Chapitre 21 : Pourquoi ?

Julieta entra dans la chambre de Camilo, son panier d'arepas chaudement serré contre elle. La tension dans la pièce était palpable. Félix était assis près du lit, tenant la main de son fils, tandis que Pepa faisait les cent pas, sa nervosité créant de petites gouttelettes de pluie qui disparaissaient presque instantanément. Mirabel se tenait à l'écart, observant en silence.

Avec un sourire rassurant, Julieta posa son panier sur une petite table.

- Je peux le guérir, annonça-t-elle calmement, mais sa voix portait une autorité qui fit s'arrêter Pepa.

Tous se tournèrent vers elle, les yeux agrandis de surprise.

- C-Comment ? demanda Félix, ses sourcils se fronçant légèrement.

- Mon don est revenu, déclara Julieta d'une voix douce mais déterminée, en sortant un arepa doré et encore fumant.

Mirabel, debout dans l'ombre près de la porte, ajouta :

- Je l'ai vu...mamá peut aider Camilo. Elle a à nouveau son don.

Le silence tomba comme une chape de plomb. Pepa s'arrêta net, le souffle court.

- T-Tu...Tu es sûre ? balbutia-t-elle, presque trop émue pour parler.

Julieta hocha simplement la tête avant de s'approcher doucement de Camilo, allongé, pâle mais conscient. Ses yeux se levèrent vers sa tante avec une lueur de fatigue et d'espoir.

L'annonce de Mirabel avait attiré l'attention. Derrière la porte entrouverte, Bruno et Alma, qui attendaient à l'extérieur, échangèrent un regard stupéfait. Bruno poussa doucement la porte pour entrer, sa curiosité l'emportant. Alma le suivit, bien plus hésitante, mais visiblement touchée par l'atmosphère de tension et d'espoir.

- Julieta, murmura Alma, sa voix emplie d'un mélange de surprise et d'émotion contenue. Tu as retrouvé ton don ?

Julieta ne répondit pas immédiatement, se concentrant sur Camilo. Elle posa doucement l'arepa sur les lèvres de son neveu.

- Mange, cariño, dit-elle tendrement.

Camilo obéit faiblement, mordant un morceau de l'arepa. À mesure qu'il mastiquait, une chaleur dorée émana doucement de son corps, et ses joues reprirent peu à peu des couleurs. En quelques instants, il cligna des yeux, visiblement plus alerte.

- C-Camilo, murmura Pepa en se précipitant à ses côtés, les larmes aux yeux. Félix posa une main rassurante sur son épaule tandis qu'elle l'embrassait sur le front.

Bruno, les bras croisés, regarde Mirabel avec une lueur d'interrogation et de compréhension dans ses yeux,

- C'est étrange, Mira...Tu as non seulement brisé la bougie, mais maintenant, tu rends ces dons. C'est comme si tu étais connectée à eux d'une manière que je ne comprends pas encore.

Pepa, Félix et Alma se tiennent derrière lui, visiblement choqués et perplexes par cette nouvelle révélation. Mirabel fixait obstinément ses pieds, incapable de soutenir leurs regards. Sa voix est basse, presque monotone, mais empreinte d'une sincérité désarmante :

- Oui et non. Mamá m'avait tellement manqué que j'ai réussi à la pardonner...Je ne sais pas pourquoi ni comment, mais il semblerait que je puisse rendre les dons. C'est arrivé d'abord avec Camilo, et maintenant avec mamá.

Elle relève légèrement la tête, mais évite de croiser leurs regards, les yeux perdus dans ses souvenirs.

- Après tout...Ce n'est pas faux. Camilo est mon primo, mon meilleur ami. Il a toujours été là, même quand tout le monde m'a tourné le dos. J'ai besoin de lui pour...Sourire un minimum.

Pepa s'avança, posant une main hésitante sur l'épaule de sa nièce.

- Tu as ramené le don de Camilo, et maintenant celui de mère Julieta...Mais est-ce que tu te rends compte de ce que cela signifie pour toi ?

Mirabel détourna son regard et répondit, sa voix monotone, presque lasse :

- Je ne sais pas, tía. Peut-être que ça ne signifie rien ! Peut-être que ça signifie tout. Je voulais juste que mamá soit heureuse et Camilo...Elle hésita avant de murmurer. Il est ma seule ancre en ce moment...S'il n'était pas là, je ne sais pas où je serais.

Félix hocha la tête, le visage grave.

- Ce garçon te tient beaucoup à cœur, hein ?

Mirabel hocha légèrement la tête, mais ses épaules s'affaissèrent encore davantage, comme si elle portait un poids invisible.

- Il était le seul, qui croyait en moi...Même après l'avoir trahis injustement...Et ça, je ne me le pardonnerais jamais...

Ses derniers mots résonnent dans la pièce, marquant un silence lourd et chargé d'émotion. Pepa, touchée par la mention de son fils, pose une main sur son cœur, son expression passant de la stupeur à une tristesse teintée de remords. Félix, quant à lui, fronce les sourcils, cherchant à comprendre ce que tout cela signifie pour leur famille.

Alma, malgré tout, conserve un air sévère, mais son regard est troublé, comme si les paroles de Mirabel avaient ébranlé sa conviction. Bruno, fidèle à lui-même, rompt le silence :

- C'est...Impressionnant, vraiment. Ce lien que tu as avec eux...Mais cela ne te pèse-t-il pas, Mirabel ? Rendre les dons, c'est comme porter le miracle sur tes épaules, non ?

Mirabel détourne les yeux, son visage redevenu impassible.

- Peut-être. Mais c'est ce qu'il faut, non ? Tout ce que je veux, c'est qu'ils soient heureux. Même si...Elle s'interrompt un instant, luttant pour ne pas laisser ses émotions transparaître. Même si je ne ressens plus rien. Ce vide, tió Bruno, il est toujours là.

Bruno esquisse un geste pour s'approcher, mais Mirabel lève la main, comme pour dire qu'elle n'a pas besoin d'être consolée.

- Je vais bien ! Vous devriez vous réjouir, mamá peut guérir à nouveau et Camilo peut reprendre ses tours...C'est tout ce qui compte.

Alma, qui était restée silencieuse jusque-là, s'avança avec une expression d'émotion contradictoire.

- Mirabel, je ne mérite pas de demander quoi que ce soit de toi...Mais si tu peux faire revenir les dons...Peux-tu envisager de ramener celui de Casita ? Le village tout entier en dépend !

Mirabel se tenait droite, son regard glacial fixé sur Abuela, l'atmosphère de la pièce devenant tendue en un instant. Les autres membres de la famille, y compris Bruno, Julieta, Pepa et Félix, semblaient tous figés, incertains de ce qui allait suivre. Abuela, bien que prise de court, garda son calme apparent, bien qu'une ombre d'hésitation traversa son regard.

Abuela fit un pas en avant, ouvrant la bouche pour parler, mais Mirabel leva une main, l'interrompant immédiatement. Sa voix était calme, mais chaque mot résonnait avec une colère contenue.

- Alors, Abuela, tu te fiches vraiment de moi ? C'est ça ? Depuis que Casita s'est effondrée, tu m'ignores, tu ne me regardes même pas, et là, soudainement, parce que tu crois que je suis liée au miracle, tu viens me demander de ramener Casita ? Sérieusement ?

Julieta fit un pas en avant, tendant la main vers Mirabel, mais Bruno posa doucement une main sur l'épaule de sa sœur, lui murmurant de rester en retrait pour le moment. Félix, de son côté, serra la main de Pepa pour la calmer, tandis que ses yeux s'attardaient sur Abuela, méfiant.

Abuela, secouée mais essayant de conserver son autorité, répondit :

- Je sais que j'ai fait des erreurs, Mirabel, mais c'est pour le bien de notre famille. Nous avons besoin de toi pour réparer ce qui est brisé !

Mirabel éclata d'un rire amer, qui fit frissonner ceux qui l'entouraient.

- Oh, maintenant vous avez besoin de moi ? Maintenant que tout est en ruine et que vous n'avez plus vos précieux dons ? Et tu penses vraiment que je vais sauter de joie pour t'aider après tout ce que tu m'as fait subir ? Après que tu m'as brisée, ignorée, et traitée comme si j'étais un problème à résoudre ? Tu veux que je répare tes erreurs pour que tu puisses tout recommencer comme avant ? Je l'ai déjà dis, j'ai "involontairement" redonné le don de mamá et celui de Camilo, tu viens me demander de ramener Casita ? SÉRIEUSEMENT ?!

Abuela ouvrit la bouche pour protester, mais Mirabel avança d'un pas, son regard brûlant.

- Non, Abuela. Si Casita est partie, c'est parce qu'elle a vu ce que je voyais depuis toujours : ta soif de perfection a détruit cette famille. Alors, non, je ne vais pas ramener Casita. Peut-être qu'il est temps pour vous de vivre comme moi. Sans miracle. Sans maison magique. Juste vous et vos échecs !

Elle ne lâche pas Alma du regard, son visage un mélange de douleur, de colère et de désespoir. Elle avance de quelques pas, ses poings serrés, ses lèvres tremblantes.

- Tu m'as ignorée toute ma vie, traitée comme une erreur, comme un poids mort. Maintenant que tu vois que je peux t'être utile, tu oses demander mon aide ?!

Julieta, incapable de rester silencieuse, murmura avec inquiétude :

- Mirabel, mi vida, ce n'est pas la solution. Nous pouvons reconstruire ensemble, pas pour ton Abuela, mais pour nous tous, pour toi aussi !

Pepa, essaie d'intervenir dans le conflit, malgré l'angoisse.

- Mirabel, calme-toi, por favor...

Mais Mirabel n'écoute pas. Elle pointe un doigt accusateur vers Alma, sa voix se brisant sous l'intensité de ses émotions :

- Bravo, Abuela...Bravo. Tu ne changes jamais. Tu as toujours voulu manipuler tout le monde pour préserver ta version du miracle. Et maintenant que tout est en miettes, que je suis brisée, tu veux quoi ? Que je me sacrifie encore pour ta fichue Casita ?!"

La pièce reste figée. Alma ouvre la bouche pour répondre, mais aucun son n'en sort.

- Si tu veux récupérer Casita, Abuela, trouve quelqu'un d'autre !

La tension était palpable dans la pièce alors que Mirabel fixait Abuela avec un regard glacial. Alma, silencieuse, évitait de croiser son regard, tandis que les autres membres de la famille Pepa, Julieta, Félix, et Bruno observaient la scène, leurs visages empreints d'une tristesse qu'ils ne pouvaient dissimuler. Mirabel, sans dire un mot, tourna les talons, sa silhouette raidie par l'émotion.

Pepa mit une main sur sa poitrine, un souffle d'inquiétude traversant son visage. Félix posa doucement une main sur son épaule pour la rassurer, mais il partageait la même expression troublée. Julieta, en retrait, mordillait nerveusement sa lèvre, ses mains tremblantes cherchant une solution invisible. Bruno, quant à lui, baissa la tête, murmurant quelque chose d'inaudible pour lui-même.

Au fond de la pièce, un murmure faible se fit entendre.

- M-Mira...?

La voix venait de Camilo, alité, ses traits pâles et fatigués. Mirabel s'arrêta brusquement. Elle se retourna lentement, le regard fixé sur son cousin malade. Sa froideur sembla vaciller un instant, remplacée par une lueur fugace d'inquiétude.

Elle s'approcha de quelques pas vers le lit, mais resta à distance. Camilo, allongé et visiblement épuisé, même après que Julieta lui avait donné un arepas, il essayait de relever un peu la tête pour mieux la voir.

- Reste...murmura-t-il, sa voix presque cassée.

Mirabel secoua la tête doucement, son expression redevenant impénétrable.

- Repose-toi, Camilo. Tu en as besoin, murmura-t-elle, sa voix dépourvue d'émotion, mais légèrement tremblante à la fin. Elle détourna les yeux, incapable de soutenir le regard de son cousin, avant de se détourner complètement et de quitter la chambre.

Derrière elle, l'atmosphère devint encore plus lourde. Camilo retomba doucement contre ses oreillers, ses yeux fixant le plafond avec une douleur silencieuse. Julieta ferma brièvement les yeux pour contenir ses larmes, tandis que Bruno posa une main sur son front, frustré de ne pouvoir rien faire. Pepa se tourna instinctivement vers Félix, cherchant son réconfort, alors qu'Alma, restée en retrait, paraissait plongée dans une réflexion amère.

🕯✨️🕯

Mirabel était assise sur le toit de Casita, récemment reconstruite avec l'aide de toute la communauté. Le coucher de soleil peignait le ciel de nuances rouges et orangées, mais ses yeux bruns restaient ternes, vides. Elle restait immobile, sentant le vent jouer avec ses cheveux. Le monde semblait silencieux, presque trop paisible pour le tumulte qui régnait en elle.

Elle s'approcha lentement du bord du toit, regardant le vide en dessous. Ses pensées tourbillonnaient, sombres et lourdes.

Dois-je continuer ainsi ? se demanda-t-elle en silence. Vide. Reprochée. Insultée malgré tout ce qu'elle faisait pour tenter de se racheter. La douleur de se sentir une malédiction pesait lourdement sur ses épaules, une charge qu'elle ne pouvait plus ignorer.

Elle avançait, un pas après l'autre, le regard fixé sur le sol loin en bas.

- Être une malédiction pour tous...Même pour soi-même, ça fait trop mal.

Elle ferma les yeux, laissant ses pieds franchir la limite. Le vent souffla plus fort contre elle, comme pour la retenir, mais elle se laissa tomber doucement en avant.

Soudain, une main ferme l'attrapa par le poignet. La prise était si forte qu'elle en fut brusquement tirée en arrière, son équilibre complètement brisé. Elle tomba sur les tuiles, le souffle coupé. Confuse, elle ouvrit les yeux, son cœur battant à tout rompre.

C'était Dolores. Ses yeux, d'habitude si calmes et contrôlés, étaient grands ouverts, remplis d'horreur. Elle respirait fort, le choc palpable sur son visage.

- Qu'est-ce que tu fais, Mirabel ?! s'exclama-t-elle d'une voix tremblante, son ton un mélange de colère et de panique. Tu comptais...T-Tu comptais vraiment sauter ?!

Mirabel resta silencieuse, figée. Son corps tremblait légèrement, pas à cause du vent, mais à cause de la peur, ou peut-être de la honte. Elle détourna le regard, incapable de soutenir celui de Dolores.

- P-Pourquoi...Pourquoi Dolores ? Pourquoi tu m'as arrêtée ? murmura Mirabel, la voix cassée, presque inaudible.

Dolores secoua la tête, incapable de cacher ses larmes. Elle s'agenouilla devant sa cousine, ses mains toujours accrochées aux épaules de Mirabel.

- Parce que je tiens à toi, idiote ! cria-t-elle, une émotion rare perçant dans sa voix. Tu crois que personne ne t'aime ? Que tu es une malédiction ?! C'est faux ! Tu es importante, Mirabel. Peut-être que tu ne le vois pas, mais on a besoin de toi. J'ai besoin de toi !

Mirabel ouvrit la bouche pour répondre, mais rien ne sortit. Les mots de Dolores, pleins d'émotion et de vérité, s'infiltraient lentement dans les couches de douleur qu'elle portait.

Dolores serra Mirabel dans ses bras, son visage contre l'épaule de sa cousine. Elle continua, la voix brisée :

- Tu n'as pas le droit de partir comme ça. Pas après tout ce qu'on a traversé ensemble ! Je sais que tu te sens vide, que tout semble noir, mais je te promets qu'on va t'aider à guérir. Mais tu dois nous laisser t'aider, Mirabel. S'il te plaît...

Mirabel se recula brusquement des bras de Dolores, ses yeux bruns, encore ternis par l'épuisement et la douleur, fixant sa cousine avec une froideur inhabituelle. Sa voix tremblait légèrement, mais elle ne fléchit pas.

- Arrête de faire du cinéma, Dolores, lâcha Mirabel avec un soupir las. Toi et mes sœurs, vous n'arrêtiez pas de m'harceler pour que je vous rende vos dons, comme si c'était la seule chose qui comptait !

Dolores resta figée, ses yeux remplis de regret, mais Mirabel détourna le regard, évitant toute confrontation. Elle passa une main nerveuse dans ses cheveux avant de reprendre :

- Je pensais aussi que tu me trouvais toujours aussi vilaine, pire qu'Abuela...Sa voix se brisa légèrement avant qu'elle ne se reprenne. Que même Camilo était aveugle pour me faire confiance !

Dolores ouvrit la bouche, cherchant des mots pour répondre, mais aucun son n'en sortit. Elle semblait désemparée face à la froideur de Mirabel.

- Va retrouver ton beau Mariano et laisse-moi tranquille, prima, ajouta Mirabel avec un ton amer, en serrant ses poings pour contenir sa frustration.

Elle tourna les talons, prête à partir, mais quelque chose dans la façon dont Dolores baissa la tête, les épaules tremblantes, la fit hésiter une fraction de seconde. Toutefois, elle secoua la tête, comme pour chasser ce moment de doute, et s'éloigna rapidement, son pas rapide trahissant l'orage qui grondait encore dans son cœur.

Dolores resta immobile, le regard vide, murmurant doucement pour elle-même :

- Je voulais juste m'excuser, Mirabel...

Mirabel marchait d'un pas rapide et déterminé dans le couloir, ses yeux vides fixant le sol. Elle serrait les poings, une colère froide brûlant en elle. Lorsqu'elle atteignit la porte de la chambre d'Isabela, elle s'arrêta brusquement en entendant des pas précipités derrière elle.

Dolores, essoufflée, l'attrapa doucement par le bras.

- Mirabel, écoute-moi ! lui dit-elle, sa voix tremblant légèrement.

Mirabel retira brutalement sa main, lançant un regard glacial à sa cousine.

- Ne me touche pas, Dolores. Elle murmura, sa voix basse mais pleine de reproches. Tu étais dans le plan. Comment as-tu pu accepter ça ? Comment as-tu pu laisser Isabela rendre Camilo malade juste pour attirer l'attention ?

Dolores écarquilla les yeux, visiblement prise au dépourvu.

- M-Mirabel...J-Je...C-Ce n'est pas ce que tu crois !

Mais Mirabel n'était pas d'humeur à écouter. Elle fit un pas en avant, ses sourcils froncés.

- Tu savais, Dolores. Tu savais qu'Isabela voulait manipuler Camilo, et tu n'as rien dit. Tu as sacrifié sa santé pour quoi ? Pour un miracle ? Sa voix se brisa légèrement, laissant entrevoir la douleur derrière sa colère.

Dolores resta sans voix, son regard passant de Mirabel à la porte derrière elle.

- Comment sais-tu ça ? murmura-t-elle finalement, la panique palpable dans sa voix.

Mirabel haussa les épaules, un sourire amer apparaissant sur son visage.

- J'ai mes sources, prima. Peut-être que sans magie, vous n'êtes pas aussi discrètes que vous le pensez ! Elle recula légèrement, sa voix devenant presque un murmure. Je voulais juste vous confronter, mais maintenant que je vois ta réaction...Je n'ai même plus besoin de réponses.

Avant que Dolores puisse ajouter quoi que ce soit, Mirabel tourna les talons, laissant sa cousine figée dans le couloir, un mélange de honte et de peur dans les yeux.

🕯✨️🕯

Plus tard, Mirabel, toujours silencieuse, se tenait à l'écart, les bras croisés et le regard baissé, évitant de croiser celui des membres de sa famille. La pièce était imprégnée d'une tension palpable. Julieta et Pepa, visiblement en colère, tournaient en rond devant Isabela, Luisa, et Dolores, qui gardaient la tête baissée, prises de remords.

Julieta haussa la voix, son ton chargé d'une rare sévérité :

- Vous savez dans quel état est votre cousin/frère et ce que votre comportement a causé ! Comment avez-vous pu le laisser croire qu'il n'était pas important, ou pire, blâmer indirectement Mirabel encore une fois ? Est-ce que vous ne voyez pas tout ce qu'elle endure ?

Pepa, les bras gesticulants avec nervosité, ajouta :

- Camilo n'est pas le seul à souffrir ! Mirabel s'efforce de garder la tête haute, malgré tout ce qu'elle traverse, et vous trouvez le moyen de la rabaisser en continuant ce cycle de méchanceté passive ?

Isabela essuya discrètement une larme, incapable de soutenir le regard de sa mère. Luisa semblait plus abattue que jamais, le poids des reproches l'écrasant, tandis que Dolores jetait de rapides coups d'œil nerveux autour de la pièce, cherchant du réconfort sans en trouver.

Félix, observant la scène depuis un coin de la pièce avec Antonio dans les bras, murmura à Abuela et Bruno :

- Elles ont clairement dépassé les limites cette fois...

Abuela hocha la tête, le visage grave, mais elle resta silencieuse, observant Mirabel de loin avec un mélange de culpabilité et de tristesse. Bruno, pour sa part, croisa les bras, son regard passant de Mirabel aux coupables.

Camilo, visiblement plus en forme qu'il ne l'avait été ces derniers heures, s'approcha lentement de Mirabel, qui restait immobile. Il posa une main hésitante sur son épaule, mais elle ne réagit pas. Il chuchota avec douceur :

- Prima, ça va ? Tu ne devrais pas rester ici.

Mirabel finit par lever les yeux, glacials et sans émotion, avant de les fixer sur Isabela, Luisa, et Dolores. Son regard, empreint d'une intensité froide, les fit frissonner. Elle avança lentement, son corps rigide et ses poings serrés, son aura pesant sur toute la pièce.

- Alors, c'est ça ? fit-elle d'une voix basse mais tranchante. Vous passez des jours à me regarder de haut, à m'ignorer, et maintenant vous faites souffrir Camilo à cause de votre incapacité à accepter vos propres erreurs ?

Ses yeux, sombres et perçants, s'arrêtèrent sur chaque membre de sa famille avec une froideur qui glaça l'air. Sa posture était rigide, mais ses mains tremblaient légèrement, trahissant une tempête d'émotions contenues.

Elle commença à chanter doucement, presque comme un murmure, sa voix rauque reflétant une profonde lassitude.

Ne parlons pas du miracle-no-no, non
Ne parlons pas du miracle !

Sa posture était rigide, mais ses mains tremblaient légèrement, trahissant une tempête d'émotions contenues.

Mais, ce jour-là, tout semblait en harmonie (le plus beau jour de nos vies).
Des étoiles dans les yeux, aucun nuage dans le ciel cette nuit ! (pas d'ombre dans la nuit).

Elle leva un doigt accusateur en désignant sa grand-mère.

Abuela tenait son regard comme un feu vacillant (chandelle en tremblant)

À moi de vous guider, mais à quel prix vraiment ? (Je vois tous vos doutes)

Elle désigna Isabela, qui détourna immédiatement les yeux, mal à l'aise sous le poids du regard de sa sœur cadette. Mirabel soupira lourdement, secouant la tête. Elle avança vers elle d'un pas brusque, saisissant son épaule avec une fermeté inattendue. Isabela se raidit, les yeux écarquillés, déconcertée par ce contact. Mirabel se pencha légèrement vers elle :

Isabela, sous ta perfection se cache le doute qui gronde ! (Pourquoi cacher que ton monde vacille dans chaque seconde ?)

Isabela, bouche bée, restait immobile, incapable de répondre.

Puis, Mirabel se détourna brusquement et se dirigea vers Luisa, qui, déjà nerveuse, recula légèrement. Mirabel n'hésita pas et posa sa main sur son bras, serrant juste assez pour capturer son attention. Luisa cligna des yeux, les lèvres tremblantes.

Luisa, ce fardeau, ces attentes, tout cela te brise ! (Mais sous la pression, ta force parfois agonise).

Le regard de Luisa devint vitreux, et elle détourna les yeux, incapable de soutenir celui de Mirabel. Revenant au centre de la pièce, elle leva les bras, tournoyant légèrement pour balayer du regard l'ensemble de sa famille.

Sous le poids des secrets, tout finit par éclater !

Puis, elle s'arrêta brusquement. Elle ferma les yeux et laissa échapper un long soupir. Lorsqu'elle les rouvrit, elle fixa ses pieds, comme si elle ne pouvait plus supporter de regarder qui que ce soit.

Ne parlons pas du miracle-no-no, non !
Ne parlons pas du miracle !

Mirabel s'avança lentement vers Dolores, chantonnant d'une voix basse et troublante, son regard fixé comme une lame sur sa cousine.

Je vivais dans la peur de cette malédiction, chuchotant, balbutiant,
Des pleurs étouffés, des cris d'appel cachés sous un masque souriant !
Je voyais en chacun de vous des failles que vous taisiez,
Vos secrets enfouis, vos forces usées ?

En un instant, elle tendit la main et attrapa le bras de Dolores, ses doigts fermes mais glacés. Dolores sursauta, étouffant un cri, tandis que Mirabel murmurait d'une voix grave et presque hypnotique :

Dolores, ton don est un murmure pesant, oppressant,
Tu entendais tout, mais mes cris, si faibles, passaient au vent.
Est-ce que je suis vraiment la méchante de votre rêve enchanté ?

Dolores se figea, son souffle court, son visage envahi par une peur qu'elle peinait à masquer. Les autres membres de la famille, surpris par l'intensité de l'échange, restaient immobiles, incapables d'intervenir.

Ou voyez-vous enfin la vérité dans ma réalité ?

Mirabel, son visage fermé et dépourvu de toute émotion, fixait sa famille. Chaque membre des Madrigal semblait sur le point de dire quelque chose, mais aucune parole n'osait franchir leurs lèvres. Le silence était assourdissant, interrompu soudainement par une action inattendue.

En un instant, Mirabel n'était plus à sa place. Elle était derrière Camilo, surgissant comme une ombre silencieuse. Ses lèvres s'étirèrent en un sourire énigmatique tandis qu'elle entonnait une mélodie basse, presque murmurée, mais teintée d'une étrangeté inquiétante.

Ça donne des frissons,
C'est une vraie malédiction !

Camilo sursauta violemment, son corps se raidissant, et il se retourna vivement pour faire face à sa cousine. Mais elle n'était déjà plus là. Elle s'était déplacée avec une fluidité presque spectrale pour se tenir devant Félix, qui avait figé sur place, son visage marqué par une incompréhension mêlée d'inquiétude.

Vous échangez vos vies contre une destinée,
Mais au final, c'est une cage dorée !

Mirabel le fixait, ses yeux sombres et vides, mais son regard n'avait ni animosité ni chaleur. Juste un vide terrifiant.

Sans un mot, elle détourna les yeux et se dirigea vers ses parents. Son pas était lent, mais chaque mouvement semblait calculé, comme si elle exécutait une danse silencieuse.

Il voit ton esprit, il rit quand tu cries !

Elle s'arrêta brièvement devant Julieta et Augustín, mais elle ne leur adressa ni regard ni parole. Juste un instant suspendu, assez pour que le malaise s'intensifie.

Puis, elle pivota, se dirigeant vers le centre de la pièce. Elle fit face à tout le monde, levant légèrement le menton, et reprit sa chanson.

Ne parlons pas du miracle - non, non,
Ne parlons pas du miracle !

Mirabel se tenait face à Pepa, Bruno, et Julieta, les fixant intensément. Un sourire presque énigmatique étirait ses lèvres tandis qu'elle commençait à fredonner, puis à chanter, une mélodie douce mais emplie d'une tension palpable. Sa voix résonnait, claire et ferme, portant des paroles qui semblaient à la fois reprocher et libérer. Elle désigna d'abord Pepa, tendant un doigt accusateur mais calme.

Elle t'a empêché de pleurer, de ressentir ce que tu voulais (non, non),

Pepa, figée, serra les poings, son visage oscillant entre la culpabilité et la douleur. Elle ouvrit la bouche pour parler, mais aucun son n'en sortit.

Puis Mirabel pivota vers Bruno. Sa voix prit une teinte plus douce, presque moqueuse, mais pas sans une once de tristesse.

Elle t'a poussée loin de chez toi, abandonnant ton vrai "toi" (non, non).

Bruno baissa les yeux, triturant nerveusement son poncho. Son visage était marqué par la honte et le regret, mais il n'osa pas interrompre.

Enfin, Mirabel se tourna vers Julieta, sa mère. Sa voix se fit plus dure, presque tranchante, malgré les tremblements qui révélaient la profondeur de ses blessures.

Elle a fait briller mes sœurs, m'a laissée dans l'ombre, oubliée,
Car je n'avais pas de miracle à célébrer ?

Julieta, les bras croisés, s'effondra légèrement sous le poids de ces mots. Ses lèvres tremblaient, et ses yeux brillaient de larmes non versées. Elle tenta de parler, mais Mirabel la coupa avec un geste fluide, reprenant sa chanson.

Mirabel commença alors à tourner lentement autour d'eux, le cercle devenant une scène dans laquelle elle exposait leurs fautes, mais aussi leurs fardeaux.

Et voilà, c'est le destin cruel de la famille Madrigal !

Le regard perdu, elle s'arrête lentement, fixant avec intensité Abuela, qui semble incertaine, en proie à un mélange de honte et de culpabilité. Elle commence alors à chanter d'une voix tremblante, la mélodie douce, mais pleine de douleur, comme une lamentation.

Tu m'as dit qu'un jour, je l'aurais, cette destinée rêvée,

Avec chaque note, elle se rapproche lentement de sa grand-mère, ses pas mesurés, remplis de résignation et de colère non exprimée.

Puis, en un geste poignant, Mirabel relève ses manches, dévoilant des cicatrices et des marques laissées par des années de douleur et de souffrance des blessures physiques, mais aussi émotionnelles, invisibles aux yeux de tous sauf aux siens.

Mais tout ce que tu m'as donné, ce sont des blessures à jamais gravées !

Elle laisse sa famille dans l'ombre, ne cherchant plus leur soutien ni leurs regards. Ses yeux baissés, elle chantonne doucement, tremblante, le visage marqué par des larmes qu'elle refuse d'admettre. Le son de sa voix se fait de plus en plus faible, presque comme une prière désespérée, mais sa volonté de se détacher de tout cela reste évidente.

Depuis ce souffle sur la chandelle,
Mon cœur s'éteint, il chancelle.
Mais je l'entends encore...(Casita)

Elle ferme les yeux et, soudainement, sans prévenir, elle place ses mains sur ses oreilles. Le geste est vif, presque impulsif, comme pour se protéger de la douleur qu'elle ne peut plus supporter.

Une part de moi s'en est allée ce soir-là,

Elle ignore délibérément les regards pleins d'inquiétude de sa famille, se murant dans son propre monde. Elle ne veut plus les entendre, ne veut plus leur pitié ni leurs excuses. Dans cette pièce, seule la mélodie de sa chanson lui appartient.

Et pourtant, je l'entends encore...

Les membres de sa famille échangent des regards furtifs, une inquiète culpabilité dans leurs yeux, mais Mirabel, absorbée par ses propres démons, continue de chanter, ses mains crispées sur ses oreilles, cherchant à étouffer la réalité.

Mirabel, d'un coup, releva brusquement la tête, son visage vide d'émotion, les yeux presque glacés, un regard qui semblait coupé de toute humanité. Un ricanement froid s'échappa de ses lèvres, un son aigre qui dénotait bien plus de douleur que de malice.

Hmm, le miracle...Parlons du miracle.
Pourquoi faut-il toujours taire cette histoire ?
Éloignez-le de moi, pardonnez-moi, faites qu'il s'efface avec le soir !

Ses yeux prenaient une teinte jaunâtre, presque surnaturelle, tandis qu'elle se tenait là, ses mains placées derrière son dos comme une silhouette menaçante.

Suis-je donc la malédiction des Madrigal ?

Elle se mit à chanter, mais ce n'était pas une chanson ordinaire. Ses paroles se mêlaient, se tordaient et se fondaient les unes dans les autres comme une étrange mélodie dissonante, un enchevêtrement qui créait une harmonie perturbante, comme si ses mots étaient porteurs d'une puissance qu'elle n'avait jamais connue auparavant. Chaque phrase, chaque son était une vibration douloureuse qui semblait déstabiliser tout autour d'elle.

Isabela, les yeux écarquillés, était complètement stupéfaite par ce qu'elle voyait. La confusion et l'incompréhension marquaient son visage tandis qu'elle reculait lentement, réalisant qu'elle ne reconnaissait plus la Mirabel qu'elle pensait connaître. Luisa, elle, frissonnait, un frisson de peur parcourant son échine. Ses yeux cherchaient désespérément une explication, mais elle n'en trouvait aucune, son cœur battant à tout rompre dans sa poitrine.

Dolores, de son côté, plaquait sa main sur sa bouche, un geste instinctif pour étouffer l'angoisse qui montait en elle. Elle savait, elle ressentait au fond d'elle que ce n'était pas normal, que ce n'était pas simplement de la colère ou de la tristesse. Ce qu'elle voyait là dépassait la simple perte de contrôle.

Pepa, Julieta, et Bruno, échangèrent des regards bouleversés, figés sur place, sans savoir comment réagir. La tension dans la pièce était à son comble. Abuela, habituellement une figure d'autorité calme, était figée, son visage marqué par l'incompréhension et une peur sourde qu'elle n'avait pas montrée depuis longtemps. Antonio, les yeux remplis de douleur et d'incertitude, détourna lentement le regard, incapabe de faire face à la scène qui se déroulait devant lui.

Félix et Augustín étaient pétrifiés, leurs corps ne répondant plus, comme s'ils étaient devenus les témoins silencieux d'une transformation irréversible. Enfin, Camilo, qui observait tout cela avec une expression de tristesse profonde, ne pouvait que regarder sa cousine, se sentant impuissant. Le monde semblait s'effondrer autour d'eux alors que Mirabel, cette fois, était bien plus qu'une simple cousine ou fille. Elle était devenue un autre être, une force incontrôlable, et personne ne savait plus quoi faire ni quoi dire pour la ramener.

Mirabel s'arrêta soudainement au milieu de la pièce, son regard vide fixant le sol comme si elle cherchait quelque chose de perdu, un sens, une raison. Ses yeux, autrefois pleins d'émotion et de vie, étaient désormais ternes, un marron sans éclat, une absence totale.

Ne parlons pas du miracle, non, non.
Pourquoi ai-je parlé du miracle ? Oh, non !

Elle fredonna doucement, sa voix presque imperceptible, comme un dernier souffle dans l'immensité d'un vide qu'elle n'arrivait plus à combler. Chaque note semblait suspendue dans l'air, lourde de tristesse, mais aussi de résignation. Ses mains glissèrent lentement sur ses épaules, une tentative désespérée de se rassurer, de se protéger contre la tempête intérieure qui faisait rage.

Ne parlons pas du miracle,
J'aurais dû taire ce fichu miracle !

Puis, avec un soupir presque inaudible, elle se laissa tomber lentement sur le sol, ses genoux pliant sous son poids, comme si l'effort de supporter sa propre douleur était devenu trop lourd. Ses yeux se fermaient lentement, cherchant un peu de paix dans cette obscurité intérieure qui l'envahissait. Elle n'entendait plus rien d'autre que son propre chant, ses dernières paroles fredonnées s'éteignant dans le silence de la pièce.

Autour d'elle, la famille se tenait figée, leurs regards remplis de confusion, d'inquiétude et de chagrin.

Les voix s'élevaient, cherchant à la rejoindre, mais elles semblaient si lointaines. Ses parents, son oncle Bruno, sa tante Pepa, et même son cousin Camilo...Chacun appelait son nom avec inquiétude, comme s'ils étaient tous là pour la protéger, pour la ramener à la raison.

- Mirabel, tu ne peux pas rester comme ça !, entendait-elle la voix de Julieta, pleine de tendresse et de préoccupation. Viens, mi vida, viens nous parler !

Mais Mirabel ne répondait pas. Elle se contentait de regarder fixement ses mains, le cœur battant dans sa poitrine, se demandant si elle méritait vraiment leur attention. Et puis il y avait aussi Camilo, avec sa voix familière, un peu plus douce que d'habitude, mais toujours pleine de cette touche d'inquiétude.

- Prima, s'il te plaît, ne reste pas là toute seule...On a besoin de toi !

Les autres voix se mêlaient, mais elle ne les écoutait presque plus, trop fatiguée pour se battre contre ce poids intérieur. Elle avait le sentiment d'avoir tout gâché. Que le lien qu'elle avait avec sa famille, celui qui semblait autrefois si fort, était maintenant brisé.

Mais au fond d'elle, elle savait qu'ils étaient là pour elle. La famille, malgré tout, était là, et c'était peut-être cela qui la faisait tenir, bien que ce sentiment de vide la rongeait de l'intérieur. Elle se leva lentement, jetant un dernier regard à l'ombre du monde qui l'entourait, avant de se diriger vers eux, sachant au fond d'elle-même qu'elle ne pouvait pas tout porter seule.

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