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- Mael !

Le cri se fait entendre de loin, faisant tourner plusieurs têtes. Mais Andréa s'en fiche bien des autres, grognant surtout dans sa barbe de voir que lui ne l'a pas entendu. Pris d'une impulsion, l'Oméga tire alors violemment sur ce fil invisible, comme pour hurler à pleins poumons dans les oreilles de son arrogant Alpha, qui l'ignore outrageusement, un "Je suis derrière toi" tonitruant. Et bon sang, il se retient presque de gronder sa satisfaction quand il voit le blond se figer d'un coup, coupé dans son élan, et scrute autour de lui, le cherchant du regard.

Alors il avance vers lui et il le voit clairement, ce fameux moment où Mael l'a enfin trouvé. Cette fine lueur d'une joie pure et insulaire qui explose dans ses iris d'un ciel si pur, chauffant leur lien d'une chaleur douce et rassurant qui lui réchauffe le bout des doigts... Tout de suite, ils peuvent effectivement être entourés de tous les élèves du lycée, cela n'a aucune importance. Ils sont juste là, pour eux deux, soufflant sur les braises de cet incendie qui se réanime dès qu'ils sont ensemble. La fine barrière qui englobe leur petit univers secret semble si fragile, prête à éclater comme une bulle de savon vieillie qui finit par exploser, laissant à leurs vues ingrates tout ce qu'ils souhaitent protéger. Mais ce n'est qu'une illusion, cette barricade tiendrait bon face à un ras de marée sans sourciller et il n'existe personne de capable pour venir se glisser entre eux.

Depuis la crise de nerfs de Mael, les choses se sont calmées. Que ce soit parce qu'ils se sont sentis invasifs ou parce qu'ils préfèrent simplement ne pas avoir d'ennui, on les laisse tranquilles. Ils ont donc passé une première année plutôt calme... Voilà plus d'un an qu'ils sont dans cette école, arpentant toujours les mêmes murs. Ils connaissent à présent toutes les classes, même les coins, soi-disant secrets, où les élèves vont pour flirter. Leur petite vie de lycéen normal était donc simple ! Jusqu'à ce que tout se chamboule de nouveau...

- Ce soir mon cours de violon est annulé.

- OK, je t'attends à la sortie.

- On mange du rôti de porc et de la purée ce soir.

- Super ! J'adore la purée de Tante MJ !

- Faudra aussi que tu m'expliques un truc en SVT j'ai rien compris !

- On fera ça en même temps que nos math si tu veux.

- Ça marche. À t'aleur !

Leurs doigts se trouvent naturellement, se liant ensemble dans une simple étreinte. Ils ont besoin de cette douce chaleur, de sentir qu'ils sont réellement ensemble justes pendant ce petit moment. C'est un petit moment tout doux pourtant bien moins qu'un baiser sur la joue. Ça ne dure que quelques secondes, juste assez pour se lancer un regard réconfortant, et ils se relâchent finalement, reprenant chacun son chemin. Ce n'est qu'une nouvelle habitude qui s'est installée juste comme ça. Juste parce qu'ils continuent de répondre à leurs besoins sans se restreindre par fierté...

Les contacts physiques deviennent bien plus fréquents à présent... Bien souvent ce sont leurs instincts qui les dictent, faisant en sorte qu'ils se placent côte à côte ou que leur pied se touche sous la table pendant les repas. Andréa s'installe toujours ridiculement proche de lui quand ils s'installent pour faire leurs devoirs, leurs cuisses l'une contre l'autre, donnant à Mael bien du mal pour gérer certaines idées déplacées.

Ils ont dix-sept ans et beaucoup de gamins autour d'eux parlent de sexe comme d'une sortie ciné. Quelques-uns de leurs camarades de classe subissent leurs premiers émois de genre, se plaignant ouvertement de passer ces moments sans partenaire. Ils apprennent à peine à subir leurs cycles comme des gosses normaux à un moment de leur vie ou ce genre de besoins physiques se font entendre. Et ils ont reçu certains regards sans équivoque, de ceux qui pensent qu'ils doivent bien s'amuser tous les deux... Pourtant c'est terriblement loin de la vérité, mais ils ont simplement ignorés.

Ces imbéciles n'apprendront donc jamais...

Car pendant qu'ils pensent à leurs froides nuits d'adolescent, eux continuent de ne pas faire comme tout le monde ! Si les gosses de leurs âges souffrent des affres de leurs hormones en ébullition, eux apprennent à vivre seuls en un sens... Car c'est leur réalité actuellement, Mael restant seul chez lui toute la semaine à présent !Il est évident que ça n'a pas été simple de convaincre ses parents, mais la situation étant ce qu'elle est, ils ont finalement accepté d'au moins essayer.

Alors depuis le début de l'année, l'Alpha occupe seul l'appartement dans lequel il a grandi. Il pourrait effectivement avoir du mal face à cette soudaine solitude, mais à dire vrai, cela fait un moment qu'il ressent un certain besoin d'indépendance. Il a essayé de le murer quelque part, grognant mentalement sa frustration. Mais parfois il n'y fait pas face, et il a l'impression d'être proche d'une quelconque forme d'explosion ! Alors il sortait courir, se vidant le crâne en fatiguant son corps, lui qui déteste pourtant toute forme de sport.

Puis ses parents ont consenti à le laisser vivre seul, et il aurait dû profiter de cette liberté solitaire à laquelle il aspirait. Mais il n'a jamais été seul ! Andréa est présent à chaque instant ou presque, ils ne sont franchement pas loin de cette vie en coloc' dont rêve tant le blond. Cette présence-là ne le dérange absolument pas, au contraire il la chérit profondément, adorant sentir sa présence dans toutes les pièces de l'appartement. Ils espèrent qu'ils vivront ensemble plus tard, et ces petits moments ne sont que des avant-goûts des plus plaisants. Il s'enivre dans ce merveilleux quotidien, remerciant presque sa jeune sœur...

En effet, tout ceci est grâce à elle ! Il s'avère qu'Alice est terriblement douée, un vrai génie... suffisamment pour attirer bien des regards et faire pleuvoir des propositions quant à son éducation. La plus intéressante d'entre elles est venue d'une école spécialisée en particulier, accueillant des enfants si particuliers pour leur donner l'opportunité d'un apprentissage personnalisé. L'école prend en charge les frais d'inscription et offre à ses élèves un enseignement d'une rare qualité, une aubaine incroyable qui permettrait à sa sœur de vraiment s'ouvrir à un brillant avenir. Mais voilà l'os, cette fameuse école se trouve loin...

Bien que, pas trop... En tout cas, pas si l'on part de la ville où travaille son père ! À peine une heure vingt de trajet, pas de quoi rendre cela impensable. Avec un peu d'organisation, tout pourrait se faire...

Quand Marianne et Paul ont discuté de scinder encore plus la famille, dévoilant alors leur plan, rien de ce qui en sortait ne semblait correct. Ils avaient convenu de laisser Alice partir avec son père la semaine, laissant derrière Marianne et Mael... Selon les adultes, c'était la meilleure chose à faire pour leurs deux enfants ! Bien sûr, Paul allait devoir s'organiser, mais il n'avait pas le choix, prévoyant déjà de préparer les repas de la semaine le week-end pour gagner du temps... Mais ils n'avaient sans doute pas envisagé l'avis de leur fils. Sans y réfléchir réellement, l'adolescent avait posé son propre point de vue. Il était assez grand, vraiment, pour vivre seul ! Après tout, il n'était pas non plus perdu au milieu d'inconnu, en cas de soucis, il pouvait parfaitement trouver de l'aide rapidement auprès de son oncle et sa tante. De leur côté, Marianne pouvait se permettre d'aménager ses horaires pour assurer les trajets, tout devenait largement plus simple et acceptable. Cependant les parents ont franchement renié l'idée en premier lieu, refusant d'admettre cette réalité ou leur bébé est déjà assez grand. Néanmoins Mael avait tenu un discours mesuré et cohérent, plein d'assurance et de volonté, plantant une graine à laquelle ils n'avaient pas pensé.

Cette assurance a surpris les deux parents, bien qu'ils ne pouvaient pas vraiment contenir une certaine forme de fierté. Ils avaient déjà discuté de la situation avec MJ et Adrien qui ont évidemment proposé d'héberger Mael. Cependant aucun d'eux ne pouvait être certains de la réaction des deux concernés à l'idée de se retrouver soudainement à vivre sous le même toit. Ils s'entendaient bien, enfin ! Alors il était difficile de concevoir de mettre cette relation en danger. Ils avaient donc refusé la généreuse offre de leurs alliés, bien décidés à laisser leurs gamins faire les choses eux-mêmes puisqu'ils semblaient trouver leur repère tout seul, rassurant les parents. Leur avenir ne semblait plus si inquiétant, au contraire ! Apparemment ils savaient s'y prendre l'un avec l'autre et ils devaient simplement accepter de les laisser décider seul.

Donc ils ne souhaitaient pas risquer cette entente en forçant une telle situation qui pourrait jouer un rôle nocif... Ils ne sacrifieraient pas le bien-être de leur fils pour celui de leur fille ou vice-versa...

Mais laisser leur grand seul à la maison, ils n'y avaient pas pensé. Ou sans doute qu'ils n'avaient pas voulu envisager que ce jour-là était déjà là... C'était pourtant juste devant leur nez et que l'idée soit posée par Mael les rassurait sans trop savoir pourquoi.

Mael était un gamin mature et intelligent. Il saisissait tout ce que ça incluait et même si les parents comprenaient qu'il faudrait certainement un temps d'adaptation. Honnêtement ils n'avaient pas réellement d'arguments défavorables... Donc après y avoir de nouveau réfléchi, retournant la situation dans tous les sens avec cette option, ils avaient rediscuté avec leurs enfants. Quand Mael avait affirmé une fois de plus être parfaitement capable de vivre seul, ils avaient accepté de faire l'expérience.

Avec la sécurité de la présence de MJ et Adrien derrière, cette nouvelle façon de fonctionner avait vu le jour... Mael prendrait le repas chez ses voisins, mais pour le reste, il se débrouillait. Et six mois plus tard, on pouvait dire que c'était une réussite ! Marianne et Paul avaient tout surveillé de loin, des notes de leur fils à l'état de l'appartement, il avait fait face... Ce petit enfant pleurnichard devenait un homme !

De son côté, l'Alpha s'est parfaitement adapté à sa nouvelle situation. C'est même une aubaine pour les deux liés qui mènent cette petite vie de jeunes mariés bien qu'ils conservent des distances amicales admirables...

Ils rentraient le soir ensemble quand c'était possible, sinon le premier arrivé s'assurait des taches ménagères. Ils avaient même commencé un planning de lessive composé à 90% des vêtements de Mael, Andréa y glissant un sweat à l'occasion lorsqu'il en avait besoin. Ce n'était qu'un entrainement se disaient-ils, et à dire vrai pourquoi pas ? Andréa avait son propre jeu de clés, et c'était simplement devenu normal qu'il se rende là-bas à la fin des cours... Ils s'arrangeaient ensemble, se tenant au courant de quelconque changement, et vivaient leur petite vie de pseudocouple en toute amitié au milieu des ados en chaleurs... 

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Prochain chapitre : L'amitié c'est trop frustrant

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