THOMMY: QUATRE

Thommy surveillait son bistrot, assis derrière le comptoir, la tête plongée dans ses pensées.. Cela faisait maintenant trois jours qu'il avait présenté Bakari à Marge, trois jours qu'il s'était disputés avec Irène, et surtout trois jours qu'elle lui manquait cruellement. Le jeune homme n'avait pas vraiment compris à quel moment précis il s'était épris de la jolie blonde, mais le fait était qu'elle occupait constamment ses pensées. Il s'inquiétait pour elle. « Qui peut bien être l'homme qui la poursuivait ? » Il avait beau retourner cette question dans tous les sens dans sa tête, elle restait sans réponse. Papy Macphy entra, sortant le jeune serveur de sa réflexion. Il s'approcha de lui et lui servit son steak avec un sourire. Le vieil aveugle bougonna :

— Qu'est-ce qu'il t'arrive, Thommy ? D'habitude, tu es aussi bavard qu'une pie...

— Tout va bien, je suis juste un peu fatigué, répondit-il.

— Tu mens très mal, gamin... Alors, raconte tout à ton meilleur client, il n'a rien d'autre à faire de sa journée, de toute façon.

— C'est une histoire de fille, Papy, ce n'est plus de votre âge !, rigola Thommy,

retrouvant un peu de sa bonne humeur.

— Chenapan ! J'ai été jeune avant toi, tu sais ! J'étais même très séduisant, autrefois.

Voyant son meilleur client le regard perdu dans les bribes du passé, le jeune homme sourit. « Séduisant ? » Il avait vraiment de la peine à l'imaginer. Mais il tenta tout de même :

— Alors vous pourriez peut-être m'aider à décrypter une de mes amies ?

— Ça, mon jeune ami, j'ai bien peur de ne pas être assez qualifié pour cette lourde tâche, marmonna l'ancien. J'étais certes séduisant jadis, mais pour ce qui est de comprendre le fonctionnement du cerveau féminin, je ne suis pas plus avancé que toi. Il faut croire que seules les femmes peuvent se comprendre entre elles.

Entendant cela, le jeune serveur faillit lâcher la carafe qu'il tenait dans ses mains. « Mais bien sûr! Pourquoi n'y ai-je pas pensé plus tôt ? » Il s'écria, avant de courir vers le téléphone :

— Vous êtes un génie, Monsieur Macphy !

— Dire qu'il a fallu huitante ans pour que quelqu'un le sache, railla le vieillard.

***

C'est ainsi que Thomas se retrouva, une heure plus tard, assis en face de Marie-Edwige, dans le petit salon de la superbe demeure des de La Vallière. La jeune fille avait écouté son histoire avec un calme olympien, si bien qu'il se serrait presque cru chez un psy.

— Alors, qu'est-ce que je dois faire, d'après toi ? demanda-t-il. — Je ne sais pas trop, admit-elle, je ne suis pas une experte.

— Oui, mais tu dois quand même avoir quelques amies filles !

La jeune noble baissa les yeux et le jeune serveur comprit que des amies, elle n'en avait pas tant que ça. Mais il ne se laissa pas abattre pour autant.

— OK, bon alors dis-moi comment toi tu aurais voulu que je réagisse !

— Je ne sais pas. Mais en tout cas pas comme tu as réagi. Tu n'étais pas assez sérieux !

— Mais si je suis trop sérieux, ça ne va pas non plus...

— Je ne te demande pas de faire une tête d'enterrement sans relâche, juste d'arrêter de tourner autour du pot !

Le jeune homme n'y comprenait plus rien. « Moi qui croyais que les filles aimaient qu'on les fasse rire. » En face de lui, Marge rougissait de plus en plus. Enfin, jugeant sans doute son acolyte trop lent à la détente, elle reprit :

— Tu m'as l'air de bien l'aimer, cette fille, alors il faut le lui dire et après tu pourras lui faire tous les gags plats que tu veux.

— OK. Mais il reste quand même un problème...

— Lequel ?

— L'homme de la ruelle. J'ai peur qu'il s'en prenne de nouveau à elle.

Marie-Edwige le fixa quelques instants, réfléchissant. Thommy fut touché qu'elle prenne ses problèmes à cœur. « Après tout, rien ne l'y oblige. » Soudain, il lut dans les yeux de son amie la même détermination sans faille qui l'avait étonné quelques semaines plus tôt.

— Je sais ce qu'il faut faire... Tout d'abord, il faut tout savoir sur cet homme et sur ses motivations, puis lui faire peur pour qu'il arrête. D'une manière ou d'une autre !

— Dis, tu n'étais pas censée être gentille et naïve, toi, à la base ?, plaisanta Thommy. Elle lui lança un regard si noir qu'il préféra ne pas insister. Après tout, cette fille était machiavélique. 

« Elle n'a pas fini de nous étonner », songea-t-il avec raison.

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