Chapitre 20 : Tension !

Dans la Casita, Mirabel est assise sur un tabouret bas, derrière Camilo, qui s'est installé devant elle avec un sourire malicieux. Mirabel, bien que son visage reste neutre et ses yeux toujours empreints d'une certaine absence, s'affaire doucement à tresser les cheveux bouclés de son cousin. Camilo, fidèle à son caractère espiègle, tourne légèrement la tête pour lui lancer une plaisanterie :

- Alors, prima, tu comptes faire de moi un modèle pour les habitants du village ou quoi ? Avec ta créativité, ils vont me demander des tresses tous les jours.

Mirabel ne répond pas immédiatement. Elle termine une mèche, prenant soin de bien entrelacer les boucles avec une précision presque mécanique, avant de murmurer :

- Je tresse juste pour passer le temps, Cami.

Le ton est monotone, mais Camilo ne se laisse pas démonter.

- Eh bien, heureusement que tu as choisi mes cheveux et pas ceux d'Antonio. Avec ses boucles, on aurait fini demain matin ! plaisante-t-il.

Un très léger étirement au coin des lèvres de Mirabel pourrait presque être pris pour un sourire, mais elle reste impassible. Camilo, cependant, continue de jouer les comédiens pour essayer d'alléger l'atmosphère.

- Bon, et si je faisais un tour comme ça dans le village ? Tout le monde dirait : "Regardez Camilo, le Madrigal stylé !" Pas besoin de don pour être magnifique, hein ?

Mirabel tire doucement sur une mèche pour ajuster la tresse, interrompant ses divagations. Elle murmure, presque imperceptiblement :

- Tu n'as pas besoin de faire semblant, primo.

Surpris par ce commentaire, Camilo se tourne vers elle, le visage plus sérieux.

- De quoi tu parles ? Je ne fais pas semblant, prima. Je veux te voir sourire, c'est tout. Ça me manque de te voir heureuse.

Le regard de Mirabel vacille un instant. Elle baisse les yeux sur les cheveux de son cousin, reprenant son travail en silence. Camilo, déterminé à ne pas laisser tomber, finit par dire doucement :

- Je sais que tu te sens vide, mais tu sais quoi ? Tresser mes cheveux, c'est déjà un bon début. Parce que ça veut dire que tu es là avec moi, et ça compte.

Cette fois, Mirabel s'arrête complètement, ses mains suspendues dans les cheveux de Camilo. Elle reste silencieuse, mais pour la première fois, une étincelle fugace traverse son regard.

Puis elle hocha la tête, posant les élastiques sur la table après avoir ajusté la coupe de cheveux de Camilo, qui admirait son reflet dans une vitre cassée de Casita. Avec un sourire, il passa sa main dans ses cheveux fraîchement tressés, se redressant fièrement.

- C'est pas si mal que ça, hein ?, lança-t-il avec son éternel ton moqueur mais chaleureux.

Mirabel roula légèrement les yeux, sans perdre son calme.

- Tu dis ça comme si j'étais une débutante. Je fais ça depuis des années, primo !

Avant qu'il ne puisse répondre, Antonio arriva en courant, sa petite taille compensée par son enthousiasme. Essoufflé, il s'arrêta net devant eux, posant ses mains sur ses genoux pour reprendre son souffle.

- CAMILO ! Wow, pas mal la coupe !

Camilo, flatté, leva son pouce en guise de remerciement. Antonio releva la tête, un sourire malicieux sur son visage, avant de lâcher :

- Mais j'espère que t'es prêt, parce qu'on a besoin de toi au village !

- Pourquoi ? répondit Camilo, intrigué, en croisant les bras.

Antonio s'approcha avec l'air sérieux d'un messager porteur d'une grande nouvelle.

- Maintenant que tu as ton don, tout le monde te demande partout ! Il y a une file d'attente juste pour te voir !

Camilo éclata de rire, une étincelle de son ancien charme revenant dans son regard.

- Ah, je savais bien qu'ils ne pouvaient pas se passer de moi !

Mirabel observa la scène en silence, un léger sourire sur ses lèvres, même si une ombre semblait toujours flotter sur son visage. Antonio tira doucement sur la manche de Camilo.

- Allez, viens, c'est urgent !

Camilo haussa les épaules, prêt à partir, mais il se retourna une dernière fois vers Mirabel.

- Merci pour la coupe, prima. Je leur dirai que c'est grâce à toi si je suis aussi stylé !

- Tais-toi et file, Cami. répondit Mirabel avec un soupir amusé.

Alors que Camilo partait avec Antonio, Mirabel resta là, seule un instant, les yeux fixant le reflet laissé sur la vitre. La solitude dans son regard était perceptible, mais elle semblait décidée à ne pas laisser ses sentiments transparaître davantage.

Elle soupira doucement, s'arrêtant un instant, avant de ranger les affaires de coiffure.

C'est à ce moment-là que la porte s'ouvrit doucement, laissant apparaître Bruno et Pepa. Bruno semblait nerveux, ajustant maladroitement sa cape verte, tandis que Pepa, observait sa nièce avec une expression mêlant inquiétude et détermination. Mirabel leva à peine les yeux vers eux, reprenant son activité sans un mot.

Pepa s'avança la première, s'asseyant sur une chaise à côté de Mirabel. Elle prit une grande inspiration avant de demander doucement :

- Mirabel...Comment tu te sens ces derniers temps ? On sait que tu traverses quelque chose de difficile, mais on aimerait comprendre pour t'aider.

Bruno resta en retrait, croisant les bras et fixant le sol, mais il ajouta d'une voix hésitante :

- Oui, c'est juste...Je veux dire, on est là. Même si on ne sait pas trop quoi dire, on est là pour toi ?

Mirabel posa la brosse qu'elle tenait, ses doigts se serrant légèrement autour du bord de la table. Elle resta silencieuse quelques instants, puis murmura :

- Comment je me sens ? Je me sens vide, tío. Complètement vide !

Pepa pencha légèrement la tête, son expression se radoucissant tandis que la bruine au-dessus d'elle s'intensifiait légèrement.

- Vide ? Tu veux dire...Émotionnellement ?

Mirabel hocha la tête, les yeux fixés sur ses mains.

- Depuis que j'ai soufflé sur cette bougie, c'est comme si une partie de moi avait disparu. J'ai perdu quelque chose, mais je ne sais pas quoi !

Bruno s'approcha lentement, tirant une chaise pour s'asseoir en face d'elle.

- Peut-être que ce "vide", c'est lié à tout ce que tu as traversé et à ce que tu as laissé derrière toi ? C'est normal de se sentir perdue après tout ça, Mirabel.

- NORMAL ?! répéta Mirabel en le fixant avec une lueur de colère. Rien de tout ça n'est "normal", tío Bruno. Pendant dix ans, j'ai essayé d'exister dans cette famille, de trouver ma place. Et maintenant que j'ai détruit le miracle, je ne suis toujours qu'un fardeau à leurs yeux...

Pepa s'empressa de poser une main sur l'épaule de Mirabel.

- Ce n'est pas vrai ! On te doit tellement, Mirabel. Peut-être qu'on n'a pas su te le montrer avant, mais...

Mirabel se leva brusquement, s'éloignant d'eux pour regarder par la fenêtre.

- Vous dites ça parce que vous vous sentez coupables. Je ne ressens rien, tía Pepa. Pas de joie, pas de colère, pas d'amour, juste ce vide constant.

Bruno échangea un regard avec Pepa avant de demander doucement :

- Mirabel, est-ce que tu ressens ce vide...Comme si quelque chose te manquait ? Ou comme si tu avais perdu quelque chose en toi ?

Elle resta silencieuse un moment, réfléchissant. Puis, d'une voix tremblante, elle murmura :

- Peut-être...Je ne sais pas. Peut-être que c'est moi qui me suis perdue ?

Pepa se leva, s'approchant doucement d'elle, et prit ses mains dans les siennes.

- Alors, on va t'aider à te retrouver, Mirabel. Peu importe combien de temps ça prendra !

Bruno ajouta avec un sourire timide :

- On sera là, chaque étape du chemin. Tu n'as pas à porter tout ça seule, d'accord ?

Mirabel détourna les yeux, mais cette fois, une larme silencieuse roula sur sa joue. Elle hocha légèrement la tête, murmurant :

- Merci...Mais je ne sais pas si je pourrai.

Pepa la serra doucement dans ses bras, tandis que Bruno posait une main réconfortante sur son épaule. Les trois restèrent là, dans un silence apaisant, cherchant ensemble un moyen d'apaiser les blessures invisibles qui pesaient sur Mirabel.

Elle soupira longuement dans les bras de Pepa, laissant une rare proximité s'installer entre elles. Elle releva légèrement la tête pour croiser les regards inquiets de Pepa et Bruno, ses yeux bruns toujours ternes, dénués de l'éclat qu'ils avaient autrefois.

- Vous avez aussi souffert, murmura-t-elle avec une voix rauque, mais posée, son ton vidé d'émotions vives.

Bruno pencha la tête, surpris, alors qu'elle poursuivait, regardant d'abord sa tante.

- Je sais ce que tu as enduré, tía. Les rumeurs, les jugements...Comme quoi tu ne contrôlais jamais tes émotions. Ça a dû être si épuisant de vivre avec cette pression constante, tout ça à cause du don que tu n'as jamais demandé.

Elle se tourna alors vers Bruno, son expression toujours neutre, mais sa voix marquée par une étrange douceur.

- Et toi, tío...Tu as dû fuir, vivre seul dans les murs, parce que tout le monde pensait que tes visions faisaient de toi un monstre. Je sais ce que ça fait d'être rejetée et incomprise.

Pepa serra Mirabel un peu plus fort, tandis que Bruno restait figé, les yeux écarquillés.

- Tu n'étais pas censée savoir tout ça, Mirabel, murmura-t-il.

- Je ne savais peut-être pas tout, mais je l'ai ressenti, répondit-elle en baissant la tête. C'est comme si toute cette douleur qui vous entourait avait trouvé refuge en moi. Je ne peux pas l'ignorer, même si je n'arrive plus à l'exprimer comme avant !

Un silence pesant tomba sur la pièce. Bruno sembla hésiter avant de se pencher légèrement en avant, analysant la posture de sa nièce.

- Mirabel...Peut-être que ce que tu ressens est plus qu'une simple tristesse. Ce que tu décris ressemble à un blocage émotionnel...Un traumatisme pourrait expliquer pourquoi tu as du mal à ressentir ou à exprimer ce que tu ressens ?

Pepa fronça immédiatement les sourcils, croisant les bras.

- Un blocage ? Peut-être, mais tu vois bien qu'elle reste connectée d'une certaine façon. Elle se confie à mes fils, elle comprend encore nos douleurs...Mais pourquoi ne peut-elle supporter que Camilo et Antonio ?

Mirabel haussa doucement les épaules avant de murmurer :

- Parce qu'eux, ils ne m'ont jamais fait de mal. Antonio, il est si pur et Camilo malgré tout, il reste fidèle à ce qu'il ressent pour moi. Mais pour les autres...Elle ferma les yeux un instant, retenant des mots qu'elle ne voulait pas prononcer.

Pepa s'agenouilla légèrement pour être à sa hauteur et posa une main sur son épaule.

- Mirabel, personne ne t'en veut ici. Nous avons tous commis des erreurs, moi y compris. Mais tu n'as pas à porter tout ça seule. On est là pour toi !

Bruno hocha la tête en ajoutant doucement :

- Et si tu ressens ce vide, peut-être qu'on peut commencer à le remplir...Avec nous ?

Mirabel leva un regard encore incertain vers eux, les larmes menaçant de tomber, mais elle les retint encore une fois.

- Je ne sais pas. Je ne sais même pas si je peux.

Pepa et Bruno échangèrent un regard déterminé, l'un cherchant déjà comment l'aider, tandis que l'autre se promettait de lui redonner un jour l'éclat qu'elle avait perdu.

🕯✨️🕯

La lumière douce de l'après-midi éclairait le chantier, où Mirabel travaillait sur l'un des murs de la future Casita. Elle tenait un pinceau, la main couverte de taches de peinture bleue et verte, concentrée sur un motif qu'elle dessinait soigneusement. Camilo était à ses côtés, un large sourire sur le visage, tenant une boîte de peinture et observant son travail avec admiration.

- Tu devrais rajouter un petit papillon ici, suggéra-t-il, pointant une partie vide du mur.

- Merci, maestro, répondit Mirabel d'un ton sarcastique, mais elle esquissa un sourire discret, appréciant sa présence. Camilo semblait toujours trouver des moyens de la faire se sentir un peu moins lourde, un peu moins seule.

Non loin d'eux, Isabela se tenait, les bras croisés, son expression agacée évidente. Elle peignait elle-même un autre mur, mais ses coups de pinceau étaient brusques, et ses regards vers Mirabel remplis d'une frustration mal dissimulée.

- Camilo, tu ne pourrais pas aider au lieu de jouer au critique d'art ? lança-t-elle sèchement.

Camilo leva les mains en signe de défense, sa voix malicieuse.

- Je supervise, Isa. Et puis, avoue que Mirabel fait un meilleur travail que toi !

Isabela roula des yeux avant de répondre :

- Au moins, je fais quelque chose. Pas comme certains qui passent plus de temps à parler qu'à travailler !

Mirabel, jusque-là concentrée sur son mur, posa brusquement son pinceau.

- Je peux peindre seule, merci. Si ça t'ennuie de travailler à mes côtés, tu peux aller ailleurs, Isa.

Le silence s'installa un instant. Isabela fusilla Mirabel du regard, mais ne répondit pas. Mirabel reporta son attention sur son mur, le cœur plus lourd, mais bien décidée à ne pas montrer sa douleur. Camilo, lui, posa une main réconfortante sur l'épaule de sa prima.

- Ignore-la. Isa est juste Isa, murmura-t-il doucement, essayant de la réconforter. Ton mur est magnifique ! Je l'aime tellement.

Mirabel hocha la tête, mais son regard restait fixé sur le mur devant elle.

- Je veux juste qu'on finisse ça, murmura-t-elle, la voix tremblante.

Camilo resta silencieux, respectant son besoin d'espace, mais il resta près d'elle, peignant quelques détails ici et là pour l'aider. Derrière eux, Isabela, agacée, laisse tomber son pinceau bruyamment sur la table en s'exclamant avec frustration :

- Si seulement, Mirabel, tu n'étais pas si égoïste ! Pourquoi Camilo est le seul à avoir récupéré son don ? Je veux récupérer mon don, moi aussi !

Ses mots résonnent durement dans la pièce, attirant immédiatement l'attention de Camilo. Mirabel, quant à elle, reste immobile, le regard figé sur son travail, ignorant les paroles de sa sœur aînée comme une tentative désespérée de se protéger. Son visage trahit cependant une fatigue émotionnelle profonde, et son silence en dit long.

Camilo, fronçant les sourcils à l'égard d'Isabela, se redresse. Visiblement énervé, il marche rapidement vers sa cousine et s'interpose.

- Ça suffit, Isabela ! Pourquoi tu t'en prends à elle comme ça ? Mirabel n'a rien demandé de tout ça !

Sa voix est ferme, son regard perçant. Isabela croise les bras, un air de défi sur le visage, mais Camilo continue, sans laisser la place à une réponse :

- Tu ne comprends rien à ce qu'elle traverse. Tout ce qu'elle sait, c'est que dès qu'elle a réussi à me faire confiance et à surmonter la peur qu'elle avait à cause de tout ce qu'elle a subi, mon don est revenu. Tu veux récupérer ton don, alors peut-être commence par essayer d'aider ta petite sœur au lieu de la démolir ! Mirabel est fragile, et toi, tu fais tout ce qu'il faut pour la briser encore plus ?!

Le silence tombe lourdement. Isabela est déstabilisée par les paroles de Camilo, tandis que Dolores, restée en retrait, observe calmement, un soupir discret échappant de ses lèvres. Luisa, qui apporte les matériaux, visiblement mal à l'aise, détourne les yeux.

Mirabel, les poings serrés sur ses genoux, murmure finalement, d'une voix basse mais lourde de tristesse :

- Fragile ? Peut-être que c'est vrai. Mais je n'ai pas besoin qu'on me défende, Camilo. Laisse tomber !

Sans un mot de plus et elle rentre à l'intérieur, ses pas résonnant dans le silence. Camilo regarde Isabela avec une pointe de déception avant de la dépasser pour suivre Mirabel.

🕯✨️🕯

Isabela, Luisa, et Dolores étaient assises dans une pièce calme, leur conversation initialement légère mais bientôt teintée d'un mécontentement croissant. Isabela, les bras croisés, fixait Dolores et Luisa avec un mélange de frustration et de détermination.

- Je n'en peux plus de la façon dont Mirabel et Camilo sont inséparables ! Elle ne nous parle même pas correctement, et on dirait qu'elle a complètement oublié que nous existons. Et pire encore, elle n'a aucune intention de nous rendre nos dons ?

Dolores, assise avec un air fatigué, soupira.

- Isabela, tu exagères. Ce n'est pas comme si elle pouvait, nous rendre nos dons comme ça. La magie a disparu à cause de tout ce qui s'est passé avec Casita, pas juste à cause d'elle.

Luisa, qui se frottait les tempes, ajouta avec hésitation :

- Dolores a raison...Et puis, Mirabel est aussi confuse vis-à-vis du don de Camilo. Mais je dois admettre que c'est difficile. Sans ma force, je ne sais pas comment les gens normaux font pour tout gérer !

Isabela roula des yeux, visiblement agacée par leurs réponses.

- Vous ne voyez pas ce qui se passe ? Elle nous ignore ! Elle préfère rester collée à Camilo, alors qu'elle sait qu'on souffre. J'ai une idée pour lui montrer qu'elle n'a pas le droit de nous mettre de côté.

Luisa et Dolores échangèrent un regard perplexe.

- Qu'est-ce que tu as en tête, Isabela ? demanda Dolores, en fronçant les sourcils.

Isabela, un sourire presque malicieux sur le visage, s'approcha d'elles et murmura son plan.

- On pourrait rendre Camilo un peu malade....Rien de grave, juste un petit rhume ! Imaginez, Mirabel paniquera tellement qu'elle viendra enfin nous écouter ?!

Dolores se redressa, son expression immédiatement choquée.

- Isabela, tu plaisantes ? C'est mon petit frère ! Et sans la magie de tía Julieta pour guérir, même un rhume peut être dangereux ?!

Luisa, hésitant, ajouta :

- Dolores a raison. Mamá nous a dit qu'on devait éviter de tomber malade à tout prix ! Et puis, c'est un peu extrême, non ? Je veux dire, on ne sait même pas si Mirabel changerait d'attitude pour autant.

Isabela, cependant, leva la main pour les interrompre, ses yeux brillants d'une étrange détermination.

- Oh, arrêtez d'être dramatiques. Ce n'est qu'un petit bain forcé dans la rivière ! Il attrapera un léger rhume, rien de plus. Je ne veux pas le blesser, juste attirer l'attention de Mirabel.

Dolores, bien que clairement opposée, semblait hésiter face à l'assurance d'Isabela. Luisa, qui voulait éviter toute confrontation, hocha faiblement la tête.

- Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée...Mais je suppose que ça pourrait marcher, si on est vraiment prudentes.

Isabela sourit, satisfaite, en regardant ses deux complices hésitantes.

- Parfait ! Maintenant, il ne nous reste plus qu'à attendre le bon moment. Vous verrez, ça nous aidera à enfin retrouver notre place dans cette famille.

Dolores regarda sa cousine avec appréhension, tandis que Luisa soupira, visiblement mal à l'aise avec le plan. Mais Isabela, confiante, se leva, prête à mettre en œuvre son idée.

En parlant du loup !

Camilo et Antonio jouaient paisiblement près de la rivière, le soleil couchant teignant l'eau d'un éclat doré. Camilo lançait un bâton pour que les petits animaux autour d'Antonio s'amusent, riant doucement avec son frère.

- Antonio, laisse les animaux, il est tard. On doit rentrer à la Casita, avant que mamá commence à s'inquiéter ! dit-il en regardant l'horizon.

Non loin de là, Isabela, Dolores, et Luisa étaient cachées derrière des buissons, échangeant des regards conspirateurs. Isabela murmura :

- Alors, qui va le faire ?

Dolores détourna les yeux, silencieuse, tandis que Luisa semblait mal à l'aise, jouant nerveusement avec une branche.

- Pas moi, murmura cette dernière.

Agacée, Isabela roula des yeux :

- Bien, je vais m'en occuper come d'habitude ! Vous êtes vraiment inutile ?!

Elle sortit discrètement de leur cachette, avançant avec précaution sur le sol mouillé pour ne pas faire de bruit. S'approchant derrière Camilo, elle donna un coup sec qui le fit basculer dans l'eau froide de la rivière.

Camilo jaillit hors de l'eau en criant, visiblement furieux. Ses cheveux trempés dégoulinaient tandis qu'il éternuait violemment.

- C'EST QUOI TON PROBLÈME ISABELA ?! hurla-t-il.

Isabela haussa les épaules nonchalamment, lançant un regard faussement innocent avant de s'élancer en courant vers la Casita. Dolores et Luisa, un peu coupables mais amusées, la suivirent rapidement, évitant le regard furieux de Camilo.

Antonio accourut immédiatement, son visage marqué par l'inquiétude.

- Cami, ça va ? demanda-t-il timidement.

Camilo passa une main sur son visage, toujours frissonnant, puis força un sourire pour rassurer son frère.

- Ça va, Toñito, c'est rien.

Il éternua à nouveau, son nez rougi par le froid, mais il reprit un ton plus léger :

- Allez, il est vraiment temps de rentrer maintenant !

Antonio, toujours un peu inquiet, hocha la tête et le suivit tandis qu'ils s'éloignaient de la rivière. Camilo gardait le silence, le visage fermé, mais il serra doucement l'épaule de son petit frère comme pour montrer que tout allait bien. Antonio resta silencieux, mais son regard inquiet trahissait son malaise.

🕯✨️🕯

Camilo et Antonio viennent d'arriver à Casita, mais alors que son jeune frère rejoint sa mère, Camilo se sent soudainement mal. Il ressent une chaleur envahissante qui lui monte au visage, ses joues et son nez rougissent. Il est désorienté, un malaise qu'il ne comprend pas tout de suite. En fronçant les sourcils, il se rend compte que la cause de son malaise est plus qu'une simple fatigue. Il repense à ce qui s'est passé avant son arrivée : Isabela l'a poussé dans la rivière, un geste impulsif qu'elle a fait avec une colère qui, à présent, semble mal placée.

À ce moment-là, Mirabel descendait de sa chambre, son visage habituellement stoïque, mais cette fois, son regard se posa immédiatement sur Camilo. Elle le scrutait, et il ne pouvait cacher la rougeur de ses joues et son air déstabilisé. Mirabel s'approcha brusquement de lui, et il la vit poser sa main sur son front.

La surprise envahit Camilo, car pour la première fois, il percevait dans ses yeux un éclat d'inquiétude qu'il ne lui avait pas vu depuis longtemps. Elle murmura avec une note de gravité dans la voix :

- Camilo...Tu as de la fièvre !

Il essaie de se redresser, de faire comme si tout allait bien, mais son corps, en proie à la chaleur de la fièvre, le trahit. Mirabel le scrute un instant avant de réagir :

- Tu dois aller te reposer. Même si ma mère n'a plus son don, je vais la prévenir de ton état !

Elle se tourne pour partir, mais, avant de le laisser, elle se retourne à nouveau vers lui, le regard dur, mais inquiet, et lui demande, sans détour :

- Comment es-tu tombé malade, primo ?

Camilo, un peu gêné, hausse les épaules, une expression d'inconfort sur le visage.

- Isabela m'a poussé dans l'eau de la rivière...dit-il, avec un petit rire gêné, mais la gêne se transforme rapidement en malaise.

Mirabel fronce les sourcils, une lueur de colère dans ses yeux sombres.

- Cette peste...murmure-t-elle froidement. Ses mots sont teintés de frustration, mais aussi d'un souci sincère pour son cousin.

Elle s'approche de lui une fois de plus, d'un pas décidé, son regard se faisant plus ferme.

- Va dans ta chambre, dit-elle d'une voix sèche mais empreinte d'un certain protectorat. Je vais prévenir ma mère et tes parents !

Elle lève les yeux vers lui, son expression se radoucit un peu, mais son geste reste déterminé.

Camilo, reconnaissant mais aussi un peu perdu, acquiesce d'un mouvement de tête, et, avec un dernier regard vers elle, se dirige lentement vers sa chambre, tout en sachant que Mirabel n'était plus la même.

🕯✨️🕯

Julieta, toujours aussi préoccupée, se tenait près du lit de Camilo, scrutant attentivement son visage pâle et en sueur. Sa fièvre semblait avoir pris un tour inquiétant, et elle savait que sans ses pouvoirs de guérison, elle ne pouvait rien faire de plus pour l'aider rapidement. Pepa, debout près d'elle, observait Camilo avec des yeux emplis de terreur, se mordillant la lèvre inférieure.

- Est-ce qu'il va s'en sortir ?! répétait-elle, sa voix tremblante de peur.

Félix, tentant de calmer sa femme, posa une main sur son épaule et murmura quelques mots réconfortants, mais il ne pouvait cacher son propre malaise.

Julieta, les yeux toujours rivés sur son neveu, bougea doucement pour ajuster une couverture autour de lui. Ses mains tremblaient légèrement, et elle se mordait la lèvre, inquiète.

- Comment es-tu tombé malade, Camilo ? murmura-t-elle d'une voix douce, presque inaudible, se sentant coupable de ne pas avoir pu prévenir cette situation. Je t'avais dit de faire attention...

Camilo, bien que grognant sous l'effet de la fièvre, tourna faiblement la tête vers sa mère et murmura d'une voix faible mais distincte :

- C'est Isabela, tía...Elle m'a poussé dans l'eau de la rivière.

Julieta s'arrêta, ses yeux s'agrandissant en un mélange de confusion et de choc. Elle se tourna brusquement vers Pepa, qui était aussi stupéfaite que son mari.

- Isabela ? Mais pourquoi aurait-elle fait ça ?!

Pepa, les sourcils froncés, secoua la tête, visiblement confuse et en colère à la fois.

- Elle l'a poussé dans la rivière ? Pourquoi faire une chose pareille ?! ELLE VA M'ENTENDRE CETTE JEUNE FEMME ! Sa voix se brisa légèrement sous l'effet de l'émotion.

Julieta regarda Camilo d'un regard triste et protecteur, son cœur se serrant encore plus.

- Tu sais, mon garçon, nous allons te guérir, tout va bien se passer, lui dit-elle avec douceur, tout en cherchant fébrilement une solution, son esprit tournant à toute vitesse.

Mais l'incertitude de la situation, et l'absence de ses pouvoirs de guérison, la plongeaient dans une inquiétude grandissante.

Le regard de Pepa, tourmenté et frustré, s'intensifia alors qu'elle regardait son fils avec un amour désespéré.

- C-Comment ça a pu en arriver là ? murmura-t-elle, avant de se tourner vers sa sœur, les mains tremblantes.

Julieta, avec ses traits fatigués mais déterminés, était occupée à soigner Camilo. Il tremblait sous l'effet de la fièvre. Le stress de la situation, combiné à l'angoisse qui pesait sur la famille, était difficile à ignorer.

Félix était à côté de Julieta, tentant de la réconforter, tout en essayant de convaincre Pepa de sortir de la pièce.

- Mi vida, viens, laissons ta sœur travailler tranquillement, dit-il en essayant de calmer sa femme.

Mais Pepa, inquiète, insistait, les yeux remplis de colère et de peur.

- Mais FÉLIX, je m'inquiète pour notre fils ! Sa fille a rendu mon bébé MALADE ?! La voix de Pepa était tremblante, l'inquiétude palpable.

Félix, dans un soupir, tenta à nouveau de convaincre sa femme.

- Je sais Pepi, mais le stress n'est pas bon pour notre fils. Allons-y, laissons Julieta travailler ! Il faut que tu prennes du recul...Camilo a besoin de calme.

Pepa hocha la tête, mais pas sans un dernier regard angoissé vers son fils, avant de sortir de la pièce avec son mari.

Julieta, seule dans la pièce avec Camilo, soupira profondément. Elle se sentait à la fois coupable et impuissante. Ses mains tremblaient légèrement en essuyant le front de Camilo. La souffrance de son doux neveu était un fardeau qu'elle portait, et la tristesse dans ses yeux se mêlait à l'incompréhension.

Comment sa fille aînée, Isabela, pouvait-elle être la cause d'une telle rupture dans la famille, surtout avec le lien si particulier que Camilo et Mirabel partageaient ? Cela la tourmentait profondément. Puis, en voyant la détresse dans les yeux de Pepa, elle ressentait une douleur presque aussi vive pour elle. Sans son don, elle se sentait perdue, incapable de réparer les choses.

Elle se pencha un instant sur Camilo, murmurant quelques mots réconfortants.

Soudain, la porte de la pièce s'ouvre lentement, et Julieta, qui s'attendait à ce que ce soit Pepa, lève les yeux. À sa grande surprise, c'est Mirabel qui entre, les yeux remplis de larmes. Elle a l'air bouleversée, ses traits tirés par la fatigue et la douleur qu'elle porte en elle. Elle avance précipitamment, et, avant même que Julieta puisse dire quoi que ce soit, Mirabel tombe à genoux devant elle, la suppliant.

- Mamá, guérit Camilo !, crie-t-elle, sa voix brisée par l'émotion. Les larmes roulent sur ses joues alors qu'elle prend les mains de Julieta dans les siennes.

- J-Je t'en supplie, guérir mon primo...J-Je ne peux pas le perdre !

La panique et la peur envahissent Mirabel. C'est la première fois depuis un moment qu'elle laisse ses émotions déborder si ouvertement. Julieta, prise de court par cette scène, regarde sa fille dans les yeux. Le choc est immédiat. Julieta, qui était en train de gérer la situation avec calme et efficacité, se trouve maintenant face à une Mirabel vulnérable et brisée, implorant de l'aide.

Mirabel, accablée par le poids de la culpabilité et du vide qu'elle ressent depuis la perte de la magie, pleure sincèrement, tremblant de peur pour Camilo. Elle se sent impuissante face à la maladie de son cousin, se sentant encore plus coupable de ce qui s'est passé avec la perte de la bougie magique et les conséquences qui en ont découlé. Pour la première fois, elle se rend compte de l'importance que Camilo a pour elle, de l'impact qu'il a dans sa vie.

Julieta, émue par l'attitude désespérée de Mirabel, se penche lentement vers elle et la prend dans ses bras.

- Mirabel, calme-toi, murmure-t-elle, caressant doucement ses cheveux. Camilo va aller mieux, je vais tout faire pour l'aider. Nous allons traverser ça ensemble. Tu n'es pas seule !

Elle resserre son étreinte autour de sa fille, déplaçant la serviette de son neveu pour lui offrir un peu plus de fraîcheur. Julieta, touchée par l'amour que Mirabel porte à Camilo, se rend compte que la famille, malgré tout ce qui s'est passé, reste unie dans l'adversité.

Mirabel, épuisée et accablée par ses pensées, se redresse lentement de sa position. Elle murmure d'une voix froide, presque brisée :

- Isabela est allé beaucoup trop loin, mamà !

Ses yeux, remplis de tristesse et de frustration, se posent sur Camilo, endormi, avant de se tourner lentement vers sa mère, Julieta. Les larmes commencent à couler de ses yeux, tandis qu'elle se livre dans une douleur qu'elle ne peut plus retenir.

- Pourquoi je ne peux pas être heureuse, mamá ? sa voix tremble, désespérée. Pourquoi personne me laisse le choix de me racheter ? POURQUOI ?!

Elle pose ses mains sur son visage, submergée par le poids de la culpabilité et de l'épuisement émotionnel. Ses larmes ne cessent de couler, et elle se laisse aller, implorant silencieusement la compréhension qu'elle désire tant.

Elle regarde une dernière fois son cousin, Camilo, endormi, son cœur se serrant à la vue de son visage paisible.

- Je suis tellement reconnaissante envers lui pour m'avoir aider à me sentir mieux depuis la chute de Casita...Il est peut-être parfois idiot, mais je l'aime comme ça ! Je veux retrouver mon primo...murmure-t-elle d'une voix brisée, déposant sa tête près de lui sur le lit, comme si elle voulait se réconforter dans sa présence.

Julieta regarde sa fille, son cœur lourd de tristesse en voyant la distance entre elles. Ses yeux expriment un mélange de regret, de culpabilité et de douleur. Julieta approche doucement de Mirabel, posant sa main délicatement sur la tête de sa fille, caressant ses cheveux avec douceur, comme pour lui apporter un peu de réconfort.

- Je suis désolée, Mi vida, murmure Julieta d'une voix pleine de tendresse. Te voir comme ça me brise le cœur, encore plus que tu ne peux l'imaginer ! Depuis la reconstruction, le fait que tu ne sois pas aussi proche de moi pour que je puisse me racheter me fait tellement de mal. Mais je sais que, au fond, ce n'est pas de ta faute.

Mirabel, les yeux fixés sur Camilo qui semble toujours inconscient de ce qui se passe autour de lui, laisse échapper un profond soupir, le regard vide. Elle tourne lentement la tête vers sa mère, qui ne cesse de lui prodiguer des mots pleins de bienveillance.

- Je ne t'ai jamais détestée, dit-elle enfin, sa voix tremblante. J'étais juste confus et brisée. Ses mots sont à la fois un soulagement et une confession, comme si un poids immense venait d'être levé de ses épaules.

Julieta se rapproche encore plus, prenant doucement les joues de Mirabel entre ses mains. Ses yeux sont remplis de sincérité et de regrets, et elle lui répond :

- Je le vois, Mirabel. Tu avais des étincelles si magnifiques dans tes yeux, et elles ont disparu après la chute. Mais tes yeux sombres...Ils sont toujours magnifiques à mes yeux. Tu as toujours été spéciale pour moi ! À mes yeux, tu n'es pas une vilaine...Tu es ma fille, mon amour, mon oxygène, ma raison de vivre, ma vie entière !

Mirabel reste figée, surprise par ces paroles pleines d'amour et de réconfort. Les larmes, longtemps contenues, commencent à monter dans ses yeux, menaçant de couler. Puis, au moment où Julieta termine sa phrase, les yeux de Mirabel brillent brièvement d'une lueur dorée, un éclat qu'elle n'a pas ressenti depuis si longtemps. C'est comme si, en entendant ces mots, une étincelle d'espoir se rallumait en elle. Mais la lueur disparaît aussi vite qu'elle est apparue, laissant place à une intensité calme dans son regard.

- Je suis désolée de ne jamais t'avoir dit cela avant, mais contrairement à ton Abuela, je tiens toujours à toi ! Julieta ajoute, la voix remplie de sincérité, avant de lâcher délicatement le visage de Mirabel.

Mirabel, émue par ces paroles, ne peut retenir les larmes qui commencent à couler de ses yeux. Elles ne sont plus des larmes de douleur, mais de guérison.

- M-Mamá ? demande-t-elle, d'une voix brisée mais pleine d'espoir.

Julieta regarde ses mains, comme si elle venait de réaliser quelque chose de très puissant, avant de murmurer avec une étonnante douceur :

- M-Mirabel...Tu m'as rendu mon don !

Mirabel, abasourdie, reste figée. Elle n'a pas encore totalement compris ce qui se passe, mais une chaleur familière s'installe en elle. C'est comme si un poids invisible avait disparu, et que l'air autour d'elles était devenu plus léger.

- Je t'aime, mamá, dit Mirabel, en prenant Julieta dans ses bras.

Leur étreinte est silencieuse, mais elle est pleine de réconfort, de pardon et d'amour renouvelé. Julieta la serre plus fort, les larmes aux yeux.

- Allons, maintenant je peux guérir Camilo, murmure Julieta avec espoir, en posant son regard sur son neveu.

Mirabel, toujours stoïque mais apaisée, hoche la tête en murmurant doucement :

- S'il te plaît, il me manque...

Puis elle repose doucement sa tête sur le lit de Camilo, dans un geste protecteur. Sa souffrance commence à s'atténuer, mais la route de la guérison est encore longue. Mais pour la première fois depuis longtemps, elle ne se sent pas seule.

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