Chapitre 22 : Tout reprendre à zéro
La tête reposant contre la vitre de la voiture, Keyra s'était assoupie durant le trajet. Monsieur Mensah gara la voiture et défit la ceinture. Il la contempla un instant, hésitant à la réveiller. Qu'est-ce qu'il la trouvait belle. Si on lui avait dit cinq ans auparavant qu'il tomberait aussi éperdument amoureux que maintenant, il aurait pris cette personne pour une attardée mentale. Mais là, il savait juste que son cœur ne battait plus que pour elle.
— Keyra, Keyra !
Ses paupières bougèrent une fraction de secondes avant que ses iris perçants ne le dévisagent. Il lui sourit.
— Nous sommes arrivés.
La jeune fille se redressa avant de frotter légèrement ses yeux. Fronçant les sourcils, elle considéra un instant l'endroit où ils se trouvaient. Ils semblaient être dans une cour intérieure. Imitant son patron, Keyra descendit à son tour de la voiture et se retrouva face à une grande villa. La porte d'entrée s'ouvrit avant que miss Tancey n'ait le temps de se poser des questions. Une fillette assez potelée passa le seuil à vive allure et sauta dans les bras de son patron. Ce dernier la rattrapa tout sourire.
— Tu m'as tellement manqué, lui apprit la fillette en dévoilant ses dents, manquantes à certains endroits.
— Toi aussi ma grande, répondit monsieur Mensah, son sourire ne l'ayant pas quitté.
Bien que surprise, Keyra observa la scène d'un œil attendri. Qui aurait crû que son patron aussi impassible, pouvait rire autant avec une enfant. Avec lui, elle allait de surprise en surprise chaque jour.
— Qu'est-ce que tu nous as apporté ? l'interrogea la fillette, encore dans ses bras.
— Pour ça, il va falloir attendre, répondit Hermann.
Lorsqu'elle tourna son regard vers la voiture, elle sembla enfin remarquer la présence de Keyra. La jeune assistante fit un salut de la main et lui sourit.
— Oncle Hermann, c'est ton amoureuse ? lui chuchota-t-elle à l'oreille.
Hermann resta interdit un instant. Les enfants avaient-ils vraiment l'œil aussi perçant ? Un rire nerveux s'échappa de ses lèvres. Oui. Lui, Hermann Jonas Mensah était nerveux à cause des dires avérées d'une gamine de six ans. Il tourna son regard vers son assistante qui était restée en retrait.
— Approche Keyra.
La demoiselle s'exécuta.
— Lucie, je te présente mon amie Keyra. Keyra, c'est Lucie ma...
— ... Sa fille préférée, termina la dénommée Lucie.
— La ressemblance est frappante en effet, répliqua Keyra en riant.
Piquée au vif, elle fit signe à Hermann qu'elle voulait descendre. Ce dernier exauça son souhait. Il se pencha vers Keyra afin de lui communiquer une information à priori importante, mais une dame élégamment habillée sortit de la demeure et vint à leur rencontre. Ses cheveux étaient regroupés en un haut chignon. Son ensemble maxi mettait en valeur ses courbes généreuses. Son cou strié lui donnait cependant un air moins strict.
— Hilda !
— Fiston, tu es enfin là ! Je ne t'attendais plus.
Elle s'approcha de lui tout sourire et lui fit une accolade. Réceptif, il embrassa à son tour la dame qui l'avait accueilli.
— Oh ! Tu nous a ramené une invitée ! constata-t-elle.
— Oui. Mais rentrons avant, je ferais les présentations complètes une fois à l'intérieur.
N'étant pas de cet avis, la nouvelle venue se rapprocha de Keyra et lui pris le bras, lui faisant signe de l'accompagner à l'intérieur. L'assistante de Monsieur Mensah jeta un coup d'œil par dessus son épaule afin d'avoir l'avis de son patron, mais la dame qui lui avait pris le bras la faisait déjà avancer.
— Allez rentrons, il ne te fera rien, pas tant que je suis là en tout cas.
La jeune assistante ne pu s'empêcher de sourire. Elle n'aurait pas un lien de parenté avec Alice par hasard ? s'interrogea-t-elle, amusée.
— Allez-y, je vous rejoins, l'informa le concerné.
Keyra acquiesça. Accrochée aux bras de la bonne dame, la demoiselle Tancey pénétra dans l'enceinte. Elle eut à peine le temps d'observer les lieux qu'une horde d'enfants se précipita vers elle. De petites mains vinrent saisir la sienne. Keyra baissa les yeux et vit un petit garçon avec des yeux vairons. L'un bleuâtre et l'autre brun, sa peau avait l'éclat du chocolat et une touffe de cheveux bouclée. Il devait être métis, tout comme elle. La jeune fille lui sourit et s'abaissa à son niveau. Curieux, le garçonnet palpa ses joues et ses cheveux.
— Comme vous êtes jolie !
— Tu l'es aussi, répondit-elle, en lui ébouriffant les cheveux, le visage rieur.
— Dites, quand je serais un peu plus grand, vous vous marierez bien avec moi ?
Surprise par sa demande innocente, Keyra ne put s'empêcher de sourire à nouveau.
— Eh bien...
— Elle est déjà prise ! surgit une voix masculine derrière elle, provoquant un soubresaut dans sa poitrine.
Les enfants, plus énergiques qu'elle ne l'aurait cru, se ruèrent vers le nouvel arrivant.
— Oncle Hermann ! Oncle Hermann ! Oncle Hermann !
Le temps qu'elle tourne le regard vers son patron, le sol le portait déjà, les plus petits s'étant assis à califourchon sur lui. Cette vision suffit à la faire exploser de rire. Jamais elle ne se serait imaginé être témoin d'une telle scène.
— Allez ça suffit ! Laissez-le respirer, intervint la dénommée Hilda, sur un ton ferme.
Pendant un moment, Keyra en était arrivé à oublier sa présence. Obéissants, ils le libèrent enfin et monsieur Mensah se releva.
— Fiston, finis les cachotteries. Dis-nous qui est cette jeune fille.
— Un instant, où sont les autres ?
— Toi vraiment. Aydden, va chercher les plus grand s'il te plaît, demanda la dame au chignon haut.
— D'accord !
Le garçonnet aux yeux vairons s'élança en toute hâte vers les escaliers. Quelques minutes plus tard, il réapparu, suivi de cinq adolescents. En comptant les plus jeunes, ils étaient en tout une vingtaine. Comme ils étaient tous réunis, Hermann se leva de son siège et se posta aux côtés de son assistante, histoire d'en finir avec ce suspens.
— Bien ! Maintenant que nous sommes tous réunis, je vais pouvoir faire les présentations. Hilda, les enfants, je vous présente mon amie Keyra. Keyra, voici ma tante et... Les enfants !
— Bonjour Keyra ! répondirent-ils en chœur.
— Coucouuuu les enfants ! répliqua la demoiselle. Et rebonjour, tante Hilda.
À l'unisson, les tous-petits agitèrent la tête en guise de désapprobation. Voyant sa confusion, Hermann se pencha vers elle afin de lui expliquer.
— Elle a horreur qu'on place le mot Tante devant son prénom. Appelle la Hilda, tout simplement.
— Aaah... euh je ne savais pas... Hilda, excuse-moi.
— Ce n'est rien, répondit la concernée. Sûrement que ce garnement ne t'as pas parlé de moi.
— En effet ! approuva Keyra, un sourire gêné à l'appui.
— Les enfants, c'est quoi la règle ? s'enquit Hermann sur un ton légèrement strict.
Comme s'ils étaient au camp militaire, ils se mirent en rang, du plus petit au plus grand. La benjamine du groupe s'avança vers l'assistante de Monsieur Mensah.
— Ye m'appelle Nadré, et yai cinq ans, lui apprit la fillette.
Elle se mit sur le côté afin de laisser la place à la suivante. La deuxième s'avança timidement et leva les yeux vers elle.
— Je m'appelle Aïcha, j'ai cinq et demi, l'informa-t-elle de sa petite voix, triturant le bout de sa robe.
Elle me fait penser à Alicia.
Tour à tour, ils se présentèrent. Puis vint celui du garçon aux yeux vairons.
— Moi c'est Aydden. J'ai huit ans et je n'ai pas encore d'amoureuse. Et puiiis, j'aime dessiner. Tu veux voir mes dessins ?
— Ce sera avec plaisir, répondit Keyra, son sourire toujours scotché au visage.
— Je sais aussi danser, et chanter et puis je sais...
Un raclement de gorge l'arrêta dans son élan.
— Ce n'est pas le moment de faire l'étalage de ton CV, pense aux autres, lui rappela monsieur Mensah.
La mine boudeuse, il rejoignit la bande de ceux qui s'étaient déjà présentés. Durant toute la durée de la présentation, Keyra n'avait pas pu retirer ce sourire de son visage. Elle les trouvait tellement mignons. Lucie, celle qu'elle avait rencontré en premier semblait être la boute-en-train de service, suivie par Maël, dix ans. Mise à part Aydden qui était métis, il y avait Aline, albinos de peau avec des yeux incroyablement gris. L'ayant à présent entourée, ils l'assaillaient de questions. Les plus curieux ne pouvant s'empêcher de jouer avec ses cheveux.
Un sourire en coin, Hermann l'observa, un air visiblement satisfait sur la face. Ces gosses étaient d'une adorable compagnie. Il ne s'était pas trompé en décidant de l'y emmener. Ils étaient doués pour remonter le moral, même s'ils n'en avaient pas conscience. Hilda lui murmura quelque chose à l'oreille. Le patron de M. Design acquiesça et monta les escaliers. Keyra le suivit du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse de son champ de vision avant de se renconcentrer sur ses agresseurs.
— Comment tu as connu tonton Hermann ?.... Vous vous connaissez depuis longtemps ?.... Pourquoi tu n'es jamais venu ici avant ? .... Ils sont où tes parents ?.... Tu aimes le chocolat ?.... Tu veux venir jouer avec nous ?.... Tu viendras souvent ici ?... Qu'est-ce que tu aimes faire ? .... Où est tata Alice ? ... Moi je sais dessiner...
Keyra ne savait plus où donner de la tête, ni à qui répondre en premier.
— C'est l'heure des corvées ! annonça la tante d'Hermann, un air victorieux sur la face.
Râlants, ils se dispersèrent dans la maison, sûrement pour effectuer les tâches qui leur avait été confié.
— Merci Hilda ! souffla la jeune fille.
— Je t'en prie. Ils sont adorables mais fatiguant.
— J'ai pu voir ça, répliqua Keyra en riant.
— Je reviens, je vais aller superviser ce qu'ils font. Si tu cherches Hermann, il est dans l'une des chambres en haut. Troisième porte à droite, lui indiqua-t-elle.
Keyra la remercia encore une fois et entreprit son périple jusqu'à la pièce en question. Comme la porte était fermée, la jeune fille toqua. Quelques instants plus tard, la poignée s'ouvrit tout doucement. Monsieur Mensah lui fit signe d'entrer. L'index sur la bouche, il lui fit signe de rester silencieuse. Quelque peu surprise, Keyra effectua un rapide check 360° de la chambre et découvrit la raison de sa requête. Couché dans un berceau et enveloppé dans une grenouillère, un bébé semblait y dormir profondément.
— J'ai eu beaucoup de mal à l'endormir, chuchota monsieur Mensah, un air fier sur le visage.
Il se pencha sur le berceau et posa doucement sa main sur le petit corps, de crainte de le réveiller.
— Il s'appelle Eli. Hilda l'a trouvé il y a quelques jours au pas de la porte avec un mot qui disait Prenez soin de lui pour moi. Il avait une forte fièvre à ce moment-là, donc elle a eu peur. Mais je constate qu'il va beaucoup mieux aujourd'hui.
Keyra hocha la tête, ne sachant quoi répondre et se pencha aussi sur le berceau, aux côtés de son patron pour l'admirer de plus près.
— Il est mignon ! chuchota-t-elle.
— Sage surtout, affirma son patron.
Keyra posa les yeux sur son patron. Il le regardait avec une tel fierté dans le regard qu'on eût dit qu'il s'agissait de son propre fils. Il poussa un soupir.
— Quand je le vois, je pense à l'enfant que j'aurais eu si Chelsea ne s'était pas donné la mort, lui confia-t-il. Si elle ne m'aimait vraiment plus, elle aurait dû me le dire. J'aurais compris. On ne peut pas forcer une personne à nous aimer. C'est quelque chose qui se fait naturellement. Elle n'aurait jamais dû inclure mon enfant dans cette histoire.
Il se redressa. En une fraction de seconde, son regard avait changé. Il s'était durci.
— Rien que pour ça, je ne lui pardonnerait jamais son acte jusqu'à ma mort.
En entendant cela, Keyra compris enfin. Au delà de sa trahison, il n'avait pas toléré le fait qu'elle le prive de son droit en tant que père. Jusqu'à présent, c'était elle qui avait bénéficié de réconfort. Et pourtant, il avait aussi eu une vie difficile. Tout autant qu'elle. La jeune fille s'en trouva égoïste. Désolée, elle se redressa à son tour et l'enlaça de toutes ses forces, s'efforçant de retenir ses larmes. Son patron en fut surpris, surtout qu'il sentit sa chemise devenir humide.
— Qu'est-ce qu'il y a ? s'enquit-il.
— Vous avez tellement souffert. Et moi comme une idiote, je n'ai fait que profiter de vous.
Ayant compris où elle voulait en venir, un sourire se dessina sur son visage. Il posa ses mains sur son dos. Lorsqu'il sentit qu'elle s'était calmée, il l'aida à se redresser et prit son visage en coupe.
— Ne t'en fais pas. Ça fait déjà bien longtemps que j'ai réussi à surmonter cela. Je n'aurai pas dû t'en parler de cette manière...
— Non ! Vous avez bien fait ! J'ai été égoïste sur toute la ligne. Pas un seul instant, je n'ai songé à vous.
— Si tu n'arrêtes pas de répéter ça, je vais réellement me mettre en colère contre toi. Et tu sais très bien ce qui arrive dans ce genre de cas.
Keyra pouffa de rire.
— Vous voir ainsi avec ces enfants vous donnent l'air moins crédible à présent, répliqua la jeune fille avec assurance.
Souriant à son tour, il essuya les traces de larmes sur son visage.
— Je peux toujours y remédier, répondit-il.
Un silence naquit entre eux, tout comme la dernière fois au bord de l'eau, il n'était en aucun cas pesant. Mais cette fois, il semblait bien que tous les griefs et barrières entre eux avaient complètement disparu.
— Tu connais mon passé, et je connais le tien. Ça fait de nous des amis en quelques sortes, n'est-ce pas ? suggéra l'homme.
— Des amis ? reprit Keyra, la surprise se lisant amplement dans ses yeux.
— Oui. Je voudrais qu'on reparte sur de nouvelles bases. Je suis Hermann Jonas Mensah, ravi de te rencontrer, débuta-t-il, le plus sérieusement possible.
Keyra fixa la main tendue vers elle pendant un moment et soutint son regard. Elle, et monsieur Mensah, amis ? Même dans ses rêves les plus fous, elle n'aurait jamais crû cela possible. Dans les yeux de son patron brillait une lueur qu'elle ne leur avait jamais connu.
— Enchantée, je suis Keyra Lartey Tancey, répondit-elle en serrant la main qu'il lui tendait.
Pareillement à leur première rencontre, la demoiselle sentit son cœur s'emballer au moment où sa paume rentra en contact avec la sienne. Elle n'en avait pas encore conscience, mais cet acte anodin annonçait les prémices d'un futur différent de tout ce qu'elle avait pu imaginer. Pour la énième fois de la journée, un sourire sincère vint étirer ses lèvres.
— Ce doit être un rêve, pincez-moi !
— Pourquoi tu continues de me vouvoyer ? Entre amis, on se parle librement, lui reprocha-t-il.
— Entendu, monsieur... Je veux dire Hermann.
Il se pencha à nouveau sur le berceau et admira le petit bout de chou qui dormait toujours. Il se sentait comblé. C'était inouï, inespéré. C'était déjà un premier pas qu'il avait entamé vers elle. Lorsqu'elle l'avait serré dans ses bras, il n'était qu'à ça de lui avouer ce qu'il ressentait. Mais il s'était ravisé, et au bon moment. Il ne voulait pas la brusquer. Se souvenant qu'elle ne savait toujours pas la raison de sa présence en ces lieux, Hermann se retourna vers elle et lui fit signe de s'asseoir sur le lit.
— Tu dois sûrement te demander où tu es et qui sont tous ces enfants ! lâcha-t-il en prenant place à ses côtés.
— Eh bien, j'avoue que oui. Je me pose la question. J'ai été à la fois perdue et surprise.
— Excuse-moi, j'aurais dû tout t'expliquer lorsque nous étions en bas.
Il la fixa pendant quelques secondes avant de parler.
— Même si mon enfance n'as pas été des plus faciles, j'ai toujours pensé que j'ai été chanceux. Au moins j'avais ma mère et mes frères à mes côtés, et rien que ça rendait la situation moins difficile. Mais en grandissant, j'ai pris conscience que ce n'était pas le cas de tout le monde. Et surtout, ce qui s'est passé avec Chelsea m'a aussi poussé à réfléchir. Certaines personnes ne sont naturellement pas faites pour être parents. Alors quand je suis revenu au pays, j'ai eu l'idée de construire un endroit où ces enfants pourraient se sentir aimés et protégés. Lorsque j'en ai parlé à mon oncle, sa femme et lui n'ont pas hésité une seule seconde à m'aider. Il m'a mis à disposition cette maison qui était censée être celle de sa retraite lors de ses vieux jours, et sa femme, Hilda a proposé de s'occuper d'eux.
— C'est une sorte d'orphelinat ?
— Orphelinat ? Je n'aime pas vraiment ce qualificatif. Pour moi, c'est plus un abri. Un refuge pour ces gamins, à qui l'innocence de l'enfance a failli leur être arracher. Ce foyer n'abrite pas seulement des orphelins comme tu as pu le constater. D'autres ont été abandonnés par leurs parents soit par manque de moyens, ou en raison de leurs maladies et défauts physiques. Mais la plupart ont dû fuir à cause de la maltraitance dont ils étaient victimes chez eux ou chez leurs tuteurs.
Il poussa un soupir. Il s'était toujours demandé comment de telles personnes pouvaient exister, mais surtout pourquoi ils avaient le pouvoir de procréer. À quoi rimait tout ceci ? Mettre un enfant au monde puis le laisser souffrir. Au moins, ici dans ce refuge, il pouvait être certain qu'ils ne seront pas une épine pour la société.
— Une partie des bénéfices de M. Design revient à ce refuge. Ça nous permet d'assurer leur bien-être, leur éducation et surtout pour couvrir les frais médicaux des plus nécessiteux. Il y a eu des fois où j'ai voulu tout lâcher, mais chaque fois que je pensais à ces enfants et à la souffrance que ma mère a connu, je retrouve la force de me battre. Si je suis aussi intransigeant en tant que dirigeant, c'est parce que je veux m'assurer qu'ils connaissent un meilleur futur.
Et ce, peu importe si les autres vous critiquent, termina Keyra intérieurement.
La jeune fille posa doucement sa main sur la sienne.
— Ils ont beaucoup de chance de vous avoir, vous savez...
Il l'attira à lui et la serra dans ses bras.
— C'est plutôt moi qui suis chanceux de t'avoir à mes côtés, avoua-t-il. Tu n'as pas seulement sauvé l'entreprise, mais aussi ces enfants. S'ils peuvent encore rire et jouer, c'est grâce à toi.
La tête posée contre son torse, Keyra ne pu s'empêcher de sourire. La porte s'ouvrit sur la tante d'Hermann, les contraignant à se séparer.
— Oh désolée, je n'ai rien interrompu j'espère !
— Non pas du tout, répliqua Keyra. Je vais voir Aydden et les autres.
Hilda hocha la tête et s'écarta de la porte pour la laisser passer.
— Les enfants semblent l'avoir adoptés. Et il n'y a pas qu'eux d'après ce que j'ai vu... dit-elle en prenant place là où la jeune fille s'était assise il y a quelques instants. C'est bien la première fois que tu nous amène quelqu'un en dehors de la famille, de surcroît une fille.
— Alice est déjà venue ici il me semble.
— Tu m'as dit qu'elle était ta sœur de cœur. Ça ne compte pas. Elle fait déjà partie de la famille. Dis-moi, cette jeune fille, elle te plaît ?
Hermann hocha négativement la tête.
— Non, c'est bien plus que ça ma tante. Je l'aime, et énormément.
Hilda paru plus que ravie. Depuis combien d'années elle avait rêvé d'entendre ces mots de sa part ?
— Je suis vraiment heureuse de t'entendre dire ça. Si je peux te voir fonder ta propre famille d'ici quelques années, je pense que je pourrais mourir en paix.
— Arrête ! Tu sais très bien que je déteste quand tu parles de mort.
— C'est pourtant une séparation inévitable mon chéri. Mais c'est d'accord, je ne mentionnerai plus ce sujet en ta présence, promit-elle. Bon descendons, c'est l'heure de déjeuner.
S'assurant que le petit Eli dormait toujours, ils sortirent de la pièce afin de rejoindre les autres.
***
— Dites au revoir les enfants !
— Au revoir Keyra, au revoir tonton Hermann ! répondirent-ils en chœur, agitant leurs mains.
— Bye-Bye ! Je vous reverrai une prochaine fois.
Après un dernier salut adressé à ces adorables anges, Keyra monta dans la voiture, aux côtés de son patron. Elle avait passé une superbe journée. Un peu plus tard, Hilda avait pris le soin de lui expliquer en détail comment ils s'organisaient pour s'occuper des enfants. Elle était aidée par trois autres femmes -qu'elle n'avait pas pu rencontrer étant donné qu'elles faisaient les courses pour le mois prochain- qui se relayaient. Vu que son mari était très souvent en voyage et que sa fille avait déjà sa propre famille, elle vivait avec eux la majeur partie du temps.
Quant aux enfants, les plus petits suivaient des cours à domicile tandis que les plus grands donc les adolescents, allaient en présentiel. Elle apprit aussi quelques informations supplémentaires sur eux. Par exemple, Aydden a été abandonnée par sa mère à cause de la couleur de ses yeux. Tout comme Aline l'a été à cause de sa peau. Keyra avait trouvé cela très con. Abandonner de si adorables enfants à cause de leurs différences. Quant à Camel, âgé d'onze ans et autiste, il était le sixième d'une famille nombreuse. Mais en raison de sa santé mentale, ses parents sont eux-mêmes venus lui demander de s'en occuper pour qu'il ait un meilleur avenir. En général, il était très silencieux mais il lui arrivait parfois de provoquer un boucan infernale. Chaque enfant avait en vérité sa propre histoire. Hilda lui avait aussi confié qu'en dépit de leurs différences, -physiques, mentales ou même en âge- ils s'étaient acceptés avec une facilité déconcertante. Ils avaient passé pratiquement toute l'après-midi a jouer. Hilda l'avait toléré en cette occasion spéciale, d'après ses termes.
— Pourquoi tu me regardes comme ça ? s'enquit Hermann en lui jetant un bref regard, avant de se concentrer sur la route.
Keyra haussa les épaules. Cette journée était au delà de ses attentes. D'abord sa rencontre avec les enfants, l'évolution significative de sa relation avec celui qui était désormais son ami, mais surtout, elle avait découvert une facette de lui qu'elle n'aurait jamais soupçonné.
— Merci pour cette journée Jojo !
La voiture s'arrêta brusquement. Keyra porta la main à sa bouche lorsqu'elle se rendit compte de sa gaffe.
Il déteste quand je l'appelle ainsi parce qu'il trouve que ça fait trop enfantin. Ne prononce jamais ce surnom devant lui s'il te plaît.
— D'où tu connais ce surnom ?
Keyra se mordit la lèvre. Il allait se mettre en colère. Pourquoi est-ce qu'elle avait sorti ça tout d'un coup ? Dire qu'ils commençaient tout juste à bien s'entendre.
— Ne dis rien, c'est sûrement Alex qui t'en a parlé, conclut-il.
— Il n'as pas fait exprès, et j'avais promis ne pas mentionner ce surnom devant toi, le défendit-il.
Hermann la fixa un instant avant d'éclater de rire. Il riait aux éclats, comme toute personne ordinaire. Abasourdie, Keyra soutint son regard. C'était de mieux en mieux. Décidément, elle se souviendra longtemps de cette journée.
— Regarde ton air effaré, comme si tu avais commis un crime. Je n'aime pas quand ils m'appellent comme ça parce qu'ils abusent. Toi par contre tu as l'autorisation de m'appeler ainsi si l'envie t'en prend, mais juste lorsque nous ne sommes que tous les deux.
— Ah... Euh.... okay, finit par répondre Keyra en riant elle aussi.
Il démarra le moteur et ils se remirent en route. Comme il avait pris le chemin du marché, Keyra le supplia presque de s'arrêter. Il céda à sa requête et stationna le véhicule. Mademoiselle Tancey en descendit, un sourire sur le visage et lui demanda de l'accompagner.
— La dernière fois quand je suis venue ici, j'ai repéré un stand de tisserands. Et tu sais, la manière dont ils fabriquent leurs vêtements correspondent parfaitement à nos idéaux. Je me suis dit qu'on pourrait donc faire une collaboration, expliqua-t-elle une étincelle dans les yeux. Je comptais t'en parler mais les choses se sont enchaînées, et je n'ai pas eu le temps de le faire.
— Si tu parles de ceux qui sont près des artisans, j'ai déjà essayé de leur en parler. Mais ils sont restés catégoriques. Ils doivent croire que je veux m'emparer de leurs techniques.
Keyra s'arrêta un moment. Monsieur Mensah se retourna vers elle et lui demanda la raison de sa pause.
— Ah zut ! Je parle bien d'eux, répondit-elle. Mais laisse-moi essayer une nouvelle fois. Peut-être qu'ils seront d'accord.
— Franchement dit, je ne pense pas.
— Pessimiste va ! On va faire comme ça, tu restes à l'écart et moi je pars leur parler. Ils seront peut-être réceptifs.
— Si tu insistes, répliqua le sieur Mensah, un sourire moqueur à l'appui.
Confiante, la demoiselle se rendit auprès d'eux. L'ayant reconnue, les hommes semblaient ravis de la voir et bavardèrent joyeusement avec elle. Profitant d'une brèche, elle leur glissa subtilement sa proposition. Ne lui laissant pas le temps d'en dire d'avantage, celui qui a priori était leur chef la stoppa dans son élan. Décidée à ne pas flancher, Keyra leur tint tête en leur expliquant les avantages d'une telle collaboration.
Près d'une demi-heure plus tard, Hermann vit la jeune fille revenir vers lui, un air boudeur couvrant son faciès. Il s'approcha d'elle.
— Laisse-moi deviner, ils n'ont rien voulu entendre.
— Je ne comprends pas. C'est pourtant un avantage pour eux.
Son sourire moqueur naquit de nouveau au coin de ses lèvres.
— Tu es en train de te moquer de moi là ? l'interrogea-t-elle.
— Un peu oui. Je t'avais prévenue, mais tu t'es entêtée. C'est pas bien grave. Je suis quand même ravi que tu aies eu cette idée.
— Je vais réessayer un autre jour, l'informa Keyra.
— Comme tu veux. Allez viens, on y retourne.
Keyra acquiesça et ils prirent la direction de la voiture. À peine ils avaient effectués quelques pas qu'une voix hésitante héla son prénom.
— Keyra !?
_____
4290 mots !
Saaaaaluuuuuuuut la compagnie ! Ouh là ! Ça fait longtemps par ici. *se cache derrière un mur invisible*. J'espère que vous allez tous bien, moi ça va bieeen et je suis super heureuse. Parce que, bah c'est Septembreuuuuh 🤭🤭🤭
Bon, assez d'enfantillage !
. Comment vous avez trouvé ce chapitre ?
. Et, que pensez-vous de l'évolution de la relation entre les deux personnages ?
. Aviez-vous soupçonné cette facette de notre dirigeant ?
. Comment trouvez-vous Hilda ?
. Qui peut bien être cette personne qui les a interpellé ?
Nb : Je vous annonce officiellement que nous sommes dans le deuxième arc du roman. (Il est divisé en trois grandes parties)
Je ne sais pas si c'est dû à l'effervescence de ce mois, mais l'inspiration coule à flots ! Donc, attendez-vous a recevoir des notifications ces temps-ci 😍😍🤓
Sur ce, je vous souhaite de passer une excellente nuit/ soirée/ Journée (tout dépend du moment où vous lisez) mais surtout, un Excellent mois 🎉🎉🎉🎉🎊🎊🎊🎊🎊✨✨✨✨✨✨✨✨🤸🤸🤸🤸🤸🏌️💆
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