Chapitre 65
Mohammed avait beau courir, il avait l'impression que le temps s'était arrêté. Ses poumons ne parvenaient plus à se remplir d'air. Le son des sirènes résonnait dans ses oreilles, broyant son cœur.
- Où est-elle ! Que s'est-il passé !
Sa voix s'était éraillée à mesure qu'il parcourait l'hôpital à la recherche de Tara.
Aziz, visage noirci de fumée se leva à la hâte pour aller à sa rencontre. Mohammed scruta son expression dans l'espoir qu'il ne soit pas porteur de mauvaises nouvelles.
- Tara avait terriblement mal au ventre, l'un de nos hommes à jugé bon de l'emmener à l'hôpital mais....une autre bombe était placé sur la route principale et la voiture a été soufflée.
- Soufflée ! Juste soufflée ? Demanda-t-il d'une voix chevrotante tant la panique montait inévitablement en lui.
- Juste soufflée, Affirma Aziz la respiration affaiblie par les toxines qu'il avait encore dans la gorge.
- Où est-elle ? Répéta-t-il plus fort ; est-ce qu'elle est morte ?
Mohammed se figea d'horreur après avoir prononcé cette phrase qui...
- Non, mais elle est blessée, j'ignore à quel point. Les médecins s'occupent d'elle.
Un grand froid le paralysa. Mohammed fixait les portes closes ne parvenant plus à maintenir l'émotion grandissante qui faisait battre son cœur. Seul sa rage l'aidait à tenir debout.
- Anaya s'en est sorti avec quelques coupures et Ahmed est...dans un sale état.
Une douleur lancinante lui comprima le cœur. Désespérément, Mohammed réalisa qu'il avait échoué. Il n'avait pas tenu sa promesse de la protéger. Raoul avait gagné et venait d'atteindre son âme. Si jamais Tara mourrait...
- Pourquoi...souffla-t-il soudain livide ; pourquoi est-elle partie du château.
- Appartement ses douleurs étaient un cri de désespoir, répondit Aziz en se passant une main sur son visage ; Elle avait terriblement mal.
- J'ai failli à ma promesse Aziz, murmura-t-il d'une voix à peine audible ; Je....n'ai pas réussi à la protéger comme j'aurai dû le faire.
- Tara est une femme forte, elle va s'en sortir.
Hélas, Mohammed ne croyait plus au miracle depuis longtemps. La télé du couloir passait en boucle l'explosion qui venait de cibler Tara. Il pouvait entendre l'agitation dehors....il pouvait entendre le nom de Tara revenir sans cesse hanter les derniers souvenirs qu'il avait d'elle. Une larme roula sur sa joue...brusquement il tenta de l'essuyer mais une autre la remplaça. Il n'avait pas le souvenir d'avoir pleuré un jour pas même pour la mort de ses parents. Et à mesure que le temps passait, Mohammed avait l'impression que sa vie était vide, redevenue cruellement celle qu'elle était avant de rencontrer Tara.
Il était redevenu l'homme dans ce fauteuil roulant, observant les dunes de sable changer d'aspect au fil des saisons.
Puis le temps passa...il crut que des années venaient de s'écouler. Mohammed perdait espoir, affaibli par les dires des journalistes qui passaient en boucle une vidéo amateur prise pendant l'explosion.
- Votre altesse ?
Quittant lentement sa torpeur il cligna des yeux à plusieurs reprises avant de découvrir que cette voix appartenait à un médecin. Il se releva précipitamment imité par Aziz.
- Est-ce qu'elle va bien ? Demanda-t-il le souffle court.
- Elle va bien, elle vivra votre altesse.
Cette nouvelle aurait dû le réconforter hélas, l'expression de ce médecin ne présageait rien de bon.
- Mais ? Demanda-t-il d'une voix percée d'impatience.
- Tara a été touchée aux yeux, lâcha-t-il d'une voix délicatement prudente.
Mohammed demeura interdit, comme si on venait de lui couper les jambes.
- Quoi ? Murmura Mohammed d'une voix presque éteinte comme s'il venait de sombrer en enfer.
- Le scanner à révélé un œdème cérébral ainsi qu'une lésion au niveau des yeux, compressé par l'œdème....ce qui signifie qu'elle...
- Non, siffla-t-il entre ses dents serrées.
- Ce n'est que temporaire, s'empressa de dire le médecin avec un regard confiant ; Il faut seulement que l'œdème se résorbe au fil des jours, pour le moment, il faut qu'elle reste dans le noir.
- Vous êtes en train de me dire qu'elle est aveugle ! Cria-t-il en se retenant de le plaquer contre le mur.
- Croyez-moi votre altesse, j'ai eu des cas de ce genre tant de fois que je peux vous assurer qu'elle recouvra la vue d'ici quelques semaines.
- Semaines ! Répéta-t-il les yeux noirs, une lueur désespéré au fond des yeux.
- Nous ne pouvons pas être sûr à cent pour cent de la durée d'un œdème peu importe quelle partie du cerveau touchée. Parfois des patients se retrouvent amnésique.
Mohammed refusait d'y croire. Son monde venait de s'effondrer autour de lui. Anéanti, il préféra se réduire au silence par crainte de tout maudire sur son passage.
- Est-ce...qu'elle le sait ? Parvint-il à dire d'une voix altérée par la douleur qui broyait son cœur.
- Oui, avoua le médecin en se reculant avec crainte ; Elle est faible, néanmoins consciente de la gravité de la situation. J'ai préféré lui expliquer avant vous votre altesse et je comprendrais si...
- Et son mal de ventre ? Le coupa-t-il les yeux rivés sur le sol, n'osant croire ce qui était en train de lui arriver.
Quelques heures avant il l'a demandé en mariage. Quelques heures plus tard elle était victime d'un attentat perpétré par un homme cruel et qu'il se jura de tuer.
Est-ce que son infirmité durerait toute sa vie ?
Cette question ne manqua pas de l'anéantir totalement.
- Parfois, dans un début de grossesse assez difficile, certaines femmes présentes des douleurs assez douloureuse mais grâce à dieu, le bébé est en vie.
Mohammed releva lentement la tête les oreilles bourdonnantes.
- Quoi ? Lâcha-t-il d'un souffle à la fois désespère et incrédule.
Le médecin affaissa ses épaules, le visage cendré.
- Oh...je...vous ne le saviez pas ? Je suis confus je pensais que...
- Elle est enceinte ?
Plongée dans le noir, Tara avait l'impression d'être abandonnée. Elle avait de vague souvenir de l'explosion mais ce souvenait d'avoir senti une odeur désagréable de souffre. Elle avait mal partout, son corps meurtri par la violence de cette explosion qu'elle pouvait encore entendre résonner dans ses oreilles.
Lorsqu'on lui avait annoncé son infirmité temporaire Tara n'avait pas réagi. Certains se seraient mis à hurler, crier, pleurer...mais Tara n'avait rien fait de tout ça. Pour la première fois de sa vie, elle avait envie de faire confiance à la médecine. Malgré tout, au fond d'elle, Tara était complément terrifiée à l'idée de ne jamais retrouver la vue. Effondrée par l'absence de Mohammed elle se demandait si lui aussi était blessé. Anaya et Ahmed...mon dieu !
À travers le bandage qui entourait ses yeux fermés elle sentit des larmes sillonner ses joues. Mais par-dessus cette épaisse noirceur, un miracle était né. Tara était enceinte. En fait, c'était cette nouvelle qui l'aidait à tenir le choc. Un soupir tremblant s'échappa de ses lèvres douloureusement égratignées par les éclats de verre. Elle toucha le pansement avec la naissance de ses doigts complètement apeurée à l'idée de le retiré et de ne rien y voir. Un sentiment de panique l'empêcha de respirer. Une horrible douleur lui vrillait la tête, elle pouvait encore sentir l'odeur du sang et de souffre.
Une sourde culpabilité envahissait son cœur...celle de ne pas avoir attendu Mohammed.
Tout lui paraissait si étrange, comme si elle était de retour dans cette chambre d'hôpital dans laquelle Tara avait pleuré chaque fois qu'elle revoyait ce monstre bâillonnait sa bouche pour l'empêcher de crier.
La peur lui nouait le ventre, néanmoins, elle refusait de céder à cette peur qui l'envahissait. Dans l'obscurité, elle entendit des pas se rapprocher d'elle. Elle avait la certitude que c'était lui. Elle pouvait déjà sentir son souffle sur elle....mais la culpabilité était plus forte. Elle devinait aisément son regard sombre creusé par le remord et elle n'avait pas besoin de ça...non pas aujourd'hui pas maintenant. Elle ne bougea pas, anéantie de voir son rêve se transformer en cauchemar puis déclara dans l'énergie du désespoir ;
- Si tu es venu me dire que tout est de ta faute alors ce n'est pas la peine de rester, parvint-elle à dire la gorge nouée...
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