Chapitre 16




Hannah redressa la tête mais la chaleur n'était en rien atténuée et le mafieux semblait apprécier ce moment gênant.

- Oui je vais bien, je suis juste...un peu désorientée par tout ça.

- Tu finiras par t'habituer à cette nouvelle vie et aux aspects qu'elle contient, répondit-il sans s'épancher sur son sort plus longtemps. Plus vite tu auras compris ça plus vite tu pourras en profiter.

- Ça a l'air si...facile quand tu le dis de cette façon, railla-t-elle en se servant une tasse de café.

- Oh mais ça l'est, c'est juste toi qui complique ta propre situation, pas la mienne, répliqua le mafieux d'une voix ourlée de satisfaction. Pour ma part j'ai eu ce que je voulais.

- Est-ce que tu essayes de me mettre de mauvaise humeur de si bon matin ?

D'un regard mauvais, Hannah lui jeta autant d'éclairs que possible mais rien ne semblait l'atteindre.

- Non je n'oserais pas cara, répondit-il en feignant d'être sérieux. Je te donne simplement un conseil précieux qui pourrait t'être utile pour les prochains mois.

Hannah se dispensa de lui répondre car le rêve encore omniprésent dans son esprit faisait vaciller son désir de lui tenir tête.

- Que suis-je censé faire exactement ?

- Pour commencer, sortir de cette chambre, tu agis comme une prisonnière et si tu continues ainsi c'est dans ma chambre que tu le seras.

Cette fois-ci Hannah frémit sous le regard menaçant de l'italien qui ne plaisantait pas.

- Je ne suis pas chez moi ici et je ne sais pas ce que j'ai droit de faire ou non.

- Tu fais ce que tu désires tant que tu restes sur la propriété, répondit-il toujours avec sérieux. Le domaine est immense, tu as accès à tout. Tu es ma femme, cette villa t'appartient autant qu'elle m'appartient.

- Vraiment ? C'est ainsi que tu vois la conception de ce...mariage...

- Peu importe comment tu es devenue ma femme, tu l'es à présent et comme n'importe quel mariage il y a ce que l'on appelle un partage des biens.

Incrédule, Hannah secoua imperceptiblement la tête.

- Tu vas ensuite me dire que je récupère la moitié de ta fortune.

- Non tesoro, ça ne va pas jusque-là, lui dit-il avec un sourire en coin. Le contrat que tu as signé stipule que tu m'appartiens c'est tout. En revanche je tiens à ce que tu saches que cette villa est ta maison, tu es libre de faire ce que tu veux.

- Ah donc c'est un partage des biens décidé par le maître suprême et qui n'a aucune valeur juridiquement, lança-t-elle en faisant mine de réfléchir.

- C'est ça mon ange, chuchota-t-il en rentrant dans son jeu.

Hannah ravala une réplique cinglante et noya sa défaite en buvant son café.

- Notre mariage est différent mais cela reste un mariage, ajouta-t-il en se levant avec l'aisance d'un félin. Je te l'ai dit mia cara, je n'ai aucune raison de t'envoyer dans cet endroit tenu secret car cela nous concerne nous et seulement nous. Profite des avantages que je t'offre avant de les critiquer. Sors de cette chambre et explore des avantages du grand méchant loup.

L'esprit entre deux rives bien distinctes, Hannah le regarda enfiler sa veste et saisir une arme de poing qu'il glissa dans son dos.

Elle déglutit avec peine quand il s'approcha de sa chaise.

- Je dois sortir pour mes affaires, tâche d'être sage, annonça-t-il en se penchant pour déposer un baiser dans ses cheveux.

Elle ferma les yeux au contacte de ses lèvres dures et ses épaules se raidirent légèrement. Son after-shave gravitait autour d'elle alors qu'il était déjà parti. Quelques minutes plus tard elle entendit la voiture de sport quitter la villa et son cœur se mit à ralentir. Elle toucha ses cheveux à l'endroit exacte où il l'avait embrassé. Une peur éveilla sa conscience mise à l'épreuve et c'est seulement lorsqu'elle réalisa qu'elle était seule dans la demeure du diable qu'elle sentit dans son cœur que sa vie avait radicalement changée.

- Est-ce que tout va bien signorina ?

Bianca lui sourit comme si elle voulait la rassurer, sans doute parce qu'elle avait deviné le chamboulement qui devait se lire sur son visage.

- Cela ne vous dérange pas de savoir que je suis là parce qu'il en a décidé ainsi ?

Hannah aurait pensé qu'elle allait fuir la question mais elle ne le fit pas.

- Signore Santi est un homme extrêmement déterminé et aucun d'entre nous n'est en mesure de protester. Personne n'est choqué vous savez.

- Parce qu'ils sont tous de la mafia, nota Hannah.

- C'est exactement ça, confirma Bianca en débarrassant la table. Signore Santi doit certainement avoir ses raisons, il ne fait pas les choses sur un coup de tête. C'est un homme très réfléchi.

- Il voulait un jouet, rétorqua Hannah une moue amère aux lèvres.

L'italienne entre deux âges se figea une seconde puis poursuivit sa tâche.

- Je le connais suffisamment pour vous affirmer le contraire, si c'était le cas, vous ne seriez pas là, conclut Bianca l'air sérieux avant de s'en aller.

Hannah sentit quelques frissons parcourir sa nuque à cette information qui malheureusement manquait de détails. Lazaro Santi n'avait pas encore révélé l'intégrale de ses secrets.

Néanmoins elle ne s'avouait pas vaincue et suivit Bianca dans l'espoir d'en savoir plus sur le mafieux.

- Ça fait longtemps que vous êtes à son service ?

- Oui signorina, répondit Bianca en pénétrant dans une cuisine équipée et aménagée dans les moindres détails. J'ai postulé à son offre et j'ai obtenu la place. Bien sûr, au début je ne savais qu'il s'agissait d'un...mafieux...

L'italienne se racla la gorge en fuyant son regard.

- Comment l'avez-vous su ?

Hésitante, Bianca se dirigea vers l'évier.

- Un jour je me suis présentée à son bureau deux minutes plus tôt que d'habitude et je l'ai vu ranger des armes. J'ai tout de suite compris que mes intuitions étaient les bonnes. Derrière ses costumes impeccables d'homme d'affaires se cachait un côté bien plus sombre.

- Est-ce qu'il vous a vu ce jour-là ?

- Oui, mais il ne me l'a pas dit immédiatement. Il m'a testé. Il voulait voir si j'étais digne de confiance et ça a été le cas.

Bianca marqua une pause, les yeux dans le vague, un sourire en coin.

- Il a fait en sorte que je devine toute seule ce qu'il faisait et ce qu'il était réellement.

- Vous n'avez pas eu peur ?

- Énormément peur ! S'exclama Bianca avec un petit rire. Mais peu à peu, j'ai vu un homme soucieux de mon bien-être et bienveillant, mais je sais au fond de moi ce qu'il est capable de faire.

Soudain, l'italienne s'approcha et posa ses mains sur ses avant-bras.

- Mon enfant, soyez rassurée même si je sais que ça sera compliqué. Signore Santi ne vous fera aucun mal.

- Vous en êtes tellement persuadée que je suis tentée de vous croire mais il me faut du temps, murmura Hannah avec un sourire sans joie.

- Je comprends, répondit Bianca en posant furtivement un main tendre sur sa joue. Je dois sortir faire des courses, est-ce que je peux vous laisser ici ?

- Il y a certainement des gardes du corps postés partout dans la villa.

Bianca secoua négativement de la tête.

- Justement non, dit-elle gravement. Il n'y a aucun gardes du corps ce qui me laisse penser que Signore Santi est en train de vous tester...

L'italienne quitta la cuisine en la laissant seule avec cette information ahurissante. Alors il était encore en train de la tester ? Hannah ne sentit même pas la colère poindre en elle et quitta la cuisine pour monter se préparer.

Une heure plus tard elle quitta la chambre et s'arrêta dans le couloir silencieux. Elle était seule dans le domaine et étrangement, elle ne se sentait pas en sécurité. Il n'y avait plus personne, seulement le silence qui l'accompagnait à chacun de ses pas. D'abord tentée d'ouvrir toutes les portes pour y découvrir ce qu'il pouvait bien se cacher à l'intérieur, Hannah abandonna cette idée et descendit pour rejoindre l'extérieur. Des sentiments contradictoire l'empêchèrent de respirer car elle était à la fois angoissée par cette solitude et heureuse de la retrouver. Elle suivit le chemin qui menait à un escalier en bois et l'emprunta sans savoir où il menait. Même si l'italien n'était pas là, elle avait l'impression de sentir sa présence partout autour d'elle. Son aura puissante était pratiquement impossible à oublier même pour quelques heures et plus elle descendait ces marches plus elle se sentait observer.

Très vite, ses appréhensions disparurent quand le bruit des vagues fut plus fort que ses pensées. Elle retira ses chaussures en remarquant le sable fin sur les dernière marches et se surprit à sourire.

La mer bleue et cristalline se dressait devant elle, grande et magnifique. Le bruit des vagues frappant les rochers était aussi captivant que terrifiant. Le vent marin courut sur son visage et le poids sur ses épaules se dissipa peu à peu.

- C'est si magnifique, se murmura-t-elle à elle-même en marchant sur le sable fin alors qu'il n'y avait pas âme qui vive sur cette plage privée.

Un sourire rêveur sur les lèvres, Hannah s'approcha des vagues qui caressaient le sable chaud en essayant de se rappeler quand pour la dernière fois elle avait vu quelque chose d'aussi magnifique.

Son âme de petite-fille la guida vers les rochers alors que l'eau assez froide recouvrait ses mollets. Quelques algues malicieuses se collèrent autour de ses chevilles et quand elle atteignit les rochers elle monta sur l'un d'eux recouvert de sable. Prudente, elle s'aventura sur les suivants en ramassant quelques coquillages abandonnés et s'installa au sommet du rocher pour admirer la ligne bleue et infinie.

Elle resta là un long moment à profiter de ce havre de paix jusqu'à ce qu'un courant d'air glacial s'empare d'elle. Un pressentiment assez étrange lui noua la gorge alors qu'elle pivotait sur le rocher pour balayer la plage d'un regard inquiet.

Il n'y avait pourtant personne...du moins c'est ce qu'elle pensait avant de voir une silhouette au loin qui s'empressa de disparaître derrière les arbres. Hannah se leva maladroitement en mettant sa main en visière de façon à détailler au mieux cette silhouette. Soudain, et alors persuadée qu'il s'agissait d'une femme, Hannah vit quelqu'un d'autre et cette fois-ci il s'agissait d'un homme portant une casquette.

Glacée, le cœur battant à la chamade Hannah descendit les rochers sans faire attention et une vague assez forte la prit dans son étau immaculé. Elle glissa du rocher, emportée par le rouleau qui la propulsa sous l'eau.

Une douleur au genou droit la força à reprendre la contrôle et elle émergea en surface avant qu'une autre vague la pousse vers la plage. Désorientée, Hannah ouvrit les yeux pour fixer la plage d'un regard inquiet, à la recherche de ces intrus avec un seul prénom en tête.

Lazaro...

En pleine réunion, l'italien faisait courir ses doigts sur la table l'esprit ailleurs. D'une oreille distraite, il écoutait ses employés se féliciter du bilan trimestriel qui les avait propulsé au sommet du cours de la bourse.

Lazaro aurait normalement savourer cette énième victoire mais une bataille plus précieuse attendait d'être savourée.

Les mâchoires serrées, il attendit d'être seul pour lâcher un juron alors qu'il s'enfonçait lui-même dans les ténèbres. En laissant Hannah seule dans la villa, il espérait éprouver une autre satisfaction en rentrant.

Celle de la voir.

Il était rongé de l'intérieur d'avoir fait ça car il mesurait les risques qu'elle tente de s'enfuir. Ce n'était pas un jeu pour lui mais juste ce dont il avait besoin pour être certain que la jeune femme était digne de confiance. En la laissant seule, il venait d'ouvrir les pans d'un semblant de liberté et la peur qu'elle ressentait envers lui pouvait la pousser à tenter l'impossible.

- Patron...

La voix de Sandro lui fit serrer les mâchoires encore plus fort car si l'un de ses hommes étaient là, c'est que ses doutes étaient sur le point d'être confirmés.

- Parle ! Ordonna-t-il les dents serrées.

- Elle n'est nulle part sur les caméras, ça va faire bientôt une heure maintenant.

Les yeux noirs, Lazaro fit craquer sa nuque en se levant, alors que la colère coulait dans ses veines jusqu'à les faire pulser le long de sa gorge veineuse.

Une profonde inquiétude se mêla à cet écran sombre qu'il avait devant les yeux car sa tentative d'évasion était tout aussi dangereuse que lorsqu'il allait la retrouver.

Une sensation sourde se mit à grandir en lui alors que ses tempes battaient au rythme de cet instinct possessif qui lui hurlait de la retrouver avant qu'il ne soit trop tard.

Pour elle, comme pour lui...

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