Chapitre 6 - Traverser l'orage.
Le ciel est couvert.
Je stressais.
La salle est sombre.
J'avais peur.
Il régnait le silence.
Je m'attendais au pire.
Dans cette atmosphère malsaine.
— En gros vous êtes exclue.
Les battements contenus dans mon cœur se relâchèrent. Les gouttes de sueur perlèrent. Toute poltronne devant la silhouette du sous-directeur.
Il roula les yeux.
— Enfin, temporairement, continua t-il.
Il balança mon dossier sur son bureau et soupira longuement en faisant tourner son fauteuil.
— Bref c'est ton dernier avertissement. Tu reprendras les cours dans deux semaines. Si tu ne viens pas après ce délai, tu seras renvoyée définitivement. Même chose si tu poses encore problème, m'informa le sous-directeur.
Je levai la tête et croisai son regard. Il était plein de dérision. C'était tant mieux. J'étais habituée aux comportements méprisants en mon égard. J'en étais même à l'aise avec. Ça suffisait amplement à me donner courage. À afficher un sourire aussi cynique que mes expressions.
— Merci M. Baloreau , croyez moi ça ne se reproduira plus.
— ...
Il fit un signe pour m'indiquer de disposer et je sortis.
Après avoir refermé la grande porte en verre peinturé, je m'adossai sur elle. Puis me laissai glisser tout le long de celle-ci pour me retrouver assise au sol ; le regard fixé au mur blanc en face de moi.
Je ne bougeai pas. Cela m'apaisait. Et je devais être calme pour faire face à la personne qui s'avançait dans les couloirs.
Cette jeune femme à la peau aussi blanche que la neige. Un visage parfait taillé à la serpe. Une belle silhouette féminine qui pourrait faire grimper le cœur de tous les hommes. Des yeux noirs ramenant sa beauté à la fatalité. Encadrés par des cheveux teintés blonds laissant encore des racines brunes avec une coupe au carré.
Mon corps tout entier frissonna.
Ma mère.
Car ma mère était là.
Sa présence totale comme son regard froid.
— On rentre.
—...
Elle s'en alla et je la suivis machinalement. Traversant les couloirs remplis d'yeux et superstitions.
N'ayant en commun que nos bruits de pas vers le parking. Entre moi et ce seul être qui pouvait me faire peur.
— Monte, me lança t-elle en débloquant les portières de la voiture.
J'exécutai comme à mon habitude et elle démarra.
Même cette pluie, qui avait l'habitude de me divertir et de combler le silence ne tomba pas.
Nous restâmes là. Me demandant si de sa bouche elle allait au moins me réprimander pour mon exclusion. Mais rien.
Avec Prime derrière qui me chuchotait des horreurs. Se moquant encore instinctivement de ma situation. Cette ombre qui ne cessait de me suivre se réjouissait à cela.
— Je dois te dire quelque chose d'important...
Si j'avais su ce qu'elle allait me dire...
— Je vais me marier.
...Jamais je n'aurais voulu qu'elle me dise un truc.
— Quoi ?
— Je ne me répèterai pas.
— Qu'est ce que tu viens de dire ?
Puis d'un coup elle arrêta la voiture.
— Sors.
—...
Je me crispai.
— Sors de là !
Je sortis malgré moi. Mon corps tout entier tremblait.
— Penses-tu vraiment que je blague ?
— ...
— On en reparlera plus tard. Pour l'instant rentre seule.
Elle redémarra la voiture, me lança un dernier regard avant de partir.
— Non...
Je s'effondrai par terre.
— Mademoiselle est ce que ça va ? demanda un passant.
— Non...non...non pas maintenant...je ne veux pas !
Je vis cette ombre me rire. Une frénésie inconnue m'envahit. Je criai. Très fort. Je hurlai à en couper mes cordes vocales.
— Mademoiselle calmez-vous !
— JE NE VEUX PAS ! J'EN AI PAS ENVIE !
À ma voix certains enfants se mirent à pleurer.
— Mais c'est qui cette folle ?
Les gens me fuirent. Je restai seule sur le sol humide.
Un homme me frappa au visage. Parce que j'étais devant son magasin.
Alors je partis.
Alors je fis ce qu'on me dit.
Faillant à me faire cogner et insulter par les conducteurs lorsque je ne respectais pas les codes.
L'impression que la réalité était onirique. Me répétant à chaque fois le mot le plus réel jamais appris. Pourquoi ? Pourquoi j'ai obéis ? Pourquoi j'ai rien fait ?
Je voulais juste savoir pourquoi ? Qui me répondra ? Au diable les obstacles si je devais rester dans une pluie sans beau temps.
Alors juste pourquoi ?
***
J'ai les yeux gonflés.
Je rentrai enfin. Il y avait personne à première vue. Ce qui était étonnant vue que ma mère était rentré avant moi. J'ai regardé un de ses dessins picturaux qu'elle avait l'habitude de faire sur les murs avec des bombes de peinture.
C'était une fille qui parlait en souriant avec son amie ; mais derrière elle son amie lui détruisait en lui griffant dans le dos.
— C'est moche pas vrai ?
Je me retournai. J'avais pourtant pensé n'avoir vu personne. Un homme dans la quarantaine. Ni gros ni mince. Disons doté d'un bon embonpoint. Un rouquin aux yeux noirs plus profond que le néant.
Depuis quand est ce que ma mère laissait entrer ses hommes à la maison quand elle n'était pas là ? Était-ce lui ?
— Qui êtes vous ?
Celui qui me l'avait volé ?
— Pourquoi me vouvoies-tu ?
— Répondez à ma question.
Il sourit. Il se rapprocha de mon oreille. Avec ce sourire. Et murmura :
— Ta mère ne serait pas contente de l'accueil que tu me réserves. Imagine un peu...qu'est ce qu'elle te ferait si elle savait que tu m'as mal accueilli hein ?
— Mais je ne vous connais même pas.
— Tu en as peut être une petite idée non ? Dans le cas contraire raison de plus pour y remédier.
Je serrai les dents.
— Je...je suis désolée.
Son sourire s'élargit. Il me lança un regard pervers.
— Fais moi visiter ma maison.
Je me mis à trembler. C'est cet homme ? Celui qui m'a pris mon père ? Qui a volé sa place ? Il me faisait autant peur que ma mère. Mes jambes en flagellaient.
— Je ne voudrais surtout pas me répéter.
— D'ac...d'accord...
Je fis ce qu'on me dit. Même si c'était étrange. Vu que le bas de l'appartement n'avait qu'une seule pièce. Une grande pièce. Contenant le salon et la cuisine. Séparés par un comptoir.
Alors j'allais à l'étage. Il y'avait quatre pièces. La salle de bain, la chambre de ma mère. Ensuite ma chambre et celle de mon père. Les lieux inaccessible aux clients de ma mère était la mienne et la chambre de mon père.
— Vous ne devez pas y entrer, dis je devant ma chambre.
— Et pourquoi cela ?
— C'est interdit.
— Ho ho j'y crois pas. C'est ma maison ici ! J'ai le droit d'aller où je veux ! Alors on entre petite conne.
Il me donna un coup de pied dans le ventre se qui me propulsa vers la porte qui s'ouvrit à l'impact. Je tombai par terre.
— Je vais enfin pouvoir m'amuser !
Je relevai la tête.
— Pourquoi avez vous fait ça ?
— Je fais ce que je veux avec ma maison. Ce qui est à l'intérieur y compris.
— Qu'est ce que vous me voulez ?
Il ne me répondit pas.Il s'approcha vers moi. En se léchant les lèvres. Détacha sa ceinture. Je m'empressai de me lever malgré ma douleur au ventre. Il me plaqua par terre en riant.
— Je suis désolé gamine... Ça fait un moment que Déborah m'abandonne soit disant parce qu'il faut le faire après s'être unis...mais tu vois je vais épouser ta mère. Deborah est désormais ma femme ! Et tout ce qui appartient à Déborah m'appartient aussi !
— AU SECOU...! tentai-je en essayant de me lever.
Il ferma ma bouche. Et sortit son phallus.
Je tourna le regard. Prime, elle était encore là. C'est de sa faute. Je veux pas que ça se passe comme ça.
Je lui pressait les testicules. Il gémit de douleur. J'en profitai pour me libérer. Je lui balança un vase. Il le rata. Je me précipitai à la fenêtre.
— AU SECOURS !
Il m'attrapa le bras et m'envoya violemment vers le mur. Cela rouvrit ma blessure à la tête causé par Mme. Lorraine. Je tombai par terre. Il se mit à califourchon sur moi rouge de colère. L'homme se mit à m'étrangler.
— Espèce de putain ! Tu n'es qu'une sale pétasse qui va finir comme sa mère ! Et encore tu n'es même pas capable de le foutre !
Je suffoquai.
Est ce que mon esprit me jouait des tours ? Qu'avais je bien fait au destin ? Pourquoi cela se passe t-il toujours comme cela ?
Allais-je vraiment finir comme ça ? Prime m'avait-elle menti ? Elle s'était bien jouée de moi. Mais pensées tombèrent sur Wayne.
Je ne lui avait même pas dit que je l'aimais. Putain. C'était vachement ironique. La fille qui mourrait avant la mère.
Ça y était. Etais-je vraiment détruite ? Je pensais bien que oui.
Mais comme par enchantement j'entendis un coup de feu.
L'homme cria.
J'ouvris les yeux. Il se leva rapidement. Il y'avait du sang.
— Putain de bordel fait chier ! Déborah t'es folle ? Espèce de tarée !
Je équarquillai les yeux lorsque je vis ma mère. Avec le regard plus sombre jamais vu chez elle.
Elle tira un deuxième coup. Puis un troisième. Le sang éclaboussa sur mon visage. Il trépassa.
Mais elle continua à tirer sur ce corps inerte. Elle s'acharna avec rage. Jusqu'à ce qu'il devienne un ramassis de putain de boucherie. Je restai choqué devant ce bordel.
— Des conneries.
— ...
— Ma vie est remplie de conneries !
Ma mère lâcha son arme. Elle cria en se prenant les cheveux.
Je pris peur et sortis de la chambre.
Je trébucha dans les escaliers. Mais me rattrapait de justesse. Mon corps tout entier tremblait. Il ne m'obéissait plus je me mis à pleurer.
L'homme m'avait laissé tranquille. Et il était mort. Devrais-je être heureuse ?
Comment fallait-il que je me sente ?
Que venait-il de se passer ?
***
— C'était de la légitime défense.
— On a aucune preuve que Bertrand Laplace voulait la tuer.
Il y'avait deux policiers qui ont été interpellés par les voisins lorsqu'il ont entendu des coups de feu. Ils parlaient avec ma mère au salon.
J'étais dans la chambre de mon père. Je serrai sa tenue de l'armée contre moi.
— Et votre fille elle en pense quoi ?
— Ma fille ?
J'entendis des bruits de pas vers moi.
— Blom ? Tu veux bien venir quelques secondes ma chérie ?
Je frissonnai en l'entendant parler.
Je fis ce qu'on me dit.
— Votre mère déclare que le dénommé Bertrand Laplace a tenté de vous tuer.
Je regardai les policiers, puis regardai ma mère. Je n'avais rien fait. C'était pas à cause de moi.
— C'est vrai. Il voulait me violer et...quand j'ai voulu me débattre il s'est mis à m'étrangler. Après ma mère a surgi et a tiré.
— Combien de fois elle a tiré ?
Elle me fixa.
— Elle...elle a tiré une fois mais il s'est dirigé vers elle. Elle a dû tirer encore pour le neutraliser. Si elle n'avait pas été là...je serai morte, résumai-je.
Les deux agents se regardèrent ne sachant quoi dire.
Ma mère sourit.
— Vous avez entendu ? Je n'ai fait que protéger ma fille adorée. Si vous doutez encore, demandez aux passants. Eux aussi ont entendu Blom crier.
— Vous aurez un procès quand même. On mènera des enquêtes pour savoir si ce que vous dites est vrai. Si c'est le cas vous finirez avec une amende.
— Merci messieurs ! À la prochaine fois !
—...À la prochaine fois..., soufflèrent-ils méfiants.
Ils partirent très vite.
— Vas dormir, c'était une longue journée, prononça t-elle ayant déjà changé de ton.
Ma mère se retourna pour aller à l'étage.
— C'est tout ?
Elle s'arrêta.
— Tu as dit quelque chose ?
— C'est vraiment tout ce que tu as à me dire ? m'enquéris-je.
— Oui.
Je m'énervai.
— Moi j'ai des choses à dire ! Tu passes ton temps à faire la pute en longueur de journée puis tu viens me balancer en pleine tronche que tu t'es casé ? J'ai failli mourir à cause de toi et tu me dis d'aller dormir ?
Elle soupira. Elle pris un regard froid. Elle changea aussi sa voix.
— Et alors c'est quoi le blème au juste hein ? Tu ne me sers à rien bordel. Arrête de chouiner. Le jeu est terminé va dormir.
Elle se tourna et s'en alla vers sa chambre.
Je restai dans le salon.
Je n'arriverai plus jamais à rester dans la chambre. Je ne peux pas non plus salir celle de mon père.
Je ne voulais plus rester là. Je voulais partir. Prime me regarda fixement.
Qu'est ce que t'attends ?
Ce que j'attendais...J'attendais quoi ?
***
Il pleuvait. C'était un orage nocturne. Mais j'étais prête. Cela n'allait pas m'empêcher d'avancer.
Je voulais survivre. Mais on ne le faisait que par ses propres moyens. Après tout, tout le monde penser à fuguer dans sa vie
J'avais pris comme seul bagage mon violon. J'avais volé de l'argent dans les tiroirs.
Le vent soufflait fort. Je n'avais pas de parapluie. Mais j'étais prête.
La vie c'est comme une barque. Lorsqu'il n'y a pas de vent on avance pas. Lorsque la tempête arrive on avance.
J'étais décidé à avancer. Je le voulais. C'était le moment. Et puis je ne manquerais à personne. Ah non...
Manquerai-je à Wayne ? Tant pis. Je m'étais assez posé de questions dans cette vie.
Je vis une église. Une catholique. Elle était très haute. Il y'avait une croix rouge dessus.
Et si c'était mon point de départ ? Plus de questions. C'est mon point de départ.
J'entrai.
C'était vide. Il n'y avait personne. Je pourrais m'abriter quelques heures.
Il y'avait beaucoup d'images sur les fenêtres. Des représentations du Christianisme. C'était inspirant. J'avançai vers la table du prêtre. Une magnifique peinture du Christ se dressait derrière moi.
J'avais envie de jouer. Ça fait depuis l'incident du VERSACE que je ne l'ai plus fait.
Je vérifiai qu'il n'avait vraiment personne.
Je sortis mon violon. Je l'avais protégé de la pluie.
Il n'y a pas de jury. Personne pour me critiquer. Je me préparai pour mon morceau fétiche.
J'avais pensé qu'il n'avait personne.
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