Chapitre 6 : Le dîner catastrophique !
Luisa et Julieta s'affairaient autour de la grande table en bois, la pièce illuminée par la lumière chaude des bougies placées sur des chandeliers ornés. La table était recouverte d'une nappe blanche impeccablement pliée, et les assiettes en porcelaine étincelaient sous la lumière tamisée. Il y avait des fleurs fraîches au centre, choisies avec soin pour l'occasion, et des verres en cristal qui brillaient comme des bijoux.
Luisa, avec son énergie calme mais déterminée, déplaçait les lourdes chaises en bois autour de la table, veillant à ce que chaque place soit parfaitement alignée. Sa force tranquille était évidente dans la manière dont elle travaillait, mais même avec toute sa musculature, elle était méticuleuse, vérifiant l'équilibre de chaque élément. Elle plaçait délicatement des bouquets de fleurs autour, ajoutant une touche de couleur qui contrastaient avec l'élégance du reste de la table.
Julieta, de son côté, se tenait près du comptoir en train de préparer quelques plats de dernière minute. Ses gestes étaient précis et empreints de tendresse, comme si chaque plat qu'elle préparait était une déclaration d'amour pour sa famille. Elle disposait des entrées et des salades, son regard se levant de temps en temps vers Luisa, son sourire doux témoignant de l'affection qu'elle portait à sa famille. La chaleur de la cuisine s'infiltrait dans l'air, ajoutant à l'atmosphère de convivialité. Les arômes d'épices, de légumes rôtis et de sauces mijotées emplissaient l'espace, créant une promesse de repas délicieux.
Il y avait un léger contraste dans leur manière de travailler : Luisa faisait souvent une pause pour s'assurer que chaque élément était bien en place, tandis que Julieta semblait se perdre dans la préparation des plats avec une attention totale aux détails. Parfois, leurs regards se croisaient, et un sourire complice se formait entre elles, témoignant de l'harmonie qui régnait dans la famille, malgré les tensions externes.
Luisa, en plaçant un dernier vase avec des fleurs fraîches au centre de la table, se tourna vers sa mère et lui dit d'une voix calme, mais pleine de préoccupation :
- Mamà, est-ce que tu penses que tout va bien se passer ce soir ?
Julieta haussait les épaules, une petite touche de nervosité dans son geste.
- Il faut espérer que tout se passe bien...Isabela et Mirabel sont les grandes vedettes de ce dîner après tout. Mais toi, tu vas bien, mi hija ? Ce n'est pas trop de pression pour toi ?
Luisa sourit légèrement, bien qu'un éclat de stress traversa brièvement ses yeux.
- Je gère, Mamà ! Mais tu sais, j'aimerais que tout soit parfait pour elles, surtout pour Mirabel.
Le regard de Julieta se fit plus doux en entendant ce nom, son cœur de mère s'emplit d'une empathie profonde pour sa plus jeune fille.
- Je sais, mi hija...murmura-t-elle, puis elle ajouta plus fort en souriant à Luisa, Tout va bien se passer, tu verras.
Mais, malgré ces mots rassurants, un poids palpable était dans l'air. Le dîner de ce soir ne marquait pas seulement les fiançailles de deux jeunes filles, mais aussi une grande rencontre, un mélange de rires, de sourires, mais aussi d'attentes lourdes et de non-dits. Les Guzmán, membres de la famille qui n'étaient pas tous aussi proches, allaient franchir la porte ce soir pour ce dîner, et avec eux, de nombreuses attentes sociales, des regards scrutateurs et des silences pesants. Mais les Madrigal étaient prêts à tout donner pour faire en sorte que cette soirée, aussi complexe soit-elle, se déroule sans heurts.
Pepa entra dans la salle à manger avec un léger sourire forcé, ses mains crispées sur les bords de sa robe comme si elle tentait de retenir quelque chose. Ses yeux trahissaient une tension palpable, ses sourcils légèrement froncés malgré l'effort qu'elle faisait pour garder une attitude joyeuse. Comme toujours, un nuage gris menaçant se formait au-dessus de sa tête, un signe évident que ses émotions étaient loin d'être sous contrôle. L'atmosphère dans la pièce se faisait plus lourde à chaque seconde, tandis que la vapeur d'une légère pluie s'échappait du nuage.
Julieta, en train de disposer les derniers plats sur la table, leva les yeux au moment où Pepa entra et soupira doucement, un air de compassion dans les yeux.
- Pepa, dit-elle en s'arrêtant, ne te force pas à sourire, ce n'est pas sain pour toi.
Pepa se frotta les tempes, visiblement agacée par ses propres efforts de contrôle.
- J'essaie, Julieta, répondit-elle avec une voix légèrement tremblante, mais elle se redressa rapidement, essuyant la sueur qui perla sur son front. Je ne veux pas provoquer un ouragan ce soir !
Un nuage plus sombre et plus menaçant se forma au-dessus de sa tête, comme si sa propre frustration prenait une forme physique. La pluie se mit à tomber lentement, créant une légère brume qui s'échappait du nuage.
Julieta souffla doucement, se détournant des plats pour regarder sa sœur avec une expression empreinte de tendresse mais aussi de souci.
- Oh Bruno, si tu étais là...murmura-t-elle, le cœur lourd, se souvenant de son petit frère, le seul capable de calmer la tempête intérieure de Pepa.
Le silence qui suivit leur échange pesait lourdement dans l'air.
Luisa, qui observait la scène depuis un coin de la pièce, se dirigea vers Pepa avec un sourire rassurant. Elle savait que sa tante n'était jamais à l'aise avec ses émotions incontrôlables.
- Tía, pourquoi tu ne viens pas m'aider à arroser les roses dans les vases ? proposa-t-elle, son ton doux et apaisant. Comme ça, tu pourras laisser tes émotions s'évacuer. On aura besoin de toi ce soir, mais pour ça, il faut que tu te sentes bien !
Pepa hésita un instant, le nuage au-dessus de sa tête se dissipant lentement en réponse à la gentillesse de Luisa. Pepa baissa les yeux et hocha finalement la tête.
- Tu as raison Luisa, répondit-elle, son sourire devenant un peu plus naturel. Je vais faire ça !
Elle suivit sa nièce jusqu'aux vases, et en chemin, le nuage se dissipa lentement, une brume légère tombant à ses pieds.
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La salle à manger était magnifiquement décorée, la grande table ovale couverte d'une nappe immaculée et des chandeliers allumés, projetant une douce lumière dorée qui baignait l'espace. Tous les membres de la famille Madrigal étaient déjà installés, discutant avec la famille Guzmán, leurs visages sereins mais aussi légèrement tendus, sachant qu'une grande annonce était imminente.
Les Guzmán étaient bien habillés, les hommes en costumes élégants et les femmes dans de belles robes colorées. Mariano, d'un air légèrement nerveux, était assis aux côtés de sa mère, Señora Ozma, tandis qu'Alexandro, toujours aussi imposant et élégant, avait pris place près d'Abuela. La matriarche était assise en bout de table, son regard perçant balayant la pièce avec une autorité silencieuse, observant les invités avec une certaine bienveillance, bien que son esprit semblait préoccupé par d'autres préoccupations.
Les conversations se poursuivaient dans un léger bourdonnement, avec quelques éclats de rire nerveux ici et là, mais une nervosité palpable flottait dans l'air. On sentait que tout le monde attendait l'arrivée des deux sœurs. L'absence de Mirabel et d'Isabela n'était pas passée inaperçue, et les regards s'échangeaient, certains se demandant pourquoi elles n'étaient pas encore venues. La tension était à son comble, et Abuela, bien que calme, avait ses yeux rivés sur la porte, attendant impatiemment l'arrivée de ses petites-filles.
Finalement, après un moment de silence qui sembla s'étirer à l'infini, Alma se leva lentement, attirant l'attention de tout le monde. Elle se tourna alors vers Señora Ozma, la mère de Mariano, et lui adressa une salutation respectueuse.
- Señora Ozma, commença-t-elle, sa voix claire et autoritaire. Nous sommes honorés d'avoir votre famille ici ce soir. Ce dîner marquera non seulement une célébration de notre famille, mais aussi un nouveau chapitre, comme vous le savez !
Elle marqua une pause, ses yeux se posant sur la famille Guzmán, en particulier Mariano, puis elle se redressa avec dignité.
- Je tiens à remercier tout le monde pour leur présence, et j'espère que ce moment sera mémorable pour chacun d'entre vous.
Son regard s'attarda un instant sur Alexandro, qui avait l'air aussi impeccable que toujours, avant de se tourner vers la porte, visiblement impatiente de voir ses petites-filles faire leur entrée.
- Les jeunes femmes de notre famille se joindront à nous dans un instant, ajouta-t-elle d'un ton qui ne laissait aucune place à l'ambiguïté. Mirabel et Isabela doivent être prêtes pour le grand moment !
Señora Ozma prit la parole, sa voix douce et polie, mais portante. Elle se tourna vers la famille Madrigal avec un sourire mesuré, son regard empreint d'une chaleur calculée.
- C'est un honneur pour nos garçons d'avoir une alliance avec vous, les Madrigal, dit-elle, ses yeux se posant brièvement sur Alexandro et Mariano, qui hochaient la tête en signe de respect. Les Guzmán sont fiers de rejoindre votre famille par ce lien !
Les garçons, bien que silencieux pendant un instant, échangèrent ensuite un regard complice avant de prendre la parole à leur tour. Mariano, toujours un peu hésitant mais bien élevé, ajouta :
- C'est un grand privilège d'être ici ce soir avec vous tous. Nous espérons que ce dîner marquera le début d'une belle union.
Alexandro, plus assuré, prit le relais avec un sourire, sa voix forte et déterminée.
- Je suis heureux d'être ici parmi vous, et d'apprendre à mieux connaître la famille Madrigal. Nous ferons en sorte que cette alliance soit fructueuse et respectée, tant dans nos cœurs que dans nos actions.
Les mots étaient doux, mais leurs significations restaient glaciales dans l'esprit de certains membres de la famille Madrigal, notamment ceux qui étaient présents pour voir la sincérité derrière les paroles.
À la table, Dolores soupira, visiblement agacée par la scène qui se jouait devant elle. Ses yeux se fermèrent un instant, son cœur battant à un rythme plus rapide. Camilo, lui, roula les yeux au ciel, ses bras croisés, l'air de plus en plus exaspéré. Il fit un petit bruit de langue, exprimant son dégoût sans retenue.
- Pff...Quelle blague, murmura-t-il entre ses dents, comme s'il ne pouvait plus supporter ce cérémonial.
Abuela, perchée au bout de la table, sourit largement, essayant de masquer ses propres pensées sous une façade de contentement. Elle se tourna alors vers la porte, attendant enfin l'apparition de ses deux petites-filles. Ses yeux s'illuminèrent dès qu'elle aperçut Isabela et Mirabel entrer dans la salle, toutes deux dans leurs plus belles robes, l'une radieuse, l'autre plus nerveuse, mais toutes les deux parfaitement accordées à l'ambiance de la soirée.
Isabela, élégante comme toujours, portait une robe ajustée d'une couleur brillante qui capturait la lumière, ses cheveux parfaitement coiffés et tombant en vagues soignées autour de son visage. Elle avait l'air d'une princesse moderne, un sourire modéré sur ses lèvres tandis qu'elle marchait avec une grâce mesurée.
Mirabel, quant à elle, bien que plus timide, portait une robe qui mettait en valeur sa personnalité unique. Le contraste entre sa robe plus modeste et la brillance de la soirée ne la rendait que plus belle à ses yeux, et son regard, bien que nerveux, brillait d'une lumière déterminée. Les deux sœurs s'avançaient dans la pièce, mais les regards semblaient se fixer sur elles immédiatement, notamment sur Mirabel, qui ne cessait de lutter contre l'angoisse qui la rongeait.
Abuela, voyant ses petites-filles entrer, afficha un sourire satisfait et accueillant. Mais en dedans, elle était bien consciente de l'importance de ce moment : cette union allait être scellée ce soir. Tout devait être parfait.
- Ma chère Isabela, Mirabel, dit Abuela d'une voix douce mais ferme. Vous êtes magnifiques ce soir. Venez, installez-vous près de nous. Il est temps de commencer cette soirée en beauté !
Isabela s'avança avec une élégance naturelle, sa démarche fluide et assurée. Elle se dirigea d'abord vers Mariano, ses talons résonnant légèrement sur le sol, tandis que ses robes onduleuses capturaient la lumière de la pièce. Le regard d'Isabela, bien qu'empreint de calme, trahissait un léger sourire satisfait alors qu'elle se glissait gracieusement dans sa place à côté de Mariano, qui, bien qu'un peu nerveux, lui rendit son sourire avec un respect évident.
Mariano, bien que le garçon qui semblait le plus réservé parmi les hommes présents, ne pouvait s'empêcher de regarder Isabela avec une admiration sincère. Isabela, pour sa part, lui adressa un sourire serein, presque rassurant, tout en s'installant confortablement, comme si elle avait parfaitement maîtrisé l'art de se faire désirer. Elle posa ses mains délicatement sur la table, adoptant une posture noble et digne de son rôle, bien consciente des attentes qui pesaient sur elle ce soir-là.
De l'autre côté de la table, Mirabel, le cœur battant, s'avança à son tour, mais son pas était plus hésitant. Contrairement à sa sœur, elle ne portait pas cette aura de perfection absolue. Elle jeta un regard furtif à la famille Guzmán, en particulier à Alexandro, qu'elle devait désormais appeler son fiancé. Ce dernier, en train de discuter avec son père, tourna son regard vers elle juste au moment où elle s'approchait pour s'installer à côté de lui.
Mirabel sentit un frisson la parcourir à cet instant. Elle s'assit rapidement, ses mains tremblant légèrement lorsqu'elles se posèrent sur la table. Son regard se perdit un instant dans les plis de sa robe, cherchant un semblant de réconfort dans les détails de sa tenue. Elle n'osait pas regarder Alexandro directement, mais elle sentait la pression de sa présence à ses côtés, ce même Alexandro qu'elle connaissait si peu, mais qui était désormais celui qu'Abuela avait choisi pour elle. Il sourit doucement, mais Mirabel ne parvenait pas à répondre à son sourire, son esprit encore perdu dans la tourmente de ses pensées.
Alexandro, conscient de l'atmosphère délicate qui régnait autour d'eux, tenta d'alléger la situation en posant une main assurée sur la table. Mais pour Mirabel, chaque geste, chaque mouvement semblait amplifié dans son esprit, et elle ne pouvait s'empêcher de se sentir comme une étrangère à ce monde qui semblait si loin d'elle.
La conversation était calme, presque cérémonieuse, jusqu'à ce qu'Alexandro brise le silence en s'adressant à Mirabel. Il avait observé la scène, notant son air réservé et son attitude un peu plus timide comparée à celle d'Isabela. Tout en posant ses coudes sur la table, il tourna son regard vers Mirabel, un léger sourire sur les lèvres, mais un ton d'interrogation dans la voix.
- Dis-moi, Mirabel, quel est ton don ? demanda-t-il, un brin de curiosité dans sa voix.
Les mots d'Alexandro frappèrent Mirabel de plein fouet. Elle écarquilla les yeux et sentit une chaleur envahir son visage. Elle avait souvent été confrontée à cette question, mais jamais avec un tel ton, si insistant, presque intrusif. Elle serra ses poings sous la table, la respiration soudainement plus rapide. Son cœur se serra.
- J-Je...Je n'ai pas de don, répondit-elle d'une voix basse, presque inaudible. C'est la seule chose qui ne m'a pas été donnée, et je ne sais toujours pas pourquoi.
Un silence lourd s'abattit sur la table. Les autres convives échangèrent des regards furtifs, certains paraissant mal à l'aise, d'autres plus perplexes.
Mais Alexandro, manifestement surpris, sembla ne pas comprendre. Il haussait légèrement les sourcils et, sans réfléchir davantage, il répondit d'un ton froid, presque condescendant :
- Tu n'as pas de don ? Comment allons-nous garantir une génération d'enfants avec des dons, alors ? Il marqua une pause avant de murmurer d'un ton plus sec : Es-tu vraiment sûre de ne pas être adoptée, Mirabel ?
Les mots d'Alexandro frappèrent Mirabel comme une gifle. Son visage se figea un instant, et une vague de colère et de frustration déferla sur elle. Elle sentit ses muscles se tendre, un frisson désagréable parcourant son dos. Comment osait-il remettre en question son identité et sa place au sein de sa propre famille ?
Elle se leva soudainement, le bruit de la chaise raclant contre le sol faisant sursauter la pièce. Ses yeux s'étaient écarquillés sous l'effet de la surprise et de l'indignation, et d'un geste brusque, elle frappa violemment la table de sa paume. Le bruit du coup retentit dans toute la salle, coupant net la conversation qui s'était installée auparavant.
- COMMENT OSES-TU ! cria Mirabel, sa voix emportée par une colère qu'elle n'avait pas su contenir. Comment oses-tu me parler de la sorte, comme si je n'avais pas ma place ici ?!
Son cri résonna dans la pièce, et instantanément, tous les regards se tournèrent vers elle. La famille Madrigal semblait figée, choquée par l'intensité de sa réaction. Même Abuela, d'ordinaire si autoritaire, semblait un instant déconcertée. Camilo et Dolores échangèrent un regard inquiet, tandis qu'Isabela, déjà assez distante, évitait le regard de Mirabel.
Les yeux de Mirabel brillaient de colère et de frustration. Elle n'avait pas pu retenir sa réponse. Il n'était pas normal, pour elle, d'être ainsi interrogée, comparée à sa famille qui, elle, possédait un don. Cela la rongeait de l'intérieur depuis toujours, mais jamais personne n'avait été aussi direct, aussi cruel, à propos de son "manque".
Alexandro, de son côté, semblait tout aussi choqué par la violence de la réaction de Mirabel. Il n'avait pas mesuré la portée de ses paroles. Il tenta de se reprendre, levant les mains en signe de défense, mais la tension était palpable dans l'air.
- Je...J-Je ne voulais pas...commença-t-il, mais il fut couper par un bruit d'orage.
Soudain, un nuage gris, chargé de pluie, apparut juste au-dessus du dîner, éclipsant la lumière chaleureuse des bougies et jetant une ombre sur la table joliment dressée. De petites gouttes commencèrent à tomber doucement, mouillant les plats soigneusement préparés et ajoutant une touche de désordre à cette soirée déjà délicate.
Abuela, visiblement agacée, poussa un soupir d'exaspération en lançant d'un ton sec :
- Pepa, le nuage de pluie ! Ce n'est vraiment pas le moment.
Pepa, assise à l'autre bout de la table, serra sa tresse entre ses doigts et ferma les yeux, essayant de contrôler l'orage émotionnel qui se formait au-dessus de sa tête.
- D-Douceur, calme...Tout va bien, tout est parfait...murmura-t-elle doucement, comme pour se convaincre elle-même.
Mais les gouttes persistaient, prouvant combien elle était troublée. Félix, assis à ses côtés, lui prit doucement la main, murmurant des paroles rassurantes pour apaiser sa nervosité. Il glissa un regard compréhensif à sa femme, en lui disant d'un ton calme :
- Ne t'en fais pas, mi vida, on va gérer ça ensemble.
Pepa soupira, les épaules affaissées, et le nuage s'éclaircit peu à peu, bien qu'il reste suspendu au-dessus de la table comme une menace latente.
Pendant ce temps, Julieta, assise non loin de Mirabel, observait sa fille cadette avec tristesse et inquiétude. Elle comprenait que Mirabel portait un poids immense sur ses épaules, et cette confrontation ne faisait que raviver ses propres sentiments de protectrice. Elle s'approcha un peu plus de Mirabel, lui offrant un sourire doux, mais Mirabel semblait absorbée dans ses pensées, son regard sombre rivé sur Alexandro.
Mirabel prit une profonde inspiration, cherchant à regagner son calme après l'échange tendu avec Alexandro. Elle se tourna lentement vers lui, une lueur de défi dans les yeux, et murmura d'une voix contrôlée, mais avec une pointe de sarcasme :
- Sinon, à part le fait que ma famille soit disons unique en son genre, qu'est-ce qui t'intéresse chez moi, Alexandro ?
Alexandro, pris au dépourvu, ouvrit la bouche, cherchant ses mots. Le regard perçant de Mirabel semblait lui mettre une pression inattendue, et il hésita avant de répondre.
- E-Eh bien, euh...J-Je...J-Je suppose que je trouve fascinant de faire partie d'une famille avec un tel héritage magique, balbutia-t-il maladroitement, évitant son regard et scrutant la table comme s'il cherchait une réponse dans les plats devant lui.
Camilo, assis un peu plus loin, leva discrètement les yeux au ciel, se retenant de sourire. Il croisa les bras avec un regard amusé, visiblement ravi que sa cousine prenne le contrôle de la conversation. Dolores, elle, esquissa un sourire entendu, partageant le sentiment de Mirabel et comprenant son malaise. Elle jeta un regard complice à Camilo, qui lui répondit par un clin d'œil discret.
Mirabel fronça les sourcils, sentant que la réponse d'Alexandro manquait de sincérité. Elle lui répondit, le ton acéré :
- Donc en fait, c'est juste le miracle qui t'intéresse, n'est-ce pas ? Pas moi, pas ce que j'aime, ni ce que je pense seulement ce que représente ma famille. Elle marqua une pause, soutenant son regard avec intensité. Sache que je ne suis pas qu'un moyen pour perpétuer un héritage. Je suis une Madrigal, avec ou sans don !
Alexandro semblait gêné, ses joues rougissant légèrement sous le poids du regard de Mirabel et des autres membres de la famille qui, eux aussi, attendaient sa réponse. Sous la table, il joua nerveusement avec sa serviette, conscient d'être jugé par toute la famille.
Abuela intervint, posant doucement une main sur le bras de Mirabel pour tempérer la tension.
- Allons, Mirabel, dit-elle d'une voix feutrée, nous sommes tous ici pour célébrer une union, pas pour régler des comptes. Soyons respectueux.
Mirabel jeta un dernier regard réprobateur à Alexandro, puis baissa légèrement la tête pour masquer son agacement. Elle n'avait pas pour habitude de se taire, mais elle ne voulait pas empirer la situation, surtout avec Abuela présente.
À l'autre bout de la table, Luisa et Antonio échangèrent un regard perplexe. Antonio, encore trop jeune pour comprendre toute la complexité de la situation, se contenta de froncer les sourcils et haussa légèrement les épaules, avant de se concentrer de nouveau sur son assiette. Luisa, quant à elle, observait la scène avec une expression de surprise mêlée de souci, incertaine de ce qui allait se passer, mais sentant que les tensions autour de la table montaient.
Isabela, assise près de Mariano, avait tourné son attention vers lui au moment où il sortit discrètement une petite boîte en velours. Son regard se figea d'abord, mais elle força un sourire radieux, ses yeux s'écarquillant de surprise. Elle savait que ce geste était attendu d'elle, mais elle ne pouvait s'empêcher de ressentir un mélange de nervosité et d'hésitation. Mariano, sans se rendre compte des pensées qui traversaient Isabela, lui adressa un sourire tendre, son regard plein d'espoir.
Pendant ce temps, à l'autre bout de la table, Mirabel avait tourné la tête d'un air résolu, choisissant d'ignorer Alexandro après leur échange tendu. Elle serrait les dents, souhaitant intérieurement ne plus avoir à échanger un mot avec lui. Mais, brusquement, elle sentit sa main sur son bras. Elle écarquilla les yeux, une vague de surprise et d'indignation la traversant alors qu'elle tournait lentement la tête pour lui faire face. D'une voix basse, mais ferme, elle murmura entre ses dents :
- Lâche-moi.
Alexandro ne répondit pas immédiatement, gardant sa main serrée sur son bras avec une froideur calculée. Il se pencha légèrement vers elle, son ton tout aussi bas, presque menaçant.
- Tu pourrais au moins essayer de te comporter correctement ce soir, Mirabel.
La panique de Mirabel se transforma en colère glacée, et elle tira sur son bras pour tenter de se libérer, mais il ne céda pas. L'attention de Camilo, assis un peu plus loin, était déjà entièrement captée par la scène. En voyant l'expression contrariée et tendue de Mirabel, un regard furieux passa sur le visage de Camilo. Son instinct protecteur s'éveilla, et son expression se durcit. Il serra les poings, se retenant à peine de se lever pour intervenir, ses yeux lançant des éclairs en direction d'Alexandro.
Dolores, quant à elle, avait tout observé depuis le début. Elle posa délicatement sa main sur le bras de Camilo pour l'apaiser, murmurant d'une voix calme :
- Ne fais rien de trop brusque, Camilo...On ne veut pas gâcher complètement la soirée. Abuela nous surveille !
Mais Camilo ne pouvait contenir sa rage. Il se redressa légèrement, croisant le regard de Mirabel, comme pour lui envoyer un message silencieux de soutien. Il savait qu'il devait rester discret, mais son corps entier tremblait d'envie d'intervenir pour défendre sa cousine. Il adopta une expression ironique, un sourire forcé aux lèvres, et lança d'un ton cinglant pour attirer l'attention :
- Eh bien, Alexandro, tu te sens obligé de contrôler chaque geste de Mirabel maintenant ? C'est drôle, je pensais que tu avais dit vouloir découvrir sa personnalité, pas la dicter.
À ces mots, plusieurs personnes autour de la table tournèrent la tête, surpris par le ton direct de Camilo. Alexandro, pris de court, desserra sa prise sur le bras de Mirabel, et elle se dégagea immédiatement, reculant de quelques centimètres pour marquer ses distances. Abuela leur lança un regard lourd de reproches, comme pour leur rappeler qu'un tel comportement n'était pas toléré à cette table.
Alma, la voix basse mais pleine de reproches, murmura sèchement à Camilo :
- Camilo, un peu de retenue, je te prie.
Camilo, piqué au vif, laissa échapper un « quoi ! » frustré, prêt à se défendre. Mais avant qu'il ne puisse en dire davantage, Dolores, assise à ses côtés, lui attrapa le bras et le tira doucement pour le ramener à sa place. Elle lui chuchota fermement, l'air inquiet :
- Camilo, calme-toi, sinon tu vas tout faire rater.
Camilo lança un regard agacé, mais il hocha la tête et, prenant une grande inspiration, croisa les bras pour contenir son impulsivité.
- Pardon, marmonna-t-il, l'air de mauvaise grâce, sous les yeux perçants de sa grand-mère.
Mirabel, quant à elle, se massa la tempe en soupirant d'exaspération, en tentant de garder son calme malgré l'orage intérieur qui grondait en elle. Mais soudain, son regard s'illumina lorsqu'elle aperçut Mariano, assis non loin, qui s'apprêtait à poser la fameuse question à Isabela, une petite boîte de velours prête dans ses mains. Comprenant qu'ils n'avaient plus de temps à perdre, elle jeta un regard significatif à Dolores pour lui signaler que le moment était venu de mettre en place leur plan.
Dolores, rapide et discrète, adressa un signe à Camilo pour lui indiquer d'agir, un sourire espiègle aux lèvres. Camilo, en un mouvement fluide, tendit le piment en direction de Mirabel, qui le récupéra sans attirer l'attention. Avec un sourire innocent, elle engagea une petite conversation anodine avec Alexandro pour détourner son attention. Puis, d'un geste discret, elle glissa le piment rouge vif dans son assiette, en prenant soin de bien l'enfoncer pour qu'il ne le remarque qu'au moment de manger. Elle échangea un clin d'œil rapide avec Camilo et Dolores, impatiente de voir la suite.
Quelques instants plus tard, Alexandro, sans se douter de rien, prit une grande bouchée de son plat. À peine avait-il mâché qu'une expression d'horreur traversa son visage. Ses yeux s'agrandirent de panique, et une couleur rouge vif se répandit sur son visage tandis qu'il sentait la brûlure intense du piment envahir sa bouche. Incapable de supporter la douleur, il bondit de sa chaise en criant, provoquant un choc général autour de la table. Dans sa précipitation, il renversa une généreuse portion de sauce qui éclaboussa la robe de Mirabel, qui écarquilla les yeux en sentant la tache se répandre sur le tissu. À cet instant, tout le monde se figea, surpris et confus devant le comportement inattendu d'Alexandro.
La panique de celui-ci se répercuta également sur les animaux d'Antonio, qui, effrayés par le cri soudain, s'agitèrent autour de la table. Des oiseaux piaillaient, un capybara se réfugia sous la table, et le jaguar d'Antonio émettait des grondements nerveux. Cette agitation soudaine eut aussi un effet immédiat sur Pepa : un grand nuage gris apparut au-dessus de sa tête, et des gouttes de pluie commencèrent à tomber, menaçant de se transformer en véritable averse. Pepa, déjà tendue, fit de son mieux pour se calmer en murmurant de petits mots apaisants, tandis que Félix l'aidait en lui massant doucement les épaules pour éviter que la pluie ne dégénère en tempête.
Alexandro, incapable de supporter la brûlure, s'excusa en bégayant, les yeux larmoyants, avant de déclarer à toute vitesse :
- Je reviens...J-Je...J-Je dois un instant !
Il quitta la salle en courant, une main devant la bouche, cherchant désespérément un moyen de calmer le feu dans sa gorge. Le chaos laissé par son départ soudain laissa toute la famille Madrigal, ainsi que la famille Guzmán, dans un silence surpris et perplexe. Julieta, Isabela, et même Abuela échangèrent des regards confus, essayant de comprendre ce qui venait de se passer.
Profitant de la confusion, Camilo se leva discrètement et suivit Alexandro à distance, un sourire malicieux aux lèvres. Lorsqu'il fut hors de vue des autres, il se métamorphosa rapidement pour prendre l'apparence de son futur "ami" et attendit un instant pour se préparer à la prochaine étape de leur plan. Sa mission était simple : jouer le rôle d'Alexandro de manière provocante, afin de semer le trouble et faire douter les Madrigal et les Guzmán de son caractère.
Quelques instants plus tard, il revint à table, arborant une expression arrogante et froide. Il s'approcha de Mirabel, la regardant avec mépris, et lança d'un ton hautain :
- Sérieusement, Mirabel, tu crois vraiment que quelqu'un pourrait te prendre au sérieux avec une tenue pareille ? Sa voix avait pris un ton plus cassant, attirant les regards surpris des invités.
Julieta, choquée par ce changement de comportement, fronça les sourcils. Elle murmura,
- Alexandro, tout va bien ? tandis que Mariano, troublé par cette attitude soudaine, observa son frère avec inquiétude.
Camilo, bien décidé à envenimer la situation, se tourna alors vers Pepa, un sourire insolent aux lèvres :
- Et toi, señora Pepa, tu ne pourrais pas contrôler ce petit nuage pour une fois ? C'est un dîner important, essaie d'être plus appropriée !
Pepa, blessée par cette remarque, se mordit les lèvres pour ne pas répondre, tandis que Dolores et Mirabel échangeaient un regard complice.
Félix, rouge de colère, se leva soudainement, son visage marqué par une rage contrôlée. Il pointa son doigt vers Alexandro, dans la peau de Camilo, qui venait de faire une remarque acerbe à l'encontre de Mirabel et de Pepa.
- Je t'interdis de parler comme ça de ma femme ! lança Félix d'une voix grondante, sa main tremblant légèrement sous l'effet de l'énervement.
Alexandro et poursuivit, la voix pleine de menace :
- À ta place, je fermerais ma bouche, comme à chaque fois.
Félix se tenait droit, les yeux brûlants de colère, prêt à défendre sa famille, en particulier sa femme, ses enfants et ses nièces.
Pepa, sous le choc de l'attaque contre elle, resta figée, les yeux écarquillés, mais n'osa rien dire, se repliant sur elle-même sous l'impact de cette dispute soudaine. Elle jetait des regards nerveux entre Félix et les autres membres de la famille Guzmán, tentant de garder son calme pour éviter un nouvel orage.
Julieta, visiblement choquée par la tournure des événements, se leva d'un bond et cria d'une voix ferme :
- Ça SUFFIT ! Elle s'adressa à Félix, mais aussi à Alexandro (plutôt Camilo dans sa forme déguisée), ses yeux s'assombrissant sous le poids de la frustration. Je n'ai pas l'intention de laisser cet affront passer !
Alexandro, impassible, se contenta de la regarder de haut, son sourire faussement calme sur les lèvres. Puis, il tourna son regard vers Mirabel, et dans un éclat de mépris, il lâcha :
- Señora Julieta, votre fille Mirabel est immonde.
À ces mots, un silence lourd s'abattit sur la salle, interrompu par le cri étouffé de Mirabel. Elle baissa la tête, feignant une grande surprise avant de se laisser envahir par des larmes soudaines, comme si le choc de ces paroles l'avait complètement brisée.
- Ce n'est pas VRAI ! s'écria-t-elle, les larmes coulant sur ses joues. Tu es un monstre ! continua-t-elle, sa voix tremblant de douleur et d'incompréhension, un acte théâtral destiné à faire réagir sa famille.
Julieta, toujours figée dans son état de colère, fronça les sourcils et se leva à son tour. D'une voix menaçante et pleine de réprobation, elle répliqua :
- Parle correctement de ma fille, jeune homme ! Elle s'avança d'un pas menaçant, son regard posé sur Alexandro, d'un air de défi. Le silence dans la pièce semblait plus lourd à chaque seconde.
Soudain, Luisa, qui jusqu'alors était restée silencieuse et figée, se leva brusquement de sa chaise. La colère bouillonnait en elle, sa protection instinctive envers sa petite sœur faisant surface de façon éclatante. Elle se tourna vers Alexandro, ses yeux lançant des éclairs.
- Tu as dit quoi à ma petite sœur, microbe ? hurla-t-elle, la tension palpable dans sa voix. Son corps tout entier était tendu, prête à se jeter sur lui pour défendre Mirabel à tout prix.
Alexandro, bien qu'intimidé par l'hostilité de Luisa, ne se laissa pas démonter. D'un ricanement dédaigneux, il répliqua, essayant de minimiser l'impact de ses paroles :
- La plus forte des Madrigal, mais à la fois la plus faible, une petite pleurnicharde !
Il lâcha cette phrase avec un mépris palpable, croyant sans doute que ses insultes allaient être suffisamment percutantes pour déstabiliser la famille Madrigal.
Les regards se croisèrent, les membres de la famille étaient tous sur le qui-vive, les tensions palpables à chaque respiration. Luisa s'apprêtait à répondre d'une manière beaucoup plus directe, prête à défendre Mirabel coûte que coûte, mais Abuela, d'un geste ferme, leva la main, essayant de ramener un semblant de calme dans la pièce.
Le dîner, censé être un moment de célébration, était devenu un véritable champ de bataille. La famille Guzmán était sous le choc de la situation, tandis que les Madrigal, unis dans la défense de Mirabel, se tenaient prêts à faire face à tout affront. Le contraste entre les deux familles était plus que jamais évident, et chacun sentait que la soirée risquait de prendre une toute autre tournure.
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