Épilogue de la plénitude

{C'est vrai que c'est facile d'écrire pour ne rien dire. Ne rien dire, dénoncer ou peut-être ressentir. Ecrire pour avoir une soi-disant inspiration artistique. Se sentir plus haut que tout, toucher quelque chose de mystérieux, de sacré. Penser à toutes ces brebis perdues, suivant ce que des gens leur ont enseigné. Autant d'hommes et de femmes sans visages qui ne comprendront jamais le bonheur qu'il y a dans la création. Prendre le vide et en faire de l'art. Tenter de prendre cette purée étrange pour l'ordonner à son goût, inédite vision d'une vie prétendument originale. Ainsi, en utilisant des mots compliqués, dénoncer l'outrecuidance de la société d'aujourd'hui sans même comprendre le fond de ce que l'on pense. L'urgence de devenir un guide pour le monde fait son trou dans le cerveau de l'artiste. On se sent investi d'une grande tache envers cette humanité, la notre doit être envoyée plus loin dans les étoiles. Il y a une certaine jouissance à se sentir grandir, à lever ses bras pour toucher les nues plus vite. Et tout là-haut, enfin, on pourra regarder ces petites bêtes se battre entre elles. Regarde les de haut, baisse le regard sur ta propre conscience. Souris doucement et accorde leur de l'empathie. Ils ont bien de la chance d'avoir l'artiste pour les guider dans leur âme. Qu'ils soient bénis de sa plume, elle purifiera ce monde de toute l'ignorance. Dans le ciel, les nuages orgueilleux embrume son cerveau. Il rit, seul dans la salle de son trône, ce roi écrivain de sa propre vanité. Il savoure cette vie de vénération. Qu'il est agréable de vivre sous le regard admirateur des gens. Ce qui est beau dans tout ça, c'est l'aveuglement des autres. Ils regardent la magie de la création inspirante, les yeux écarquillés par la naïveté. Reculant dans leur propre idée de la beauté et de l'harmonie, ils sont le paradoxe même. Ils perdent l'avance et le recul en même temps. Dans une coordination presque parfaite, ils s'étonnent et crient au génie. Ils affluent aux pieds de l'artiste et, à ses chevilles, ils ne pensent pas pouvoir grimper. Ils se livrent tout entiers à son jugement, marche dans ses traces de pas.}

Mais au fond, quelle est la démarche dans tout ça? L'écriture, hein, à quoi ça sert? La création, tout ça, le message qui percute ou la beauté du mot?

Quelle est la légitimité de l'artiste à prétendre être au dessus de tout, au nom de la grande créativité?

A quel moment, il peut se définir artiste? Quand est-ce qu'il est devenu l'élite intellectuelle?

Et si lui il peut être tout là haut, pourquoi on se pose toutes ces questions...?

Qu'est ce qui fait que ce qu' on écrit est mieux ou pire qu'autre chose? Qu'est ce qu'on doit traiter? Des sujets futiles, ou de fond? Sa propre psychologie, celle des autres ou d'inconnus? Est ce qu'on a le droit de parler de soi même? Ça serait pas trop égocentrique?

Par où commencer? Comment organiser tout ça, toute la pensée? Faire le tri, écrire l'harmonie?

Comment être dans le vrai? Dans le droit chemin?

Est-ce qu'on sais vraiment écrire? On ne se serait pas voilé la face? On a peut-être été trop sûr de soi quand on s'est dit qu'on savait faire ça?

Est-ce qu'au fond, on ne fait pas ce qu'on veut? C'est pas vrai? Peut-être que le seul égocentrisme, c'est de croire qu'il y a des gens qui intéressent à de pareilles tribulations ridicules d'adolescente sans confiance.

Peut-être aussi que je n'écris que pour moi? J'ai le droit d'être égoïste quand il s'agît de mes propres pensées.

Et si j'ai envie de me contredire, ça ne sera que le reflet de mon âme. Une contradiction permanente.

Un paradoxe.

Pourquoi je devrais le faire pour les autres, autrement que pour ma propre santé mentale? Si ça plait à des gens, tant mieux, nan? Mais quel est l'intérêt si personne ne lit?

Au fond, pourquoi je publie ça? Il y a forcément une fin esthétique. Harmonieuse, messagère, différente.

Stop

J'expérimente, je m'entraîne.

J'aligne des mots, ils ont du sens pour moi et j'espère qu'il t'atteindra, derrière ton écran.

Je pourrais simplement écrire ce que je peux imaginer de plus beau pour la reconnaissance.


Mais je ne le ferais pas, techniquement.

L'artiste, ce n'est pas moi. Je suis juste une gamine qui se pose trop de questions et qui donc produit de l'inutilité

Comme parler de vide dans le vide

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