Chapitre 13
Adam
Le retour à Trout River se fit d'abord en silence. Abraham et ses hommes avaient rendu leur voiture et pris l'avion à Seattle au petit matin et nous n'étions plus que quatre dans la voiture de Connor alors que nous laissions la Péninsule d'Olympic dans notre dos. J'étais fatigué de ma nuit blanche, dévoré de questions sans réponses, et mes loups respectaient mon humeur méditative. Mais sur la banquette arrière, je sentais Lucius vibrer d'excitation et s'agiter de plus en plus et je finis par me retourner.
- Tout va bien Lucius?
Il hocha la tête mais je remarquai ses pupilles légèrement dilatées, signe que son loup était proche d'émerger. Il me répondit d'un ton sourd, les mâchoires crispées sous l'effort de se maîtriser.
- Mon loup est surexcité. C'est la première fois que j'ai l'occasion d'assister à une bataille pour le poste d'Alpha et l'énergie dégagée m'a un peu perturbé. Nous avons couru un moment mais ça n'a pas suffit.
Connor ricana.
- Tu n'es pas le seul. Je parie que la moitié de la meute d'Emily est encore en train de chasser dans les bois, à cette heure-ci.
Il quitta la route des yeux un instant pour faire un clin d'œil au lycan derrière lui.
- Et l'autre moitié doit être en train de baiser. Tu devrais y penser, peut-être.
Je roulai des yeux devant cette nouvelle preuve de subtilité de mon béta alors que Léon avait viré au pourpre et que la peau déjà foncée de Lucius avait pris deux nuances de brun supplémentaire. Une vague odeur d'excitation et de gêne envahit l'habitacle et pris de pitié, je détournai la conversation.
- Tu iras courir en arrivant à la maison, Lucius. Ça vous fera du bien à ton loup et toi. Tu n'avais jamais assisté à un combat entre lycans? Vous n'aviez pas d'alpha à l'armée?
- Des combats, si, quelques uns. Mais jamais jusqu'à la mort.
Il se pencha en avant et j'aperçus son profil austère.
- Nous ne sommes pas très nombreux à pouvoir supporter la vie militaire : devoir obéir à des humains, réprimer son loup à la pleine lune... J'ai dû demander à Fenrir la permission de m'engager pour qu'il puisse s'assurer que j'en serai capable et ne mettrai pas notre nature en danger. De plus, nous sommes dispersés dans tous les corps d'armée, envoyés sur le terrain, déplacés régulièrement. Impossible de former une meute dans ces conditions. Nous nous débrouillons sans alpha et sommes souvent seuls.
- Ça doit être difficile à vivre...
Il se rembrunit sensiblement.
- Ce n'est pas facile, en effet. Mais c'était mieux que l'alternative à l'époque où j'ai pris cette décision.
Je lui jetai un regard rapide dans le rétroviseur et hochai la tête sobrement. Léon avait un sourire doux et compatissant et je ne pus m'empêcher de remarquer que leurs cuisses s'étaient rapprochées. Avec un peu de chance, Lucius n'aurait pas à courir seul ce matin. Je ne connaissais pas toute son histoire mais je pouvais en deviner des bribes. Les simples faits qu'il soit afro-américain et gay garantissaient que sa trajectoire de vie n'avait pas dû être un long fleuve tranquille au milieu des meutes intolérantes qui continuaient à sévir, malgré les efforts d'Abraham. Il semblait s'être accoutumé à la solitude mais aujourd'hui, il avait la chance de pouvoir accéder à autre chose s'il le souhaitait.
Nous arrivâmes à la maison en milieu de matinée et je crevais la dalle. Une nuit blanche n'était pas de nature à m'abattre mais j'avais besoin de calories pour compenser et mon estomac me faisait bruyamment savoir ce qu'il attendait de moi. Karen avait dû lire dans mes pensées à distance car une montagne de pancakes, du bacon et une salade de fruits frais avaient été mis de côté et nous nous jetâmes dessus comme les loups affamés que nous étions. Elle était partie à la clinique et les enfants étaient sans doute à l'école. Les louveteaux étaient assez nombreux dans la meute pour constituer une petite classe et ne se mélangeaient aux humains qu'à partir du secondaire, lorsqu'ils étaient assez âgés pour comprendre l'impératif de conserver nos secrets. Jusque-là, ils suivaient un programme ad hoc et plusieurs lycans se relayaient dans la minuscule école que nous avions créée pour leur apprendre ce qu'ils avaient besoin de savoir. Ma meute était en expansion et cette organisation avait de beaux jours devant elle. J'avais presque fini mon repas et j'envisageais de partir sur le chantier lorsqu'Harry passa le nez dans la cuisine. Il avait les traits tirés et l'air épuisé et je soufflai en songeant qu'il avait encore passé la nuit à naviguer sur son ordinateur au lieu de se reposer. Nous avions certes besoin de moins de sommeil que les humain mais il ne fallait tout de même pas exagérer et sans supervision, mon lycan étrange avait la sale manie de dédaigner les contingences matérielles telles que la nourriture et le sommeil.
- Je... je peux te parler Adam ?
- Oui, bien sûr.
J'enfournai une crêpe entière dans ma bouche pour la route, attrapai le mug de café chaud que Lucius venait de me remplir à nouveau et le suivis dans les étages jusqu'à son antre. Je n'avais aucun secret pour mes bétas mais Harry était toujours mal à l'aise de devoir s'exprimer devant plusieurs personnes à la fois, surtout des loups dominants, et c'était plus simple comme ça. Il s'installa sur son fauteuil de gamer et je me dégageai un coin de couette pour m'y assoir. La pagaille n'avait fait qu'empirer depuis mon dernier passage et je songeai que le lycan était pire qu'un adolescent. Il se tordait les mains en regardant son écran et je finis par le questionner.
- Harry? Tu avais quelque chose à me dire?
- Ou... oui. J'ai trouvé euh... des informations. A...avec l'empreinte que tu m'as donné.
Je me redressai sur le lit et une pointe d'excitation m'envahit.
- Bon boulot! Ça ne t'a pas pris autant de temps que ça, finalement! Bravo!
Il rosit et baissa les yeux. Harry n'avait pas eu l'habitude d'être complimenté ou félicité et à chaque fois que je lui faisais remarquer qu'il faisait du bon travail, ou réussissait quelque chose, il paraissait à deux doigts de s'enterrer sous le parquet.
- Euh oui. Euh...
Il cillait frénétiquement et je maîtrisai mon impatience pendant qu'il tentait de s'exprimer.
- Euh... Ça risque de ne, p... pas te plaire, je pense.
Je plissai le front.
- Pourquoi?
- C'est assez perturbant.
Il regarda le mur au dessus de moi et ses traits fins se crispèrent pendant qu'il déballait à toute allure le résultat de son enquête.
- Il...il n'est pas recherché. Micah. Par les au... autorités. J'ai mis du temps à m'en assurer parce que les bases de données entre Etats ne sont pas toujours mises à jour. J'ai d'abord vérifié au niveau fédéral puis Etat par Etat et j'ai eu de la chance de trouver une correspondance. Ton euh... ton barman n'est référencé ni dans Interpol, ni dans la base des crimes fédéraux et aucun mandat d'amener n'a été transmis aux marshals à son sujet. Il... il n'a pas non plus de casier et n'a jamais été condamné. Par contre, j'ai trouvé ses empreintes dans un dossier ouvert par la police de New York même si finalement, aucune charge n'a été retenue contre lui. C'est comme ça que j'ai pu remonter jusqu'à lui.
Mon estomac fit un tour sur lui-même et je me penchai vers lui.
- Un dossier ouvert pour quels faits?
- C... c'était euh... Du racolage...
Je ne pus retenir ma grimace.
- Merde. C'est un prostitué?
- Je ne sais pas si...
Il baissa les yeux puis les remonta sans réussir à nouveau à les fixer sur moi.
- Il avait quinze ans, Adam.
Mon visage dut se décomposer car il pâlit et se détourna vivement vers son écran, me le désignant du doigt.
- Son... son vrai nom est Trevor Miller. Il a vingt ans, en réalité, et non pas vingt-deux. J'ai fouillé un peu partout après ça et j'ai réussi à trouver sa trace dans les dossiers des services sociaux de la ville de New-York. Il a été placé à plusieurs reprises en famille d'accueil.
Je déglutis difficilement, la peau de mon dos se hérissant sous l'afflux de révélations.
- Comment s'est-il retrouvé à se prostituer, alors?
- Il... il a été accueilli dans une première famille à douze ans à la mort de sa grand-mère qui était sa tutrice. Puis il a été changé deux fois sans que les raisons n'apparaissent dans son dossier. Il a fugué de la troisième famille à quatorze ans et a été déclaré disparu. P... puis il s'est fait arrêter pour racolage, comme je te disais. Il a déclaré s'appeler Léo Smith mais l'agent qui l'avait interpellé a pris le soin de regarder les fichiers des disparus et il a fait le lien. Au final, les charges ont été abandonnées. Il a été réintégré dans le système de protection des mineurs mais dans un foyer, cette fois-ci. Il s'en est enfui après seulement deux semaines.
- Mais où vivait-il?
- A la rue, probablement. Il y a des photos prises lors de sa première arrestation. Il n'était pas euh... en grande forme. Il... il avait été frappé...
Je grinçai des dents. Une colère froide montait en moi sans que je ne réussisse à la contenir.
- Montre-moi.
Ma voix sortit beaucoup plus râpeuse que je ne l'avais prémédité et mon loup se tapit à la surface en grondant férocement, prêt à sortir déchiqueter la source de ma rage. Harry renifla d'un coup et je le vis tressaillir longuement. Il ne se détourna pas, même lui et ses pauvres habitudes sociales savaient qu'on ne recule jamais devant un lycan furieux, à moins de se désigner comme sa proie, mais l'odeur de sa peur remplit soudain l'air de la chambre étroite. Une goutte de sueur perla sur son front et il s'avachit sur son fauteuil de bureau en contemplant le plancher. Il leva une main prudente tout en gardant les yeux soigneusement baissés et cliqua à plusieurs reprises sur sa souris, jusqu'à faire apparaitre une image d'identification judiciaire qui me fit enrager un peu plus. L'adolescent efflanqué qui apparaissait sans sourire en tenant un petit carton d'identité à son nom n'avait pas grand chose à voir avec le minet effronté et sûr de lui que que j'avais eu envie de sauter. Il n'avait non plus rien en commun avec le guerrier féroce et armé qui m'avait tenu en joue, ni avec le jeune homme avidement curieux de comprendre. Sur la photo, Micah, ou Léo, ou Trevor, paraissait encore plus jeune que ses quinze ans. Ses cheveux blonds sales étaient plus longs et rendaient ses traits trop minces encore plus aiguisés. Ses yeux étaient éteints et je remarquai qu'il n'étaient pas bleus, comme je m'y attendais, mais d'un gris orageux, foncé de longs cils ourlés. Plusieurs marques et hématomes constellaient ses joues pâles et le loup au fond de moi hurla sa rage. Mes doigts se crispèrent sur la tasse que je tenais toujours et la porcelaine céda d'un coup. Deux morceaux de céramique tombèrent sur le parquet dans un son mat et un troisième s'enfonça dans ma paume, entaillant profondément la chair et les tendons. Le liquide encore chaud ruissela sur mes genoux et sur le lit et Harry couina de peur. Je restai immobile quelques instants. L'odeur du sang et de café versé monta jusqu'à mes narines et j'inspirai profondément pour me calmer. Je jaugeai le désastre en cillant et une fois repris, je relâchai très doucement le morceau coupant sur la table de lit. J'attrapai un kleenex propre dans la boite sur le chevet et le serrai sur ma plaie. La blessure était minime et serait guérie dans quelques minutes mais entre la boisson et cette égratignure, j'avais sali le lit. Et j'avais aussi terrorisé mon loup soumis, qui semblait à deux doigts de se laisser tomber par terre sous forme humaine pour me présenter son ventre fragile.
- C'est bon, Harry.
Mes paroles se confondaient dans un grognement sourd et mes crocs avaient pointé en perçant ma lèvre inférieure. Je soufflai profondément pour refouler mon loup. Je n'avais pas l'habitude de perdre le contrôle de la sorte. Pour un alpha, j'étais réputé patient et à l'écoute et je me maîtrisais parfaitement, en temps habituel. Mais j'étais à fleur de peau après avoir assisté au combat de la nuit passée et je ne sais pourquoi, les informations sur Micah avaient touché une corde sensible. Ma bête était à deux doigts de se libérer pour entamer la traque contre ceux qui avaient malmené et abusé l'enfant qu'il avait été, comme si, pour une raison qui m'échappait, il nous appartenait.
- Je ne suis pas fâché contre toi, assurai-je à Harry. Je suis désolé pour le bazar.
- P... pas de souci, alpha, gémit-il, les yeux rivés sur le parquet. Je... je comprends.
- Et bien, tu as de la chance parce que moi non.
Mon trait d'humour forcé l'aida à se détendre et il releva une seconde le nez pour me regarder, un sourire tremblant sur ses lèvres blanchies et mordillées. Je lui retournai un rictus contraint.
- Tu as trouvé quelque chose d'autre?
Il secoua la tête.
- N... nan. Après sa fuite du foyer, Trevor Miller disparaît pour de bon. P... plus d'arrestations, plus de familles d'accueil. Il y a six mois, Micah Jameson réapparait dans les bases de données avec suffisamment de brouillage pour qu'un expert ne fasse pas le lien avec l'enfant décédé. Je... je ne peux pas t'en dire plus. Mais...
- Oui?
- Il fuit, Adam. Il ne fuit peut-être pas les fèds ou la police de New-York mais il est évident qu'il se cache. Et... et celui qui l'a aidé à brouiller les pistes est très, très bon dans ce qu'il fait.
Les révélations de Harry tournèrent en boucle dans ma tête durant les jours suivants notre discussion, me plongeant à nouveau dans une humeur de dogue qui faisait hurler Connor et soupirer Myriam. Toujours perturbé par mon coup d'éclat, et de plus en plus pâle et tendu, Harry se terrait dans sa chambre à longueur de journée. Karen, elle, évitait tout simplement de me croiser et même les enfants ne réussissaient pas à me dérider. Lucius et Léon étaient les seuls à qui mon comportement de connard ne semblait faire ni chaud ni froid. Et pour cause. Comme suggéré par mon béta, ils étaient allé courir dès notre retour à Trout River, Léon s'étant dévoué pour accompagner l'ancien militaire. Les deux lycans étaient revenus des heures plus tard, un sourire stupide étalé sur leurs visages humains et une odeur de forêt, de proie et de sexe accrochée à la peau. Ils se promenaient depuis dans une bulle écœurante d'hormones et de sentiments et la senteur de leurs phéromones empuantissait tout mon foyer, ce qui n'arrangeait en rien ma mauvaise humeur. Je ne comprenais pas ce qui m'arrivait. J'avais voulu vérifier si ce Micah ne représentait pas une menace pour la meute, c'était chose faite. J'étais sensé m'en désintéresser. Je ne savait pas pourquoi la pensée de ce qu'il avait traversé, même si je n'en avais qu'une minuscule idée, tordait mon ventre et faisait jaillir mes griffes aux moments les plus importuns. Je n'étais pas naïf ou innocent. Humains comme lycans, nous vivions dans un monde violent et les plus jeunes et les plus fragiles étaient les principales victimes de l'inhumanité qui régnait, en ville comme dans nos forêts. Mais à chaque fois que mes souvenirs me ramenaient à l'adolescent aux yeux vides sur la mauvaise photo d'identité, ma rage revenait en boomerang et je ne réussissais à la contrôler que grâce à de longues courses en forêt et la destruction systématique des punching-ball que Connor ne cessait de me ramener.
- Mais pourquoi tu ne vas pas lui parler? finit par cracher Connor un soir dans le salon de chez moi, après des heures de chamailleries sur les devis que nous devions préparer pour un nouveau client. Tu me rends dingue, putain! Tu rends dingue absolument tout le monde ici et ta mauvaise humeur est en train de contaminer toute la meute à travers nos liens!
- Arête de dire des conneries, aboyai-je sur mon bêta. Tu ne sais pas de quoi tu parles ! Je n'ai aucune raison de retourner là-bas. Je voulais des infos, je les ai eu, c'est terminé.
Il ouvrit une bouche offusquée et agita ses bras épais comme des moulins.
- Mon cul c'est terminé ! Ce gamin t'obsède et ça te transforme en enfoiré ! C'est vrai, bordel ! Tout le monde est nerveux, les soumis sont stressés, les dominants de mauvais poil, tout le monde se prend la tête avec tout le monde. Ca suffit! Va voir ton serveur et sors-toi la tête du cul!
William, le comptable de ma boîte, riva ses yeux sur la table et derrière moi, j'entendis le bruit d'un assiette se briser au sol accompagné du jappement désolé d'un lycan surpris et maladroit. Je serrai fortement les paupières et déglutis pour ne pas hurler. Harry allait décimer toute ma vaisselle si je ne faisais pas quelque chose, à force de marcher sur des œufs en ma présence et de sursauter à chacun de mes éclats. Connor avait raison, une fois de plus, et j'avais un peu envie de le détester pour ça. Mais c'était aussi là le rôle d'un bêta et le fondement de notre amitié et de sa place auprès de moi.
Je me passai la main dans les cheveux avec colère et admis ma défaite. Le visage de Micah, ou Trevor, ou Léo, hantait mes pensées depuis des jours et je devais absolument m'en débarrasser. Peut-être que le revoir, constater qu'il se portait bien, qu'il n'était plus cet enfant en danger, serait capable de m'apaiser. Donc ouais, Connor avait raison. Mais ça ne signifiait pas que j'étais obligé d'être gracieux et mature à ce sujet. Mon bras jaillit dans un éclair vif et j'attrapai mon bêta à la gorge avec un rugissements féroce, où j'expulsai une bonne part de ma frustration.
- Un peu de respect pour ton alpha ! N'oublie pas ta place, bêta !
Mon ton était mauvais et il se figea. William se transforma en pierre, sans même oser respirer. Seul le tremblement de ses mains posées sur la table trahissait sa nervosité devant notre conflit. Connor détendit son cou lentement et laissa partir sa tête en arrière, m'offrant sa soumission. Il avait les yeux mi-clos mais aucune peur ne transparaissait dans son odeur alors que je bloquais sa trachée. Je plantai mes yeux dans les siens et laissai mon affection pour lui transparaître dans mes yeux et supplanter mon agacement sincère. Malgré son visage de plus en plus violet, il sourit en coin et dès que je relâchai mon emprise, cet enfoiré se mit à ricaner entre deux souffles précipités.
- Pardon, Adam, répondit-il, pas du tout désolé. Mais j'ai raison et tu le sais.
- Je rêve du jour où tu dirigeras ta propre meute et où tes bêtas te feront chier autant que tu m'as soulé.
Il me regarda et une gravité franche parut sur ses traits ouverts.
- Ça n'arrivera pas, Adam. Je suis ton loup et je préfère rester ton bêta qu'être l'alpha de n'importe quelle meute.
Il était profondément sincère et nous nous dévisageâmes longuement, notre lien de meute brûlant entre nous. Je hochai la tête et j'allais ajouter quelque chose lorsqu'un nouveau fracas nous fit sursauter. Je me retournai d'un bond vers la cuisine. Harry se tenait à moitié accroupi, tâchant de rassembler les débris de ce qui avait du constituer un plat de lasagne en train de décongeler et je soupirai. Ouais, j'avais vraiment besoin de me calmer si je voulais sauver une partie de mon mobilier.
Lorsque j'entrai dans le bar, la musique était bruyante et les lumières vibraient. Une foule d'humains se pressait là, dansant, bavardant, riant, draguant mais moi tout comme mon loup n'en avions cure. Comme en pilotage automatique, j'avançai jusqu'au comptoir, les yeux rivés sur des cheveux colorés et des mains agiles. Mon loup gémit de plaisir et je compris. Putain. Micah leva la tête vers moi et une lueur brève de joie traversa ses iris bleus dont je savais désormais qu'ils étaient gris tempête, en réalité, avant qu'il ne retrouve l'impassibilité qu'il savait si bien arborer. Je cherchai machinalement sur son visage les traces de l'enfant en précarité qu'il avait été, de l'adolescent à la rue et du fuyard traqué, mais je n'en trouvai rien. Je savais mentir, je pouvais feindre, mais il était clairement bien meilleur que moi à ce jeu là. J'avais mille questions à lui poser. Je voulais comprendre qui il était, je voulais savoir s'il était en danger mais il me sourit avec hésitation. Mon loup en geignit de bonheur et la colère que j'avais ressenti, que je ressentais encore, s'apaisa comme par magie. Alors je le regardai et lui dis, doucement.
- Salut Micah. Je suis content de te voir.
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