Lorsque Tara fut enfin seule dans sa chambre, elle repensa aux paroles réconfortantes de Tina. Elle avait confiance en elle et semblait se réjouir qu'elle soit sur la voie de la guérison. Néanmoins, elle avait raison sur un point. Elle était encore fragile. Parfois quelques bruits suffisaient à la faire sursauter. Alors pourquoi elle n'éprouvait aucune crainte dans les bras de Mohammed. N'importe quelle femme dans sa situation se serait dérobée devant une telle force. Tara elle, se sentait terriblement seule chaque fois qu'il disparaissait. Et dire qu'elle le connaissait que depuis une semaine...Elle avait pourtant l'impression de le connaître depuis des années.

- Le groupe vient de partir, lança cette voix masculine qui arrivait toujours à la faire frémir.

Tara se redressa sur le lit pour le contempler au loin. Il se tenait à l'entrée de sa chambre mains dans les poches, le regard caressant. Elle ne sut quoi lui répondre et serra le coussin contre son ventre.

- Je ne vous ai pas entendu arriver, murmura-t-elle en esquissant un léger sourire.

- Tara, commença-t-il en s'approchant du lit ; Je pense que le vouvoiement n'est plus de mise maintenant que nous nous sommes embrassés tu ne penses pas ?

Rouge de confusion elle le suivit du regard alors qu'il se rapprochait tel un prédateur se fondant sur sa proie. Il s'installa au bord du lit et lui tendit sa main. Hypnotisée par cette paire d'yeux noire, Tara glissa sa main dans la sienne.

- Ta main est froide, constata-t-il d'une voix rauque ; Que se passe-t-il Tara ?

- Rien, mentit-elle en le regardant droit dans les yeux.

Seulement, elle oubliait à qui elle avait affaire. Mohammed avait la capacités de lire en elle comme dans un livre ouvert et c'est d'ailleurs ça qui lui plaisait le plus. Il arrivait à prévenir chacun de ses tremblements.

- Qu'est-ce que t'a dit madame Thomas ?

- Rien de bien important, seulement qu'elle était fière de moi mais que je demeurais encore fragile.

- Elle a raison, dit-il en portant sa main à ses lèvres.

Tara frissonna entièrement au contact de sa barbe et de sa bouche à la fois dure et sensuelle.

- Parfois il m'arrive de me demander quelle genre de jeune femme je serais devenu si je...

Tara ne parvint pas à poursuivre. Cette question la hantait depuis tellement d'années...

- Sans doute la même jeune femme que j'ai sous mes yeux, déduit-il en arborant un sourire qui la fit chavirer.

- Tu es sincère ? Demanda-t-elle d'une voix tremblante ; Les personnes qui m'entourent ont tendance à me complimenter sans cesse pour éviter de me faire de la peine.

L'expression du roi se durcit subitement.

- J'ai connu bien des femmes Tara et je peux t'assurer que beaucoup d'hommes rêveraient d'être à ma place.

Ses yeux devinrent aussi noir qu'un ciel d'orage.

- Je te retourne le compliment, rétorqua-t-elle toujours aussi persuadée que cette récente idylle était impossible.

Tara retira sa main de la sienne et s'allongea sur le lit de façon à dissimuler son visage dans le creux des coussins.

Il l'obligea à se retourner et pressa doucement ses épaules de façon à l'immobiliser.

- De quoi as-tu peur Tara ?

Il voulait qu'elle lui expose ses pensées les plus secrètes et Tara ne se sentait pas prête à lui exposer. Seulement, dans ses yeux, une lueur d'impatience l'a poussée à lui avouer ses craintes.

- On se connaît depuis quelques jours et je ne parviens pas à comprendre pourquoi tu t'intéresses à moi de cette façon, je ne suis pas comme les autres femmes, je ne suis pas Amalia.

- Exactement, affirma-t-il d'une voix dure et ferme ; Tu n'es pas les autres femmes, tu es unique habibti.

Ses mâchoires tressautèrent.

- Je sais que tout ça est nouveau pour toi, murmura-t-il d'une voix plus amène ; Mais rien ne presse, pourquoi ne pas laisser les choses venir d'elles-mêmes ? Proposa-t-il en caressant sa pommette avec son pouce.

Il avait raison, Tara se posait trop de questions.

- Vous...tu as raison, je me torture l'esprit pour rien.

Il se pencha, sans plus attendre et posa sa bouche sur son front. Pour lui, c'était un geste tendre et respectueux. Tara le savoura en fermant brièvement les yeux puis les rouvrit.

- Ce soir, j'ai un dîner d'affaires, je serais vraiment heureux si tu venais avec moi.

Tara cilla. Elle ? Un dîner d'affaires ?

- Une dîner ? Répéta-t-elle en tirant nerveusement sur ses doigts ; Seigneur, je n'ai jamais été à un dîner Mohammed.

L'homme parut déstabilisé devant son aveux. Il claqua un juron entre ses dents le visage très grave puis se radoucit peu à peu.

- Je te guiderais, je serais près de toi...

Cette promesse suffit à la soulager d'un poids. Mohammed tenait chacune de ses promesses.

- Je t'en prie Tara, accepte.

Son regard devint profond et impénétrable. Oh...si seulement elle pouvait lire dans ses pensées aussi facilement qu'il le faisait avec elle.

- Je n'ai pas de robe, proteste Tara en essayant de se lever.

Peine perdue, il la bloqua contre le lit et dégagea une mèche de son visage.

- Ce n'est pas un problèmes habibti.

Comment lui refuser ça alors qu'il se montrait si doux et si prévenant depuis leur rencontre ?

- C'est d'accord j'accepte...je...

- Non, je t'en prie, chuchota-t-il de sa voix rocailleuse ; Ne tremble pas s'il te plaît.

Son expression s'était fissurée d'une douleur intérieur comme s'il refusait de la voir ainsi.

- Si tu n'as pas envie de venir, je ne t'y forcerais pas Tara.

- Je vais venir Mohammed, assura-t-elle en se levant du lit après s'être dégagée de son emprise ; À quelle heure dois-je me tenir prête ?

Tara se posta devant la fenêtre et le sentit s'approcher. Elle fut parcourue de délicieux frissons lorsqu'il posa ses mains sur ses épaules. Être aussi proche d'un homme sans savoir ce qu'il ressentait était comme une douleur lancinante logé dans le codeur. Son estomac se contracta nerveusement.

- Je suis le roi, nous partirons quand tu seras prête à partir, chuchota-t-il contre ses cheveux.

Tara se concentra sur l'horizon.

- Tina m'a dit de noter tous mes efforts dans un carnet, lui confia-t-elle sans quitter des yeux le désert exposé aux premières lueurs d'un nouveau couché de soleil.

- C'est une bonne idée, approuva l'homme en glissant prudemment son bras autour de sa taille.

Mohammed, ivre de désir pressa son bras pour la plaquer contre son torse et de son autre mains noua ses doigts aux siens. Il n'arrivait pas à résister à la tentation de la toucher.

- Est-ce que je fais partie de ta liste d'efforts ? Demanda-t-il d'une voix rieuse afin de la détendre un peu.

- Tu es même au top de la liste ! S'exclama-t-elle en riant doucement.

Mohammed s'abreuva de son rire léger et posa un baiser sur sa tempe. Elle ne se raidit pas et grâce à la vitre il constata qu'elle souriait comme si une partie d'elle ne voulait pas partager ces instants de bonheur.

- Je suis ravi de l'apprendre, lui chuchota-t-il à l'oreille avant de se détacher d'elle pour consulter sa montre.

- Anaya va t'aider à te préparer, la prévint-il en caressant ses cheveux ; Je t'attendrais dans le hall d'entrée.

Une faible lueur de panique traversa ses yeux bleus puis elle acquiesça en tortillant ses mains. Une fois de plus, Mohammed eut peine à la quitter. Un nouveau sentiment lui comprima la poitrine. Il ignorait comment se finirait cette soirée ni comment il parviendrait à la laisser au pas de sa porte de chambre en lui souhaitant bonne nuit. Il mourrait d'envie de l'avoir au creux de ses bras comme la nuit dernière. Sa respiration s'accéléra subitement.

- Je serais prête, lui dit-elle avec ce regard timide qui lui donnait envie de la prendre dans ses bras.

Il dut se battre pour pivoter les talons et quitter sa chambre. Tara posa ses mains sur son ventre et inspira profondément.

Elle avait à fois hâte d'aller à ce dîner et paniquée à l'idée de ne pas être à la hauteur. Mohammed avait su briser la barrière qu'elle avait dressée devant elle pour se protéger. Elle se souvenait encore des rêves inaccessibles qu'elle s'imaginait dans sa chambre clinique. Des rêves qui lui semblaient impossible à réaliser. Et pourtant, sans le savoir, Mohammed Al Zahar venait de redonner de l'espoir à ses rêves...