Chapitre 72



  - Que viens-tu de dire ? Souffla la jeune femme.

Mohammed se passa une main sur le visage sans la quitter des yeux. Sa respiration était erratique et son corps lourds de remords. Par Allah qu'avait-il fait ?

Il n'était pas parvenu à se contenir et cette dispute lui brisait le cœur. Il ne parvenait pas à se défaire de la culpabilité qui le rongeait de l'intérieur et encore moins de son désir de la venger. Réprimant un pas en avant, il contempla sa future femme immobile sur sa chaise exigeant par le silence une explication.

- Mohammed de quoi est-ce que tu parles ? S'impatienta celle-ci en serrant son poing contre sa cuisse.

Voyant qu'il ne pouvait plus faire machine arrière, Mohammed décida de lui avouer la vérité au sujet de sa grossesse et surtout il espérait qu'elle prenne conscience qu'elle devait s'alimenter davantage.

- Je t'ai menti, lâcha-t-il d'une voix plus amène ; Quand le docteur Adzira m'a parlé elle ne m'a pas seulement dit que tu devais t'alimenter mais qu'elle était quasiment sûre que tu attendais des jumeaux ou des faux jumeaux.

Tara se leva d'un bond toute fois prudente sur son avancé. Impossible ! S'écria-t-elle intérieurement en n'osant y croire.

- Mais pourquoi elle ne me l'a pas dit ?

- Selon les traditions du royaume, c'est aux hommes d'annoncer le sexe de l'enfant ou tout autre information qui touche la grossesse de près comme de loin.

Mohammed décida enfin de s'approcher lorsqu'elle manqua de trébucher.

- Je craignais de te donner de l'espoir pour rien.

La bouche ouverte elle semblait chercher ses et Mohammed savait ô combien ce qu'elle était en train de ressentir à cet instant.

- Je suis désolé de t'avoir caché ça Tara, reprit-il d'une voix presque éteinte ; Je comprendrais si tu m'en voulais.

Elle secoua de la tête en posant ses mains sur ses tempes. Elle semblait complètement déroutée par la nouvelle. Mohammed suspendit son geste près de son visage, incapable de décrire les sentiments qui se bousculaient en elle.

- Je ne t'en veux pas, je suis complètement bouleversée par cette nouvelle.

Pour appuyer son dire, elle posa sa main sur son ventre en exhalant un soupir alors que ses lèvres s'incurvaient d'un sourire.

- Si c'est la cas ça serait la plus belle nouvelle de toute ma vie ! Oh mon dieu Mohammed.

Ce qu'il redoutait arriva. Tara était heureuse et déjà persuadée qu'elle était enceinte de jumeaux.

- Restons sur nos gardes Tara...

- Ou...oui tu as raison, bredouilla la jeune femme avec semblant de sérieux ; Restons prudent.

Calmé, malgré le déferlement de rage qui aurait pu fragiliser sa relation avec Tara, un flot de sentiments qui l'assaillait.

- Je n'aurai pas dû m'énerver de la sorte, cela ne mène à rien.

Tara était encore dans l'euphorie de la nouvelle et en avait presque oublié leur altercation. Enceinte de jumeaux ? Une maelstrom de sensations se mit à déferler en elle.

- Je vais bien, et je crois que nous avions besoin de cette discussion pour avancer.

Il la guida jusqu'au lit, captura ses lèvres avec infinie tendresse. Enfin, la passion se réveilla en elle. Tout semblait merveilleux à l'exception de sa cécité.

- Demain, nous avons quelque chose de très important à faire, tu devrais te reposer.

Mohammed tira les couvertures pour la protéger de la brise fraîche. Demain serait une étape importante dans sa reconstruction. À la fois heureuse et dans l'incertitude Tara se blottit contre lui pour lui prouver qu'elle ne lui en voulait pas de s'être emportée et pria pour cet enfant...qu'elle espérait pouvoir découvrir très bientôt.

~

- Bienvenue à Rome votre altesse.

Mohammed bougonna quelques remerciement sans quitter Tara des yeux. Chacune de ses expressions tirait son visage d'une douleur lancinante. Mais très vite, elle redressait les épaules pour paraître forte.

- Tu as faim ? Demanda-t-il d'une voix douce en la guidant vers la ruelle bondée de monde.

- Je ne pourrais rien avaler, refusa-t-elle en lui tenant la main au plus fort.

Tara se laissa guider dans la ruelle, le ventre complètement noué. Des milliers de questions se bousculaient dans son esprit. Serait-elle assez forte pour surmonter cette épreuve ?

Plus elle entendait les pas des passants résonnaient, plus Tara doutait d'elle. Cette odeur...elle s'en souvenait. Le clocher de l'église se mit alors à sonner midi. Tara se stoppa, le cœur battant. Inutile de voir pour se souvenir de cette église et de sa bâtisse très vieille qui forçait l'admiration des passants.

- Prend ton temps, mon amour.

La voix grave et rocailleuse de Mohammed lui insufflait du courage...le courage d'avancer plus loin encore.

- Nous y sommes, lui annonça Mohammed en s'arrêtant de marcher.

Tara sentit son souffle s'affaiblir. Comme elle l'avait prédit, Tara revit le visage de son agresseur mais ce qui la choqua le plus, ce fut ce silence assourdissant. Le même qui l'avait accompagné il y a jadis des années.

- Tout va bien ? Demanda-t-il en la sortant in extremis de sa torpeur emplie de ces images insupportables.

- C'est tellement silencieux, murmura-t-elle d'une voix presque inaudible.

- C'est un ruelle à sens unique habibti, il n'y a rien d'autre que des tas d'ordures.

Mohammed serra ses mâchoires, mains sur les épaules fragiles de Tara. Une immense tristesse émanait de son beau visage. Ses mains tremblaient, constat-t-il en les prenant dans les siennes.

- Jamais je n'aurais pensé être capable de surmonter ça, dit-elle d'un souffle court.

- C'est très courageux, nota-t-il en caressant l'intérieur de ses paumes pour qu'elle ne s'éloigne pas trop de la réalité.

Il n'y avait personne, pas même un commerçant. Il tourna la tête vers les rues animées de Rome et comprit à quel point le calvaire de Tara avait été terrible tant pour la violence que pour la pression menaçante exercée sur elle pour l'attirer jusqu'ici.

- Ça...y est je veux partir ça suffit, le supplia-t-elle en titubant.

La seconde suivante, il lui prit la main pour la guider vers les rues animées. Sa respiration était saccadée mais elle tint bon, marchant à petit pas vers les rires des passants.

- Tu l'as fait Tara.

- Même en n'y voyant rien, j'ai pu ressentir les détails, l'odeur très particulière et...

Tara marqua une pause et s'arrêta brusquement.

- Est-ce que tu vois une boutique d'antiquités autour de toi ?

Mohammed fronça des sourcils en jetant un regard circulaire sur les boutiques. Une en particulière attira son attention.

- Oui, j'en aperçoit une à l'angle de la rue.

- Je veux y aller s'il te plaît.

Guidée jusqu'à la boutique, elle y entra, se souvenant du petit tintement de la clochette. L'odeur du bois raviva les derniers souvenirs heureux qu'elle avait eu avant son agression. Aidée par Mohammed, Tara toucha quelques objets d'une main tremblante.

- C'est ici...que J'étais quand....

Emmener Mohammed dans cette boutique l'aidait à surmonter son passé. Elle l'intégrait à son histoire pour qu'ils puissent tourner la page et démarrer une nouvelle vie. Émue aux larmes, elle sentit sous la pulpe de ses doigts la finesse des objets, bercée par les explications de Mohammed.

- Tu ferais un vrai antiquaire, lança-t-elle d'une voix amusée.

Mohammed ne quittait plus ses mains, lui faisant toucher les objets avec lenteur pour qu'elle puisse savourer la texture des objets.

- Quand nous rentreront au château, je te montrerais une salle qui regorge de trésor.

Elle se mit à rire mais il n'en savoura ni le goût ni la douceur de sa voix. Mohammed se mit à fixer le vieil homme qui avançait vers eux dans la difficulté. Il se redressa lentement en continuant de dévisager le regard de cet homme qui semblait attristé...peiné, rivé sur Tara.

- Mohammed ? L'appela-t-elle.

Et alors qu'il fut sur le point de lui répondre le vieil homme remonta la trotteuse d'une magnifique boite à musique qu'il posa devant Tara.

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