Une porte claqua, signe que quelqu'un venait de pénétrer dans la maison. Morgane sursauta en même temps que les deux adultes qu'elle espionnait.

Quelques minutes plus tard, Jasper apparut dans le salon, l'air furibond.

- Bonjour mon chéri, le salua sa mère. Tu as passé une belle journée ?

- Ça aurait pu être le cas si cette cinglée de Geneviève ne s'était pas mise à me vilipender. Elle a hurlé pendant une bonne demi-heure que c'était de ma faute si Morgane était morte.

Celle-ci étouffa un ricanement en plaçant sa main devant sa bouche en se rendant compte qu'elle s'était presque trahie.

Sacrée Geneviève ! Elle détesterait Jasper jusqu'au bout.

- Tu aurais dû lui jeter un sort pour lui faire oublier Morgane, dit Guimond.

- Je n'en ai pas eu le courage, répondit Jasper en soupirant. Après tout, elles ont quelques peu raison.

- Dans ce cas, tu n'as qu'à ne pas y retourner, proposa Viviana.

- Maman, je t'ai déjà dit que jamais ce camp, j'aime pêcher et j'ai des amis...

- Tu devras dans ce cas coordonner ton emploi du temps afin de rester plus souvent à la maison maintenant qu'elle se trouve ici.

- J'essaierai.

- Bien. Je suis satisfait de ton travail, mon fils.

Morgane en profita pour s'éclipser, son dégoût pour eux revenant au galop. C'était eux qui avaient orchestré toute cette magouille ! Elle se sentait trahie une fois de plus. Jasper avait fait en sorte que son père l'envoie au camp. Il lui avait menti ; il savait déjà qui elle était. Il avait dû le savoir dès qu'il avait posé les yeux sur elle. Elle avait trouvé étrange qu'il arrive au moment où elle se noyait dans le lac lors de son arrivée. Il la suivait probablement...

Que de mensonges et de trahisons !

Morgane retourna dans sa chambre, en ayant assez entendu. Elle prit le cahier de Sudoku qui se trouvait sur sa table de chevet, faute de ne pas avoir d'autre passe-temps. D'ailleurs, elle avait l'impression que le temps passait très très lentement depuis qu'elle était arrivée dans cette maison.

Quelques minutes plus tard, on frappa à sa porte, qui s'entrouvrît avant qu'elle n'ait invité la personne. Jasper apparut, aussi beau et séduisant qu'à son habitude.

- Je ne t'ai pas autorisé à rentrer, le houspilla Morgane.

- Savais-tu que c'était très impoli d'écouter aux portes ? rétorqua Jasper en s'avançant vers son lit.

- Pardon ?

- Je sais que tu écoutais notre conversation tout à l'heure. Je t'ai entendu pouffer derrière l'arbuste. Avoue que tu as adoré apprendre la réaction de Geneviève.

Morgane haussa les épaules.

- Je crois seulement que tu le mérites, répondit-elle.

- Donc, tu avoues avoir épié la conversation de mes parents. C'est très vilain.

Le jeune homme s'était assis sur son lit, un peu trop près à son goût. Pourtant, ce moment avait déjà eu lieu auparavant, mais Morgane savait maintenant à qui elle avait affaire et ce n'était plus au « bad boy » du camp, mais plutôt à un enchanteur aux pouvoirs déroutants.

- Ils parlaient de moi. C'est normal que j'aie écouté.

Jasper la fixa droit dans les yeux, mais la jeune femme les ferma instantanément, ne voulant pas qu'il l'hypnotise.

- Que fais-tu ? interrogea Jasper.

- Je ne veux pas que tu me lances un sort d'amnésie, répondit Morgane.

Jasper pouffa.

- Ce n'était pas mon intention.

- Je ne te fais plus confiance. Après tout, c'est à cause de toi que mon père m'a envoyée au camp de pêche, n'est-ce pas ?

- C'était la seule façon de t'attirer ici.

- Espèce de sale...

Jasper la coupa.

- C'était pour ton bien, Morgane !

Celle-ci sentit ses nerfs lâcher.

- J'en ai marre ! s'écria-t-elle en lançant le livre de Sudoku à l'autre bout de la pièce.

- Je comprends, ma fée...

- Ne m'appelle pas comme ça ! hurla-t-elle en se levant. Et je ne suis pas à toi !

- D'un point de vu, si, puisque nous sommes liés.

- Ça reste à prouver !

Un petit sourire narquois se dessina sur les lèvres de Jasper.

- Pourtant, les preuves sont flagrantes, comme le fait que je saches toujours où tu te trouves. Lorsque tu t'es perdue en forêt, je savais exactement où te localiser. En passant, j'ai menti ; tu n'étais pas à côté du sentier. Tu t'étais enfoncée profondément au cœur des bois et si je ne t'avais pas trouvé, alors tu serais probablement morte à l'heure qu'il est.

- À moins que tu ne sois une boussole ambulante, rétorqua Morgane. Après tout, tu as sans doute d'autres talents cachés !

- Je t'assure que je ne peux pas trouver n'importe qui. De plus, le jour où je t'ai appris à nager, il y a comme eu un courant qui est passé entre nous. Tu en a déduis que ma montre t'avait donné un choc. En réalité, lorsque deux personnes liées se touchent, c'est comme une explosion de désir entre elles. Plus elles sont longtemps sans te toucher, plus le choc est intense et peut même être douloureux.

La jeune femme plaça sa main sur son front. Un mal de tête débutait.

- C'est complètement débile cette histoire ! Comment fait-on pour se délier ?

Jasper parut songeur et se gratta la tête.

- Euh...je ne sais pas. J'ai rarement entendu parler de deux personnes liées de la même façon que nous, puisque c'était la première fois qu'un enchanteur ressuscite quelqu'un. D'ailleurs, tu ne dois parler de cela à personne car, si les Volmaîtres l'apprennent, ils feront tout pour s'approprier mon don.

- Pas de problème. De toute façon, on me prendrait pour une folle.

- À mon avis, puisque c'est la mort qui nous a liés, c'est seulement elle qui peut nous délier.

Morgane observa le jeune homme, pantoise.

- Es-tu en train de me dire que je serai débarrassée de toi seulement si l'un d'entre nous deux meurt ?

Il haussa les épaules.

- C'est ma théorie.

- Génial, soupira Morgane. Je suis liée à mon kidnappeur !

- Et ton sauveur, ne l'oublie pas !

- Sale prétentieux !

- Arrête de nier la vérité, Morgane. Je t'ai sauvée de la noyade et, depuis, nous avons développé une relation plus qu'amicale.

La jeune femme leva les yeux au ciel. Elle était incapable de définir ses sentiments exacts pour lui, mais l'attirance en faisait assurément partie. Toutefois, jamais elle ne le dirait à voix haute. Pas besoin puisqu'il pouvait lire ses pensées. Jasper eut justement un petit sourire comme s'il savait ce à quoi elle songeait, ce qui lui valut un regard noir de la part de Morgane.

- Et si on parlait de ton nouveau pouvoir ? fit l'Enchanteur.

- Je n'ai pas le goût d'en discuter avec toi, répondit Morgane.

- Pourquoi ? Ton don est rare et très utile. Te rends-tu compte que tu pourras voyager n'importe où dans le monde ?

- Ouais, je l'ai réalisé.

- Et tu n'en es pas plus emballée ?

Pas quand on découvrait que ses amies la détestait.

- Je l'étais, mais plus maintenant.

Jasper l'observa en fronçant les sourcils.

- J'ai testé mon pouvoir, tout à l'heure, en retournant au local de danse de New York où mes amies se trouvaient, expliqua Morgane. Et je me suis rendu compte, qu'en fait, elles n'étaient pas de vraies amies.

La jeune femme éclata en sanglots.

- Elles...me...détestaient, sanglota-t-elle.

Jasper la serra dans ses bras et elle se laissa faire car elle avait besoin de réconfort.

- Elles étaient jalouses de toi, ma fée, dit-il. C'est évident. Je ne les connais pas, mais je peux t'assurer que ta beauté et ton talent en rend jaloux plus d'un. Même au camp, plusieurs filles te regardaient de cette façon.

- Tout le monde me déteste. Regarde Cristal et Erin !

Jasper pouffa.

- Elles détestent toutes les personnes qui sont plus jolies qu'elles, ne t'en fait pas. Et tout le monde ne te déteste pas. Jenny, Corine et Geneviève sont tristes de t'avoie perdue. Même mes camarades n'étaient pas enjoués aujourd'hui. Ton passage a marqué leur vie. Et la mienne.