Chapitre 3
Jasper s'était rapproché d'elle à son insu et avait un petit sourire moqueur.
- C'est bien ce que je pensais, lui souffla-t-il si bas que personne d'autre ne l'entendit. Je me demandais d'où tu sortirais, cette fois-ci.
- Redonne-moi ça, grinça-t-elle en lui prenant sa casquette des mains.
Morgane la remit sur sa tête en vitesse.
- On se cache ? Dit-il en lui faisant un clin d'oeil.
- Je suis allergique au soleil, répondit-elle d'un air détaché.
Avec un sourire en coin qui laissait voir qu'il ne la croyait pas, il se tourna vers son groupe d'amis et annonça :
- Nous nous sommes croisés tout à l'heure.
- Ah ouais ? Où ça ? Demanda Geneviève.
- Lorsqu'elle était en train de marcher vers les chalets, répondit-il.
- Ouais, ajouta Morgane. On s'est tous les deux faits prendre par l'averse.
Elle lui jeta un regard éloquent.
- Ouais, ajouta-t-il en comprenant où elle voulait en venir. On était tellement mouillés qu'on avait l'air d'avoir plongé directement dans le lac.
Il avait le sourire aux lèvres, mais elle ne le trouvait pas drôle du tout. Elle lui jeta un regard noir.
- Pourtant, j'étais dehors et il n'a pas mouillé, dit Patrick.
- Probablement un nuage qui est passé au-dessus de nous, dit rapidement Morgane. Ça n'a pas duré longtemps.
- En tout cas, il annonce beau cet après-midi, alors on va pouvoir aller sur le lac.
- Génial, soupira Morgane tellement bas que seul Jasper l'entendit.
- Je donne des cours aux débutants tout à l'heure. Si tu veux de l'aide, tu n'as qu'à venir, proposa-t-il.
- Non merci, répondit-elle. Je ne mordrai pas à l'hameçon comme les autres filles.
Geneviève éclata de rire.
- L'hameçon....elle est bonne celle-là. Je n'aurais pas pu faire mieux.
Jasper les fixa, ne comprenant rien, puis le déclic se fit. Il se tourna vers Geneviève, puis lui demanda :
- Qu'est-ce que tu lui as raconté sur moi ?
- Oh ! Seulement la vérité, répondit-elle. Allons-y, Morgane.
Geneviève la tira par le bras et cette dernière haussa les épaules en regardant Jasper.
- Wow ! S'exclama Geneviève. Tu l'as remis à sa place.
- Ce n'était pas mon intention, mais j'ai vu la façon dont il s'est comporté avec les filles de tout à l'heure et ça m'a choquée.
- Ouais, c'est du Jasper tout craché. Ça m'a toutefois pas mal étonné qu'il t'adresse la parole. Il te parlait comme s'il te connaissait bien.
- Il m'a seulement aidée à transporter mes valises.
Et sauvée de la noyade.
- Ça, c'est encore plus étonnant ! dit Geneviève. Jasper, serviable ? J'aurais bien aimé voir ça !
Il avait plutôt eu pitié d'elle.
- Pourtant, il m'a proposé des cours...
- Il est rémunéré pour cela. Il n'a aucun autre intérêt, à l'exception de briser le cœur des filles. Outre la pêche, c'est son passe-temps favori. Tu as bien fait de refuser avant qu'il ne t'attire dans ses filets.
Les jeunes se regroupèrent sur le quai et les responsables du camp commencèrent à leur expliquer le déroulement.
Morgane était trop préoccupée par tous les événements de la journée pour écouter quoi que ce soit. Elle soupira en se disant que New York allait lui manquer avec tous ses magasins et ses rues grouillantes de gens.
- Courage, Morgane, se dit-elle, tu n'en as que pour six semaines. Essaie de ne plus te noyer et tu devrais survivre.
Tout d'un coup, elle sentit une main se poser sur son épaule et sursauta. Elle était tellement perdue dans ses pensées qu'elle n'avait entendu personne s'approcher.
- Pourquoi tu ne m'as pas donné ton vrai nom ? chuchota Jasper.
- Je ne pensais pas te revoir, alors ça aurait servi à quoi ?
- Le camp n'est pas si grand que ça. Je gage que tu avais peur que je dise aux autres que tu étais tombée dans le lac.
Elle haussa les épaules. Qu'est-ce qu'elle pouvait bien répondre à ça ?
- Et qu'est-ce que Geneviève t'a raconté sur moi pour que tu me répondes aussi froidement ?
- Rien !
- Arrête, je sais bien qu'elle ne me porte pas dans son cœur.
- J'ignore pourquoi, mais il doit y avoir une bonne raison. Vous êtes déjà sortis ensemble pour vous détester à ce point ?
Jasper prit un air dégouté et cela répondit à sa question. Apparemment, Geneviève n'était pas de son genre.
Morgane lui dit d'un air las :
- Je ne veux pas avoir affaire à toi, c'est tout. Et puisque que tu envoies promener toutes les filles du coin, ça donne encore moins le goût.
- C'est Geneviève qui t'a dit ça ?
- J'ai vu comment tu t'es comporté avec ces filles, tout à l'heure.
- Elles ne m'intéressent pas. Il faut bien que je leur fasse comprendre.
- Et pourquoi elles ne décrochent pas, d'après toi ? Tu leur as sans doute donné de faux espoirs à un moment ou à un autre.
- Arrête de juger les gens que tu ne connais pas, dit-il brusquement. Tu t'es fiée à une fille que tu viens de rencontrer pour te faire une opinion de moi. C'est très immature !
Morgane fut si surprise par son changement de ton qu'elle en oublia de répliquer.
- Moi, je ne t'ai pas traitée d'empotée parce que tu ne sais pas nager, ajouta-t-il.
Et paf ! Elle savait maintenant comment il faisait pour repousser les filles. Ce gars était un vrai connard !
Morgane le regarda droit dans les yeux. Ces yeux qui l'avaient tant attirée la première fois qu'elle les avait vus.
Il changea tout d'un coup d'attitude et parla sur un ton d'excuse.
- Ce que je voulais dire, c'est que...
- Tu as raison, le coupa-t-elle. Et je ne veux pas te connaître non plus.
Elle se retourna, ne voulant pas montrer à quel point elle était blessée.
Quelle belle façon de démarrer sa journée au camp ! L'été promettait d'être long.
- Attends, dit-il en lui prenant le bras afin qu'elle ne parte pas.
Elle se dégagea brusquement.
- Laisse-moi, dit-elle d'une voix menaçante.
Il la lâcha.
- Je ne voulais pas te blesser, c'est juste que je n'aime pas qu'on me parle comme tu l'as fait.
- J'ai bien vu ça, dit-elle en se croisant les bras.
Elle ne le regardait plus amicalement ; plutôt avec une certaine répulsion.
- En tout cas, ta façon de repousser les filles fonctionne, ajouta-t-elle. Félicitation, je suis la quatrième en dix minutes.
Sur ce, elle partit pour de bon et ne se retourna pas. Elle ne lui adresserait plus jamais la parole.
Elle alla directement rejoindre Geneviève.
- Que faisais-tu ? Lui demanda celle-ci.
- Je constatais des faits, répondit-elle seulement.
Son cœur lui débattait encore.
La jeune fille essaya de se calmer, mais elle était vraiment en colère.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Lui demanda Geneviève en voyant la fureur de Morgane.
- Disons que ce Jasper est comme tu me l'avais décrit. Je n'ai jamais vu quelqu'un avec si peu de tact.
- Tant que ça ?
- À part sa beauté, ce gars n'a strictement rien d'attirant. Je me demande vraiment ce que les filles peuvent bien lui trouver.
Geneviève haussa les épaules.
- Peut-être qu'elles ne vont pas voir plus loin que le physique, répondit-elle.
- Peut-être...
Les moniteurs avaient maintenant fini leur petit discours et Morgane n'avait rien écouté.
- Qu'est-ce qu'ils ont raconté ? demanda-t-elle en pointant le groupe de moniteurs.
- Bah, le même mot de bienvenue qu'on entend chaque année. Viens, on va aller faire un petit tour sur l'eau avant d'aller manger.
Morgane regarda le lac avec horreur.
- Sur l'eau ?
- Bien oui. En canot.
Son cœur s'arrêta un fois de plus.
- Vas-y, je vais attendre les instructions de cet après-midi. Je ne sais pas comment faire.
- C'est facile, mais si tu préfères attendre, on se dit à tantôt.
Morgane la regarda s'éloigner. Bon, que pourrait-elle bien faire en attendant ?
Elle n'eut pas à se le demander longtemps.
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