Chapitre 18



Comme si c'était la chose la plus naturelle du monde, l'homme revint sur ses pas après l'avoir abandonnée quelques minutes et chargea une scelle sur son étalon. Tara n'avait pas le souvenir d'avoir accepté cette balade...enfin si. Elle se souvenait d'avoir bredouillé un petit " Oui " mais à quel prix ?

Était-ce bien raisonnable ?

Trop de questions tournoyaient dans son esprit depuis l'aube.

" Mes intentions sont tout à fait honorable "

Voici ce que lui avait dit cet homme lors du dîner qu'il avait partagé. Jusqu'ici, il gardait ses distances. Il agissait comme un hôte respectable et solennel. Seulement...chaque fois que son regard se posait sur le sien, Tara décelait dans ses yeux noirs de jais, une lueur mystérieuse...

- Le soleil risque de taper dans le désert, lequel voulez-vous ?

Dans le désert ? Loin du château ? Tara était-elle prête à sortir avec un homme qu'elle connaissait à peine ?

Jugulant au mieux sa panique, Tara releva son regard sur son imposante silhouette altière et désigna le vieux tissu d'un beige pâle tirant sur le gris.

Un sourire se dessina sur ses lèvres incroyablement dures. Il s'approcha doucement pour lui tendre.

- Il appartenait à mon arrière grand-mère, dit-il alors qu'elle le posait sur ses cheveux.

Timidement, Tara baissa les yeux à plusieurs reprises.

Sa gorge se noua lorsqu'il entoura un foulard autour de son visage. On ne distinguait plus que ses yeux noirs.

- Pourquoi ? Demanda-t-elle d'une voix tremblante.

Maintenant il avait tout d'un guerrier.

- Je n'ai pas encore fais d'annonce officielle, je ne veux pas prendre le risque que l'on me reconnaisse tout de suite.

Sa voix étouffée dans ce chèche noir n'enlevait rien au son rocailleux qu'elle dégageait. Ses yeux étaient perçant comme la nuit noire. La gravité de son regard la fit reculer.

- N'ayez pas peur Tara.

À ses mots qui se voulaient rassurants, il monta sur son immense étalon et se pencha vers elle pour lui tendre ses bras musclés. Tara avait le choix. Elle pouvait s'en aller ou accepter.

Le cœur tambourinant contre ses tempes elle s'approcha pour mieux reculer lorsqu'il posa la naissance de ses doigts sur ses épaules.

- Je veux simplement vous aider à monter.

Tara hocha timidement de la tête.

- Tournez-vous s'il vous plaît.

Elle se retourna et n'eut pas le temps de pousser un cri qu'il la souleva. De là, tous s'enchaînèrent. Elle passa sa jambe à l'autre extrémité du cheval noir et se laissa choir sur la scelle. Il était derrière elle, ses mains passèrent devant pour se saisir des rênes. Affolée par la hauteur, Tara se pencha en avant et agrippa la crinière de l'animal.

- C'est haut ! S'écria-t-elle complètement paniquée.

- Vous n'avez rien à craindre, déclara l'homme en abandonnant les rênes pour glisser prudemment ses mains sur ses poignets ; Redressez-vous, je vous tiens.

Tara se redressa en hoquetant et rentra en contact avec son torse. Elle pouvait sentir cette chaleur diffuse s'emparer d'elle. Tina Thomas voulait qu'elle aille au devant de ses peurs....eh bien elle était servie...

Tara n'avait jamais été aussi proche d'un homme autre que son frère.

- Vous êtes prête ? Demanda-t-il à travers son chèche.

- Je crois que...oui.

Mohammed reprit les rênes et quitta les écuries. Elle hoqueta, il pouvait la sentir se raidir contre lui. Malgré son chèche, Mohammed pouvait sentit les effluves de son parfum chatouiller ses narines. Le tissu gris posé sur ses cheveux servait de filtre à la lumière du soleil, les rendant ainsi encore plus beau qu'ils ne l'étaient déjà.

L'objectif était simple.

Il voulait la faire sortir de l'enceinte du château. Avec finesse et galanterie, Mohammed avait obtenu un petit " oui " qui sonnait pour lui comme une victoire. Depuis n'avait-il pas foulé ainsi le désert ?

Cela faisait si longtemps qu'il ferma les yeux un instant, dans lequel une myriade de pensées inopportunes lui insuffla un désir tel qu'il dut les chasser d'un mouvement de tête.

- Comment trouvez-vous la balade mademoiselle Kreighton ?

- El...Elle est merveilleuse.

Souvent, la tête de la jeune femme se tournait vers la gauche puis la droite comme si elle guettait le danger sans savoir qu'il était juste ici...derrière elle.

Incapable de résister à la tentation de l'effleurer, il prit ses mains délicatement pour qu'elle les entoure autour des rênes. Il voulait lui apprendre, la mettre en contact de choses nouvelles. Dieu...il perdait sans doute la tête ! À l'heure actuelle, il aurait dû exiger une réunion avec les conservateurs du pays. Il aurait dû lancer un communiqué qui aurait sans doute fait le tour de la terre....pour que son ex-femme qui avait eu droit à la même balade sache qu'il était en vie. Il se souvint douloureusement de cette journée où il l'avait emmenée dans son désert, à cheval, désireux de lui montrer où il avait grandi. Que chaque grain de sable faisait partie de sa vie. Hélas, ce jour-là, ce furent des plaintes qu'il avait entendu. Des longues et éreintantes plaintes qui l'avait obligé à faire demi-tour.

- Comment faites-vous pour vous repérer ? Vous êtes sûr que nous ne sommes pas perdus ?

La voix douce de la jeune italienne l'arracha de sa lourde torpeur.

- Je connais chaque centimètre de ce désert miss Kreighton.

- Vraiment ? Demanda-t-elle d'une voix à peine un peu plus haute qu'un doux murmure qui lui fit l'effet d'une caresse.

- Mon père m'y a emmené tant de fois lorsque j'étais enfant que je sais où je me situe d'un simple regard.

Mohammed tira doucement sur les rênes pour que Jaba se stoppe. La jeune femme regarda de gauche à droite.

- Il n'y a rien pourtant, pas même un arbre.

Mohammed ne put s'empêcher de rire et reprit sa route sur la hauteur de la dune pour laisser apparaître une tente au loin. Il place Jaba de travers afin de pouvoir apercevoir la réaction de la jeune italienne.

Sa bouche forma un 《 O 》 ses yeux bleus étincelaient de curiosité. Ses cheveux virevoltaient autour de son visage. Elle tenait d'une main ferme les pans du tissu datant d'une centaine d'année contre sa poitrine pour que celui-ci ne s'envole pas.

- Où sommes-nous ? Demanda-t-elle en tournant son regard vers lui.

Bien évidemment, cette lueur étincelante se transforma en un reflet de panique.

- C'est une tente qui a été installée il y a bien des années par mon père, expliqua-t-il en regardant celle-ci ; Je la laisse à disposition pour une tribu de bédouins qui parfois y campent avant de reprendre la route.

La jeune femme pointa du doigt l'horizon.

- Et ça ?

- Une oasis, voulez-vous la voir de plus près ?

Tara se redressa en frôlant le torse du roi. Bien-sûr qu'elle avait envie. Elle avait l'impression d'être une petite fille devant une nouvelle attraction.

- Oui s'il vous plaît, murmura-t-elle poliment en détachant ses mains des rênes.

Depuis le début de traversée Tara n'avait de cesse de porter ses regards sur les mains bronzées de cet homme. Elles étaient si...

- L'oasis s'étend sur un bon kilomètre, nous avons beaucoup de chance de l'avoir à mi-chemin de la ville, cela permet aux tourismes de faire une pause pour se rafraîchir.

Décontenancée par ses propres rêveries, Tara releva la tête vers l'oasis et la tente.

- Les bédouins sont-ils...

- Ici ? Non, sinon vous les auriez vu depuis longtemps.

Mohammed réprima cette sensation intense qui lui comprimait les muscles et arrêta Jaba devant la tente. Il sauta à terre et tendit ses mains vers elle. Hésitante, elle se mordit la lèvre, cheveux dans le vent.

- Vous me promettez qu'il n'y a pas d'hommes autre que vous ici ?

Pour preuve, Mohammed la laissa sur le cheval pour soulever les teintures de la tente qui lui apparut vide.

- Je tiens toujours mes promesses, déclara-t-il en lui offrant ses mains pour la deuxième.

Alors elle les prit, lèvres pincées, le regard fuyant, les joues cramoisies et se laissa glisser contre lui, comme l'aveu d'une preuve évidente qu'elle lui faisait confiance.

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