Chapitre 9 La peur partie 2
Toutefois, ces songes furent loin d'être reposants. Elle rêva sans cesse à la grande bouche et à sa confrontation. Elle se vit mourir encore et encore. La gueule du monstre l'engouffrait et l'amenait dans les ténèbres. Puis, bien avant qu'elle ne retrouve ces forces, les terribles souvenirs du monstre géant tirèrent Luna de son sommeil. Elle se réveilla en sursaut et resta figée de peur. Une grande douleur parcourut son corps et se concentra sur son coeur qui lui produit énormément de souffrance. C'était une peur effroyable de la mort. Malgré tout, elle trouva la force de se lever, puis elle se concentra de nouveau sur les symboles. Cette attirance vers l'intrigue inhiba partiellement la douleur qu'elle ressentait. Cependant, à son grand désespoir, Luna ne réussit à déchiffrer que très peu de ces caractères, car ils étaient si nombreux et formaient des phrases très complexes. Sans oublier que le manque de lumière rendait la tâche beaucoup plus difficile.
C'est alors que dans sa recherche, l'exploratrice finit par aboutir à une immense pièce en forme de dôme éclairé par des faisceaux bleus sur les murs. Sur chaque section de la paroi se trouvaient de nombreux symboles formant des centaines et des centaines de phrases. La pièce gigantesque émerveilla Luna qui n'osait croire qu'une telle structure pouvait se situer sous terre. En son milieu se trouvait une sphère géante faite en pierre. D'étranges lumières parcouraient la sphère de couleur terne. L'exploratrice l'observa avec intérêt. Cette découverte suscita toutes sortes de questions dans la tête de la jeune femme. Pourquoi les anciens avaient construit ce dôme? Pourquoi avaient-ils placé une sphère géante en son centre? Pourquoi avaient-ils caché cet endroit incroyable dans la forêt, loin des regards des citoyens de la cité? C'est alors que Luna remarqua devant cette immense sphère, un petit piédestal avec la forme d'une main colorée sur son interface.
― Qu'est-ce que c'est? demanda Arbol curieux.
―Je... je n'en sais rien. Je n'avais jamais rien vu de tel.
La jeune femme s'approcha en contemplant la structure jusqu'à ce qu'elle atteigne le pied du piédestal. Elle s'approcha alors de l'interface lumineuse et vit plusieurs boutons. Elle les contempla pendant un instant. Une en forme de main et deux boutons circulaires à sa gauche.
― Est-ce que tu crois que tu devrais... commença Arbol
― Y toucher?
― Oui... hésita l'être spectral anxieux.
― Je crois qu'il y a qu'une façon de le savoir.
― Attends! s'écria Arbol. Ne devrais-tu pas déchiffrer les symboles avant de toucher cette chose? Nous ne savons pas ce qu'elle fait.
― Je veux bien, mais cela prendra des jours à lire tout cela dans toute cette noirceur. Je ne peux pas perdre autant de temps.
― Attends! La fin du monde n'arrive pas si rapidement.
― La faim et la soif auront raison de moi rapidement. Je ne peux pas risquer de sortir d'ici avec la bouche géante qui guette.
― Tu ne peux pas non plus toucher ces boutons qui pourraient attirer la bouche géante.
― Il ne pourra pas entrer ici. Il est beaucoup trop gros.
― Il n'y a pas que la bouche géante qui est dangereuse. Nous ne savons rien sur ses boutons. Es-tu prête à risquer la mort de nouveau? La dernière fois cela ne t'a donné qu'une charte de valeur.
Luna hésita longuement. Elle regarda les boutons lumineux du piédestal. Il y avait tellement à perdre. Cette pensée l'angoissa pendant un instant. Après avoir pesé le pour et le contre, elle finit par avouer:
― Je ne veux pas que ce soit la fin, Arbol. Je ne veux pas être la dernière humaine de ce monde. Je viens de me réveiller, ce n'est pas pour voir un monde s'effondrer. Si les réponses à nos questions sont quelque part, c'est certainement ici qu'elles sont. Nous avons trouvé ce que cherchait le peuple des montagnes vertes depuis des générations. Une chance d'avoir des réponses. Je veux savoir ce qui est arrivé aux anciens. Je veux savoir ce qu'ils pensaient. Je veux savoir ce qu'ils savaient. Je prends le risque d'essayer. Ceci en vaut la chandelle.
Arbol n'en était pas certain. Il avait peur que ce dispositif puisse laisser la grande bouche revenir ou même pire. Il trouvait Luna très téméraire après ce qu'elle avait vécu. Ou peut-être est-ce qu'elle vivait des sentiments confus? Peut-être n'avait-elle pas toute sa tête? L'être spectral n'eut pas le temps de se poser davantage la question que sa camarade déposa sa main à l'endroit où se trouvait le symbole de la même forme. Elle espéra que cela mette fin à son désarroi, mais ce ne fut pas le cas. La lumière devint rouge, puis redevint bleue sans rien changer.
― Nous sommes chanceux, il ne s'est rien produit, avoua Arbol. Nous devrions faire plus attention...
Mais il était trop tard, Luna avait pesé sur l'un des deux autres boutons sur l'interface. Au même moment, le bouton devint vert et un bruit sourd se fit entendre. Prise de peur, l'exploratrice recula en lâchant un petit cri. Puis, soudainement, un bruit de grincement se fit entendre et une trappe circulaire au-dessus de la sphère se mit à s'ouvrir. La lumière du jour pénétra dans la salle laissée trop longtemps dans les ténèbres. L'adolescente n'eut d'autre choix que de cacher ses yeux éblouis par les événements.
Puis, lorsque la trappe fut complètement ouverte, il n'y eut plus rien. Dès que la douleur disparut, l'aventurière descendit ses mains et contempla la scène. Un faisceau lumineux provenant de la lumière du jour traversait l'iris qui venait de s'ouvrir. La salle, complètement immergée par la clarté, révéla enfin ses secrets. L'exploratrice regarda les dessins sur les murs. Ceux-ci n'étaient pas des symboles, mais des oeuvres d'art. Complètement ébahi, Arbol resta un moment sans voix intrigué par cet étrange spectacle. Puis, après un bref moment, il finit par demander:
― Qu'est-ce que cet endroit?
Luna mit ses mains au niveau de sa bouche, puis elle finit par s'exclamer:
― Je n'en sais rien, Arbol. Je ne sais vraiment pas. Je n'avais jamais vu de tel.
― Est-ce que tu crois que la grande bouche peut passer par cette ouverture?
― Je n'en sais rien.
― Tu crois que c'est sécuritaire de laisser l'ouverture dans cet état?
― Je ...
Luna pensa à l'horrible monstre qui rôdait et la peur de revoir cette abomination troubla ses pensées. Elle se mit à trembler, puis elle balbutia:
― Tu avais raison. Je vais fermer.
Elle poussa le bouton de nouveau, mais il n'y eut aucune réponse de l'iris. Elle poussa de nouveau, puis encore. Rien n'y fit. Alors, elle posa sa main sur la paume de l'interface. La paume devint verte et un bruit sourd se fit entendre.
― Qu'est-ce que tu fais? demanda Arbol.
― Je n'en sais rien! dit l'Adolescente en panique.
Soudainement, le sol sous la sphère s'éleva jusqu'à une bonne hauteur. Le plancher émit des lueurs bleutées, puis tout se figea.
― Ne touche plus à rien! s'écria Arbol.
― Je ne touche plus à rien, répéta Luna embêté.
Puis, la jeune femme recula de quelques pas et s'assit sur le plancher de pierre polie. Elle prit du temps avant de se remettre de ses émotions. Tout cela l'aurait émerveillée en d'autres circonstances, mais après la rencontre avec la grande bouche, les découvertes qu'elle faisait lui paraissaient potentiellement dangereuses.
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