Chapitre 42

« Les regrets nous tuaient à petit feu et nous empêchaient d'avancer. »

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Mon être entier semblait être entré en ébullition. Brûlante, la fureur enflammait mes veines. Tenace, elle se heurtait à mon cœur pour le malmener, pour le pervertir de manière cruelle. Oh, face à Hadrien, je me fichais bien d'avoir des pensées aussi sinistres. Pure ? Je ne voulais pas l'être, pas face à quelqu'un capable de tuer sa propre sœur de sang-froid. Pourquoi l'être, si ce n'était pour nous rendre à l'état d'une proie face à des êtres démunis d'émotions ?

Cette tension qui nous enveloppait, qui me couvrait, elle alourdissait mes membres, les éreintait de ses griffes joueuses jusqu'à influencer ma propre aura qui se voyait obscurcie, quitte à dévorer la lumière de mon âme qui brillait constamment dans ma poitrine.

C'était fou comme les Wrashars me mettaient dans une colère noire et ressortaient ce qu'il y avait de pire en moi.

Si j'étais une colombe cherchant à incarner la douceur, face à eux, je voulais devenir une vipère corrompue, prête à mordre jusqu'au sang leur cœur pour y propager mon venin, et ce même s'il était déjà entaché par leur propre noirceur.

— Où est Eden ? aboya Tyler qui me sortit de mes pensées.

Son éclat de voix me permit de m'extirper des bras réconfortants et hypocrites qui cherchaient à me bercer de leurs douces paroles pour mieux me plonger dans ma colère. Bientôt, j'entendis ma propre respiration, sifflante et lourde, se mêlant à la brise du vent emportant avec elle de la neige.

Hadrien émit un rire qui rampa le long de mon épiderme avant que ses yeux de jade ne brûlent. Un rire tordit son visage qui cachait le monstre qui se terrait dans son âme.

— Eden... Eden... répéta-t-il joyeusement. Ah, oui, lui ! Le blondinet, n'est-ce pas ?

Tyler serra les poings alors que je toisais le Wrashar en luttant contre la noirceur devenue à la fois familière et inconnue frappant les parois de mon cœur, cherchant à annihiler mes principes.

— Il n'est plus là, poursuivit Hadrien en opinant.

Tyler, sous le choc, se figea un instant alors que j'observais les traits d'Hadrien. S'il se montrait confiant, le filet de sueur au niveau de sa tempe, ainsi que le léger mouvement de ses doigts, prouvaient qu'il n'en menait pas large.

Il était terrifié.

— Quand je dis qu'il n'est plus là, ça signifie qu'il n'est plus sur Terre. Il est entre de bonnes mains, affirma Hadrien.

Et, rapidement, il brandit son épée pour laisser le tranchant étinceler sous les rayons chaleureux du soleil. Je levai ma paume en l'air sans le quitter des yeux, la mine insondable. Mon arme se matérialisa. Rageuse, je l'empoignai en m'approchant d'Hadrien, sous le regard courroucé de Tyler. 

— Tout doux, Elora, siffla le Wrashar. Nous ne sommes pas pressés.

— Tu crois ? Alors vas-y, dis-nous ce que tu as à dire, lui intimai-je avant d'afficher une moue amusée. Profère-nous ces fameuses menaces typiques, promis, on ne t'interrompra pas, on passera ensuite aux choses sérieuses.

Il était évident qu'Hadrien n'était qu'un pion utilisé par ses supérieurs, un intermédiaire. Qui étaient au-dessus, d'ailleurs ? Axel ? Plausible, il m'avait confirmé être plus puissant que Zachary et James. Menait-il les ficelles ? Seul ?

Qu'importait, comme moi, Hadrien n'était qu'un pion, et les pions finissaient bien souvent sacrifier. Je me ferais un plaisir de me dévouer pour l'emmener jusqu'à l'autel pour y déverser son sang.

Hadrien ne répondit pas. Il contracta la mâchoire et, avant qu'il ne réagisse, mon poing percuta son nez dans un craquement sinistre. Il émit un long gémissement et plaqua ses mains contre son visage dans l'espoir d'arrêter le flot du sang qui retombait à ses pieds.

Tyler en profita pour matérialiser deux épées qu'il saisit fermement avant de les croiser dans un tintement. Un sourire torve retroussa ses lèvres, et son regard brilla.

— Eh bien, Hadrien, puisque tu es là, et que tu sembles vouloir discuter, explique-nous pourquoi vous avez emmené Eden et Âlma dans le Fœrî, lui envoya mon ami en avançant vers lui d'un pas félin.

Le Wrashar nous fusilla des yeux et montra ses dents, le nez ensanglanté, un éclat sordide étincelant dans ses pupilles. Même s'il semblait prêt à fuir, il ne le fit pas. Il garda même le silence. Les jambes tremblantes, il nous défiait sans courber l'échine, et ce même s'il avait le visage en sang. Pour ça, je le trouvais plutôt courageux.

Ou stupide.

— Tu devrais nous répondre, je t'assure, insista Tyler en serrant les dents. C'est pour ton bien.

— Pour mon bien ? rit-il en retirant ses doigts de son nez cassé.

Impatiente, je l'assaillis à nouveau, le poing levé, mais il para mon assaut en s'abaissant et, en se relevant, il chercha à me heurter la mâchoire, mais je bondis en arrière sans me démunir de mon air mauvais. Soutenant mon regard glacial, il feula, comme un animal blessé, et, avec rapidité, je fondis dans sa direction pour que mon épée fende l'air afin de se diriger vers sa poitrine, mais il le bloqua avec son arme, les yeux écarquillés et les lèvres blêmes.

— Oui, pour ton bien, affirmai-je. Si tu y mets un peu du tien, tu souffriras moins.

— Vous n'avez rien d'angéliques, vous deux, cracha-t-il avant qu'il ne me dévisage. Et surtout toi, Elora !

Il chercha à repousser mon arme sans que je ne cède, luttant pour l'éloigner de mon corps. Face à son visage prenant une teinte écarlate sous la force qu'il mettait et à la sueur dégoulinant de son front, un profond dégoût souleva mon estomac. Tyler profita de son moment d'inattention pour envoyer son pied dans ses côtes, ce qui eut pour effet de le faire lâcher prise. Bien vite, je lui coupai le souffle en frappant son estomac avec mon genou. Le choc le fit tituber avant qu'il ne tombe en arrière, la neige amortissant sa chute.

Les traits déformés par la colère, je me penchai vers lui pour plonger mes yeux dans les siens, ignorant l'odeur âcre du sang qui émanait de lui.

— Je ne me répéterai pas, Hadrien, pourquoi avez-vous emmené Eden et Âlma ?

Il me dévisagea avec répulsion. Ses pupilles semblaient me hurler toute la haine qu'il ressentait à mon égard, miroir de mes ressentis.

Lorsqu'il cracha à mes pieds en me toisant, j'affichai une moue répugnée, et je frappai son visage de mon talon, la vue troublée par l'impatience. Il gémit en s'écrasant contre la neige, sans jamais relâcher son arme et, lorsqu'il esquissa un rictus glaçant, je manquai de vaciller, troublée par son aplomb.

— T'inquiéterais-tu pour ton amant ? demanda-t-il d'une voix sourde.

Tyler me lança un regard horrifié suite aux propos du Wrashar. Mon cœur sembla chuter quand ma bouche s'assécha. Comment ? Comment l'avait-il su ? L'incompréhension se mêla à la colère qui me dévorait, mais aussi au choc, à la peur. La peur du jugement de mon ami qui se tenait près de moi, figé. La peur d'être châtiée, frappée par la foudre, par la colère des cieux.

Comme si je venais de commettre à nouveau cette faute.

Hadrien se redressa pour s'élancer vers moi et, sonnée par sa réplique, je ne réagis pas de suite quand il envoya un coup-de-poing à mon ami qui fut projeté contre le tronc d'un arbre. Le choc lui coupa la respiration alors que ses yeux se révulsaient de surprise, de douleur. Le Wrashar abattit ensuite le tranchant de sa main contre la tempe de mon ami, l'impact, rapide et direct, fit sombrer l'Ange dans l'inconscience, tombant sur le côté, dans la neige.

Notre adversaire se tourna vers moi, la mine sombre. Face à son regard flamboyant, je manquai de reculer, mais je repris vite contenante, toujours déstabilisée par le fait qu'il soit au courant de mon aventure avec Eden. Pire encore, qu'il l'ait dit devant Tyler.

Je posai mon attention sur mon ami inconscient, étourdie par les pulsations frénétiques de mon cœur. Je fis un pas sans vraiment me contrôler, prête à défier Hadrien, à l'éloigner de l'Ange.

— Zachary m'a raconté que tu n'étais pas aussi pure que tu en avais l'air, Elora, poursuivit-il sans se démunir de son sourire froid.

Son aveu me troubla la vision sans que je ne m'arrête. Mais comment Zachary l'avait-il su ? Eden avait-il pu lui en parler lorsqu'ils étaient encore amis ? Impossible... Il se serait condamné lui-même... Personne n'était au courant, personne. Ce secret n'était qu'entre lui et moi, un secret qui semblait ne plus en être un...

Je ne réagis pas assez vite. Une vive douleur lancina mon estomac, ce qui m'arracha un haut-le-cœur, et mon corps glissa pathétiquement sur l'épaisse couverture blanche qu'était la neige, alors que le goût âcre du sang remontait dans ma gorge.

Malgré mes muscles endoloris, je me relevai en dévisageant Hadrien qui se tenait plus loin, souriant avec arrogance, une lueur démente dans le regard. Face à son visage si confiant, je me fis la promesse que je lui arracherais son air suffisant. Il ne resterait plus rien de lui. Rien.

— J'espère que tu as apprécié, au moins ? m'interrogea-t-il. Le plaisir de la chair... La luxure. N'as-tu pas honte d'avoir goûté à ce pêché, Ange ?

Hargneuse, je fonçai vers lui, tête baissée, et le percutai violemment. Il grogna de douleur en enfonçant ses talons dans la neige pour ne pas vaciller, et il empoigna mes cheveux, qu'il tira brusquement, ce qui m'arracha un long gémissement. Furieux, il secoua sa prise en sifflant. Mes membres se raidirent, enserrés par la colère qui me dévorait de plus en plus, un souffle furieux s'échappant de mes lèvres entrouvertes.

— Est-ce que tu regrettes ? Hein ? Est-ce que tu regrettes tes actes ?

Si je regrettais ? Je n'aurais jamais dû faire cela et, pourtant, j'avais aimé. Les regrets nous tuaient à petit feu et nous empêchaient d'avancer. Hors de question que je n'avance plus. Alors non, je ne regrettais pas.

J'aperçus l'épée d'Hadrien s'abaisser vers moi, mes cheveux toujours maintenus par ses doigts tremblants. Le sifflement menaçant de l'arme s'éleva et, avant qu'il ne m'assène le coup fatal, je me penchai sur le côté en laissant la lame trancher ma crinière. La douleur sur mon cuir chevelu disparut alors que je me relevai pour empoigner sa gorge, les yeux plongés dans les siens. Contrôlée par la colère, je le soulevai avec force, savourant la lueur de peur luisante dans son regard, mes doigts s'enfonçant dans sa peau sans pitié.

— Tu... Tu ne mérites pas ton statut d'Ange ! s'étrangla-t-il, les yeux arrondis par la terreur. Regarde-toi !

— Peut-être, oui, renchéris-je. Mais bon, toi, est-ce que tu penses mériter de vivre ? Non ? Faut croire qu'on a tous les deux un droit dont on n'est pas dignes.  

Ses doigts relâchèrent son épée et, d'un geste vif, il empoigna le pendentif de mon collier. Je me figeai de stupeur alors qu'il retrouvait son fichu sourire. Les tempes frappées par mon sang bouillonnant, je m'attardai sur sa main entravant mon bijou, et j'enfonçai davantage mes doigts dans son cou craquelant sous la puissance que je mettais.

— Je n'hésiterai pas à te l'arracher, me dit-il. Tu y tiens plus qu'à tes cheveux, non ?

Ses iris se voilèrent un peu quand je pressai encore mes doigts contre sa gorge tant le souffle lui manquait. Pourtant, il tira mon collier. Pas assez pour l'arracher, mais la menace était explicite. Alors, lentement, je relâchai ma prise pour que ses pieds se reposent sur la neige. Il ne relâcha pas mon pendentif, au contraire, il le tira à nouveau en affichant un sourire vainqueur.

J'aperçus Tyler secouer la tête, toujours affalé dans la neige, et il battit des cils en remarquant Hadrien empoigner mon pendentif. Je l'ignorai et fronçai les sourcils en observant mon adversaire.

— Et toi, Hadrien, tiens-tu à cette jolie main qui semble vouloir me menacer ? l'interrogeai-je.

Lorsque son visage blêmit en entendant ma voix glaciale, bien que contrôlée, un air menaçant peignit mes traits. Je contemplai la peur obscurcissant ses yeux, et j'ajoutai :

— Oh, vu ton regard, j'en conclus que oui. Ça ne m'étonne pas, vu le branleur que tu es.

Alors je serrai le manche de mon arme entre mes doigts et, dans un sifflement, je tranchai le poignet du garçon. Les dents de mon épée rencontrèrent d'abord la chair, les articulations, pour finalement atteindre les tendons. Le sang chaud se projeta sur mon visage, puis un hurlement effroyable s'éleva. La main retomba dans la neige et ternit le sol blanc d'un liquide vermeil.

Hadrien recula sans cesser de hurler tandis que je lançais un coup d'œil vide au membre qui gisait dans la neige. La chair sanguinolente laissait entrevoir les tendons coupés à vif, ainsi qu'un morceau d'os.

L'odeur de l'hémoglobine effleurait mes narines et me donnait la nausée, mais ça m'importait peu. Mon corps ne réclamait qu'une chose : tuer. J'avais été entraînée pour faire face aux Démons. Et Hadrien ne valait pas mieux qu'eux. Il méritait de mourir.

Jamais je n'avais ressenti une telle ardeur. Un tel désir. J'avais l'impression d'être une autre personne. D'être un amas de vices. L'ombre de ma pureté avait pris le dessus, dévorant ma personnalité sans aucune peine. J'en voulais plus. Plus. Je voulais voir l'éclat de vie s'éteindre dans ses yeux. Que son cœur s'arrête. Je voulais faire justice, venger sa sœur, et probablement d'autres personnes.

J'avais été entraînée pour faire face aux Démons, et Hadrien ne valait pas mieux qu'eux. Il méritait de mourir.

Qu'il ait été Humain ou non...

Il hurla encore à s'en perforer les poumons tout en gesticulant, poussant des gargouillis sinistres, ses yeux rivés sur le moignon en sang. Son teint, déjà cadavérique, devint encore plus livide quitte à ressortir la couleur terne de ses prunelles. Un éclat déchiré y brillait.

Et, soudain, il retomba à genoux en hoquetant, et j'aperçus un trou béant perforer sa poitrine, à seulement quelques millimètres de son cœur, derrière lui se dressait Tyler, son épée ensanglantée entre ses doigts.
Du sang maculait sa mâchoire. Il l'essuya d'un revers de main, les sourcils froncés et les traits sombres.

— Toi et moi, on va avoir une discussion, Elora, grogna le rouquin en soufflant sur une mèche rebelle de ses cheveux. Mais avant tout, occupons-nous de cet enfoiré !

Les hurlements d'Hadrien cessèrent enfin. Je passai ma main dans ma crinière avant de me décomposer en constatant qu'ils étaient bien plus courts.
Beaucoup trop, d'ailleurs. Ma gorge se noua quand je remarquai la touffe de cheveux plus loin, emportée par une bourrasque.

Mes cheveux...

Je reportai mon attention sur le Wrashar qui haletait, le cœur battant à tout rompre, balayant d'un clignement de paupières mes remords. L'ancienne Elora était morte, et ce depuis un moment, désormais. Je ne voulais plus être l'Ange faible prête à dire amer à tout. Pas quand les autres en profitaient. Je ne voulais plus fuir ma propre noirceur en prétendant que la pureté était la solution. C'était faux.

D'un signe de la main, je priai à Tyler de nous laisser, le sang consumant mes veines.

— Je m'occupe de lui. Attends-moi, s'il te plaît.

Il entrouvrit la bouche, puis il écarquilla les yeux en remarquant la longueur de mes cheveux. Quand ses lèvres frémirent, je lui lançai un regard meurtrier qu'il le contraignit à se taire. Les mains en l'air, il s'empressa de reculer, et il s'éloigna d'un pas. Mes yeux heurtèrent ceux d'Hadrien, et je me penchai vers lui en affichant un rictus.

— Tu savais que ce collier comptait pour moi, est-ce dû à ton don analytique légendaire, ou quelqu'un t'en a soufflé mot ? lui demandai-je avec ironie.

Il ne répondit pas de suite. Les joues humides et le visage crasseux, recouvert de sang, il me dévisagea avant de se tendre quand je frôlai sa gorge du bout de mon épée avec douceur et lenteur.

— On m'a seulement dit que c'était ton frère qui te l'avait offert, murmura-t-il entre deux souffles.

Et il avait raison. C'était Caïn, qui me l'avait offert. Jamais je ne l'avais retiré de mon cou, depuis. Si le pendentif était simple, il signifiait beaucoup pour moi. Impossible de vivre sans. Plus encore depuis que mon frère était mort.

— Mais encore ?

L'ancien Mortel secoua la tête avant de s'attarder sur son moignon. Des larmes s'écoulèrent le long de ses joues tremblantes. Je l'observai en silence, la mine se voulant insondable. Il semblait si vulnérable, à cet instant.

Si Humain.

Pas de pitié. Pas encore.

Je me pinçai les lèvres avant de baisser un instant le nez vers mon pendentif. La pierre, habituellement transparente, brillait d'un éclat gris, comme si un ciel orageux y résidait. Cette couleur... Elle représentait tant la fureur qui grondait en moi. Avec méfiante, je levai les yeux pour constater que le ciel était dévoilé. Cette vision me détendit.

Le temps ne changeait pas selon mes humeurs. Pas ici. La force invisible protégeait cette montagne indomptable de tout changement, et cela me rassurait bien plus que je ne voulais l'admettre.

Je lançai un regard à Hadrien, qu'il me rendit, toujours blême de peur.

— Que t'est-il arrivé ? Qu'est-ce qui t'a rendu ainsi ? tentai-je.

Peut-être pourrait-il m'apporter des réponses quant à son espèce ? Néanmoins, devant ses lèvres fermement pincées et à son visage résigné, je compris que c'était peine perdue. Il préférait garder le silence, quitte à mourir.

— Je vois..., chuchotai-je.

— Je ne m'en souviens plus ! mentit-il. Je ne sais rien à ce sujet ! Crois-moi !

— Alors tu ne m'es d'aucune utilité. Cela n'a rien de personnel, crois-moi. Mais je ne peux pas laisser vivre une créature comme toi qui arrive à tuer sa propre sœur sans même ciller.

Un feulement roula dans sa gorge et il montra à nouveau les dents, comme une pauvre bête. Un rire mauvais m'échappa tandis que je me redressais de tout mon long, la rage au ventre, comme protégée d'une barrière empêchant mes émotions de se heurter aux siennes.

Ce n'est plus un Humain, me répétai-je.

— Sans même regretter..., achevai-je.

Il s'agita avant que ses yeux ne s'humidifient. La panique émanant de lui menaça de me faire vaciller, alors qu'il me suppliait de son regard affolé.

Mais il en était un..., murmura mon cœur, toujours aussi pur.

— Sans même regretter, achevai-je.

Affolé, il chercha à se relever, mais mon épée sous sa gorge l'en dissuada. Ses lèvres tremblèrent davantage avant qu'il n'enchaîne :

— Par pitié, épargne-moi ! Tu es un Ange ! Un être pur !

La poitrine remontant avec hâte, il me supplia encore des yeux. Je secouai la tête en effleurant sa joue humide du bout de mon épée, et j'affichai un sourire froid, insensible quant à son triste état. Lorsque l'on mettait notre cœur en sourdine, il était plus facile d'agir. Sourde à ses appels, je me sentais forte. Invulnérable.

Au diable mon angélisme. Pas face à de telles créatures. Mon cœur pouvait bien pleurer, je n'en avais que faire. Que justice soit faite.

— Tu m'as demandé si je regrettais mes actes, lui dis-je doucement.

Je brandis mon arme en l'air en soutenant son regard, les tempes meurtries. Le tranchant de mon épée resplendit sous la lueur du soleil, ce qui fit plisser les yeux d'Hadrien qui protégea son visage de son bras ensanglanté. Devant son air démuni, je sentis mon cœur hurler encore, bien vite tue par la fureur prenant pas dans mon corps entier, comme si elle cherchait à m'emmener dans sa noirceur abyssale.

— Eh bien, sache que ça, je ne le regretterai pas, poursuivis-je.

Et avant qu'il ne puisse ajouter quelque chose, mon épée fendit l'air dans un sifflement sinistre, bientôt suivi par un gargouillis. La tête du Wrashar roula à mes pieds et ses pupilles vides croisèrent les miennes. Sa bouche entrouverte n'émettait aucun son et lui donnait un air horrifié tandis que du sang s'écoulait à flots.

Je me reculai en observant son corps démuni de tête, qui retomba lourdement sur le côté, laissant du sang ternir le blanc si pur de la neige. Mon cœur, gonflé douloureusement, s'endiabla alors que j'inspirais profondément, le regard vide, perdue dans la contemplation du liquide sinistre qui souillait la blancheur du sol.

J'avais tué un ancien Humain. Pour la première fois de ma vie, j'avais retiré la vie d'un être que je m'étais promis de protéger. Est-ce que cela faisait de moi un monstre ? Comme lui ?

Inutile d'y penser. L'heure n'était pas aux regrets. J'avais toute la vie pour ça.

Tyler me rejoignit avec hâte et effleura mon épaule, la mine rongée par l'inquiétude. Je lui fis un tendre sourire et, sans un regard en arrière, je m'approchai du tourbillon lumineux.

— Elora...

— Allons-y, l'interrompis-je.

Son regard méfiant me passa en revue avant qu'il ne hoche la tête, et ses lèvres efforcèrent un sourire. D'un pas, il s'approcha de la frontière surnaturelle, ses cheveux virevoltants sous les caresses du vent, le visage maculé de sang, la mine pourtant réjouie. Il avait hâte de retourner chez nous.

Face à son hésitation, je roulai des yeux et le poussai. Il poussa un hoquet de surprise et, avant qu'il ne puisse m'injurier, son corps fut absorbé par le tourbillon. Bientôt, le silence reprit ses droits.

Postée devant cette frontière, je m'emplis encore les poumons en levant le pied, prête à le suivre, et je me figeai. Je me tournai pour contempler la vue qu'offrait l'Aôtu, imprimant dans ma mémoire la vision de cette Terre qui m'avait accueilli.

Un sourire peignit mon visage avant qu'une douce chaleur ne se diffuse dans mes veines, sans qu'elle ne parvienne à réchauffer mon être glacial, meurtri par mes actes et mes pensées. Je levai ensuite le nez vers le ciel bleu en profitant de la chaleur du soleil sur ma peau. Ce monde était magnifique. C'était pour ça, que je me battrais. Pour le préserver.

Je protégerais la Terre, mais aussi le Fœrî.

Et après cela, je reviendrai sur Terre, comme je l'ai promis à Laurie, me dis-je.

Le vent souffla une dernière fois tandis que je me détournai de ce spectacle pour m'approcher enfin du tourbillon qui m'attendait, animée par le désir de changer les choses. Par la volonté de préserver l'avenir, quitte à me perdre dans le présent.

Il était hors de question que je laisse les ténèbres s'abattre dans nos mondes. Les Démons n'auraient pas raison de nous. Au diable la promesse de l'ombre.

J'étais prête à tout pour vaincre l'adversité et aider les Humains. Le ciel n'était peut-être pas avec moi, mais je restais un Ange. J'éloignerais les ténèbres et illuminerais à nouveau les cœurs assombris, et ce même si le mien ne se voyait plus réchauffer par la pureté. 

Là aussi, c'était une promesse. Ma promesse. La promesse des Anges. Du ciel.

Hey les petits ! ❤

Alors voilà encore un chapitre, et c'est le dernier ! Il reste l'épilogue que je publierai dans la soirée !

Alors alors, qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Enfin Elora met de côté son côté angélique, il était temps ! Brrr j'ai eu mal au cœur juste en écrivant la scène des cheveux. RIP à eux.

Des avis ? Des théories pour la suite ? Que pensez-vous du collier d'Elora ? Que cache-t-il ?

Je sais que vous voulez Eytan, mais il reviendra dans le tome 2, et il sera bien plus présent que dans ce tome ! 😏

Alors je vous dis soir pour clore ce premier tome (ça me déprime) bisous bisous ! ❤

~Chapitre revu~

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