Chapitre 39
« Toute vie a son importance. Pas plus, pas moins. »
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Les yeux clos, assise en tailleur sur le sable du rivage d'un lac, je luttais contre mon propre esprit depuis un moment maintenant, dans l'espoir de faire le vide dans ma tête. Mais c'était peine perdue. L'image de mes amis me tourmentait trop pour cela.
J'avais besoin d'indices. Ne serait-ce qu'un seul...
Frustrée, j'émis un long soupir. Pourquoi mon Fêkir ne se manifestait-il pas lorsque j'en avais besoin ? Il me fallait des réponses. Une vision, au moins...
Je rouvris les paupières, agacée par l'inutilité de mon don. Je ne demandais pas la lune, seulement une petite réponse, une image du futur, ou qu'en savais-je...
Mon attention se posa sur la surface du lac qui me faisait face. La lune, pleine et fière, se dressait dans le ciel et se reflétait sur l'eau pour conférer au spectacle qui se déroulait sous mes yeux un aspect féerique. Les étoiles entouraient l'astre pour lui tenir compagnie, sans jamais être vraiment près d'elle.
Comment pouvais-je m'y prendre pour avoir une vision de ma propre volonté ? En avais-je déjà été capable ?
Mais ta guerre à toi, elle commence à peine.
Tu ne parviendras pas à remporter le combat sans tes alliés. Pour ça, tu dois les trouver.
Les dires d'Eytan n'avaient cessé de me ronger. Ma guerre ? Elle était déjà perdue. Je n'avais aucune arme pour repousser l'adversité. Depuis petite, je luttais en tant qu'Ascendante afin de repousser le mal sans jamais sombrer. Mais à la mort de Caïn, mes espoirs s'étaient effondrés, comme un misérable château de cartes, quand ma foi s'était vue ternie. Mon désir de faire face aux plus impitoyables des adversaires m'avaient quitté en laissant un trou béant dans ma poitrine.
Un vide impossible à combler.
L'absence de mon frère me pesait. J'avais pourtant réussi à faire le deuil, mais une voix ne cessait de me répéter que j'étais fautive. Que j'étais coupable de sa mort...
Et c'était vrai.
Avec le temps, j'avais fini par comprendre que c'était ce qu'avait voulu Caïn. Il s'était sacrifié afin de me sauver. Il m'avait légué ses pouvoirs afin que je m'échappe des griffes de la mort.
Mais en y laissant la vie.
Et pour ça, je ne me lepardonnerais jamais.
Ma vie ne valait pas plus que la sienne.
Mon cœur se gonfla douloureusement alors que ma vue se troublait. Je papillonnai des cils en ravalant mes larmes.
Non.
Non, je n'avais pas réussi à faire le deuil. C'était un mensonge. Et ça me portait préjudice, j'en avais bien conscience. Pouvions-nous avancer quand des chaînes nous liaient, pieds et poings, dans l'espoir de nous faire reculer ?
Pire, quand nous étions l'unique fautive de nos entraves ? Je m'étais enchaînée moi-même à cause du chagrin. La tristesse en mon sein était trop forte, suffisamment pour que j'accepte de commettre de terribles erreurs.
Quitte à pactiser avec le pire un Démon.
Mais lorsque la tristesse était trop forte, qu'elle nous donnait l'impression de nous plonger un peu plus dans les profondeurs glaciales des ténèbres, nous acceptions la moindre source de chaleur, et ce même si, au fond, ça nous faisait davantage sombrer.
Et moi, à travers Eytan, j'avais cru voir une échappatoire. En pactisant avec lui pour permettre à Tyler de subir le même sort que Caïn, j'avais accepté de m'engouffrer un peu plus dans les abîmes en me disant que ça lui serait salutaire.
Mais ça ne l'était pas. Je m'étais faite avoir si bêtement... Cependant, je ne regrettais pas mon choix.
En silence, je posai mon regard sur le lac en ignorant la boule qui obstruait ma gorge. La nuit m'accueillait en son sein, prête à masquer mes pleurs si je cédais, sous le regard chaleureux de la lune qui brillait intensément.
« Elora... »
Ce murmure lointain. Il résonna jusqu'à moi, sans que je n'accepte de l'entendre. Les paupières à nouveau closes, je me fermai, attristée par ma lâcheté. Je ne céderai pas.
« Je t'en prie, arrête de me fuir. »
Non. Je ne fuyais pas. Je savais que c'était mon imagination qui me jouait des tours. Le désespoir. À la mort de mon frère, j'avais eu parfois l'impression de voir son ombre, d'entendre sa voix, de sentir son parfum. Comme s'il était là, près de moi. Au début, j'avais eu l'espoir de croiser son regard, de le voir, mais j'avais fini par comprendre que ce n'était pas réel.
Et ça faisait si mal. À tel point que je n'avais plus jamais ressenti sa présence à mes côtés, comme s'il était mort une seconde fois, empêchant ses souvenirs ou son image de me tourmenter.
Je n'avais pas envie de penser à lui. Pourquoi faire, à partir souffrir davantage et me rappeler qu'il n'était plus là ?
« Elora... S'il te plaît. »
— Ça suffit ! aboyai-je, furieuse d'entendre cette voix. Ça suffit ! Je sais que ce n'est pas réel !
Et je rouvris les yeux pour apercevoir une silhouette se démarquer de la lune pleine qui me faisait face. Mon cœur s'endiabla malgré moi, et je me tendis, prête à me défendre en cas de danger, mais aussi à m'effondrer, écrasée par le poids si lourd de l'espoir qui me gagnait.
Oh cette voix...
Familière. Chaleureuse. Elle n'avait rien de menaçante. Rien. Je la connaissais bien. Elle m'avait tant bercée, autrefois. Une larme perla le long de ma joue en remarquant deux ailes se déployer dans le dos de cette silhouette qui s'approchait, comme si elle marchait sur l'eau. Comme si elle ne faisait qu'un avec.
Le choc écrasa mon estomac, quitte à me le retourner sans pitié. Je manquai de trébucher, les yeux écarquillés, et je secouai la tête avec hystérie en comprenant : je recommençais. Je recommençais à espérer, comme lors des premiers mois après sa mort.
Je ne pouvais pas accepter d'être malmenée par mon imagination. C'était faux. Je le savais. Je le savais, bon sang, mais alors pourquoi est-ce que je voulais y croire ?
— Ce n'est pas possible..., murmurai-je. Tu n'es pas réel... Tu es censé être mort !
Enfin, j'aperçus son visage. Ses grands yeux noisette brillant d'un éclat de tendresse, ses cheveux châtains encadrant son visage angélique. Ses lèvres étirées en un sourire si doux, si bienveillant. Sourire, qui, autrefois, repoussaient sans mal toute la douleur qui rongeait mon cœur.
Sourire qui s'était finalement fané à jamais.
— Tu n'es pas réel ! ris-je avec froideur. Je le sais ! C'est impossible ! Pourquoi maintenant ? Pourquoi quand j'en ai le plus besoin ?
Caïn fit un autre pas sans perdre son tendre sourire. La lune brillait dans son dos et ressortait la blancheur éclatante de ses ailes. L'eau resplendissait à ses pieds, illuminant son visage si doux, quand le ciel nocturne le surplombait, vaste et profond.
— On avait arraché tes ailes..., sifflai-je. Ce n'est pas toi... Je le sais.
« Elora. Je ne suis réel que dans ton esprit, dans tes souvenirs, mais pas dans la réalité. »
Je me redressai en serrant les dents. Oh, c'était bien le genre d'Eytan de dire une chose pareille. Il devait encore se jouer de moi... Le maître des illusions frappait encore. Et il était hors de question qu'il me brise le cœur en se servant de ma plus grande faiblesse.
— Qui que tu sois, laisse tomber, grondai-je. Je sais que c'est une illusion. Caïn est mort ! Il est mort ! Comment pourrait-il être là, après toutes ces années ?
Comment ? C'était impossible ! J'avais réussi à voir le Fantôme d'un tas de personnes décédées, mais jamais celui de mon frère. Jamais. J'avais tant souhaité le voir, même si c'était sous la forme d'un esprit, et pourtant... Jamais il ne s'était manifesté. J'avais prié à de nombreuses reprises pour qu'il me fasse face, le temps d'un instant, sans qu'il n'apparaisse.
Peut-être parce que tu fermais les yeux lorsque tu en avais l'occasion ? Parce que tu fuyais tout ce qu'il te renvoyait à lui ? me murmura mon cœur.
Je blêmis en me rendant compte de l'évidence : oui, j'avais fui tout ce qui me ramenait à Caïn. J'avais fui ses souvenirs, empêché mes proches de prononcer son nom. Comme si cela me permettrait de moins souffrir de sa mort.
Mais à quel prix ?
Caïn secoua la tête et amorça un autre pas. Bientôt, il se retrouva face à moi pour me détailler avec attention. Tremblante, je me figeai en le toisant avec méfiance, une boule de chagrin se formant dans ma poitrine, prête à imploser en envoyant autour d'elle des lames tranchantes prête à m'arracher des larmes.
« Tu ne comprends pas, petite sœur. Je suis bien là, mais nous sommes dans tes songes. »
Et comment pouvais-je le croire ? Je ne me souvenais pas m'être assoupie... J'étais bien là, face à au lac, en cherchant à obtenir des réponses... S'il disait vrai et que je rêvais, qu'est-ce qui me prouvait que ce n'était pas encore mon Fêkir qui me faisait défaut ?
« Je sais que c'est difficile à croire, je sais également que tu es perdue, mais je peux prouver que je suis bien ton frère. Je ne suis pas une illusion. »
— Et comment ? demandai-je.
Il esquissa un sourire qui me frappa en plein cœur avant d'empoigner ma main. Son contact était chaud. Paisible. Rassurant. Pourtant, il ne me permit pas de me détendre. Impossible pour moi de lui faire confiance. Comment le pourrais-je ? Jamais, depuis sa mort, je n'avais fait un songe comme tel. Jamais.
Pourquoi maintenant, pile lorsque je ressentais son manque ?
C'était une étrange coïncidence.
Une lumière aveuglante me contraignit à fermer les paupières, puis, lorsque je les rouvris, mon cœur se figea. Je détaillai les alentours avec appréhension avant de hoqueter de stupeur.
Je me faisais face, mais en beaucoup plus jeune. Je souriais en observant Caïn. Il faisait face à un petit lac, là où de nombreuses petites lumières virevoltaient au-dessus de l'eau dans un ballet féerique.
— Encore ! Encore ! s'exclama ma version enfant.
Mon frère, également plus jeune, opina avant de tendre les mains. L'eau s'agita doucement pour former une silhouette animale qui courra autour de moi avant d'éclater en de milliers de gouttes resplendissantes, étincelantes, semblables à des perles lumineuses.
— Ce pouvoir est trop cool ! s'écria mon sosie. Je veux être comme toi, grand frère ! Et, un jour, je serai aussi un Ange gardien, parce que c'est trop bien de protéger les humains.
— Qu'importe ce que tu deviendras, répondit Caïn en souriant, le principal, c'est que tu sois heureuse.
Une larme perla le long de ma joue alors que j'observais les deux enfants rire, le visage resplendissant de joie, leur aura colorée s'agitant autour d'eux pour se confondre dans un magnifique ballet. Caïn se pencha un peu vers ma version enfant pour lui murmurer des mots qui, encore aujourd'hui, restait gravés dans ma mémoire :
— Et je serai toujours très fier de ma petite sœur. Je serai toujours-là pour toi. Et je te protégerai autant que je protégerai les humains.
— Tu me promets que tu seras toujours là pour moi ? demanda ma jeune version, les yeux brillants d'espoir.
— Oui, je te le promets.
Et il l'enlaça, alors que j'eus l'impression d'être moi aussi enveloppée de ses bras invisibles, une chaleur bienveillante me submergeant jusqu'à s'infiltrer dans mes veines. Je fermai les paupières dans l'espoir de profiter de sa présence, avant qu'une lumière ne transperce les ténèbres.
Sonnée, je clignai des yeux pour croiser le regard noisette de Caïn. Ses grandes ailes blanches battaient dans le vide sans émettre le moindre bruit alors que son sourire rassurant réchauffait ma poitrine, étouffant, le temps d'un instant, le vide constant qui me dévorait constamment.
« Je comprendrai que tu te méfies encore, Elora, et c'est normal. »
— Impossible..., murmurai-je dans un sanglot. Caïn...
Avant qu'il ne puisse réagir, je m'élançai vers lui pour l'enlacer fermement. Ses bras se refermèrent autour de moi après un instant de flottement avant que je n'enfouisse mon nez dans son cou. Une autre larme dévala ma joue. Je mourrais d'envie de flancher. De mourir dans ses bras pour ne plus jamais me réveiller de ce songe.
Pour profiter éternellement de sa présence irréelle.
Et ce même si je ne ressentais aucunement la chaleur familière de ses bras qui m'avaient tant bercé, autrefois. Même s'il m'enlaçait, rien n'était réel. Rien. Et ça, ça me prouvait qu'il n'était pas vraiment là.
Qu'il ne le serait plus jamais.
Qu'importait. J'étais bien, à cet instant.
— Tu me l'avais promis..., chuchotai-je contre lui.
« Je le sais, et je tiens ma promesse. »
Je me mis bientôt à craquer pour pleurer contre lui. Il caressa tendrement mon dos en me murmurant des mots étouffés par mes sanglots déchirants, ainsi que par les battements chaotiques de mon cœur qui pleurait, lui aussi. Tout un océan se déversait, impossible pour moi de retenir plus longtemps les larmes qui ne demandaient qu'à sortir.
« Je suis près de toi, Elora. Je suis là depuis le début. »
Il me recula un peu pour me dévisager de ses yeux bruns. Ma gorge se noua encore quand il réafficha un sourire. Un sourire qui pouvait réchauffer le cœur des êtres les plus froids.
— Pourquoi, Caïn ? Pourquoi as-tu sacrifié ta vie pour moi ? parvins-je à articuler.
Ses ailes cessèrent de battre, comme tétanisés par ma question.
« Pensais-tu sincèrement que j'allais te laisser mourir ? Elora, j'étais un Ange gardien. Mon devoir était de protéger. De te protéger. »
— Mais ma vie ne valait pas plus que la tienne !
Un éclat brisa traversa son regard tandis que j'inhalais l'air, le corps traversé de tremblements. Non, ma vie ne valait pas plus que la sienne. Il était un Ange Gardien au cœur d'or, aux pouvoirs sensationnels, alors que moi, je n'étais qu'une simple Guerrière avec un don inutile.
« Qu'aurais-tu fait à ma place ? »
Mon souffle se raréfia avant que je ne retienne un autre sanglot, les yeux larmoyants. Je m'égarai dans mes pensées en contemplant la lune crémeuse, luisante, faisant de l'ombre au ciel abyssal.
— J'aurais fait la même chose..., avouai-je.
Mon frère retrouva son éternel sourire, figé à jamais dans la Mort.
« Toute vie à son importance. Pas plus, pas moins. Et j'ai choisi de t'offrir la mienne, Elora. Arrête de te blâmer, c'était ma volonté. »
Mon cœur se serra davantage. Oui, aucune vie n'en valait plus qu'une autre. Mais comment l'accepter, lorsque c'était une personne que l'on aimait qui se sacrifiait pour nous ?
« Maintenant écoute moi. Je sais que ça fait de nombreuses années maintenant, que tu en doutes, mais je tiens ma promesse. Je suis près de toi, je veille sur toi. »
— Tu ne peux pas... Tu ne le peux plus..., couinai-je d'une voix chevrotante.
Il secoua la tête en me pointant du doigt.
« Tu as mon don. C'est comme si j'étais ici, en toi. Et de là où je suis, je garde un œil sur toi. Je reste un Ange Gardien. »
C'en était trop pour mon cœur meurtri. Disait-il vrai ? Était-ce mon subconscient qui me murmurait des choses que j'aurais aimé entendre, ou Caïn était-il bel et bien là, à travers mon songe, pour m'apporter sa chaleur ? Qu'est-ce qui était vrai ? Qu'est-ce qui était faux ? J'étais perdue...
— Mais pourquoi maintenant, Caïn ? Pourquoi n'es-tu pas venu me voir avant ? Je... J'aurais donné cher pour pouvoir te voir le temps d'un instant dans l'un de mes rêves... Pourquoi n'es-tu jamais venu me voir ?
Pourquoi ne s'était-il jamais manifesté avant ? Pourquoi n'était-il pas venu me parler lorsque j'avais le plus besoin de lui ? Lorsque j'étais complètement seule, désespérée, et transie de peur ?
Tu le sais déjà, me chuchotai-je à moi-même.
Un sourire attristé étira ses lèvres avant qu'un éclat chagriné n'illumine ses prunelles.
« Comment le pouvais-je ? Tu m'en empêchais, Elora. Tu me repoussais... »
Ses paroles me lacérèrent la poitrine, et je vacillai sous le poids de ma tristesse, retombant à genoux. Le souffle haletant, je tentai de reprendre ma respiration, pleurant à chaudes larmes. Comment avais-je pu ? Comment avais-je pu repousser mon propre frère sous prétexte que j'avais peur de souffrir ?
— Je suis désolée... Je suis tellement désolée..., sanglotai-je entre deux souffles.
Les mains de Caïn se posèrent contre mes joues avant qu'il ne relève mon visage, m'observant avec peine, avec amour. Cette vision me brisa davantage, et je pleurai en m'excusant de l'avoir fui, d'avoir cherché à l'oublier par peur de me voir être un peu plus détruite.
« Tu dois apprendre à t'accepter, Elora. »
Autre larme. Qu'est-ce que cela signifiait ? Que voulait-il dire par là ?
« Je compte sur toi pour mettre un terme à toutes ces menaces. Tu en es capable, petite sœur. Tu es forte, d'accord ? Tu l'es bien plus que tu ne le penses. Alors réveille-toi, retrouve tes amis, et menez à bien votre mission. »
Ses propos résonnèrent dans mon esprit. Mes amis... Ils se trouvaient sur l'Aôtu, je devais les rejoindre... Mais égoïstement, je n'en avais aucune envie. Pas maintenant que j'avais l'occasion de discuter avec mon frère. Je ne voulais pas me réveiller et le perdre à nouveau. Le reverrais-je ? Reviendrait-il me voir ?
« Je compte sur toi. »
Cette phrase... La même prononcée avant qu'il ne me soit à jamais retiré, avalé par les profondeurs de l'océan. Je sentis ma vision s'assombrir avant qu'il ne recule un peu.
« Continue de te battre, Elora. Même si tout semble perdu, n'abandonne pas, ne te détourne jamais de la lumière, et ce même si les ténèbres prennent de l'ampleur. »
— Mais comment ? sanglotai-je. Je... J'ai peur. J'ai peur de ne jamais revoir la lumière, Caïn...
« Tu la reverras toujours. Elle brûle en toi. N'en doute jamais. »
Devant mes traits déformés par le chagrin, par l'incompréhension et le doute, Caïn sourit un peu plus. Son corps se mit à briller, comme si de nombreuses lucioles l'enveloppaient, luisantes et chaleureuses, prêtes à me le retirer à tout jamais. Je tendis ma main, affolée, le cœur au bord des lèvres.
Non. Pas encore.
— Non, Caïn ! S'il te plaît, reste ! m'écriai-je. Ne pars pas !
Son corps luisit davantage. Je tentai d'attraper ses doigts, mais mes doigts passèrent en travers, n'atteignant que le vide. Il me lança un sourire attristé et murmura une dernière fois :
« Je serai toujours présent, je te l'ai promis... »
— Non ! Non, tu ne peux pas partir ! hurlai-je. Je t'en prie !
Et les particules lumineuses m'aveuglèrent un instant. Je me relevai pour m'élancer vers lui afin de refermer mes bras autour de lui, mais je ne rencontrai que le vide. Je retombai dans l'eau, seule, des larmes inondant mes joues, et je ravalai un hurlement déchirant, avec la volonté de m'arracher le cœur pour ne plus ressentir cette douleur vive.
Seule et transie de froid, je pleurai désespérément, le visage humide et le corps parcouru de soubresauts.
Il était parti.
Il m'avait encore quittée...
Et c'était toujours aussi douloureux.
Une légère brise effleura mon visage. Je papillonnai des cils avant de retenir un hoquet de surprise en constatant que j'étais allongée sur l'herbe, face au lac. La lune brillait toujours intensément, comme si elle se moquait de mon malheur, en compagnie des étoiles qui ricanaient de ma tristesse.
Je relevai la tête en comprenant que c'était bel et bien un songe. Un songe pourtant si réel...
Mon cœur s'enserra avant que je n'apporte mes doigts tremblants jusqu'à mes joues, et je me figeai en constatant qu'elles étaient humides. J'avais pleuré lors de mon sommeil...
Un songe....
Non. Je ne voulais pas croire au fait que c'était un simple rêve. Je voulais me dire qu'il s'agissait d'un message de mon frère. Qu'il se soit réellement manifesté, et non pas que mon subconscient s'était joué de moi, qu'il m'avait laissé entrevoir ce que je désirais...
Mon regard se perdit, contemplant la surface azurée de l'eau, miroir du ciel où la lune brillait. Elle me rappela Caïn. Aussi belle et resplendissante qu'il l'avait été, autrefois. La lumière dans mes ténèbres. Le chemin à prendre pour retrouver la voie.
Mon frère me manquait tant...
Pourquoi maintenant, bon sang ? Pourquoi ?
Comment le pouvais-je ? Tu m'en empêchais, Elora. Tu me repoussais.
Tu dois apprendre à t'accepter, Elora.
Caïn m'avait dit tout cela... Est-ce que cela signifiait que j'étais le problème ? L'empêchais-je vraiment de venir me voir ? Au fond, je connaissais la vérité. Oui, j'avais érigé des barrières pour ne plus me heurter à son souvenir. Je devais apprendre à les réaffronter, accepter sa mort.
Comment pourrais-je faire mon deuil, sinon ?
Mais c'était si douloureux...
Je secouai la tête pour balayer mes pensées, les yeux encore humides et la tête en vrac. Il fallait que je réagisse, que je me reprenne. Pour ça, je devais commencer par retrouver mes amis.
Si mon frère défunt me manquait terriblement, il fallait que je parvienne malgré tout à faire face à la réalité. Au présent. Et surtout, aux personnes vivantes.
Alors je relevai le nez en fronçant les sourcils. Une lueur azurée, chaleureuse, m'enveloppa pour réchauffer mon corps transi de froid. Mes ailes se déployèrent dans un bruissement, et je luttai pour efforcer un sourire qui n'avait rien de sincère.
Ma guerre commençait.
Hellooooo🥰
Bonnn franchement je suis pas fière de ce chapitre. Il est court et... et je sais pas vraiment...😂
Mais bon, il faut des chapitres un peu calmes. En espérant ne pas trop vous décevoir par la suite !
Soooo, vous avez des avis ? Des théories ?
Bisous populaceeee ❤️
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