Nos inquiétudes

La vie avait repris son cours après la mort du traître. Je me demandai toujours comment j'étais aussi chanceuse. La Déesse était réellement généreuse. Je me rappelai l'avoir pourtant détestée un temps. Juste après que les chasseurs eurent décimé ma meute tout en nous laissant dans cette souffrance perpétuelle. Je dégageai ces souvenirs médiocres de mes pensées et admirai cet homme qui, allongé près de moi, m'encerclait de ses bras. Il ronflait doucement, un son plus doux que le silence absolu dont j'avais dû me terrer.

La lune feutrait ses rayons à travers la fenêtre. Elle nous observait, bienveillante. Un sourire s'échappa de mes lèvres quand je repensais à la révélation que je devais faire à Adam demain. Mais la seconde d'après, je ne pus empêcher mon ventre de se tordre à cette pensée. Mon sourire flétrit telle une fleur manquant la douceur du soleil caché par d'épais nuages. Des nuages gris annonçant un mauvais temps. L'inquiétude remplaça mes traits. Elle était si prononcée qu'elle dérangea mon lien avec Adam.

Il grogna puis m'enlaça plus étroitement, ne me laissant plus aucun moyen de m'enfuir. Son geste protecteur et un poil possessif me fit rire. Même dans ses rêves je devais rester dans ses bras. Il adorait me toucher. Comme tout loup-garou, mais lui, il adorait vraiment.

Depuis que j'avais annoncé mon amour il y a bientôt quelques mois de cela, il trouvait toujours un prétexte pour m'enfermer ou me caresser Non, en fait, il me touchait même sans raison apparente. Et je le laissai faire. Peut-être avais-je même donné trop de libertés à ses affections. Il agissait comme un enfant en proie à des caprices dès que je partais loin de lui.

« Dors, demain sera un grand jour, » souffla Lulu.

Demain serait différent. Un grand changement qui, j'espérai, ne modifierait pas ma relation avec Adam. Je fermai les yeux et me laissai bercer par la respiration de mon âme-sœur.

Les rayons du soleil effleurèrent ma peau, m'ordonnant de me lever. J'exécutai sa silencieuse prière en espérant trouver Adam à mes côtés. Mais celui-ci avait disparu. Je me retrouvai seule dans un grand lit. Je grognai et m'en allai dans la salle de bain. Je détestai quand il se réveillait avant moi. J'avais l'impression de rater une partie de la journée ainsi. J'avais réussi à dormir cette nuit, car cela faisait bien au moins une semaine que je ne m'étais pas couchée.

« Où es-tu ? demandai-je par le lien.

– Bonjour mon amour, bien dormi ?

– Oui, mais tu n'as pas répondu à ma question. Quelque chose ne va pas ?

– Non, non... Juste quelques problèmes avec des loups solitaires qui se promenaient un peu trop près de notre territoire. Mais c'est réglé maintenant.

– Tu rentres quand ?

– Je te manque déjà ? me taquina-t-il, mais je n'étais pas d'humeur.

– Adam ! » criai-je plus fort que je ne l'aurais voulu.

Je grognai tandis que des dagues de larmes me taquinaient de leurs pointes. Mes sentiments étaient si déstabilisants et énervants. Je n'arrivais pas à me sentir correctement. Mes crises de colère se manifestaient de plus en plus souvent, et heureusement, je m'en rendais compte. Mais ça ne les empêchait pas de se manifester.

« Adam, je suis désolée. Je ne voulais pas crier. Je suis fatiguée c'est tout, » dis-je en tentant de réparer la situation sachant qu'il serait trop inquiet pour moi.

« J'arrive, » déclara-t-il avant de fermer le lien.

Je soupirai de frustration avant de prendre une douche qui me rafraichirait les méninges. Je sortis de la baignoire et me lavai rapidement. En enfilant des vêtements, je ne pus m'empêcher de me regarder dans le grand miroir de la chambre. Je relevai mon haut et admirai les cicatrices sur mon ventre. Je posai une main dessus et fermai les yeux.

Soudain, Adam apparut derrière moi. Je voyais son reflet dans le miroir. Ses cheveux noirs en bataille montraient qu'il avait couru et son air inquiet ne le lâchait pas.

« Oh non, il a découvert, dis-je à Lulu d'un air paniqué.

– Non, il ne sait rien. Et arrête de paniquer comme ça. Tu vas tomber inconsciente à ses pieds et il sera encore plus inquiet qu'avant, me réprimanda-t-elle.

– Tu es sûre qu'il ne sait rien ? »

Avant qu'elle ne put me répondre, Adam s'approcha doucement de moi. Nos yeux s'accrochaient à travers la glace. Mon coeur battait plus fort qu'à l'habitude. Chaque pas qu'il faisait me me mettait en émoi.

« Chérie, tu vas bien ? » demanda-t-il en s'avançant avec prudence.

Je me retournai et affrontai ses yeux gris tourbillonnants d'agitation. Je hochai la tête, mais il n'était pas dupe. Il savait que quelque chose n'allait pas.

« Tu es malade ? Ou est-ce que j'ai fait quelque chose de mal hier ?

– Non, non, je ne suis pas malade et hier, c'était magnifique, comme d'habitude, expliquai-je avec un sourire.

– Alors tu refais des cauchemars ? »

Je secouai la tête. Je détestais le voir si vulnérable. Tout ce que je voulais c'était lui avouer ce que je cachais depuis une semaine entière. Malheureusement, Alex, Tim, Rachel et Anthony m'avaient presque ordonné de tout lui révéler aujourd'hui sinon ils lui diraient d'eux mêmes. J'étais tellement stressée que mes mains tremblèrent.

« Prends-moi dans tes bras, » soufflai-je en regardant le parquet ciré à mes pieds.

Ses bras m'engouffrèrent dans un délice d'odeur et de bien-être qui m'apaisèrent. Après quelques minutes de silence, je me retirai de ce cocon et reculai d'un pas.

Et c'est à cet instant que débarqua Clara dans le salon en bas.

« Alors ? demanda-t-elle avec enthousiasme du bas de l'escalier.

– Pas encore. »

« J'ai peur... » exposai-je mes craintes à cette mère qui me dorlotait comme ma vraie mère l'aurait fait.

« Parle-lui, dis-lui, et tu verras la réaction de mon fils. »

« Que... interrompit-il ma conversation avec Clara.

– Est-ce que tu pourrais t'assoir sur le lit ?

– Pourquoi ? Qu'est-ce qu'il se passe Lucy ? Tu me fais vraiment peur là.

– Je... Je dois juste te dire quelque chose.

– Et pourquoi je devrais m'assoir pour que tu...

– Adam ! S'il-te-plaît ! » m'écriai-je, épuisée.

Je soufflai d'exaspération. Je ne voulais pas lui crier dessus. Je ne voulais pas me sentir ainsi. Heureusement, il s'installa enfin sur le lit alors que je déglutis lentement. Il me regardait avec des yeux de prédateurs. Comme si j'allais m'enfuir à tout moment. Je savais qu'il était prêt à me courir après si tel était le cas.

« D'accord. Tu... Tu sais que je t'aime Adam, » commençai-je pitoyablement.

« Idiote, ce n'est pas ce que tu veux lui dire, » s'incrusta Lulu qui, au lieu de m'aider, m'enfonça.

« Oui, et moi aussi je t'aime Lucy, répondit mon âme-sœur à ma grande surprise.

– Je... Je suis enceinte, » déblatérai-je aussi vite que je le pus.

Je me mordis la lèvre en attente de sa réaction. Ses yeux passèrent de l'inquiétude à l'émerveillement. Je fus soulagée de ce que son regard pouvait me passer comme sentiment, mais je n'avais pas fini mon discours. Il se leva et avança vers moi avec un grand sourire. Mais je gardais cet air impassible de tristesse.

« Et si notre bébé a du sang d'Ange qui coule dans ses veines. Si il ou elle peut guérir comme moi, Adam. Aujourd'hui beaucoup trop de monde sait que j'ai ces gènes en moi. Si... Si un autre traître réapparaissait et prenait notre enfant... »

Adam lâcha un grognement avant de me prendre dans ses bras. Il prit mon visage mouillé de larmes en coupe.

« Ne dis jamais ça ! Personne n'enlèvera notre enfant. Personne. Même si notre bébé a tes gènes, je le protègerai avec tout ce que j'ai mon amour.

– Mes parents aussi ont essayé de me protéger...

– Mais ils n'auraient jamais pu prévoir cette attaque Lucy. Ce qui est arrivé n'est pas de ta faute. Le... traître et les chasseurs ne savaient pas que tu avais ce sang d'Ange. C'était une coïncidence, Lucy. »

Il avait raison. Je savais qu'il avait raison, mais c'était plus facile de me dire que ma meute et mes parents avaient été torturés non par plaisir, mais à cause de moi, celle qui pouvait ranimer les morts grâce à son sang. Mettre la faute sur quelqu'un était plus simple.

« J'ai peur, » chuchotai-je tremblante.

Adam souleva mon visage et déposa ses lèvres sur les miennes. Un baiser doux, lent, amoureux. Je me laissai bercer par son arôme, sa douceur, ses sentiments. Forts.

« Tout se passera bien, je te le promets. Tu ne dois pas stresser pour ça, compris ? Je m'occupe de tout, » déclara-t-il en déposant un baiser sur ma tempe.

« Tu es vraiment enceinte, » murmura-t-il au creux de mon oreille. Je ris à ce petit air bon enfant. Son excitation et sa joie s'évaporèrent partout dans la chambre pour nous envelopper.

Il s'agenouilla pour embrasser mon petit ventre qui n'avait pour l'instant pas de bosse montrant ma grossesse. D'en bas, il leva ses yeux emplis de désir. Je ne pus m'empêcher de ressentir cette envie soudaine. Il me dévora de nouveau la bouche en parsemant ensuite mon cou de petits baisers.

« Attends, la nuit dernière, ça n'a rien fait au bébé ? demanda-t-il bien inquiet pour la santé du petit.

– Non, Alex m'a donné son feu vert, dis-je avec un clin d'oeil.

– Attends, mon frère le savait avant moi ?

– Ton frère est médecin ! Bien sûr qu'il la sut, » exposai-je en éclatant de rire.

Adam grogna un instant avant de sourire. Il m'embrassa encore et encore en affirmant le fait qu'il allait devenir père. Je ne pus que me sentir heureuse face à cette affirmation. Et moi j'allais être mère.

« Tout se passera bien mon amour. »

Je hochai la tête pour approuver malgré mon appréhension. J'avais confiance en Adam. Tout se passera bien.

Je contactai ensuite Clara pour lui annoncer que j'avais enfin avoué à Adam que j'étais enceinte. Elle soupira de bonheur puis nous intima de descendre pour fêter cette nouvelle tous ensemble.

Adam voulut de nouveau goûter à mes lèvres, mais je lui prévins que ses parents nous attendaient chez eux. Ils avaient tous organisé un petit festin pour nous. Il soupira avant de me prendre dans les bras comme une princesse.

« Je peux marcher, tu sais !

– Je sais, mais je veux te tenir dans mes bras. Je t'aime Lucy Stone.

– Moi aussi, je t'aime Adam Stone. »

Moi qui voulais mettre un peu d'espace entre nous pour éviter qu'il me touche trop souvent, ce n'était pas gagné. Mais ce n'était certainement pas pour déplaire à nos loups. Nous nous embrassâmes une dernière fois avant de sortir de notre maison pour fêter cette joie avec toute la famille.

« Lulu, remercie Luxna de ma part.

– Oh, ne t'en fais pas. Elle voit tout et sait tout, » souffla Lulu avec un sourire énigmatique.


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