SIMON: UN
Le garçon qui avait les mots dans le coeur.
Simon regarda son reflet dans la porte du four et soupira. Il en avait marre de devoir se faire lui-même la cuisine. À cet instant précis, il aurait tout donné pour avoir une mère qui lui préparerait de bons petits plats et un père qui aurait fait un œuf au plat ou même une pizza surgelée. Ou l'inverse. Mais il n'en était rien. Car c'était Fred qui faisait les courses et Simon qui tentait de cuisiner les aliments que son frère lui apportait. C'était comme ça depuis presque un an. Depuis que ses parents passaient plus de temps en voyage qu'à la maison. Depuis qu'il avait arrêté de parler, aussi. Le jeune homme passa sa main dans ses épais cheveux roux. Frissonnant, il remarqua qu'il ne se souvenait même plus du son de sa voix. Il l'avait délaissée depuis trop longtemps.
Il s'approcha du frigo et en sortit des œufs et une brique de lait. « Voyons voir ce que je peux faire avec ça. » Il cassa les œufs dans la poêle et se mit à les touiller avec une spatule. Pendant qu'il accomplissait ce geste mécanique, il pensa à ses nouveaux coéquipiers. Il aimait bien Bakari, son côté posé, sa force tranquille. Mais il avait vite compris que le grand Noir avait aussi de temps en temps besoin de repos, de penser à lui-même. Il l'avait senti à leur première rencontre, c'est pour ça qu'il lui avait demandé de lui raconter quelque chose. Simon était extrêmement perspicace et observateur. Il comprenait très vite les gens. Parfois mieux qu'il ne se comprenait lui-même.
C'est ainsi qu'il avait vu qu'Yvan était homosexuel. Personne ne le lui avait dit, mais pourtant il savait. Il ne pouvait s'empêcher de se sentir mal pour lui, être gay dans une famille russe, ça ne faisait pas bon ménage. De plus, le jeune homme blond semblait triste de sa situation et Simon ne pouvait rien faire pour l'aider. Il sentait bien qu'Yvan ne le supportait que par nécessité et il n'avait eu aucun mal à comprendre pourquoi. Il était jaloux. Le rouquin secoua la tête et ordonna ses pensées, fronçant les sourcils. « Il n'a aucune raison d'être jaloux de moi. Je suis invisible. »
Il rajouta du poivre dans sa poêle et reprit ses réflexions. Thommy était un gars super, même si Simon trouvait parfois son humour assez lourd. Il était aussi totalement accro à sa copine, ce qui amusait beaucoup le jeune roux. Irène en faisait ce qu'elle voulait. Jackson, quant à lui, était celui qu'il parvenait le moins à cerner. Ce n'était pas un mauvais bougre, mais il semblait porter parfois une charge trop lourde sur ses épaules. S'ajoutait à ça un caractère bien trempé et colérique. Honnêtement, Simon avait un peu peur de lui parce que, contrairement aux autres, il n'arrivait pas à prévoir ses intentions et cela le déstabilisait.
Quant à Marge... Le cœur de Simon battit plus fort. Elle le fascinait. Elle était incroyable. Orgueilleuse, fière, parfois tranchante, mais avant tout persévérante. Elle ne baissait jamais les bras et Simon était très admiratif de ce côté de sa personnalité. Après deux semaines, il avait aussi compris une chose essentielle à propos d'elle. Elle était très sensible sous sa carapace remplie de défauts. Simon avait la conviction que si elle n'avait pas été élevée dans une famille où l'argent et l'honneur comptaient plus que les sentiments, elle aurait pu être une fille très douce. « Elle est comme moi », se dit-il. « Brisée par une société. » Il sortit l'omelette de la poêle et la posa sur une assiette. « Sauf qu'elle, elle se bat pour s'en sortir. »
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top