episode HISTOIRE n°2: la première sortie


Lorsqu'elle eût atteint ses quinze ans, Morgane retourna dans un étrange état. Elle s'asseyait calmement devant sa fenêtre et songeait toute la journée. Elle prêtait à peine attention à Alzaïr et lorsque des hommes venaient la chercher, elle ne réagissait même pas à leur présence.

Elle ne passait même pas son temps à étudier et ne lançait aucun objet pointu vers les murs. Parfois, on l'entendait soupirer. Mais c'était bien la seule chose que l'on entendait d'elle.

Lorsque venait le temps de manger, elle touchait à peine à sa nourriture et n'entrait même pas dans la salle-à-manger. Elle restait assise devant sa fenêtre et mangeait là.


Alzaïr était très inquiet : elle était toujours plutôt joyeuse, ou énervée. Son calme était presque effrayant. Etait-elle tombée gravement malade ? Devenait-elle folle, ainsi enfermée ?

Alors, un jour, il s'assit à côté d'elle et l'imita. Aucun d'eux ne bougèrent pendant plusieurs heures. Il regarda par la même fenêtre le même paysage et s'identifia à la princesse. Étrangement, il comprit. Était-ce parce qu'il connaissait trop bien sa protégée ? Était-ce parce qu'ils traversaient la même chose ?


Après s'être occupé du deux-cent-trente-septième intrus, il revint près de la princesse sous sa forme bestiale. Il la porta entre ses pattes, mais elle ne réagit pas. Il sortit par la grande fenêtre en volant, la jeune fille toujours entre ses griffes. Cette fois, on pouvait entendre un léger cri.

Il vola jusqu'à dépasser la forêt qui les entourait, puis posa la princesse à terre. Une fois sur ses pieds, elle regarda autour d'elle, faisant tournoyer sa longue robe. Ainsi, elle avait l'air d'une adorable enfant appréciant le monde pour la première fois.

« -Je pensais que tu voudrais voir l'extérieur. Tu étais dans un étrange état, récemment.

-Je te remercie, Alzaïr, mais n'est-ce pas interdit ?

-Je braverai n'importe quel interdit si c'est pour te voir sourire de nouveau. Et puis, je suis fatigué d'obéir à toutes ces règles. »


Elle regarda le paysage. De la colline où ils étaient, on voyait plusieurs petits villages, le château dans lequel elle était née et, plus loin, la forêt d'où on pouvait voir le haut de la tour.

« -Et si un prince arrive durant notre absence ?

-Je m'en doute. Il y en a déjà eu deux, aujourd'hui. Le premier s'est enfui lorsque je lui ai grogné dessus...

-Merci de m'avoir fait sortir d'ici. Tu es le meilleur dragon qui existe ! »


Il lui sourit de tous ses crocs.


« -Je ne suis pas un bon dragon, si je t'ai laissée sortir.

-Alors tu es le meilleur ami qui existe. »


Elle lui caressa la tête tout en contemplant la vue. Alors, l'extérieur ressemblait à cela... Elle aurait aimé aller en ville, parler à d'autres personnes, approfondir ses connaissances, aller dans des tavernes... Comme n'importe quel citoyen... Mais, pour le moment, elle se contenterait de la colline. Elle pourrait toujours discuter avec les animaux qui s'y baladaient.

Alzaïr ferma les yeux en ronronnant,comme un chat. Il appréciait les caresses, lorsqu'il était sous cette forme. Il n'y avait pas droit en tant qu'humain. Il se laissa aller, le cœur léger après avoir vu la princesse si heureuse.


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