Le Vampire de Barfleur
La portière de la vieille Impala claque. Balthazar maugrée :
- Tu pourrais faire attention gamine ! Depuis que tu es avec moi je l'amène au garage quasiment toutes les deux semaines !
- Ta bagnole date trop. Achète un 4x4 et on pourrait tuer des goules juste en les écrasant.
Léa se dirige vers la station service, ses longues jambes chaussées de bottes de marche avalent les mètres et elle pousse la porte du magasin.
Son partenaire, resté inspecter la voiture bougonne.
- Aucune notion de classe ! Il ne faut pas juste tuer les monstres, il faut le faire avec élégance ! Ah quelle génération !
Il recoiffe les rares cheveux qui lui parsèment le crâne, et arrange du plat de la main sa veste de costume, plissée après les heures de conduite. Pas question de laisser une jeune de dix-neuf ans conduire son Impala chérie !
Il rejoint son associée dans le commerce et saisit un journal local. Il le feuillette un instant, l'air intéressé et se précipite vers Léa, occupée à payer des sandwichs. Sur son passage, des pots et des bouteilles s'écrasent au sol Il ignore les protestations du vendeur et agite le papier sous le nez de la jeune, blasée.
- Une affaire pour nous gamine !
Le vieil homme jette un regard avare vers le sac rempli de sandwichs et paquets de chips.
- Tu n'as pas oublié la tarte ?
- Trop tard.
Il pousse un cri de rage, mais l'étudiante avait déjà tourné les talons et marchait sur le parking. Il ouvre d'un grand coup la porte et se rue sur les pas de la jeune femme.
- Mais ! Ma tarte !
Elle se retourne et vrille son regard dans celui de Balthazar qui s'arrête aussitôt intimidé.
- Pas cette fois. Comme tu l'as dit, on a une affaire !
- A mon époque, les femmes n'étaient pas aussi agressives ! Et elles avaient des cheveux plus longs, objecta-t-il.
La jeune femme lève les yeux au ciel et réplique :
- Quel est le rapport ?
- Aucun.
Sa bonne humeur retrouvée, son co-équipier sifflote un air gai et rejoint la voiture. La portière claque lorsque Léa s'assoit et le sourire du scientifique se crispe. Il allume la radio et finit par tomber sur du rock des années quatre-vingt.
- Direction : Barfleur !
____
Après une heure de route, les deux aventuriers arrivent dans la commune de Barfleur.
Le temps gris et le brouillard démoralise vite Balthazar. Il tend une carte d'agent de police à Léa.
- Tiens. Va acheter quelque chose de plus présentable et rejoint moi au poste.
Elle hoche la tête et sort de la voiture. Il fait un signe de la main puis démarre son Impala.
En à peine quelques minutes le scientifique est sur le parking. Il ressort le journal et ricane.
- Ca devrait être facile, un vampire pas bien malin qui se terre dans cette petite ville depuis une semaine.
Balthazar rejoint le bâtiment avec une grimace face au froid et sourit à la jeune secrétaire devant son bureau. Il lui montre sa fausse carte.
- Pourrais-je voir le chef ?
La femme inspecte rapidement la falsification sans voir la supercherie.
- Je l'appelle pour voir s'il veut bien vous recevoir.
Elle saisit le combiné sur le comptoir et tape sur le clavier. En quelques paroles, le faux policier était invité à rencontrer le chef de la police. Il rejoint le bureau indiqué par la secrétaire et serre la main à l'homme aux tempes grisonnantes qui lui fait face.
- Je suis bien content de recevoir un peu d'aide, ce n'est pas arrivé depuis longtemps un drame pareil !
Le scientifique esquisse un sourire compatissant.
- Ne vous inquiétez pas, on s'occupe de cette affaire ! Et puis il me semble que vous êtes en sous effectifs. Difficile de mener une enquête !
- Oui, mais nous avons pu rassembler quelques informations.
Le policier attrape le seul dossier présent sur sa table et le tend à Balthazar qui le parcourt des yeux. Il marmonne quelques mots dans sa barbe avant de s'éclaircir la voix.
- Les corps de ces jeunes femmes sont encore à la morgue ?
- Oui, j'appelle le médecin légiste et je vous y conduis !
Le chasseur eut un large sourire et acquiesça. Il prend le temps d'envoyer un message à sa partenaire pour la prévenir de sa position et suit le policier.
_______
- Je savais que je n'aurais jamais du accepter, peste Léa.
Elle réajuste le haut de sa robe et jette un regard noir à Balthazar, à une dizaine de mètres d'elle. Il lui offre un sourire éblouissant et continue de siroter sa boisson. Son plan simple, était selon lui le meilleur : se servir de la jeune femme comme appât.
L'ambiance joyeuse dans le bar ne déteint pourtant pas sur Balthazar, qui garde les idées claires, et le regard alerte. Il observe des jeunes hommes qui tentent de flirter avec sa coéquipière, mais ils repartent bredouilles. Un des moyens de révéler la nature des monstres à la soif de sang humain consistait à leur faire toucher de l'argent pur béni, qui brûlait leur peau. Le bracelet au poignet de la chasseuse avait été au contact de chacun des prétendants, sans aucun succès.
Le vampire n'avait donc toujours pas fait son apparition.
Les minutes passèrent dans la lumière tamisée et le scientifique se détourne pour parler au barman. Quand ses yeux revinrent à la place occupée par l'ancienne étudiante, elle avait disparue. Il s'étrangle et dépose un billet sur le comptoir avant de se précipiter hors du bar.
Hors d'haleine il sort dans la nuit froide et brumeuse. Aucune âme ne semblait marcher dans les environs.
- Fichtre ! elle va me le tuer alors que je dois faire des expériences sur lui ! Quelle garce, elle respecte jamais le plan !
Il fulmine quelques instants mais soudain sourit.
- Rira bien qui rira le dernier, chantonne-t-il.
Le chasseur pianote un instant sur son téléphone et rejoint sa voiture d'un pas tranquille. Après tout, c'était bien Léa qui s'était mise dans le pétrin !
Il parcourt les rues de la ville déserte et jette des fréquents coups d'œil sur son mobile. Arrivé devant un entrepôt en très mauvais état, il éteint le moteur. La portière de la voiture claque et il pénètre dans le bâtiment abandonné, passe outre des avertissements sur les risques d'écroulement. Sa lampe torche projette un faisceau dans l'immense salle, et en un balayement il aperçoit Léa inconsciente et attachée sur une chaise.
Quelques secondes après, le scientifique sent un souffle sur sa nuque et entend comme un ronronnement. Une voix féminine et sensuelle chuchote à son oreille :
- Pauvre vieux chasseur, tu es si désespéré que tu veux sauver ta partenaire sans aucune arme ? Mais tu ne m'intéresses pas. Promis, ta mort ne sera pas douloureuse, mais je me délecterai de celle de mon autre proie.
- Ma chère, je n'aurais jamais osé venir ici sans stratagème, avoua-t-il, nonchalant.
Il devine que la créature frémit puis part dans un rire léger, dénué d'inquiétude. Il fronce les sourcils et sort son téléphone.
- Ils ne me croient jamais ! Mais vois-tu en quelques heures j'ai eu le temps de piéger l'entrepôt entier. Et puis quelques autres endroits abandonnés.
Le chasseur pianote un instant sur son clavier virtuel. D'un seul coup, une lumière aveuglante surgit de quatre projecteurs mis à chaque coin de la salle. Un déclic se fait entendre et des grappins téléguidés sortent de nulle part et se fichent dans le corps du vampire qui hurle de douleur.
Balthazar avise une chaise près de lui, et un chariot rempli de diverses choses..
La créature jeta un regard désespéré vers le scientifique.
- Allons, ne criez pas, il ne faut pas déranger notre amie...
_______
La portière de l'Impala claque. Léa s'extirpe de la voiture, et maugrée. Ils se dirigent à grands pas vers un restaurant trouvé pour le déjeuner.
- Tu as toujours un plan pour tout ?
- Toujours !
La réplique de Balthazar rend la chasseuse folle de rage et elle laisse échapper un grognement. Ils s'installent à une table et le scientifique parcourut des yeux la carte. Il lâche un soupir dé dépit quand il ne voit pas son dessert préféré au menu.
- Tu n'aimes pas avoir de dettes n'est-ce pas ? Pourtant avec moi, tu en as récolté une dizaine.
Il avise un journal sur le comptoir et se lève pour le feuilleter. Le chasseur relève la tête, les yeux brillants.
- Une nouvelle affaire !
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