Chapitre 39
Le trajet dura une bonne quinzaine de minutes avant que des gigantesques grattes ciel ne se dressent devant ses yeux écarquillés. Pendant un bref instant, elle se crut à New-York, une ville qu'elle avait pu voir que dans des magazines et qu'elle rêvait secrètement de visiter. Mohammed gara la voiture dans une ruelle en contrebas et quitta le véhicule légèrement tendu. La jeune femme semblait absorbée par le centre ville luxueux de Khazban. Mohammed lui, regrettait déjà de l'avoir emmené ici. Aiguillonné par un sentiment de jalousie, il lui ouvrit la portière à contrecœur et dut serrer les dents pour refouler cet instinct qui lui soufflait de l'embrasser. Bien des hommes seraient prêt à mourir pour cette beauté. Mohammed faisait partie de ces hommes et il avait bien l'intention de la protéger farouchement.
- C'est vraiment magnifique ! S'exclama la jeune femme les yeux étincelants.
- Oui, absolument magnifique, affirma Mohammed d'une voix rauque.
Elle tourna son regard vers lui et rougit instantanément. Il demeurait impassible mais son regard était enfiévré.
- Est-ce que c'est nécessaire ? Demanda-t-elle en désignant la pochette qu'elle tenait dans sa main ; Elle me gêne.
- Ce n'est qu'un accessoire, laisse-la dans la voiture si tu le souhaites.
Tara posa la pochette sur le siège et se redressa si vite qu'elle rencontra son torse puissant. Il en profita pour glisser sa main dans son dos.
- Un baiser mademoiselle Kreighton ? Pour me donner du courage ?
Elle nota dans sa voix une inflexion rauque. Comment résister ? Tara n'essaya même de refuser quand il se pencha doucement pour l'embrasser. Un frisson naquit au creux de ses reins. Son baiser fut pressant et intense. Il la relâcha doucement en émettant un léger grognement pour exprimer sa frustration.
- Allons-y, déclara-t-il en lui offrant son bras.
Trop bouleversée pour répondre Tara se cramponna à son biceps et le suivit à l'intérieur de l'établissement.
L'endroit baignait dans l'opulence. Difficile de savoir si c'était un restaurant ou une salle de réception. Et alors qu'elle observait les lieux d'un œil attentif, elle ne vit pas les regards qui peu à peu se braquaient sur eux.
- Que suis-je cessé faire ? S'enquit-elle alors qu'il l'entraînait parmi la foule qui s'inclinait à leur passage.
- Rien, laisse-toi guider habibti.
Il marqua une pause dans laquelle se regard devint glacial.
- Je regrette de t'avoir emmenée ici, avoua-t-il tout bas.
Tara reçut cet aveu comme un coup de poignard en plein cœur. Il s'en aperçut et reprit à la hâte.
- Il m'est difficile de te partager, murmura-t-il avec une sincérité qui la troubla ; Si je m'écoutais, je te ramènerai au château tout de suite.
- Tu...tu es jaloux ? Bafouilla-t-elle en soutenant son regard glacial.
- Quel homme ne le serait pas...articula-t-il avec une rage contenue.
Tara s'empourpra violemment alors qu'il l'entraînait plus loin encore.
- Une coupe de champagne ? Proposa-t-il tendu comme un fil d'acier.
- Je préfère garder les idées claires, refusa-t-elle en s'accrochant à son bras musclé.
Nerveusement Mohammed prit une coupe et l'avala d'un trait. Peu accoutumé à boire et surtout au milieu d'un dîner d'affaire, Mohammed se maudit intérieurement et reposa la coupe.
- Tu as raison, gardons les idées claires, dit-il précipitamment en se passant une main nerveuse autour de sa bouche, le regard rivé sur l'assistance.
- Tu me rends nerveuse Mohammad, lui fit-elle remarquer.
Il braqua son regard sur elle et se maudit une seconde fois pour son comportement complètement injuste et absurde. Il n'avait pas le droit de flancher alors qu'il l'avait presque supplié de venir ici. Dieu ! Qu'est-ce qui lui prenait ! Ses pensées devenaient subitement trop ancestrales. Il pensait comme son père et imaginait Tara...
- Votre altesse, le salua le ministre américain en lui tirant une révérence.
- Monsieur Collins, je suis ravi de vous revoir, déclara Mohammed en parvenant difficilement de recouvrer la raison.
- Je vous présente Tara Kreighton.
Point à la ligne, songea-t-il en serrant les dents devant le regard appréciateur de ce dernier. Il voulait coûte que coûte garder secrète sa relation naissante avec la jeune femme.
- C'est un honneur de faire votre connaissance mademoiselle.
La voix chaude de ce vieux pervers dont les conquêtes laissaient à désirer fit monter en lui une rage qui lui noua la gorge.
Avec un effort surhumain, Tara accepta sa poignée de main puis récupéra celle-ci pour la poser sur le bras de l'homme tendu à ses côtés. Son profil altière, son port de tête remarquablement autoritaire, Tara n'avait d'yeux que pour lui. Son cœur battait si fort qu'elle était persuadée qu'il pouvait l'entendre résonner.
Impersonnel et détaché, il répondait au ministre avec une voix méconnaissable. Tara eut peine à le reconnaître. Lentement elle fit descendre sa main le long de son bras et lui prit la main. Ce geste suffit à le détendre. Il lui esquissa un faible sourire qui pourtant signifiait beaucoup pour elle. Il noua ses doigts aux siens et enfin, il reprit une voix plus amène. Quand ils furent seuls, il se tourna vers elle, les mâchoires serrées.
- C'est agaçant n'est-ce pas ?
- Je n'ai pas compris grand chose, avoua-t-elle avec un sourire contrit ; Mais je sais que si tu lui donnes vingt pourcents de tes barils de pétrole tu vas perdre beaucoup sur le bénéfice.
Vivement étonné l'homme fronça des sourcils.
- Développe habibti, ton avis m'intéresse.
Depuis l'enfance, Tara était passionnée par les chiffres. En écoutant la proposition du ministre, Tara avait relevé quelques incohérences.
- Les chiffres qu'il t'a annoncé ne concordent pas avec le pourcentage des bénéfices. D'autant plus qu'il y a le coût du transport et le prix qu'il désire mettre pour l'essence au Etats-Unis sera au-dessus du marché.
Mohammed était tellement en admiration devant son discours qu'il demeura silencieux un long moment.
- Je suis agréablement surpris Tara, je ne savais pas que tu savais toutes ces choses.
- Oh...dit-elle embarrassée : J'aime beaucoup les chiffres.
Il haussa un sourcil.
- Je vais te prendre comme secrétaire alors, décréta l'homme avec une lueur amusée dans les yeux.
Tara n'eut pas le temps de réagir qu'il posa sa bouche sur son front aux yeux de tous. Elle sentit son corps vibrer entièrement.
- Il est temps d'aller se mettre à table, déclara-t-il d'une voix rauque.
Tara se passa la langue sur ses lèvres et pénétra dans l'arène. Une majestueuse table ronde recouverte de gravures orientales était plantée au milieu de la pièce. Une bonne vingtaines de personnes y étaient installées. Un silence respectueux tomba dans la salle à leur entrée. Tous exécutèrent une révérence pour le roi. Ce respect indiscutable la bouleversait. On pouvait déceler dans leurs regards une sorte d'adoration pour leur souverain qui lui serra le cœur. Il lui tira la chaise galamment puis s'installa à côté d'elle. Tous les regards étaient porté sur eux et pourtant Tara essayait de rester un peu effacer. Hélas, l'intérêt que lui portait Mohammed troublait les invités. Sous la table, leurs mains étaient entrelacées, son pouce caressait sa peau comme pour la rassurer. Peu à peu elle se sentit en confiance malgré la présence de ces nombreux hommes d'affaires et politiques.
- Si tu as peur, nous pouvons rentrer, lui dit-il à voix basse.
- Non, je pense pouvoir y arriver, chuchota-t-elle en lui souriant.
Peu convaincu, il l'observa longuement.
- Tu me mets en confiance, j'ai confiance en toi, ajouta-t-elle précipitamment.
Fasciné, Mohammed regarda la jeune femme tourner son regard sur les invités. Quelques mèches s'échappèrent de la broche et tombèrent sur son visage. N'y tenant plus, incapable de rester plus longtemps sans connaître la réponse à la question qu'il mourrait d'envie de lui poser, Mohammed déclara tout bas ;
- Est-ce que tu voudras dormir avec moi ce soir ?
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