Ⅷ - Le parfum de l'inutile
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『 Chapitre 8 ⋄ Le parfum de l'inutile』
▛ Trigger présence de gores ▟
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Mon âme était bousculée, morcelée, je ne savais plus quoi penser. Là, sous mes yeux, se consumait l'image du caporal-chef. Il disparaissait au fur et à mesure de ses pas, ses talons frappaient le sol boisé. Ils avaient la même sonorité que les battements de mon cœur : frénétique, ferme. Je serrais le mouchoir dans mes poings, les larmes jusqu'alors étendues sur mes joues commencèrent à sécher, coupée dans mon élan par cette nouvelle cinglante. Elle résonnait dans l'intégralité du bataillon : Trost était attaqué.
Je me relevais, titubante, alors que ma vision était à moitié floue. Mes pensées formaient une véritable tornade : un vent tellement violent qu'il m'était compliqué de chercher ma stabilité : à peine tenue dans mes mains qu'elle s'échappait.
Au loin, j'aperçus la porte du bureau du major s'ouvrir avec fracas alors que le caporal-chef s'y stoppait. Face à face, les deux s'échangèrent un regard, partirent aussitôt. Le maître et son bras-droit, voilà ce qu'ils inspiraient.
Je fermais les yeux une demie seconde, un souffle, juste un seul. Ma tornade semblait m'emporter, mon corps, au milieu de ce massacre, entrechoqué par les coups de mes songes les plus profonds :
— Ouvre les yeux Nellas, Nellas, hey, p'tite tête réveille toi !
Mon corps était en sueur, mes dents claquaient de terreur alors, qu'à peine mes paupières entrouvertes, je régurgitais l'intégralité de mon maigre repas. Cela me brûlait la gorge, vomir de l'acide, dégorger le ventre vide, c'était certainement l'une des douleurs les plus accentuées que j'avais pu éprouver.
Je sentis la main de Judith se plaquer contre mes cheveux, elle les caressait alors que j'hurlais à m'en époumoner, contre elle, cherchant de l'air. Il me manquait toujours lorsque ce cauchemar survenait.
— C'est fini p'tite tête, c'est fini.
Elle répétait ces mots, toujours les mêmes : « C'est fini ». Alors que j'émergeais de ce qui me semblait être les enfers, je réalisais tout juste ce qu'il s'était produit lorsque, pleine consciente, je découvrais le résultat de mes terreurs nocturnes : poisseuse, nauséeuse, à regarder mon rejet couvrant mon lit, mes vêtements et ceux de la rouquine. Ca n'était pas la première fois. Judith était sévère, elle n'avait pourtant jamais été en colère de me voir salir nos affaires, même les siennes, lorsque mes cauchemars reprenaient l'emprise.
Je n'avais que 9 ans.
— Pardon..! Pardon..! dis-je, regroupant mes jambes contre mon corps, ma tête s'enfouissant entre mes genoux.
La main de ma mère adoptive se lovait davantage dans ma chevelure, la plupart du temps, c'était dans ce genre de moment que je découvrais la seule tendresse dont elle était capable à mon égard. M'attirant contre elle pour fredonner cette même musique, celle qui clôturait mes crises.
Un souffle, un seul. Ma tête se vidait, murmurant la comptine de mon enfance, la tornade se dissipait. J'ouvris mes paupières, le soleil m'aveuglant presque les iris. Dehors, on apercevait les torrents de cris et d'ordres, s'apprêtant à partir pour aider les victimes. Une claque mentale se logea contre ma joue. J'en réalisais ma nouvelle position, là où je me trouvais désormais. Fronçant les sourcils à regarder d'en bas, par la fenêtre de la tour, les recrues s'activer, je frappai mes deux joues de mes mains.
— Du nerf Nellas ! fis-je tout haut.
Je rangeais le mouchoir plié de mon commandant dans la poche de ma poitrine, me mettant en route pour rejoindre mes camarades dans les jardins, car désormais, je n'étais plus une enfant dévorée de ses angoisses, j'étais une soldate.
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Un chaos ambiant nageait dans l'air. Pas la peine d'être un haut gradé, ou d'avoir de nombreuses années d'ancienneté, pour cerner que la situation était grave, prise de court, qui plus est. Les ordres s'enchaînaient et les recrues s'agglutinaient en groupuscules pour rejoindre leurs positions. Chacun semblait avoir trouvé sa place : des équipes se portant volontaires pour recueillir les blessés, d'autres chargeant une multitude de charrettes d'armes, d'équipement, de soins.
Je pouvais apercevoir l'escouade tactique, au loin, en outre, ma toute nouvelle famille. J'ignorais si je devais les rejoindre, mais les ordres du major résonnaient encore à mes oreilles : je faisais partie de ce groupe. Prenant mon courage à deux mains, je me dépêchais de rejoindre les rangs.
Petra, perchée sur son cheval, me regarda avec les yeux ronds lorsque j'arrivai en face d'eux. Elle allait répliquer, mais le caporal-chef Livaï lui coupa la route, son destrier d'un noir pâle se posta droit devant moi, me forçant à reculer d'un pas alors que mes yeux verts se dirigèrent droit vers les siens.
— Urthël, non ! C'est beaucoup trop dangereux pour une bleue comme toi ! cria-t-il.
Ses iris crachaient du feu. Le dragon face à moi ne semblait pas quitter ses positions. Je me retrouvais dans une situation plus qu'embarrassante. Je me rappelais, honteuse, de ce moment échangé quelques minutes plus tôt. Sa voix n'avait plus rien à voir, elle était stricte, cassante au possible. Je fronçais néanmoins les sourcils, les mots de mon supérieur ne voulant pas quitter mon esprit :
— Le major m'a dit que j'intégrais votre escouade. Je suis sous votre commandement, caporal. fis-je.
Ma tornade semblait revenir m'attaquer. Ma tête s'embrouillait, barbouillait, n'ayant pas le temps de souffler, de digérer les actions, je manquais de m'étouffer dans mes propres mots. Mais je tins bon. Je pus apercevoir un brin de fierté dans les yeux de la rouquine qui m'observait derrière lui, celui-ci fut plus qu'embêté. Il observait du coin de l'œil le major, agacé.
— Tck.
Son claquement de langue me provoqua un frisson immonde, me ramenant au souvenir de mon inscription et de sa bousculade. Je l'évitais comme je le pouvais, me forçant à rester concentrée sur l'essentiel. Son visage se braqua de nouveau contre le mien. Il semblait furieux, de quoi me retourner le sang, il s'apprêta à me fournir son verdict, sa voix résonnant comme un tonnerre puissant, il s'exprima :
— Tu sais t'occuper des blessures ?
— Assez, oui, balbutiais-je.
— Alors tu resteras à l'arrière, avec les soigneurs.
Il repartit aussitôt son ordre donné, commandant son escouade sous le regard de Petra.
Ahurie, les yeux ronds à chercher quoi dire, répliquer, me voilà muette, happée, stoppée. Les choses allaient vite, trop vite. Ce fut Erd, mon ancien voisin de table lors du repas, qui m'indiqua de sa main des carrioles se remplissant de soldats et de caissettes. Il me fit alors :
— Ce sont eux qui se chargent de ça, ne t'en fais pas, on reviendra te chercher une fois que les choses se seront calmées.
Je regardais, impuissante, l'escouade tactique partir en premier. Imbécile, à rester planter là comme une vulgaire jeune pousse dont on aurait oublié d'arroser les racines.
Un vif sentiment amer parcouru ma poitrine, les poils hérissés, alors que je fis volte-face, courant vers cet ordre dont je ne pouvais me soustraire.
Le parfum de l'inutile avait une odeur dérangeante. Il attaquait les narines, me les retournait à m'en causer des nausées. J'en venais à comprendre les paroles de Judith : « Les bas-fonds ont l'avantage de ne pas mentir sur la marchandise. Tu sais à qui tu as à faire ici. Tout le monde assume d'être le dernier des déchets de cette ville. Mais là-haut, tu m'entends, là-haut il va falloir que tu sois vigilante. »
Naïve. Voilà le mot qui m'empoisonnait l'esprit depuis que j'avais quitté le bureau du major, à me retrouver face-à-face avec l'ironie cruelle de la situation.
Je n'aurai jamais été prise au bataillon si je n'avais pas été une Urthël.
Le regard assombri, rejoignant mes positions sous le regard de mes compagnons. J'aidai directement à charger les cagettes de soins pour en remplir la charrette. Pas le temps de faire connaissance, de déblatérer sur qui était qui. À leurs yeux, je n'étais qu'une soldate en plus, aux miens, j'étais le nouveau poids de l'escouade tactique.
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Je sentais les roues claquer sous les pierres et les trous des chemins de terre. On discernait au loin les nombreux chevaux, les différentes escouades. La mienne se situait en première ligne, j'en étais à la dernière.
Je me trouvais avec deux jeunes femmes maigrelettes. Elles ne semblaient pas bien musclées, sûrement car elles n'avaient jamais été mises aux combats ou aux entraînements. Cependant, leur sang froid imparable avait de quoi faire froid dans le dos. Ces filles avaient dû voir plus de morts et de sang qu'un soldat. Certains regards ne trompaient pas, ceux qu'elles arboraient ressemblaient au feu éteint des habitants des bas-fonds. La mort ne m'avait jamais fait peur, le sang non plus. Elle était devenue une voisine, une vieille amie prête à ouvrir ses bras lorsqu'il était temps de sombrer, de s'évanouir et de céder à la misère.
La première de mes collègues, conduisant notre charrette, était brune foncée, les cheveux regroupées en une large tresse, des lunettes attachées fermement à ses yeux pour ne pas qu'elles tombent. L'autre, assise en face de moi, avait l'œil rivé vers le mur du district de Trost, il se devinait au loin. Son chignon blond remuait avec les mouvements de la carriole, quelques mèches s'échappaient, retombaient sur son front, près de ses grands yeux citrines. Agatha et Mina, deux noms brièvement échangés avant notre départ précipité.
— T'es nouvelle, toi, j'espère que t'es préparée à ce que tu vas voir ! beugla notre conductrice.
L'air fatigué de ma voisine en disait long sur ce que j'allais devoir regarder. Certainement un spectacle de l'horreur. À en deviner par la fumée qui s'échappait d'hors les murs, provenant de la ville, les dégâts devaient être colossaux.
— Ça ira, répondis-je, sans grande émotion.
Face à moi, Mina me sculptait du regard. Elle était petite, le visage d'une fausse enfant, déchirée par ce qu'elle avait dû voir et entendre.
— Tu as déjà connu ça ? demanda-t-elle
Difficile à dire. Les morts étaient toujours différents. J'avais pu admirer le massacre du corps humain, la détresse dévorer les intestins. C'était toujours l'infortune, le besoin qui tuaient dans les bas-fonds. Parfois, on devinait la trace des meurtres, des bagarres mal tournées ou des malchanceux tombés pour une infection.
— On peut dire ça, marmonnais-je, la bouche à moitié ensevelie dans mes bras.
Mes jambes regroupées contre mon corps, je sentais l'amer sentiment de retourner en arrière. Alors que le soleil frappait nos têtes, que la chaleur tapait nos corps, je réussissais à me croire de nouveau enterrée dans les souterrains glacés et dépourvus de lumière. Quelle ironie.
Nous approchions. Une odeur vint instinctivement piquer mes narines alors que Mina, toujours face à moi, plaqua sa main à son nez en grimaçant. La puanteur omniprésente des lieux glissaient dans l'air. Un mélange de soufre, de rouille, de putréfaction. Nous percevions les hurlements, les ordres parcourir Trost. Des ruines par-ci par-là longeaient notre arrivée. Les soldats semblaient déjà avoir gagné le centre de la bataille, là où régnait encore la terreur, à en écouter les cris et les fracas des pieds titanesques de ces monstres. En tournant la tête, j'en devinais au loin l'un d'eux, gigantesque.
Ma vision se confronta pour la première fois à un titan. Il engloutissait le corps d'un malheureux, broyait sa chair de ses dents. Ses membres volaient, s'écrabouillaient sur le sol, de son sang, il en repeignait la surface. Il ne restait que du hachis.
Notre charrette s'arrêta brusquement alors que Agatha sauta, ma voisine aussi, je suivis le mouvement. En regardant la ruelle, les corps éparpillés, le liquide rougeâtre se confondre avec les pavés de cette ancienne ville, je compris bien vite toute l'intensité à laquelle le bataillon était confronté durant ses missions.
La mort, la mort omniprésente. La violence, la violence inouïe. Les déchirures du cœur, les adieux, les fracas de l'âme, ça et là des jambes, des bras, des mains, des boyaux. Je sentais à peine mon cœur battre alors que le parfum putride des cadavres s'emparait de mon nez.
Je connaissais la mort. Je l'avais vue, je l'avais pénétrée. Jamais de ma vie elle ne m'avait semblé autant immonde.
Je manquai de régurgiter, la main à la bouche, l'autre au ventre à me tordre, les yeux tremblants. Rien ne venait, je sentais une main alors agripper mon épaule, me retourner vivement, tombant face-à-face avec Agatha qui me fourra un tissu sur le museau, le bouclant derrière mon crâne.
— Ne t'évanouis pas, Nellas, on a besoin d'nous ici ! cria-t-elle.
Besoin de nous, de moi. Ces mots résonnèrent en murmure dans mon crâne, les battements de mon cœur étaient trop forts pour discerner d'autres sons. La terre grondait sous mes pieds, elle tremblait des pas multiples et gargantuesques de ces géants.
Je repris plus ou moins conscience, mon instinct de survie en première ligne alors que je trouvais refuge dans les yeux abyssaux de ma collègue. Je hochais la tête, me mis à courir derrière elle.
Mes yeux vidés à entendre le son spongieux de ma course contre les pavés ensanglantés. Je manquais de glisser, de trébucher dans cette marre à longer les corps morcelés et découpés. La plupart étaient morts. Les têtes apparentes montraient une expression de fin de vie, la plus atroce et douloureuse possible : des bouches ouvertes, des yeux révulsés encore brouillés de larmes.
J'avais admiré jadis des corps dépourvus d'âme, dépouillés d'humanité, consumés par la faim, la soif, la maladie. Je me tenais prête à cela. Alors pourquoi ? Mon âme défaillit, mon estomac se tordait, crevait d'agonie, mes yeux vomissaient le paysage.
Me voilà souillée jusqu'à la moelle.
https://youtu.be/OPfO97EpLRk
Mon esprit se brouillait, essayait de me tenir en éveil, trouvant n'importe quel refuge, même le plus insensé possible. Alors que les automatismes prirent possession de mon corps entier, une symphonie d'antan sifflait dans mon crâne, mes souvenirs les plus profonds refirent surface à réécouter la neuvième symphonie du concerto de ma mère. Le violon grinçait dans mes oreilles, parsemé de cris et gémissements des soldats encore en vie, à qui le bras avait été arraché, ou la jambe, ou les deux. Je m'affalais en face d'un premier, il ne tenait plus en place : son pied pendait, près à se décrocher. J'ouvris avec fracas ma trousse de soin, elle était ironiquement faible. Balbutiant à prendre le flacon d'alcool, je fis couler un peu de son contenu, tremblante, sur la plaie, sous le hurlement de cet homme. Crescendo, le violon montait en intensité. Je sentis son bras agripper mes épaules avec ardeur, me forçant à froncer les sourcils, grimaçant sous l'intensité de sa douleur. Je pouvais sentir par delà son geste à quel point son affliction était élevée. Au pas de course, je nouais un tissu fermement au-dessus de la blessure, effectuant un garrot pour commencer à recoudre la peau. Mes gestes étaient frénétiques, tremblants, de quoi me rajouter de la difficulté à la tâche. Ma vision, découpée en deux, l'une d'elle à me confronter à la réalité et ces atrocités, l'autre scotchée à l'imaginaire du souvenir du récital de ma mère. À chaque fois que je pénétrais sa chair de l'aiguille, il hurlait, mon âme avec. S'appliquer alors que l'enfer même s'abat sous les yeux était une tâche difficile, ardue. Mais je ne faiblissais pas, me concentrant sur les doigts de ma mère s'agiter sur son violon, j'en faisais de même avec la peau de ce malheureux.
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Pas le temps de se poser, souffler ou même soupirer. Lorsque l'un était tiré d'affaire, on nous en ramenait un autre, et les corps s'empilaient, se chevauchaient. Des cris titanesques se devinaient, au loin, difficile de mettre un point sur la situation. À l'arrière, seul panser les blessures comptait. Mina et Agatha couraient dans tous les sens, je ne me rendais pas compte que j'étais leur égal, essoufflée et en sueur, à ne même pas constater les dégâts des blessures sur mon propre corps : mes vêtements tâchés de sang, mes mains plongeant constamment dans de l'eau rougeâtre pour se les nettoyer un minimum, tout ça pour les salir à nouveau. Sur tous les soldats que j'avais pu soigner, une poignée d'entre eux survivrait. Ca et là, on récupérait les corps sans vie, on essayait de retrouver leurs identités, puis alors, on les recouvrait avec les moyens du bord.
Les recrues n'étaient pas les seules victimes. Parfois, on voyait enseveli sous des décombres de bâtisses le corps d'habitants n'ayant pas réussi à fuir. Un véritable carnage. Il fallait savoir mettre de côté sa propre humanité pour réussir à rester droite. C'est ce dont je m'étais abandonnée : à me repasser en boucle ce vieux souvenir, mon cerveau lui-même avait voulu me sauver la vie, m'épargnant au mieux la vision de cet enfer.
Mais les choses avaient été rudes, brutales. On disait que les premières batailles étaient souvent les pires. Pour mon cas, sans même avoir combattu, j'avais mis les deux pieds entier dans le sang, la hargne et la rage. Ils s'enfonçaient dans cet amas de gadoue putride contenant toute la misère, la désolation, la colère de ce monde. Les titans tuaient habilement. Ils avaient le don de massacrer la moindre estime pour notre genre, notre espèce. À les voir mâchonner nos corps, c'était à peine si je me revoyais manger mon pain durci dans les bas-fonds. En les regardant passer, au loin, à deviner leurs expressions, goulûment attirés par notre chair, nous n'étions pas si différents : des bêtes affamées, le même genre que les habitants des souterrains décimés par leur faim, prêt à tuer pour de la nourriture.
J'ignorais depuis combien de temps nous étions ici, mais la nuit était tombée depuis un moment. Le rythme ne s'était pas calmé. Parfois, on avait droit à un peu d'eau qu'on se passait de main en main pour hydrater nos gorges et celles de nos blessés. Plus rien n'avait de sens lorsque notre rôle consistait à extirper des bras de la mort ces personnes, certaines hurlant pour en finir, les laisser, qu'ils ne pouvaient pas vivre avec une telle image dans leurs esprits. C'était peut-être le plus difficile, au-delà de faire face à l'anatomie entière de notre corps humain déversé dans les rues. A observer quelquefois Mina et Agatha, j'essayais de compter mentalement combien de fois elles avaient été chargées de cet exercice. Pas une seule fois ces deux femmes n'avaient sombré, tourné les yeux. Elles bandaient, recousaient, massaient à la chaîne. J'avais fini par m'y accoutumer, pendant que mes yeux se vidaient de leurs éclats naturels et ce, à chaque fois qu'une personne mourrait sous mon massage cardiaque.
Un de plus, songeais-je. Je fis signe à d'autres collègues de ramener des couvertures, faisant nonchalamment un : « J'ai un mort ici, qu'on m'apporte de quoi le couvrir. » Banaliser le trépas. Voilà ce qu'on m'obligeait à faire à force de confronter les défunts.
Quelle drôle d'ironie de quitter les souterrains croupis pour arriver en plein dans l'enfer. Le diable a un drôle de visage, Judith.
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▛ Petit mot de l'auteur ▟
Bonjour, bonsoir la populace !
Merci d'avoir lu ce chapitre ! Je m'excuse des passages, ma foi, gore et remplis de belles descriptions dégoutantes, il a fallu m'y reprendre à deux fois pour trouver le courage de finir ce chapitre, enfin bref !
Je vous remercie de votre lecture, du temps consacré à celle-ci, j'espère vous faire voyager par ma petite Nellas qui me tient beaucoup à cœur.
N'hésitez pas à voter, partager cette fiction si elle vous plait (ça me ferait extrêmement chaud au cœur), et de me partager vos avis en commentaire !
Cœur sur vous.
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