Chapitre 25
Un sursaut voulut et connecté à son esprit l'avait poussé à s'extirper de ce rêve trop intense et délirant pour se poursuivre. Hannah écarta les draps le sang brusquement échaudé et se passa les mains dans ses cheveux en faisant le constat qu'ils étaient humide tout comme sa chemise de nuit. La respiration déséquilibrée par ce brouillard épais qui continuait à se profiler dans son esprit elle se leva précipitamment du lit pour rejoindre la salle de bains. Elle se déshabilla à la hâte pour se fondre dans un torrent de pluies tièdes et froides. Le front appuyé contre la vitre de la cabine elle resta immobile laissant l'eau faire le travail. Ces rêves jusqu'ici insidieux commençaient à annoncer le glas d'un piège bien plus grave. Juste avant de s'endormir Hannah avait cherché une réponse à cette question qui n'arrêtait plus de la torturer depuis la lecture de ce livre...
Quels mystères entouraient son sacrifice ?
Pourquoi, elle qui avait si peur des hommes depuis cette nuit d'été humiliante avait accepté de suivre cet homme dangereux à des milliers de kilomètres de sa vie bien paisible ?
Pourquoi ?
Elle qui avait fui son passé comme Sarah Jacobs pour se reconstruire avait donné sa vie à ce mafieux sans même se battre.
Bien qu'il s'agissait de libérer sa mère, Hannah avait le choix comme Lazaro n'avait eu de cesse de lui dire.
Hannah avait choisi de continuer ce contrat dont il avait changé les règles.
Elle avait choisi de le suivre et pourtant il s'agissait de la même jeune femme qui avait fui un ex petit-ami obsédé et désireux d'obtenir son butin comme un négociateur de guerre.
Hannah sortit de la salle de bains plus détendu alors que sa peau à présent refroidie frissonnait. Elle porta une main à son front en fixant le livre qui reposait sur le lit, et qu'elle avait choisi de relire pour comprendre mieux Sarah Jacobs.
À force de se ressasser les passages les plus complexes de l'histoire, Hannah avait fini par trouver ce qui avait motivé Sarah à tout sacrifier pour cet homme glacial. Pour une raison que la protagoniste elle-même ne s'expliquait pas, l'homme dépourvu d'émotions arrivait à la faire sentir vivante et à lui livrer les propre secrets de son corps de son esprit volontairement protégé. Elle se sentait unique d'attirer l'attention de cet homme au regard cynique. Il lui vouait un temps de sa vie qu'il n'avait pas offert aux autres femmes qu'il avait soumis à ses règles. Sarah se sentait tout simplement unique, plus vivante et différente chaque fois qu'il posait son regard sur elle. L'amour s'en était suivit mais un amour à sens unique jusqu'à ce qu'il réalise l'immensité de ce qu'il avait perdu.
Était-ce différent pour elle ?
Hannah aurait aimé dire non mais c'était faux.
Lazaro Santi réveillait en elle quelque chose qui lui était difficile de définir. Le jour où ils s'étaient rencontrés, Hannah l'avait senti mais avait refusé de croire cela possible.
Il réveillait en elle quelque chose qu'elle n'avait jamais ressenti, pas même par le passé. Il la sortait de son monde bien rangé et par la seule force de son regard pénétrait son esprit pour y lire chacune de ses pensées.
Hannah se passa les mains dans les cheveux en arpentant la chambre d'un pas nerveux puis fit coulisser la baie vitrée pour sortir prendre l'air. Il était deux heures du matin et la noirceur qui l'entourait la rendait déjà nerveuse. Seules quelques étoiles pigmentaient le ciel et le bruit des vagues qui dormaient la poussa à descendre sur le pont inférieur sans faire de bruit. Il faisait si noir qu'elle hésita soudain à poursuivre sa route avant qu'une lumière au loin l'attire.
Les pieds nus, portant une simple chemise en coton volontairement grande pour qu'elle lui arrive aux genoux, Hannah ressemblait à une maîtresse en fuite après avoir quitté son amant en pleine nuit. Pourtant elle continuait de progresser jusqu'à cette lumière qui la mena à l'intérieur du bateau. Elle emprunta un escalier couvert de velours pourpre et retint un petit hoquet quand elle entendit la voix du mafieux se propager dans la pièce adjacente à celle où il se trouvait.
Sa voix s'était élevée avec une cruauté qu'elle n'avait jamais entendu jusqu'ici. Il parlait en italien et même son accent chaud ne semblait pas suffire pour réduire son timbre orageux.
Hannah s'approcha de la porte entrouverte et manqua de sursauter quand elle vit son imposante silhouette noire créer un contre jour.
Une voix distincte à la sienne était sur haut-parleur et elle reconnut Edwardo.
La discussion était tendue, et l'italien rendait impossible la traduction. Ce qu'elle voyait en revanche était parlant.
Le mafieux mains dans les poches tournait en rond comme un lion tenu en cage et ses puissantes mâchoires étaient serrées avec férocité. Ses yeux bleus semblaient transpercés de flèches orageuses. Le ton était acerbe, sifflant au point que sa gorge avait l'air dur comme l'acier.
Hannah sentit son sang se glacer même si l'échange entre les deux hommes ne ressemblait pas à une dispute mais juste à une réunion urgente où les ordres claquaient comme un fouet sur une plaie déjà saignante, au point qu'elle se demandait dans quel état pouvait bien se trouver Edwardo.
Car elle-même avait l'impression d'avoir des sueurs froides sans même comprendre le sens de cette conversation.
Hannah se recula quand la silhouette du mafieux se plaça près de la porte, dos à celle-ci. La conversion se poursuivait sur la même cadence froide et menaçant, parfois le ton prenait un aspect doucereux.
Hannah se mordilla la lèvre inférieure en posant la pointe de son pied sur le sol avec prudence mais dans l'autre pièce tout se passa très vite.
Le mafieux avait raccroché brusquement et elle n'avait aucun moyen de fuir à la hâte. Pourtant elle chercha à reculer à nouveau sur la pointe des pieds mais il fut plus rapide. La porte s'écarta par un geste vif et le mafieux émergea dans le faisceau de lumière.
Il n'était pas surpris de la voir, laissant comprendre qu'il savait depuis le début qu'elle était là.
- Qu'est-ce que tu fais là cara ? La questionna-t-il en marchant à pas de loup jusqu'à elle pour mieux l'envelopper de son aura sombre.
- Je...je prends l'air, bafouilla-t-elle en reculant.
- À deux heures du matin ? Dit-il en levant un sourcil, dardant son regard sur elle avec insistance. Tu es trempée, est-ce que je peux savoir ce qui se passe ? Ce n'est pas bien d'écouter aux portes.
Hannah ouvrit la bouche mais aucun son ne semblait vouloir sortir.
Elle heurta l'un des murs qui la stoppa et tel un prédateur se fondant sur sa proie il posa sa main sur le mur tapissé.
- Je pensais être la seule réveillée puis j'ai vu de la lumière. Je n'ai absolument rien compris de cette conversion. J'ai seulement noté que tu semblais en colère, j'espère que...qu'il n'y a rien de grave avec Edwardo.
Hannah rejeta un peu plus la tête en arrière pour affronter son regard sombre et indescriptible.
- Edwardo va bien et il est habitué à ce genre de conversation assez rêche, répondit-il avec un jeu de mâchoires. Pourquoi tu ne dors pas cara mia ?
Les raisons qui l'avaient réveillé devaient rester secrètes à tout prix mais difficile de maintenir un secret sous le regard épais de l'italien qui fouillait son âme.
- Je peine à trouver le sommeil voilà tout.
- Vous êtes une menteuse Signorina Santi, dit-il aussitôt en la piégeant un peu plus contre le mur, l'expression impassible mais trompé par ce jeu de mâchoires constant.
- Pas du tout, c'est vrai...
Elle déglutit et plus encore quand il s'inclina de façon à ce que son visage soit à hauteur du sien. Le parfum viril qu'il portait lui monta au nez alors qu'elle fixait sa bouche dure ombragé par cette barbe noire qui avait mis du piment dans leur dernier baiser.
- Je suis passé dans ta chambre il y a deux heures et tu dormais comme un bébé cara mia, chuchota-t-il tout près de sa bouche.
Hannah reprit un sursaut de conscience pour répliquer à la hâte.
- Et je peux savoir ce que tu faisais dans ma chambre ?
Un sourire ourla ses lèvres dures accompagné d'un bref rire.
- Je voulais vérifier que tu allais bien et n'oublie pas que tu es ma femme.
Le cœur battant à la chamade elle plongea son regard dans le sien.
- Ça ne...
- Pourquoi me cherches-tu Hannah ? La coupa-t-il d'une voix sombre, l'expression loin d'être amusée.
- Je te demande pardon ?
Il se redressa de toute sa hauteur rendant encore plus difficile l'instant déjà chargé d'électricité.
- Je fais mon possible pour t'instruire sur ma personne qui certes est foncièrement mauvaise, essayant en vain de te prouver que tu n'es pas n'importe qui à mes yeux et que je n'ai pas fait de toi ma femme pour ton corps mais parce que tu es indéniablement différente à mes yeux.
Il marqua une pause et ses yeux devinrent noir de désir qu'il ne chercha pas à contrôler.
- Même si je brûle chaque seconde d'achever cette lune de miel et de me perdre en toi. Que le contrôle que j'exerce sur moi-même devint de plus en plus difficile à maintenir, ajouta-t-il d'une voix rauque.
Hannah cilla légèrement en se tenant au mur alors qu'il s'était éloigné d'elle pour récupérer son verre laissé sur la table en verre.
- Je m'éloigne de toi et c'est toi qui vient à moi.
- C'est faux je...
- Arrête Hannah, la coupa-t-il en l'observant par-dessus son verre avec une paire d'yeux féroce. Sur l'île Lipari je t'ai laissé seule sur la place du marché pour que tu puisses jouir un peu de liberté et tu as passé ton temps à me chercher. Je t'ai vu de là où je me trouvais.
- J'avais peur de me perdre, ça n'a rien avoir, se justifia-t-elle la respiration désordonnée.
- Ah oui ? Et sur la bateau tu as aussi peur de te perdre ? Hier je t'ai laissé seule dans le salon parce que je pensais que ma présence te mettait mal à l'aise après le déjeuner et dix minutes plus tard tu étais sur le ponton avec moi. Il est deux heures du matin et si cette balade était si bénéfique pour toi tu ne serais jamais venu jusqu'ici tu aurais simplement poursuivit ton chemin sur le ponton après avoir vu la lumière mais au lieu de ça tu es restée derrière la porte comme si tu attendais que je te surprenne.
Hannah frissonna car le mafieux ne jouait pas. C'était un affrontement, une franche conversion qui la mettait face à la vérité mais elle ne voulait pas se l'avouer.
- C'est faux, murmura-t-elle d'une voix mal assurée tandis que ses yeux de velours continuaient d'accrocher férocement les siens.
- Dans ce cas mon ange si c'est faux sors d'ici et retourne immédiatement te coucher, ordonna-t-il en s'avançant à nouveau vers elle.
Il s'arrêta à mi-chemin, les mâchoires serrées, le regard orageux.
Hannah passa ses avant-bras derrière son dos appuyé contre le mur, incapable de bouger alors que c'était la seule chose à faire pour lui prouver qu'il avait tort.
Lazaro observa sa femme tressaillir alors qu'il était animé par une lutte constante. Ce coup de téléphone tardif était les conséquences inédites qu'elle avait sur lui. Sa détermination de la protéger du mal alors qu'il en était lui-même la réincarnation était devenu une obsession. Le désir qui pulsait dans ses veines n'avait jamais été si douloureux à tel point qu'il redoutait l'instant où il ne parviendrait plus à se contrôler. La jeune femme contre le mur les cheveux mouillés tombant en cascade sur ses épaules frêles ne faisait rien pour arranger la situation. Elle se mentait à elle-même et n'arrivait plus à le cacher. Hannah était attirée par le diable et ne voulait pas que ça se sache comme si elle était sur le point de commettre un crime.
Sa famille l'avait brisé et chacun l'avait formaté de façon à ce qu'elle se rende coupable des maux sur terre.
Son enflure de père en particulier.
Ce voyage au milieu de nulle part l'avait aidé à cette conclusion et bien plus encore.
- Plus je te regarde plus je suis de plus en plus convaincu que j'ai eu raison de faire ce choix diabolique et insensible.
Elle tressaillit à nouveau mais ne bougea pas.
- Sors d'ici Hannah, ajouta-t-il plus doucement.
Elle respirait difficilement, ses beaux yeux luisant d'une clarté unique mais n'avait toujours pas céder à son avertissement.
Et elle répondit enfin sans peut-être se douter que cette réponse allait tout changer...
- Non...
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