla-t-il entre ses dents.
- Oui ! Affirma-t-elle les yeux emplis d'espoirs qu'il puisse enfin la croire.
Lazaro se redressa lentement, ivre d'une rage qu'il essayait de contenir tandis qu'il avait le regard braqué sur la jeune femme qui lui avait dit la vérité et qui injustement avait subi des accusations qui pesaient déjà sur lui.
Car il s'était trompé et comme toute erreur, il y avait un prix à payer...
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