Chapitre 32

           

Morgane le fixa, incrédule.

-         Qui changera ma vie ? Répéta-t-elle tout en sentant la colère l'envahir. Espèce de malade ! Tu as déjà brisé ma vie. Que veux-tu d'autre ?

Jasper secoua la tête en soupirant.

-         Discuter avec toi, c'est comme parler à un mur, dit-il.

-         Repose-moi immédiatement, sinon je hurle.

-         Ne te gêne pas, répondit Jasper.

Morgane eut vraiment le goût de crier, mais elle ne voulait pas s'humilier, surtout dans cette tenue, alors elle la boucla et laissa le jeune homme la transporter jusqu'à la salle de bain.

Il la déposa doucement sur le bord du bain tourbillon, ouvrit les robinets et ajusta la température. Morgane, qui s'était attendue à ce qu'il verse de la glace dans la baignoire, fronça les sourcils.

-         Déshabille-toi, lui dit Jasper.

-         Dans tes rêves !

L'enchanteur leva les yeux au ciel puis, sans qu'elle ne le voie venir, la souleva et la déposa, cette fois, sans délicatesse, dans la baignoire. Les vêtements de Morgane étaient désormais imbibés d'eau.

-         Je vais te tuer ! ragea-t-elle. En plus, l'eau est gelée !

-         Elle est seulement tiède. C'est ta fièvre qui donne cette impression.

Ils se fixèrent en chien de faïence, mais des coups à la porte les firent revenir à l'instant présent.

-         Tout va bien ? fit la voix de Guimond de l'autre côté de la porte.

-         Oui, papa, répondit Jasper. Morgane est malade et j'essaie de l'aider à aller mieux.

-         Faites-moi signe si vous avez besoin d'aide.

-         Sûrement pas, murmura Morgane tandis que Jasper répétait qu'il contrôlait la situation.

Morgane, qui avait vraiment honte de ce qui s'était passé la nuit précédente avec Jasper, se sentit rougir lorsque le jeune homme reposa les yeux sur elle. Ouf ! Il faisait chaud tout d'un coup ! À moins que ce ne soit la fièvre ?

Jasper, qui suivait le fil de ses pensées, sourit malicieusement.

-         Selon un écrivain français, l'amour est comme la fièvre ; il naît et s'éteint sans que la volonté y ait la moindre part.

-         Sauf que je ne t'aime pas, Jasper, rétorqua Morgane.

Au lieu de répondre, il enleva son chandail, dévoilant son corps musclés.

-         Qu'est-ce que tu fais ? s'alarma-t-elle.

-         Le bain est assez grand pour deux.

En effet, il était énorme, mais la jeune femme était tellement mal à l'aise qu'elle se demanda si elle n'allait pas perdre conscience.

Lorsqu'il enleva son pantalon, elle crut défaillir. Il n'allait tout de même pas...

Heureusement (ou pas), il garda son caleçon et s'assit dans la baignoire juste à côté de Morgane. Leur proximité renforça son malaise. Jasper, pas du tout embarrassé, prit un gant de bain qu'il humidifia et le plaça sur le front de Morgane.

-         Relaxe, lui dit-il. C'est comme si nous étions dans le jacuzzi.

-         Sauf qu'habituellement, un jacuzzi se prend à plusieurs, argumenta Morgane.

-         Pas nécessairement...

-         Relaxe, répéta Jasper en soupirant. Pas étonnant que tu aies de la difficulté à contrôler tes pouvoirs.

-         Comment veux-tu que je relaxe lorsque tu es à côté de moi ? éclata Morgane.

-         Donc, tu admets ressentir quelque chose en ma présence.

Elle ne sut que répondre. Oui, chaque fois qu'il s'approchait d'elle, son souffle s'accélérait d'appréhension.

-         Je ne sais pas ce que je ressens pour toi, avoua-t-elle. Mes sentiments sont mitigés par la frustration d'être obligée de vivre ici.

-         Je comprends. Tu as besoin de temps pour digérer tout ça, répondit Jasper en hochant la tête. Sache que j'attendrai ; je suis patient.

Attendre quoi ? Elle n'allait tout de même pas lui tomber dans les bras ! Quoique la veille, elle était passée tout près...

-         J'ai toujours fui les relations entre les deux sexes, dit alors Morgane. Je trouve cela trop compliqué...

-         Moi aussi, admit Jasper. Tu as pu le constater au camp de pêche.

-         Je pensais que c'était à cause de ce qui était arrivé à Maggie...

-         Pas seulement pour ça. Et ce n'est pas parce que je trouvais que personne n'était assez bien pour moi, comme le disait Geneviève. Honnêtement, j'ai toujours souhaité partager ma vie avec quelqu'un qui, comme moi, était particulier.

-         Cela réduit pas mal les possibilités, avisa Morgane.

Jasper haussa les épaules.

-         Maintenant, ça n'a plus d'importance.

-         Pourquoi ?

-         Tu le sais, Morgane.

Celle-ci resta silencieuse. Ils étaient peut-être liés, mais ils n'étaient pas obligés de passer leur vie ensemble, non ?

-         Alors, pourquoi t'es-tu comporté comme un connard avec moi après m'avoir sauvée ? interrogea-t-elle.

-         Je me suis déjà excusé. Les mots avaient dépassé ma pensée, rétorqua Jasper. Et arrête de revenir sur cet épisode. Je crois m'être rattrapé, non ?

Peut-être, mais elle se souviendrait de ces mots blessants toute sa vie.

L'enchanteur, trempa une nouvelle fois le gant de bain dans l'eau, mais au lieu de le replacer sur le front de Morgane, il le promena sur ses épaules, ce qui lui procura un merveilleux frisson. Encore là, c'était à cause de la température de l'eau. Rien d'autre.

Jasper éclata alors de rire et se releva.

-         Je te laisse fini ton bain, annonça-t-il en s'emparant d'une serviette. Je vais aller te chercher des vêtements secs pendant ce temps.

Alors qu'il sortait de la pièce, Morgane appuya sa tête contre le dossier de la la baignoire. Ce gars allait finir par achever ses nerfs.

Un quart d'heures plus tard, elle s'enroulait dans un drap de bain, puis enfilait un pyjama aussi court que le premier. Quelle plaie, ce Jasper ! Avait-il aussi conseillé Viviana sur le choix de ses sous-vêtements ? Elle préférait l'ignorer...

Le point positif s'avérait qu'elle se sentait mieux. Au moins, ce gars était parfois utile. Il avait laissé ses vêtements sur une chaise près de la porte de la salle de bain et lui avait souhaité bonne nuit avant de la laisser enfin seule.

Apaisée, Morgane se dirigea vers sa chambre avec l'intention de dormir afin d'être en forme le lendemain. Or, elle était seulement à quelques pas de sa chambre lorsque deux silhouettes apparurent devant elle. Erin et Crystal la regardaient d'un air dégoûté et menaçant.

-         Écoute-nous bien, sale petite effrontée, commença Crystal en se rapprochant de Morgane. Nous t'avons laissée en paix puisque tu étais nouvelle mais, désormais, c'est terminé. Cesse de tourner autour de Jasper ou tu le regretteras.

-         Je n'ai pas peur de deux idiotes comme vous, répliqua Morgane.

-         Eh bien, tu devrais, dit Erin.

Soudain, sans savoir pourquoi, Morgane eut l'impression qu'un millier de petites aiguilles transperçaient sa jambe. Avant qu'elle n'ait pu crier, la douleur avait déjà disparu, la laissant haletante.

-         Ce n'était qu'un avertissement, ajouta Erin avec un sourire diabolique. Je pourrais te faire souffrir jusqu'à ce que tu en perdes la tête.

-         Vous êtes cinglées ! s'exclama Morgane. Il n'y a rien entre Jasper et moi.

-         Espèce de menteuse ! Nous savons que vous êtes liés depuis qu'il t'a sauvée la vie et, crois-moi, nous ferons tout pour le libérer de ton emprise, même si c'est te tuer.

-         Oh ! Et en passant, ne t'avise pas de parler à qui que ce soit de notre petite discussion, ajouta Crystal. Tu ne fais pas le poids contre nous. Bonne nuit.

Et elles s'en allèrent, laissant une Morgane retournée. Finalement, le danger se trouvait sous ce toit ! Il était grand temps qu'elle contrôle ses pouvoirs si elle ne voulait pas finir dans une tombe.

Un craquement la fit sursauter et elle tourna la tête vers la porte de la chambre de Lila. Les avait-elle entendues ? En tout cas, elle n'en montra rien car la porte demeura fermée tandis que Morgane regagnait sa chambre.

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