Chapitre deux

     En sortant de ma douche, je remarque que j'ai reçu un SMS de Léo me disant qu'il arrive chez moi dans une quinzaine de minutes. Je souris avant de lui répondre un « ok » puis je file dans ma chambre enfiler un boxer. Je remets mon collier, avec mon initiale, autour de mon cou puis mets une paire de chaussettes courtes avant d'enfiler ma tenue pour la soirée : un jean noir et un tee-shirt tout simple blanc à manches courtes accompagné de mes Vans noirs. Simple, mais ça ferait largement l'affaire. Surtout, et le plus important, c'est une tenue dans laquelle je suis à l'aise, ce qu'il vaut mieux lors d'une soirée, comme j'ai pu le constater lors de mes premières soirées cet été. Je me sèche ensuite rapidement les cheveux avant d'essayer de les coiffer mais ils me retombent toujours dans les yeux. Je m'asperge finalement du parfum que Léo m'avait offert à un de mes anniversaires au collège. Il est parfait car il ne sent pas trop fort et j'aime vraiment beaucoup l'odeur masculine. Pour une raison qui m'est inconnu, ce parfum me donne une certaine confiance en moi. En attendant que Léo arrive, je descends au salon et m'assois sur le canapé pour jouer sur mon téléphone.

— Je vais y aller, Valentin, j'entends ma mère crier d'en haut avant qu'elle ne descende. Tu es où ?

— Au salon.

— Je te laisse. Passe une bonne soirée et téléphone-moi pour me dire quand tu reviens, me dit-elle en faisant irruption dans le salon.

— Merci et t'inquiète pas, je lui souris pour la rassurer.

Elle me sourit en retour et lorsque je pense qu'elle est partie, elle me crie de l'entrée :

— N'oublie pas de fermer à clé et de fermer le portail !

Je roule des yeux même si je sais qu'elle ne me voie pas. Quelques minutes après, j'entends le bruit d'un klaxon et je regarde par la fenêtre pour constater qu'il s'agit bien de la voiture de Léo, enfin celle de sa mère. Je me saisis alors de mon portable que je mets dans ma poche arrière avec ma carte de bus et ferme la porte de ma maison à clé avant de les ranger dans ma poche. Je monte ensuite dans le véhicule gris après avoir fermé le portail, comme demandé par ma mère plus tôt.

— Salut, Valentin, me sourit Johanna. Tu vois, Léo, tu aurais pu t'habiller mieux, fait directement remarquer Johanna à son fils avant de démarrer.

Je sais que l'accoutrement de Léo fait souvent débat dans sa famille. Sa famille est vraiment, et bien trop à mon goût, attachée à l'apparence alors chaque détail est crucial. Chaque tenue de Léo est passée au crible par sa mère et sa plus grande sœur, Charlotte. À sa place, je serais saoulé aussi. Heureusement que ma mère n'est pas comme ça avec moi.

— C'est bon, je n'ai plus cinq ans, je m'habille comme je veux, réplique Léo en croisant les bras sur son torse, visiblement agacé de la réflexion.

Je regarde la scène de derrière et je ne peux pas m'empêcher de trouver sa réaction plutôt drôle car très enfantine.

— Non, mais c'est vrai. Tu vas en soirée, pas à la pêche.

Sans pouvoir me retenir davantage, j'explose de rire. En soi, il porte une marinière mais, de là à dire qu'il va à la pêche, sa mère exagère.

— Merci du soutient, me souffle Léo en se tournant pour me lancer un regard mi méchant mi amusé.

Je tente alors mon regard le plus innocent et il sourit avant de se retourner à nouveau.

— Je n'irai pas comme ça pour la soirée suivante et puis c'est tout, conclut Léo.

Cependant, sa mère n'en a pas fini puisqu'elle rajoute :

— Et tes cheveux, n'en parlons pas ! Ça ne ressemble plus à rien, il est vraiment temps que tu ailles chez le coiffeur !

— Et bien justement, n'en parlons pas !

Sentant que Léo commence à vraiment s'énerver, je glisse discrètement ma main jusqu'à sa hanche et la pince gentiment. Il se retourne automatiquement et me sourit tout aussi discrètement. Nous finissons par arriver dans un quartier rempli de voitures sur tous les trottoirs et la mère de Léo nous dépose devant le numéro 28.

— Bonne soirée, les garçons.

— Merci, à toi aussi, Johanna, je dis avant de descendre avec Léo.

Léo lance un rapide signe de main à sa mère avant de se retourner vers moi. Il me regarde alors de haut en bas et je me sens dévoilé sous son regard. Je m'enquiers, un peu gêné :

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Rien, j'aime bien comment tu es habillé, ça te va bien, sourit simplement Léo.

— Oh, merci, je balbutie bêtement, toi aussi.

— Ne te force pas, il lève les yeux au ciel avant de me donner un petit coup de hanche.

— Je ne me force pas. Ta tenue te va bien, même si elle fait très été, je réplique honnêtement et en lui rendant son coup de hanche, évidemment.

Et c'est vrai, même si nous sommes en octobre, j'aime bien sa tenue : il porte une marinière basique blanche et bleu marine avec un pantalon bleu marine aussi, qu'il a légèrement retroussé au niveau des chevilles. Tout ceci accompagné de ses converses blanches et de ses cheveux toujours autant décoiffés. Léo me lance ensuite un sourire magnifique avant d'entrer dans la maison bondée. Je ne connais pas Éric, le gars de la soirée, mais il a vraiment une immense maison où une très forte musique y vibre.

Bien qu'étonné, je sens que Léo m'attrape par la manche et qu'il se rapproche de moi. Comprenant qu'il ne veut juste pas se perdre, je nous mène vers les gars. Cependant, et à ma surprise étant donné que nous sommes en public, Léo ne me lâche pas et je sens des petits picotements me parcourir. Des drôles de picotements, mais pas vraiment désagréables, juste étranges.

— Hey, les mecs ! crie Estéban par-dessus la musique. Faites de la place.

Toutes les personnes présentes sur le canapé se serrent et Léo et moi nous asseyons côte à côte, complètement écrasés l'un contre l'autre. Il laisse sa main sur ma cuisse et je la fixe, ne sachant qu'en penser. Nous avons rapidement une bière entre les mains puis une deuxième, tout en discutant par-dessus la musique. Chris arrive vers nous et a l'air d'avoir déjà pas mal bu. Cela est confirmé par le ton ridicule qu'il prend pour me parler :

— Valentin ! Viens faire une partie avec moi de Beer Pong ! Je sais que tu es très fort !

Je ne sais pas d'où il tient cette information étant donné que je n'ai fait que très peu de Beer Pong dans ma vie. Cependant, je ne cherche pas à comprendre avec Chris et tous ses mensonges sur commande. Je me lève simplement mais je sens qu'on me saisit le bras. Je me retourne alors vers Léo qui arbore des sourcils froncés. Il propose, enfin impose, à Chris avec une certaine autorité que je ne lui connais pas :

— Je vais faire une partie avec lui mais je suis sûr qu'Estéban serait ravi d'en faire une avec toi.

— Génial ! On va faire une partie tous ensemble ! Allez viens par ici, toi. Grrr, glousse le seul blond de la bande en agrippant Estéban qui part avec lui en gloussant aussi.

Waouh, c'est quelque chose quand ils ont bu ces deux-là. Léo les suit et je fais de même. Je me rapproche d'ailleurs de lui afin qu'il m'entende bien malgré la musique :

— Pourquoi tu as réagi comme ça ?

Pour toute réponse, Léo se contente de hausser les épaules et d'éviter mon regard. Sympa...

La partie du jeu d'alcools commence et nous faisons les équipes : Estéban, Chris et une fille blonde tandis que je suis avec Léo et une fille brune. Malheureusement, nous avons perdu, mais j'ai essayé de limiter la casse. C'est-à-dire que j'ai fait en sorte que Léo boive le moins de verres possibles. Je n'ai pas envie pas qu'il soit trop alcoolisé étant donné qu'il le supporte moins bien que moi. Ça n'a pourtant pas l'air de lui plaire car il s'en plaint :

— Tu n'as pas à t'occuper de moi comme un gosse, je sais très bien me gérer tout seul.

— Je m'occupe pas de toi, je prends soin de toi, nuance.

— Essaie pas de rendre ton action mignonne ! il s'indigne bien qu'avec un sourire caché.

🎼 One kiss - Dua Lipa 🎼

Je me contente de lui lancer un clin d'œil avant de me joindre aux autres pour jouer à une action ou vérité. Cette soirée est décidément un cliché des soirées des gens de notre âge. Nous formons en conséquence un grand cercle dans l'ordre suivant : Estéban, moi, Léo, les deux filles du Beer Pong, Caleb, Pauline, Chris et trois autres gars. Danielle, la petite amie d'Estéban, n'a pas pu venir ce soir et nous n'avons pas trouvé Jules, Mattéo et Arnaud dans l'immense maison.

Chris tourne la bouteille et celle-ci s'arrête sur un des trois gars que je ne connais pas.

— Action, répond le brun.

— Ça ne m'étonne pas de toi, Morgan.

Le brun glousse et Chris lui commande d'enlever un vêtement. Et moi, ça ne m'étonne pas de Chris. Le gars enlève alors son tee-shirt et Chris le siffle ainsi qu'une des deux filles. En regardant son torse, je remarque qu'il a un sacré suçon près de sa clavicule. Le gars lance un clin d'œil à Chris qui glousse encore une fois comme un gamin. C'est assez dégoûtant à imaginer. Le brun enchaîne en tournant la bouteille qui vise Léo. Il choisit lui aussi action.

— Bois le reste de la vodka, challenge l'autre débile en lui désignant la bouteille posée sur la table à côté d'Estéban.

— Facile.

Léo se saisit de la bouteille et la vide en seulement deux gorgées. Je ne peux pas m'empêcher de cacher un rire car je sais que, derrière son air fier, il a juste envie de vomir car il a horreur de boire sans diluant. En même temps, qui aime vraiment ça ? Il se rassied ensuite à mes côtés et je lui glisse doucement à l'oreille :

— Ça va ?

Il se retourne et hoche la tête, un sourire débile collé au visage. Je vois bien que l'alcool accumulé depuis le début de la soirée commence à faire effet sur lui et je ne suis pas vraiment ravi, car inquiet. Les tours s'enchaînent et les actions ou vérités aussi. Estéban est à présent, lui aussi, tors nu, Chris s'est fait dessiner une bitte sur le front par Léo, j'ai échangé de tee-shirt avec Léo, ce qui est génial (sarcasmes) puisqu'il est plus petit que moi mais c'est plutôt drôle de le voir un peu nager dans le mien. On a également appris que la première fois de Chris était au collège et un tas d'autres choses toutes aussi futiles mais qui paraissent pourtant vraiment, vraiment, vraiment, amusantes sur le moment. La bouteille continue de tourner et s'arrête pour la première fois sur moi. Moi qui pensais y échapper...

— Valentin ! Action ou vérité ? me demande Estéban, bien trop joyeusement pour ne pas être saoul.

— C'est parti pour une action.

Je souris et mon ami, visiblement un peu trop bourré, me fixe un moment puis Léo avant de crier :

— Roule une pelle à Léo !

À peine les mots sortis de sa bouche qu'Estéban se la couvre, visiblement choqué de ses propres mots. Caleb lance un regard désespéré envers notre, censé, meilleur ami, et je le fixe, crédule. C'est quoi cette action à deux balles ? ! Il se paye notre tête ou quoi ? ! Il a décidément trop bu cet imbécile ! Cependant, et à mon grand désarroi, Chris encourage cette connerie :

— Allez Valentin ! Valentin ! Valentin !

Pour la première fois depuis les paroles d'Estéban, je me tourne vers Léo et comprends tout de suite qu'il n'est pas du tout, mais alors pas du tout, à l'aise. En effet, il ne bouge plus et est même crispé tandis que son regard fuit le mien. N'aimant pas le voir ainsi, je refuse catégoriquement l'action :

— Nan, les gars, sérieux. On est comme des frères, on va pas faire ça.

Aussitôt, Estéban répète « comme des frères » en explosant de rire comme si c'était la meilleure blague au monde. Mais qu'est-ce qu'il a ce soir ? ! Même Léo semble relever ma comparaison car il croise les bras après avoir levé les yeux au ciel. Cette soirée est en train de partir en couilles et je n'aime pas ça du tout.

Heureusement, Mattéo, Jules et Arnaud arrivent pile à ce moment et changent cette ambiance devenue bien trop étrange. De mon côté, je m'éclipse, après avoir fini mon verre d'une traite, sur la piste de danse, me changer les idées et surtout m'éloigner des autres. Je sens l'alcool faire effet étant donné que mon environnement commence à légèrement tanguer. Je danse alors parmi la petite foule de personnes que je ne connais pas.

Au bout d'un certain moment, je réalise qu'une fille danse avec insistance près de moi. Ça devient un peu gênant d'ailleurs alors je ne réagis pas trop. Je réagis seulement quand elle s'approche de moi, bien trop près d'ailleurs, et ça me dérange. Elle vient même me demander à l'oreille :

— Tu t'appelles comment ?

— Valentin et toi ? je réponds automatiquement sans vraiment réfléchir.

— Clara.

Elle me sourit et je le lui rends, pas trop sûr de moi. La fille continue de danser, toujours un peu trop près de moi encore quelques minutes jusqu'à que je sente un regard oppressant dirigé sur moi. Je tombe alors sur celui accusateur de Léo. Ses yeux me transpercent tant que je m'arrête de bouger. Il finit par partir, visiblement agacé, et je m'empresse de le suivre, sans même savoir pourquoi. Il sort de la maison en trombe et je crie son nom pour qu'il s'arrête mais il continue. Commençant à en avoir marre de le suivre comme un sale toutou, je l'attrape par le bras et le retourne pour lui demander :

— Mais où est-ce tu vas ? !

— Je ne sais pas où je vais ! crie-t-il à son tour tout en se détachant de moi. Et toi, tu vas où ?

— Te chercher ? je réponds, confus de sa question.

Nous nous arrêtons alors et Léo s'adosse contre un mur éloigné de la porte d'entrée. Ici, à l'avant de la maison, il y a beaucoup moins de bruit et pas de personnes comparé à l'intérieur. Je me place face au châtain, qui est visiblement contrarié de quelque chose, et lui en demande la raison :

— Tu peux me dire ce qui ne va pas ?

— Mais tout va bien, déclare-t-il sur la défensive.

— Arrête, depuis qu'Estéban a lancé ce stupide gage, tu m'évites.

— Tu rigoles, c'est toi qui m'évites. Et puis, retourne voir ta pétasse ! il cingle sans aucun rapport avec la conversation.

— C'est donc ça le problème ? je soupire, me calmant.

Je passe ma main dans mes cheveux et me calme. Il est jaloux, je crois.

— C'est elle qui est venue et je ne pensais pas que ça te dérangerait.

— Ça ne me dérange pas c'est juste que...

Je le regarde et lui fais que comprendre que si, clairement, ça le dérange. Je ne vais pas le juger ou trouver ça étrange car, si les situations étaient inversées, j'aurais réagi de la même manière, je crois. Peut-être pire même, sûrement d'ailleurs.

— OK, ça me dérange ! il avoue.

Je souris sans réussir à le cacher et insère mes mains dans mes poches. Une partie de moi est heureuse qu'il soit jaloux, car oui, on peut dire qu'il l'est.

— Pourquoi t'étais aussi gêné du gage ? je l'embête tout en me rapprochant de lui.

Ça commence à légèrement m'amuser de le voir inconfortable, surtout quand j'ai l'air d'en être la cause. J'adore le voir sortir de sa zone de confort. Il semble chercher ses mots puis finit par répliquer :

— Je n'étais pas gêné, c'est juste que comme tu l'as dit « on est comme des frères » alors ça serait carrément étrange d'embrasser son frère.

Son intervention confirme le fait qu'il n'ait pas apprécié la comparaison plus tôt. Un peu perdu, je lui demande :

— Mais qu'est-ce que tu voulais que je dise aussi ? J'ai essayé de nous sortir de cette situation parce que je voyais bien que tu n'étais pas bien.

— Parce que tu l'étais peut-être ?

— Mais, je... je n'en sais rien. Là n'est pas la question. D'ailleurs tu n'as pas répondu à la même, je m'agace, confus.

— Toi non plus.

On a l'air de deux gamins de CP et l'alcool ne nous aide sûrement pas. Ne lâchant pas l'affaire, je lui redemande, encore plus proche de lui, tellement proche que nos visages se trouvent à moins d'un mètre l'un de l'autre :

— Alors, t'aurais voulu que je dise quoi si on est pas « comme des frères » ?

Et je ne sais pas d'où me vient ce courage, de le regarder droit dans les yeux et de lui poser cette question. C'est d'ailleurs la première fois que j'ose aller aussi loin. Sur ce coup-là, merci l'alcool.

— Je... je ne sais pas.

Au tour de Léo d'être confus. Nous nous fixons alors dans le noir, seulement éclairés par les lampadaires extérieurs, et son regard me provoque un drôle de frisson. Dans un souffle presque inaudible, je me risque à reformuler :

— Qu'est-ce qu'on est au fond tous les deux ?

Le châtain en face de moi ne répond rien mais ne décroche tout de même pas son regard, qui semble apeuré, du mien. Je sens son souffle contre ma peau et ses lèvres sont dangereusement près des miennes. Léo semble débattre intérieurement de quelque chose un instant avant qu'il ne pose ses lèvres sur les miennes. Doucement, vraiment doucement, comme s'il avait peur. Je suis si surpris de son geste que je n'y réponds pas. Il se recule alors et se colle, comme pour disparaître, contre le mur. Ne réfléchissant pas davantage, j'encadre maladroitement son visage de mes deux mains et relie à nouveau nos bouches. Une chaleur m'envahit instantanément de la tête aux pieds tandis que je me laisse aller dans ce baiser chaud.

Et je ne sais pas si c'est l'alcool ou pas, mais la timidité du premier baiser semble complètement disparaitre. Je me fais vite à la nouveauté de ses lèvres et en profite de chaque millimètre. On se laisse alors aller, nos lèvres se mettant à bouger et ma langue osant même trouver le chemin vers celle de Léo. Ce dernier vient agripper mon tee-shirt et le serrer fortement.

Il va me rendre fou. Je n'ai jamais embrassé quelqu'un comme ça et personne ne m'a embrassé comme ça. C'est juste trop, mais trop bon et trop bien.

Commençant à manquer de souffle, nous finissons par nous décrocher l'un de l'autre. Automatiquement, Léo fixe les alentours et je comprends rapidement qu'il vérifie que personne ne nous ait vus. Je sens d'ailleurs mon cœur se serrer du fait que ça soit sa première pensée alors que la mienne est tout autre. Honnêtement, j'étais tellement obnubilé par lui que j'en avais presque oublié que je me trouvais en soirée.

Léo et moi finissons par nous fixer, mais nous n'arrivons pas à nous regarder plus de deux secondes d'affilée, tous deux gênés. Alors, un silence s'installe pendant lequel je me demande ce qu'on est censés faire maintenant. Personnellement, je veux bien reposer mes lèvres sur les siennes, mais je me dis que ce n'est peut-être pas approprié. J'en sais plus trop rien à vrai dire. De base, je trouvais inapproprié d'embrasser son meilleur ami, mais pourtant je viens de le faire. Le châtain en face de moi semble être complètement passé à autre chose car il propose, d'un ton détaché :

— Ça te dit de rentrer ?

Incapable d'aligner trois mots, je me contente de répondre un simple « oui ». Alors que Léo part de nouveau, je lui demande :

— On ne prévient pas les autres ?

— Bat les couilles des autres.

Indigné de la vulgarité, pourtant rare de sa part, je prends une voix de vieux con cynique :

— Votre vocabulaire, jeune homme !

Léo se contente de sourire et ça détend l'atmosphère bien trop sérieuse et intense qui s'était installée. Soulagé, je lui souris en retour tandis que nos sortons de la propriété. Je prends alors mon téléphone et y lis l'heure : minuit passée.

— On rentre en bus ? je propose.

— Ouais. On peut rentrer chez toi vu que ta mère n'est pas chez toi ?

— Oui, pas de soucis. Espérons qu'un bus arrive bientôt.

Mon meilleur ami hoche la tête tandis que je mets de la musique avec mon portable. Nous faisons alors le chemin inverse d'où nous sommes arrivés afin de trouver un arrêt de bus. Je me mets alors à légèrement danser sur le chemin ce qui fait sourire Léo. Il m'accompagne en chantant et je suis content de vivre ce moment simple mais agréable avec lui. Heureusement, nous trouvons un arrêt de bus mais malheureusement, le bus arrive dans une trentaine de minutes.

Nous nous installons alors sur le banc de l'abri bus puis je pose ma tête contre la vitre derrière moi afin de regarder le ciel. Léo fait de même et s'ébahit devant les étoiles :

— Tu as vu toutes ces étoiles ? C'est vraiment magnifique.

S'il y a bien une chose que j'ai appris sur lui, c'est sa fascination pour les étoiles. Il adore les regarder, comme un petit gosse le ferait. C'est son côté un peu rêveur.

— Ah, toi et les étoiles, je soupire gentiment, une grande histoire d'amour, je me moque.

— Oui et pour toujours.

Le temps est frais, ce qui est normal vu que nous sommes en octobre et que je suis bras nu, en pleine nuit. En même temps, je ne pensais pas avoir froid en soirée.

— J'ai froid, je me plains.

— Je te proposerais bien mon sweat mais après c'est moi qui risque d'avoir froid et je n'en ai pas vraiment envie, m'embête le châtain avant de venir se coller à moi, mais je peux t'offrir ma chaleur corporelle.

Je ris de sa connerie tout en le laissant se coller à moi. Naturellement, je viens passer un bras autour de ses épaules afin de le coller encore plus à moi. Sauf que je m'arrête un petit moment : est-ce approprié étant donné qu'on s'est embrassés ? C'est tout bête pourtant, on le fait souvent, mais avec ce baiser, je ne sais plus vraiment ce que tout ça signifie. Cependant, je suis rassuré quand Léo vient poser sa tête sur mon épaule, j'en souris même. Au bout d'un moment, je me confie, me sentais à l'aise dans la noirceur :

— J'aime bien être dans le noir.

— Pourquoi ?

— Parce qu'on est protégés de la lumière des autres.

J'espère qu'il comprend ce que je veux dire. Après, je ne suis pas sûr de ce que je veux dire non plus. Waouh, faut que j'aille dormir moi au lieu de débiter des conneries. Je profite alors juste de ce moment : Léo contre moi, la nuit et les étoiles qui veillent sur nous et la musique qui nous berce. Malheureusement, mais heureusement quand même au fond, le bus arrive et nous montons à l'intérieur. Après avoir validé nos cartes, Léo et moi partons nous asseoir au fond du bus et allongeons nos jambes sur la rambarde. Quelques minutes de trajet suffisent pour que Léo s'endorme, sa tête finissant même par tomber contre mon épaule. Au début, il se redresse automatiquement puis il finit par complètement la poser sur moi, ce qui me fait sourire.

N'ayant rien à faire, je fixe les trois autres filles dans le bus et celles-ci étaient déjà en train de regarder dans notre direction avec un petit sourire. Je me demande si elles pensent que nous sommes en couple. Aussi étonnant que cela puisse l'être, cette idée ne me dérange pas, bien au contraire même, je crois. Les minutes passent et je regarde le ciel étoilé par la fenêtre. J'appuie sur le petit bouton pour que le bus s'arrête au moment venu et souffle sur le visage de Léo pour le sortir de son sommeil.

— Je suis réveillé alors tu arrêtes ça tout de suite, ronchonne-t-il en ouvrant les yeux.

Je souris, le trouvant adorable ainsi, et il se redresse sur le siège.

— Je crève de faim, on pourra manger en arrivant ?

— Si tu veux, oui.

Le bus s'arrête et je sors du véhicule avec Léo. Nous marchons à peine cinq minutes avant d'arriver dans mon quartier.

— Ça ne te dit pas de réveiller tout le voisinage ? je souris comme un gamin.

Clairement, j'ai trop bu. Mais sur le moment, ce que je fais me paraît amusant.

— Non, Valou' ! tente-t-il de me dissuader mais je continue de sourire. Je suis sérieux !

— Debout ! je crie comme un fou.

Je vois Léo devenir tout rouge sous la faible lumière du lampadaire. Je sais pas ce que j'ai ce soir, mais je le trouve encore plus adorable que d'habitude. D'ailleurs, je me dirige vers lui et me saisis de ses petites joues avec lesquelles je m'amuse. Ça ne dure cependant pas longtemps car mon ami m'arrête, se plaignant que je lui fasse mal :

— Arrête ça toute de suite ou tu vas le regretter.

— « Arrête ça toute de suite ou tu vas le regretter » ! j'imite Léo avec une voix suraigüe et en gueulant.

— Je n'ai pas du tout une voix comme ça ! s'indigne-t-il.

— « Je n'ai pas du tout une voix comme ça ! »

Je continue de l'embêter et on se chamaille alors dans mon quartier de longues minutes. On se fige cependant lorsqu'on entend du bruit : une fenêtre qui s'ouvre plus précisément. Une fenêtre par laquelle une vieille nous braille dessus :

— Ce n'est pas bientôt fini ce boucan ?

Aussitôt, je m'excuse faussement :

— Je suis désolé, Madame, mon ami a trop bu, je parle tout en désignant Léo.

Je me retiens alors de ne pas rire devant la mine affairée de Léo.

— Mais c'est...

— Ne discute pas Léo, on rentre, je lui coupe la parole. Bonne nuit, Madame Dupont et désolé du dérangement.

Je déguerpis alors avec Léo et nous rentrons chez moi. Comme je me doutais, Léo m'engueule dès que nous sommes dans mon entrée.

— T'es vraiment un connard !

— Ose dire que ça ne t'a pas fait rire.

— Ça ne m'a pas fait rire.

— « Je suis désolé, Madame. Mon ami a trop bu », je répète les mêmes mots que j'avais prononcés à peine quelques minutes avant.

Léo échoue dans sa tentative en explosant de rire.

— Tu es vraiment un gros faux cul.

— Ne commence pas à m'insulter ou je ne te donne pas à manger.

— Très bien, je me tais, renonce-t-il en levant les mains en l'air.

— Tu veux bien aller chercher le bac de glace au garage pendant que je téléphone à ma mère ?

— Oui, bien sûr.

— T'es pire que moi pour une fois niveau appétit, je me moque.

— Au fait, elle s'appelle vraiment Madame Dupont ta voisine ? demande Léo juste avant d'aller dans ma cuisine pour se rendre au garage.

— Non, je me rappelais plus son nom et c'est le premier qui m'est venu en tête.

Je l'entends rire tandis que je téléphone à ma mère pour lui dire que je suis bien rentré et elle me prévient qu'elle ne rentre que demain vers midi, ne préférant pas prendre la voiture par « précaution ». On se salue mutuellement puis je raccroche. Léo revient au même moment avec un bac de glace, une bouteille d'eau et deux cuillères à soupe ce qui me fait rire.

— Des petites cuillères auraient suffi, sale goinfre.

Il sourit de toutes ses dents puis nous montons à ma chambre. Nous nous déshabillons alors et j'enfile des vêtements confortables. Je me tourne ensuite vers Léo qui porte toujours mon tee-shirt depuis l'action ou vérité avec son boxer. Remarquant qu'il semble gêné, je m'enquiers :

— Il y a un souci ?

— Vu que je n'ai pas pris de vêtements, je pourrais... euh dormir avec ton tee-shirt ? demande-t-il timidement.

Amusé qu'il soit visiblement gêné, j'en profite :

— Bah non, c'est mon tee-shirt, t'as cru quoi ?

— Ah, désolé. Je ne-

— Je blague, gros débile !

Je pouffe face à ses joues devenues toutes rouges, lui donnant ainsi un air de petit garçon.

— À vrai dire, je trouve que ça te va très bien, je le complimente avec un petit sourire sincère.

Il me sourit et s'installe ensuite sous ma couette. Je le rejoins et allume ma petite lumière après avoir éteint la grande. Nous mangeons alors le pot entier de glace à la vanille tout en parlant puis décidons de nous coucher, commençant à nous endormir. J'éteins la lumière et m'allonge confortablement dans mon lit collé au mur et dos à Léo.

J'ouvre cependant automatiquement les yeux quand je sens un bras passer par-dessus mon corps, se poser sur mon bassin et un corps se coller au mien. J'en ai le souffle coupé mais ne bouge pas d'un pouce. Nos jambes finissent par spontanément s'emmêler et restent accrochées. Je sens automatiquement des frissons dans mon bas ventre me gagner et la chaleur augmenter.

— J'ai compris ce que tu voulais dire à propos du noir, Valou' : dans le noir, aucun regard ne peut nous atteindre car nous ne les voyons pas.

Je souris parce qu'il a effectivement compris ce que je voulais dire. Et là, à ce moment-là, je suis bien, même vraiment bien. Parce qu'il est là, plus proche que jamais.

Je n'ose alors plus bouger tandis que mes pensées, elles, partent dans tous les sens, surtout quand je suis aussi proche de Léo. Je repense alors au baiser parce que, merde, j'ai embrassé Léo, mon meilleur ami ! Je sens que j'en rougis rien qu'au fait d'y repenser. Surtout parce que j'ai apprécié ce baiser, vraiment apprécié. Et c'est tellement étrange de dire ça étant donné qu'on est meilleurs amis.

Je repense alors à chaque fois qu'il me prend dans ses bras, à chaque fois qu'on dort ensemble, à chaque fois qu'on se donne des surnoms et d'autres choses qui me semblent si singulières à cet instant précis. J'en ai le ventre qui se tord. Je ne vais jamais réussir à dormir dans cet état, surtout avec le corps de Léo aussi collé au mien.

Ce dernier ne semble d'ailleurs pas décider à arrêter de me rendre fou car il glisse un baiser dans ma nuque. Je reste silencieux, encore, bien que brûlant de l'intérieur. En plus, à cause de la glace mangée, ses lèvres sont si fraîches qu'elles me procurent des frissons. Ses lèvres reviennent se poser sur ma nuque et je ne peux retenir le soupire de plaisir qui s'échappe de mes lèvres. Faite qu'il n'ait pas entendu...

Le plus affreux dans tout ça, c'est que cet idiot a toujours ses lèvres qui frôlent ma peau quand je le sens s'endormir ! Alors que moi, je peine à respirer correctement, trop perturbé. Ça me rappelle alors encore quand il m'a embrassé et le simple fait de m'en rappeler me contracte le ventre à nouveau. Je n'en reviens pas qu'un simple baiser me mette dans cet état ! Est-ce que je m'en remettrai un jour ? Parce que j'ai l'impression que je ne pourrais jamais oublier ses lèvres sur les miennes. Putain... j'ai embrassé Léo. Cette idée ne me quitte pas et me hante comme un doux poison, dont je ne connais pas l'antidote. Elle m'accompagne même un bon moment et ce jusque dans mes rêves.

Let me take the night, I love real easy
Laisse-moi mener la nuit, j'aime vraiment facilement
And I know that you'll still wanna see me
Et je sais que tu voudras toujours me voir

(...)

Let me love you while the moon is still out
Laisse-moi t'aimer pendant que la lune est encore visible

(...)

Something in you lit up heaven in me
Quelque chose en toi illumine le ciel en moi
The feeling won't let me sleep
Ce sentiment ne me laissera pas dormir
'Cause I'm lost in the way you move, the way you feel
Car je suis hypnotisée par la manière dont tu bouges, la manière dont tu ressens

(...)

I just wanna feel your skin on mine
Je veux juste sentir ta peau sur la mienne
Feel your eyes do the exploring
Sentir tes yeux explorer
Passion in the message when you smile
La passion dans le message quand tu souris
Take my time
Prends mon temps

(...)

See a wonderland in your eyes
Voir un pays des merveilles dans tes yeux
Might need your company tonight
Je pourrais avoir besoin de ta compagnie ce soir

(...)

One kiss is all it takes
Il suffit d'un baiser
Fallin' in love with me
Pour tomber amoureux de moi
Possibilities
Des possibilités
I look like all you need
Je ressemble à tout ce dont tu as besoin

(©️lacoccinelle avec quelques modifications personnelles)

On se retrouve une semaine plus tard, comme prévu, pour le deuxième chapitre. Alors, qu'en avez-vous pensé ? Du baiser ? De la réaction de Valentin ? Et de celle de Léo ?

Je vous dis à la semaine prochaine pour la suite.
Portez-vous bien d'ici-là !

L :) ⭐

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