Chapitre 8



À la tombée du crépuscule, le groupe quitta le château sous bonne escorte. Tara regardait les filles montaient gaiement dans le bus alors que elle, laissait tomber quelques larmes de tristesses. Ses jambes faiblirent soudain et son regard s'arrêta un instant sur la porte de sa chambre. Pendant un instant elle aurait voulu appeler son frère pour qu'il vienne la chercher. Tina Thomas monta dans le bus sans se retourner et quand il disparut, elle se sentit désemparée. Tous les espoirs qu'elle avait fondé sur ce voyage, s'évanouirent. Tout devint subitement silencieux. Le harem lui faisait froid dans le dos. Les murs semblaient vouloir se refermer sur elle. Mais inutile de s'apitoyer sur son sort. Car le sien était scellé. Que pouvait-elle espérer de la vie. Voilà six ans qu'elle vivait entre quatre murs. Chaque matin son ventre se nouait et chaque soir elle tremblait. L'épreuve qu'elle avait endurée revenait sans cesse la hanter. Elle pouvait sentir l'odeur nauséabonde de son agresseur fouetter son visage.

" Elle n'a quasiment rien senti, elle était à demi consciente "

Lorsque le médecin avait prononcé cette phrase, Tara avait crû mourir.

Echappant aux souvenirs effroyables qui hantaient son esprit, Tara se leva pour rassembler ses affaires dans sa valise. Klaus lui avait promis de venir la chercher. Et il le ferais.

- Vous allez quelque part mademoiselle Kreighton ?

Tara frémit au lieu de sursauter. Cet accent était si chaud qu'il faisait contraste dans la voix dure du souverain. Pour quelle raison était-il ici au soleil tombant ?

Prise au piège, Tara se retourna et baissa immédiatement les yeux. Non par peur mais par timidité.

- Je pense qu'il est temps pour moi de partir, déclara-t-elle péniblement.

- Est-ce qu'il y a quelque chose qui vous a contrarié ? Demanda-t-il d'une voix étonnamment douce.

Un frisson d'appréhension courut sur son échine.

- Rien du tout, seulement je ne pense pas avoir ma place ici.

Et se retourna pour remettre toutes ses affaires dans sa valise. Ses mains tremblaient tellement qu'elle dut s'y reprendre à plusieurs reprises.

- Vous avez peur, c'est tout à fait normal, lâcha le roi en avançant son fauteuil un peu plus près ; Mais je suis convaincu que madame Thomas sera triste de vous savoir partie à son retour.

Tara osa se retourner. Une chaleur étrange envahissait ses joues à mesure que le regard noir jais du roi se posait sur le sien. Elle n'aurait su dire lequel de ses traits lui faisait le plus peur. Son visage asymétrique ressemblait à celui d'un assassin. Un bel assassin. Depuis son agression, Tara n'avait plus jamais revu d'hommes. Même Mathias âge de dix-sept ans à l'époque n'avait pu l'approcher d'aussi près.

- Khazban est un beau pays, reprit-il sérieusement ; Vous allez rater quelque chose d'extraordinaire.

- Je ne suis pas...commença-t-elle en secouant de la tête ; Je...je ne suis pas à l'aise ici.

- Vous voulez dire dans l'étable ?

Tara déglutit. Cet homme mentait délibérément sur le mot exacte que portait cet endroit. Un signe évident que derrière ces murs tapissés de richesse ce cachait une tout autre histoire.

- Je suis peut-être coupé du monde depuis six ans, je n'en demeure pas moins stupide, murmura-t-elle d'une voix qui trahissait sa crainte d'aller trop loin ; Nous ne sommes pas dans une étable mais dans un harem.

Un fugace sourire passa sur son visage.

- C'est tout à fait vrai mademoiselle Kreighton.

- Pourquoi faire croire que c'est une étable ?

- Sans doute pour éviter cette situation dans laquelle vous êtes confrontée.

Tara fronça des sourcils.

- Vous avez peur.

- Pas de cette bâtisse en question.

- Son histoire alors ? En déduit Mohammed complètement fasciné par la jeune femme qui paraissait venir d'un autre siècle.

Son épaisse chevelure d'ébène tombait en cascade contre sa jambe gauche. Elle était pieds nus et portait la robe de son arrière grand-mère.

Comme elle ne répondit rien, Mohammed reprit :

- Je suis venu jusqu'à vous pour vous proposer de venir vous installer dans mon château.

La réaction de la jeune n'est pas celle qu'il espérait. Ses grands yeux s'écarquillèrent de peur. Elle secouait de la tête négativement et détourna son regard sur sa valise. Peu patient, Mohammed fit preuve d'un grand calme qui le surprit lui-même.

- Ce n'est que le temps d'une nuit, ajouta-t-il doucement ; Anaya serait ravie de pouvoir vous choyer le temps d'une journée.

En invoquant le nom d'une femme, Mohammed savait qu'il gagnerait un peu de sa confiance.

- Qui est-ce ?

- Celle qui m'a tout appris, Anaya m'a presque élevé.

À ce souvenir d'enfance, Mohammed sentit sa gorge se nouer. Il n'avait pas été très tendre avec elle ces derniers jours. Cette pensée le fit soupirer.

- Mon invitation est plus que honorable mademoiselle Kreighton, et je tiens à vous apporter tout le confort dont vous ayez besoin.

À la dérobée, la jeune femme le regardait timidement. Peut-être à deux doigts d'accepter.

- Et au cas où vous ne l'auriez pas remarquer, je suis dans un fauteuil.

Enfin, elle se retourna pour se laisser choir par terre les bras sur le lit. Mohammed fut choqué par son comportement. Une pensée déplacée l'obligea à serrer ses mains contre les roues de son fauteuil pour se reprendre.

- Ce n'est que temporaire, dit-elle en baissant les yeux sur ses jambes.

- Et qu'est-ce qui vous fait dire ça ? Demanda-t-il en leva légèrement son sourcil.

Mohammed lut de la peur dans son regard. Elle n'osait pas lui exposer ses conclusions alors il se sentit obliger de reculer son fauteuil pour lui montrer qu'elle pouvait avoir confiance.

- Vos jambes se contractent souvent, murmura-t-elle alors en n'osant à peine le regarder dans les yeux ; Si vous étiez condamné, vous ne pourriez pas les bouger.

Longuement, Mohammed observa la jeune femme assise près de son lit, serrant convulsivement ses poings contre le matelas.

- C'est une excellente analyse, lui fit-il remarquer ; Beaucoup avant vous ont concluent que j'étais condamné d'un simple regard.

- Rester six ans dans une chambre avec des tas de livres ça aide un peu, murmura-t-elle pour toute réponse.

Mohammed devint subitement silencieux...fasciné par ses traits fins et incroyablement doux. La savoir seule depuis l'enfance et brisée depuis cette agression le poussaient inexorablement vers cette jeune inconnue au tendre regard.

Que lui arrivait-il ? Se demanda-t-il en inspirant imperceptiblement.

- Anaya serait vraiment heureuse de vous avoir à ses côtés, reprit-il en prenant soin de ne pas user de sécheresse à son égard.

Tara plongea pour la première fois son regard dans celui du roi. Elle voulait savoir s'il ne mentait pas. Aussi noir que le jais de ses cheveux, sa paire d'yeux traduisait la vérité.

- Vous avez le choix, reprit-il d'un ton neutre ; Vous pouvez partir et ne pas profiter de mon pays. Vous pouvez rester dans votre chambre et alors je mettrais des gardes près de l'entrée pour que vous vous sentiez rassurée...ou alors, vous acceptez de dormir dans l'une des chambres du château.

Tara se pinça la lèvre en le regardant à la dérobée.

Un trouble s'empara d'elle lorsqu'il recula son fauteuil pour avancer près de l'entrée.

- Vous êtes libre de choisir Tara, déclara-t-il avec une expression si douce que son visage y semblait peu accoutumé.

Alors il disparut soudain, la laissant seule avec les trois choix qui s'offraient à elle.

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