Chapitre 38
« — Mais ta guerre à toi, elle commence à peine. »
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Le choc imprégnait mes traits alors que mon attention était posée sur le Démon posté entre Axel et moi, son corps imposant faisant barrière.
Armé de deux épées impressionnantes formant une croix contre la hache du Wrashar, resplendissantes sous les rayons de la lune, Eytan repoussait l'arme d'Axel en me tournant le dos. Son aura noire s'agitait autour de lui et m'écrasait, m'étouffait. Le danger émanait de tous ses pores, mais, pour une fois, ce n'était pas à mon encontre.
— Je n'aime pas que l'on parle en mon nom, Wrashar, siffla Eytan.
Axel émit un grognement de surprise et essaya de forcer son adversaire à reculer, mais Eytan le poussa sans management avant de faire tournoyer ses épées comme si elles ne pesaient rien. Le Wrashar tituba en retenant sa respiration, la mine stupéfaite, la peur peignant ses traits.
— Alors, à l'avenir, tiens ta langue, poursuivit Eytan en faisant un pas vers son adversaire.
— Eytan..., pesta Axel en fléchissant, prêt à se défendre, serrant son arme entre ses mains.
Les membres tressautant, je me relevai, encore bouleversée par l'arrivée du Démon qui me lança un coup d'œil par-dessus son épaule, et il reporta son attention sur Axel, la mâchoire serrée.
— Et je n'aime pas non plus que l'on me vole mes jouets, poursuivit Eytan d'une voix glaçante.
D'un geste habile, il pivota sur lui-même avant qu'un sifflement ne déchire l'air. Du sang gicla, et un couinement de douleur s'éleva. Je clignai des paupières en ignorant mes jambes lourdes et remarquai l'une des épées d'Eytan plantée dans l'appendice du Wrashar qui hurla. Il agita désespérément son tentacule dans l'espoir de dégager l'arme, mais le Démon lui asséna un coup de pied contre l'estomac pour qu'il retombe lourdement en arrière.
Malgré son piteux état, Axel releva ses yeux entièrement noirs vers son adversaire et dévoila ses crocs dans un sourire.
— Il faut savoir partager, Eytan, lâcha-t-il d'une voix d'outre-tombe.
Eytan ricana, mauvais, et fit tournoyer sa deuxième épée sans se démunir de son rictus malveillant. Ses iris flamboyèrent avant qu'il ne les plonge dans les miens, ce qui me glaça le sang.
— Je ne partage pas.
Ses propos claquèrent comme un fouet sur mon échine. Axel releva la tête en devenant livide devant l'épée étincelante d'Eytan, et la promesse sordide qui étincelait au fond de ses pupilles.
— Pas cette fois, Démon ! renchérit Axel en serrant la mâchoire.
Et, avant qu'Eytan n'abatte son arme sur lui, une lumière aveuglante engloba le corps d'Axel. Je reculai en plissant les paupières, avant qu'un léger souffle se joigne au clapotis de la pluie. Lorsque la lueur disparut, je me braquai en constatant que le Wrashar et James avaient disparu.
Eytan contracta la mâchoire en plantant son épée dans la terre, le regard meurtrier. Je déglutis, prise de frissons froids, le cœur battant frénétiquement. Lorsque le Démon releva ses yeux bleus vers moi, je retins mon souffle devant l'intensité qui s'en dégageait. Ses lèvres s'ourlèrent en un sourire malicieux alors qu'il penchait la tête sur le côté, la mine curieuse.
Lentement, comme s'il risquait de bondir sur moi au moindre faux pas, je reculai pour saisir mon épée qui se tenait plus loin, les doigts tremblants et les cheveux trempés. Je la serrai contre moi, et son contact m'apporta un peu de réconfort.
— Tu comprends pourquoi je t'ai fait venir ici, mon ange ?
Ses paroles balayèrent les nombreuses pensées qui me persécutaient, et je fronçai les sourcils en prenant une profonde goulée d'air. Oui. Je comprenais. Eytan m'avait provoqué une vision concernant Axel pour que je le pense en danger, et le fait que Nathan me dise que je n'avais que quelques minutes pour le retrouver m'avait poussé à partir à sa recherche, quitte à venir ici.
Ainsi, j'avais pu découvrir son véritable visage.
Encore une fois, Eytan avait tout prévu.
Sans mot dire, je hochai la tête, trop chamboulée pour prendre la parole. Eytan sourit un peu plus et saisit ses deux épées avec nonchalance, avant qu'elles ne disparaissent. Il reporta ensuite son attention sur moi, le regard acéré, puis il s'approcha.
— Tu voulais que je comprenne ce qu'il est réellement, réussis-je à murmurer, le regard dans le vague. Tu m'as fait venir ici, car tu savais qu'il préparait quelque chose avec James.
— C'est bien ça.
— Mais pourquoi ? l'interrogeai-je en ancrant mes yeux dans les siens.
Le Démon enfouit ses mains dans les poches en fronçant les sourcils, la mine plus sérieuse. J'essayai d'ignorer le mal de tête qui se pointait, les membres ankylosés et meurtris.
— Qu'est-ce que tu veux, au fond ? Quel est ton intérêt ? ajoutai-je.
Il ne répondit rien. Frustrée, je grinçai des dents en me massant les tempes. Toutes ces questions me donnaient le tournis. J'en avais la nausée. Si je n'obtenais pas une seule réponse, je savais que la chute serait vertigineuse, la chute brutale. Bien qu'au fond, perdue dans toutes ces interrogations, je sentais déjà mon être se faire malmener, je ne donnais pas cher de l'état dans lequel risquait d'être mon cœur.
— Et pourquoi m'as-tu sauvée, Eytan ? Ne suis-je pas qu'un simple jouet ?
Le coin de ses lèvres frémit et une lueur moqueuse enflamma le fond de ses pupilles. Mon sang ne fit qu'un tour alors que la haine se confondait avec le regret. J'étais fatiguée de laisser mon cœur s'ouvrir à n'importe qui. Lasse d'être bien trop crédule avec des personnes qui ne désiraient qu'une chose : me faire flancher. Pourquoi ne parvenais-je pas à apprendre la leçon ? Quand est-ce que je parviendrais à faire taire mes sentiments ?
Le silence plana, quand mes questions s'amusaient à me hurler dessus, quitte à m'assaillir le crâne. J'étais affligée. J'avais l'impression de me noyer dans un océan de tracas, là où les griffes de mes tourments agrippaient mes épaules pour mieux me maintenir prisonnière.
— Justement, mon ange, commença-t-il. Si l'un de mes jouets doit se briser, je préférerais que ça soit de mes mains, et pas de celles d'une autre personne.
Première gifle. En plein visage.
Déstabilisée, j'entrouvris la bouche, les oreilles sifflantes, mais sa prestance m'écrasa et m'empêcha de renchérir.
— Mais le moment n'est pas encore venu, enchaîna-t-il. J'ai encore besoin de toi.
La flamme effroyable qui s'agitait au fond de son regard sembla s'intensifier et consuma la totalité de mes membres meurtris, trempés, ainsi que mes tripes. Le souffle du vent effleura ma peau brûlante, et le bruissement des feuilles s'éleva, quand la pluie s'intensifiait, incapable, pourtant, d'apaiser la chaleur tenace qui m'enveloppait.
— Et, lorsque le moment sera venu, je m'occuperai personnellement de ton cas, mon ange. Lorsque tu ne me seras d'aucune utilité, je me débarrasserai de toi.
Deuxième gifle. Et cette fois, en plein cœur.
D'abord, un sentiment creusa ma poitrine pour me vider de tout ressentis. Un gouffre profond semblait me dévorer pour s'attaquer à mon pauvre cœur éraflé. Pourtant, bien vite, une colère effroyable enflamma mes veines pour crépiter autour de moi, prête à défier les cieux qui pleuraient.
Cependant, notre pacte m'entravait. Je savais que j'étais condamnée. Une parole de sa part, et ça serait fini. Mais je ne pouvais pas fermer les yeux sur ses propos. J'étais trop lasse pour ça.
Bientôt, un bruit sourd s'éleva dans les airs, suivi par ma respiration haletante. La tête tournée sur le côté, le Démon fronça les sourcils tandis que je le fusillais des yeux. Une marque rougeâtre se forma sur sa mâchoire qui, très vite, tressauta.
— Je ne suis pas un jouet, Eytan ! m'écriai-je. Et surtout, je ne suis pas ton objet ! Pour qui tu te prends, hein ?
Lentement, il tourna la tête vers moi, les muscles tendus. Malgré son aura qui ne cessait de s'agiter, prête à se fondre sur moi pour m'engloutir, je ne cillai pas. La rage emplissait mon être entier et prenait possession de mon corps tremblant.
— Tu as encore besoin de moi ? sifflai-je. Pour quelqu'un qui semble intouchable, je trouve ça ironique, personnellement !
Ses sourcils se froncèrent davantage pour faire de l'ombre à la couleur azure de ses iris. Il esquissa un geste, mais je pointai brusquement mon épée vers lui pour le menacer, les jambes prêtes à céder sous le poids de la peur se mêlant à la haine.
— Si tu m'as fait venir ici, c'est parce que tu voulais que je découvre qui est Axel. Mais pourquoi ? Pourquoi ? Putain, qu'est-ce que tu veux, Eytan ? Dis-le moi !
Ma voix gronda, s'élevant dans le ciel couvert, bien vite balayé par le souffle du vent. Je m'approchai encore d'Eytan, mon arme toujours pointée vers son corps qui me surplombait de sa stature qui me dominait.
Sa mine indéchiffrable me rendait dingue ! Je ne le comprenais pas. Je ne comprenais pas son but. Qu'est-ce qu'il désirait, à la fin ? Qui était-il ? Cette question perdurait depuis trop longtemps. Je voulais des réponses. Je n'en pouvais plus. Quand parviendrais-je à percer le mystère qui l'enveloppait ?
— Réponds-moi ! hurlai-je d'une voix tremblante. Quel est ton intérêt ? Hein ?
Je fis un autre pas. Mon épée frôla sa poitrine, et, pourtant, il ne cilla pas. Il ne recula pas non plus. Il n'esquissait aucun geste. Il se contentait simplement de scruter mon visage silencieusement. Et ça aussi, ça me rendait dingue. Je me sentais si pathétique, alors que j'avais le dessus.
Pathétique. J'étais pathétique. Je savais que, face à lui, je n'avais aucune chance, mais j'étais trop épuisée. Je ne voulais pas être un jouet, à ses yeux. Je n'en étais pas un. Qu'importait qu'il me brise, je l'étais déjà.
— Tu agis de manière contradictoire ! repris-je. Tu prétends vouloir ma perte, et pourtant, tu m'as sauvée plus d'une fois. Je ne te comprends pas ! Et pourquoi avoir laissé Axel faire croire que tu avais tué cette bibliothécaire ? Hein ? Je ne comprends pas ! Je ne te comprends pas !
Ma voix faiblit, par manque de souffle. Je secouai la tête en ignorant mon cœur qui battait à tout rompre. Je relevai le nez vers lui, tout en frôlant à nouveau sa poitrine du bout de mon arme.
Cette histoire n'avait donc aucun sens ?
S'il voulait causer ma perte, pourquoi me donner des indices ? Pourquoi me faire découvrir la véritable identité d'Axel ?
Et, à nouveau, le silence prit la parole. J'inspirai profondément et, de ma main libre, je plaquai mes doigts contre son torse pour le repousser en serrant les dents, agacée par son mutisme, par son visage insondable.
— Dis-moi la raison, Eytan ! insistai-je.
Aucune réponse. Encore. Et cette lueur moqueuse qui luisait au fond de ses yeux... Elle me mettait encore plus en rogne. Il se fichait de moi. Encore, et encore.
Je serrai mon épée en le toisant avec haine. La pluie, qui s'était légèrement calmée, s'intensifia à nouveau, avant qu'un orage ne déchire le ciel noir. Aussi noir que le cœur du Démon qui me faisait face.
Mon corps vibra de colère et ma main libre se redressa, prête à s'abattre à nouveau contre sa mâchoire, mais il intercepta mon geste en saisissant mon poignet. Devant la noirceur de son regard, mon cœur loupa un battement, quand son toucher brûlant m'arracha des picotements le long de ma chair.
— Tu ne devrais pas faire ça, mon ange, souffla-t-il.
Ses doigts enserrant mon poignet me firent tressaillir, et il pencha la tête sur le côté. Lorsqu'il fit un mouvement, je me tendis, prête à recevoir un coup.
Mais il n'en fit rien.
Hésitante, je le dévisageai et sa main, qui m'empoignait, me relâcha lentement alors que son autre main se promenait sur mon dos pour s'arrêter sur ma taille. Il esquissa ensuite un sourire moqueur et, avant que je ne réagisse, il me rapprocha de lui.
— Cesse de m'appeler ainsi, parvins-je à gronder pour ne pas lui démontrer à quel point il me terrifiait. Je te l'ai déjà dit, je ne t'appartiens pas.
Il me rapprocha bientôt de lui, pour que mon corps se rapproche du sien. Son souffle brûlant s'échoua sur mon visage livide, et sa chaleur corporelle, bien plus étouffante qu'à l'accoutumée, m'enveloppa, entravant chacun de mes membres.
— Dès le moment où tu as pactisé avec moi, mon ange, tu t'es donnée à moi. Tu m'appartiens, que tu le veuilles ou non.
Je manquai de vaciller, mais sa prise m'empêcha de trébucher. Il me contempla encore un moment, sans se démunir de son air cruel, alors qu'une vérité s'imposait à moi : il avait raison.
Je lui appartenais. Corps et âme.
Mais surtout âme.
Je brûlais. Je suffoquais.
J'étais condamnée. Condamnée à être sous son emprise. Le temps m'était compté. Quand il se déciderait à me réclamer le prix que je lui devais, les dés seraient lancés. Mon âme ne serait plus mienne. Ma vie serait brisée. Mes principes renoncés.
Quelle terrible erreur avais-je commise ?
Je m'étais pourtant répétée que je ne lui céderais pas. Jamais. Qu'il était inconcevable que je flanche pour le supplier. Et pourtant...
Pourtant, je lui étais maintenant redevable.
Le bleu de ses iris luisit, étincelant sous les rayons de la lune, se promenant sur mes traits effrayés. Enfin, sa main relâcha la mienne, quand l'autre resta égarée sur ma taille, comme s'il voulait m'empêcher de fuir. Mais le pouvais-je seulement ? Le fuir m'était impossible, puisque je lui étais entravée.
Il inclina un peu la tête pour que ses cheveux humides caressent ma peau blême et brûlante, quand le ciel continuait de pleurer, à l'instar de mon cœur.
— Pourquoi, Eytan ? demandai-je pour changer de sujet, rongée par le chagrin. Dis-moi ce que tu as en tête, je t'en prie. Ce jeu dure depuis trop longtemps.
Trop pour que je reste saine d'esprit...
— Tu te poses les mauvaises questions, Elora.
Sa voix traîna le long de ma chair. Je frissonnai encore, les membres crispés, tétanisée par sa proximité, par ses lèvres proches des miennes, sa chaleur brûlante m'entravant sans pitié, et ses yeux me happant sans scrupules, comme pour me plonger, corps et âme, dans ses ténèbres prêtes à me dévorer.
Des ténèbres qui me guidaient et m'ouvraient la voie à chaque instant. Je savais que bientôt, je finirais par m'y perdre à tout jamais.
— Réfléchis, tout simplement, poursuivit-il. Pourquoi est-ce que je voulais que tu voies le vrai visage d'Axel, à ton avis ?
Pourquoi ? Il yavait tant de possibilités. Laquelle était vraie ? Si je pensais à uneraison, une autre s'avérait être bonne. Eytan était imprévisible, impétueux.
Oui, c'était le mot qui convenait pour le définir. Il était comparable au vent. Il pouvait se montrer calme, pour finalement se transformer en une tempête qui détruisait tout sur son passage. Une tempête impétueuse qui était impossible à vaincre.
— Tu voulais que je découvre l'existence des Wrashars, murmurai-je.
— « Wrashar ». Tu as entendu ce mot plusieurs fois, mais ça ne suffisait pas.
— Pourquoi ? chuchotai-je d'une voix éreintée par ma gorge nouée.
Ses lèvres pleines se soulevèrent en un rictus espiègle. Ses yeux se firent plus intenses, voire plus menaçants. Mon estomac se tordit quand des picotements assaillirent ma peau frissonnante. Cet homme causerait ma perte, je le savais. Pion égaré dans un échiquier sanglant, je finirai par être frappée par un destin cruel. Sacrifiée par un Roi ténébreux s'amusant de mon malheur.
— Encore une fois, tu te poses la mauvaise question. Si je t'ai menée jusqu'à ici, c'est pour que tu comprennes ce qu'il se passe.
— Ce qu'il se passe ? répétai-je. C'est depuis que tu es sur Terre, qu'il se passe quelque chose, Eytan.
Un léger rire s'échappa de ses lèvres avant qu'il ne sourit avec une douceur feinte, quand une menace évidente consumait ses iris.
— Vraiment ? Oh, mon ange...
Sa main, maintenant ma taille, remonta lentement jusqu'à mon dos, laissant une traînée brûlante sur ma chair, pourtant couverte. Ses doigts se promenèrent ensuite sur mes bras pour qu'il empoigne finalement mon coude et me rapproche encore plus de son corps. Je retins ma respiration et relâchai mon épée à mes pieds pour plaquer mes mains contre son torse, dans l'espoir de laisser une certaine distance entre nous.
Mais c'était inutile. Même s'il y avait un léger espace entre son corps et le mien, je ressentais toute cette tension qui m'étreignait, la chaleur écrasante qu'il dégageait. Il semblait y avoir une flamme autour de nous, crépitante, prête à nous consumer.
— Je sais qu'une question te tourmente, et je vais y répondre, reprit-il.
Ses iris s'assombrirent, et je remarquai le blanc de son œil gauche noircir un peu. Je clignai des yeux, surprise, avant de voir qu'il était inchangé. Avais-je rêvé ? Il me détailla longuement sous ses cils noirs, quitte à me donner l'impression de lire à travers mon âme.
— Oui. Je suis la cause des nombreux meurtres qui ont eu lieu sur Terre depuis peu.
Et, avant que je ne renchérisse, ses lèvres s'approchèrent des miennes et les frôlèrent. Les siennes étaient aussi douces qu'une plume, aussi attirante que le fruit défendu, mais aussi dangereuse que des flammes. Pourtant, je ne reculai pas. Je ne cillai pas. Je restai-là, le souffle court, à attendre qu'il continue. Son petit jeu de séduction ne marchait pas. Pas cette fois.
Les Démons étaient réputés pour leur beauté hypnotique. Pour leur charme magnétique. Eytan n'y échappait pas. Mais je ne serais plus ce pathétique papillon de nuit attiré par la flamme qu'il incarnait. Je ne me brûlerais pas les ailes.
— Oui, mon ange, je suis le monstre auquel tu penses, termina-t-il dans un souffle.
Sa main relâcha mon coude pour que ses doigts remontent jusqu'à mon visage afin d'effleurer ma joue. Mes jambes flageolèrent alors qu'on se défiait du regard dans un silence religieux. Toujours écrasée par sa puissance, j'ignorai sa bouche qui frôlait mon front, ainsi que sa chaleur insufflant des promesses pécheresses dans mon être, et me mis sur la pointe des pieds pour m'approcher de lui. Mon cœur hurla, me priant de ne pas jouer à ce jeu-là, quand ma raison me dictait de faire taire mes peurs.
Mes lèvres s'approchèrent des siennes et remontèrent jusqu'à son oreille.
— Et les monstres doivent être arrêtés, Eytan. Qu'importe le prix à payer, je le ferai, et ce même si je dois sombrer dans ta noirceur. Même si je dois renoncer à mon âme.
Je reculai enfin et aperçus un drôle d'éclat enflammer ses pupilles. Et ce fichu sourire... Il ne quittait pas son visage ô combien angélique.
— Ton âme ? Elora, tu es si naïve, susurra-t-il. N'est-elle pas déjà perdue ?
Ses paroles me troublèrent la vue et me frappèrent la poitrine, mais je repris vite contenance pour ne pas lui montrer à quel point j'étais atteinte. Les yeux secs, mais le cœur humide, je n'exprimai rien. Ne supportant plus notre proximité, je reculai encore, me libérant enfin de son aura menaçante, de sa chaleur écrasante.
— Je suis le monstre auquel tu penses, répéta-t-il. C'est vrai. Mais je suis le monstre du monde que forment tes pensées.
Abasourdie, je le dévisageai. Qu'est-ce qu'il voulait dire ? Devant mon air égaré, il s'éloigna à son tour, les mains se plongeant dans ses poches pour lui donner une allure nonchalante.
— Je te l'ai dit. Tu dois réfléchir. Je t'ai mené jusqu'à ici pour que tu comprennes qu'il existe une autre espèce, mais pas seulement. Au fond, je suis persuadé que tu as toutes les cartes en main pour obtenir les réponses que tu souhaites, mais tu te voiles la face. Tu as peur de la vérité, Elora.
Troisième gifle. Dans mon être. Tout était chamboulé.
— Pourquoi t'entêtes-tu à te détourner des faits, mon ange ? Pourquoi accordes-tu tant d'importance aux conséquences que pourraient avoir tes actes ?
Les conséquences que pourraient avoir mes actes ? Agir comme si je n'avais plus rien à perdre... C'était ce qu'il sous-entendait, j'en étais persuadée. Subtile, mais évidente, l'allusion à notre pacte sonnait cruellement à mes oreilles, piqûre de rappel quant à mon destin. Son sourire s'accentua et, bientôt, son ombre s'étendit à ses pieds pour l'envelopper, pour le vêtir. Ses yeux me brûlèrent encore, flamboyants d'un drôle d'éclat. Pour une fois, ce n'était pas de l'amusement.
— Il se passe quelque chose sur Terre, mais aussi dans notre monde. Les guerres ne sont pas prêtes de s'arrêter, mais ça, tu dois certainement le savoir.
Ma bouche s'entrouvrit, mais il me devança :
— Mais ta guerre à toi, elle commence à peine.
Avant que son ombre ne l'engloutisse, sa voix rauque s'éleva :
— Tu ne parviendras pas à remporter le combat sans tes alliés. Pour ça, tu dois les trouver.
Mes alliés ? Mais qui étaient mes alliés ? Mes amis, ou d'autres personnes ?
Bientôt, le souffle du vent résonna à mes oreilles, le Démon maintenant volatilisé. J'emplis mes poumons d'air en levant le nez vers le ciel. Il ne pleuvait plus, mais les nuages étaient toujours présents. Les jambes lourdes, je ramassai mon épée qui flamboya avant de disparaître.
Bon sang, quand est-ce qu'Eytan m'apporterait-il de véritables réponses, au lieu de se jouer de moi ? Je n'étais pas plus avancée...
Du moins, j'avais tout de même appris une chose : il existait une nouvelle espèce, les Wrashars. Eytan m'avait poussé à le découvrir, mais dans quel but ? Je n'en savais rien.
Il prétendait que ma guerre commençait, mais qu'est-ce que cela signifiait ? Le combat était mal engagé. Je savais d'avance quelle serait la finalité. Du moins, la mienne. Mais n'était-il pas possible de remporter tout de même la bataille avant d'accepter les conséquences ? Pouvais-je changer les choses, et ce même si j'étais redevable à un Démon ?
J'étais complètement perdue...
Une chose était certaine : pour mener à bien cette guerre, il fallait que je retrouve mes amis.
Ils étaient en danger.
Hello mes petits anges !
Soooo, qu'en avez-vous pensé ? Vous êtes perdus ? Qu'avez-vous compris ? Selon-vous, que veut Eytan ? Et pourquoi Elora se voilerait la face ? Alala Eytan jehe le père fouras avec ses phrases énigmatiques 😂
Lâchez vos théories, je veux voir si vous êtes sur la bonne piste ! 🙃
Et à bientôt pour le prochain chapitre ! Bisous ! ❤️
~Chapitre revu~
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