Léonie et Agathe jouaient paisiblement dans le jardin.
Leurs éclats de rire s'élevaient dans les bosquets, se répercutaient en écho contre le tronc des chênes.

Les autres petits Weasley gravitaient autour d'elles, jouant à chat pour les plus grands, avec les petits cubes en bois moldus pour les plus petits.

Mais Hermione n'avait d'yeux que pour ses filles.
Ses précieuses petites filles.

La lueur dans leurs yeux, les sourires qui étiraient leurs lèvres, le rouge sur leurs joues.
Leurs petites boucles rousses qui tombaient en cascade sur leurs épaules. L'éclat océan de leurs prunelles, si identiques.
Les tâches de rousseur sur leur petit nez. Le grain de beauté au coin des yeux de Léonie, en une forme un peu floue de croissant de lune. La tâche de naissance dans le cou d'Agathe, la même que celle de son père.

Tout un tas de petits détails auxquels elle aimait prêter attention. Qu'elle aimait observer. Qu'elle aimait regarder et qui lui confirmaient que les filles étaient bien là.

Qu'elles étaient bien réelles.
Bien vivantes.

Et qu'en elle, vivait à présent l'espoir d'un monde meilleur.
En paix.
Serein.

Il avait fallu des années à Hermione pour tourner la page.
Pour reprendre confiance en l'avenir.
Pour reprendre confiance en la vie, l'univers, la destinée.
Pour se souvenir que le bonheur se trouvait partout, même dans les détails les plus insignifiants.

Pour comprendre pourquoi le mal existait et pourquoi il fallait l'affronter.
Que c'était l'équilibre même du monde et que, quoi qu'ils fassent, ils ne pourraient jamais y échapper.
Car tel était le cycle de la vie.

Le perpétuel cycle de la vie, dont ils n'étaient qu'une brindille de poussière.

Il lui avait fallu des années pour se reconstruire. Réapprendre à vivre.
Trouver la force d'aller consulter des spécialistes qui avaient enfin mis un nom sur son mal être et qui l'avaient accompagnée sur le chemin de la guérison.

Il lui avait fallu attendre longtemps avant d'avoir le courage de se confier à ses amis. Et comme elle s'y était attendue, Ron et Harry avaient fait preuve d'une patience et d'une compréhension à nulle autre pareille. Ils l'avaient soutenue, guidée dans les moments de rechute, épaulée. Ils s'étaient montrés infiniment doux et attentifs. Ils l'avaient écoutée. Ils l'avaient consolée quand les larmes avaient coulé. Ils lui avaient pris la main sans jamais la lâcher.

Ils avaient été son roc ces quatre dernières années.
Ils avaient été son pilier, le rayon de soleil dont elle avait cruellement eu besoin.

Ginny n'avait pas failli non plus. Elle avait été présente à chaque étape. Elles avaient été là, elle et sa bonne humeur. Son sourire. Sa joie de vivre. Ses répliques singulières et cocasses.

Sans eux, Hermione n'en serait pas là aujourd'hui.

Et bien sûr, il y avait eu lui.
Sa lumière.
Son bonheur.
Son point d'ancrage.

Fred ne l'avait plus abandonnée depuis cette fameuse nuit où ils avaient réalisé être deux à souffrir.
Fred était resté là, même dans les moments les plus douloureux.
Il l'avait écoutée. Il l'avait consolée. Il l'avait poussée à faire plus. Il l'avait mise dans tous ses états.

Il l'avait soutenue comme jamais personne n'avait su le faire jusque-là.
Il l'avait aimée, avec ses cicatrices et ses défauts.
Il l'avait aimée, avec ses peurs et ses angoisses.
Il l'avait aimée, avec ses incertitudes et ses terreurs.
Il l'avait aimée, avec ses cauchemars. Ses pensées noires.
Il l'avait aimée si fort qu'il lui avait redonné l'envie de s'aimer elle-même.

Il n'avait pas failli à son devoir quand la vie avait placé un cadeau inattendu sur leur chemin.
Il n'avait pas fui ses responsabilités quand Hermione avait découvert qu'elle était tombée enceinte.
Une seule nuit avait suffi.
Une seule.

Bien sûr, l'annonce de sa grossesse avait surpris plus d'un des Weasley.
Il avait fallu expliquer, parler, mais seuls Harry, Ron et Ginny connaissaient toute l'histoire.
Ils étaient les seuls à savoir ce qu'elle avait voulu faire.
Ils étaient les seuls à savoir ce que Fred avait failli faire cette nuit-là.
Ils étaient les seuls et Hermione préférait qu'il en soit ainsi.

Mais chacun avait accepté cette idée, et Hermione avait mené sa grossesse à terme.
Fred avait été là, du début à la fin, l'épaulant à chaque seconde. La réconfortant dans les moments de doute. Quand la peur de ne pas être une bonne mère ou d'être trop jeune l'avait assaillie.

Il s'était montré d'une infinie patience, et peu à peu, il avait retrouvé de l'éclat, de la joie.
La grossesse d'Hermione avait été comme un baume pour son cœur brisé.
Il s'était relevé.

Tous l'avaient vu peu à peu s'ouvrir de nouveau.
Redevenir ce Fred railleur et joyeux qu'il avait été.
Certes, il manquait encore un éclat dans ses yeux, son sourire n'était plus aussi éclatant qu'autrefois, mais tous se contentaient de ce qu'il parvenait désormais leur donner sans sa moitié.

Hermione avait comblé un vide dans sa vie et il s'y était accroché de toutes ses forces.

Et lorsque les jumelles étaient nées, cette fameuse nuit de Noël, ils avaient su que George leur avait offert le plus beau des cadeaux.

L'amour.

Et depuis, chaque jour, ils s'efforçaient d'honorer sa mémoire comme il fallait : avec le sourire, avec bienveillance, en veillant sur les filles avec amour et respect. En veillant à s'aimer sans détour, sans mensonges, sans peurs.

En profitant de la vie comme George l'avait toujours fait.

―Puis-je savoir ce que vous faites ici, seule, Mrs Weasley ? susurra une douce voix au creux de son oreille.

Hermione esquissa un sourire amusé et ne prit pas la peine de tourner la tête pour savoir de qui il s'agissait. Elle sentit aussitôt les bras de Fred s'enrouler autour de sa taille et elle laissa aller sa tête contre son épaule, son regard toujours rivé vers les enfants.

―J'observe nos filles, Mr Weasley, répondit-elle.
―Le plus beau des spectacles, Mrs Weasley, acquiesça-t-il. Mais vous manquez cruellement à vos invités, Mrs.
―Comme si vous n'aviez pas passé les trente dernières minutes à les ravir de vos petites farces, Mr Weasley, dit-elle avec un éclat de rire dans la voix.

Elle sut, sans le voir, que Fred était en train de sourire.

―Vous me connaissez trop bien, Mrs Weasley.
―Et vous avez signé pour ça, Mr Weasley, lui rappella-t-elle en agitant sa main gauche où brillait désormais une alliance en or.
―Et je ne le regretterai jamais.

Il déposa un doux baiser sur sa joue et Hermione se retourna pour lui faire face.

Les prunelles de Fred n'avaient plus été aussi brillantes qu'en cet instant, et une seconde, elle faillit se perdre dans l'océan de son regard.

―Tant mieux, parvint-elle à dire, esquissant un sourire en coin. Car je vais avoir besoin de vous, Mr Weasley, pour les mois à venir. Voire même pour les années à venir.
―Et en quoi puis-je vous aider, Mrs Weasley ? s'enquit-il en arquant un sourcil.

Le sourire resplendissant de la jeune femme répondit pour elle.

Fred sentit son cœur louper un battement. Sa bouche s'entrouvrit légèrement sous le choc.

Il la contempla de longues secondes, pas complètement certain d'avoir compris ce qu'elle venait de lui dire.
Mais ses yeux larmoyants et l'éclat de rire joyeux qu'elle lâcha lui confirmèrent que si.

―Quand... comment... ? bredouilla-t-il.
―J'avais des doutes depuis quelques semaines, répondit Hermione en glissant ses bras autour de son cou. J'ai demandé à mon médecin de faire les tests nécessaires et ils étaient tous positifs. Je suis enceinte, Fred. Nous allons avoir un autre bébé.
―Un autre bébé... murmura-t-il.

Puis, brusquement, lorsque l'idée se fraya complètement un chemin dans son esprit et qu'il réalisa ce qu'elle venait de dire, il poussa une exclamation de joie qui attira l'attention des enfants.

―Un bébé ! s'exclama-t-il en la soulevant de terre. NOUS ALLONS AVOIR UN AUTRE BEBE !

Quelques applaudissements retentirent dans leur dos.

Les invités, qui avaient constaté l'absence soudaine des deux mariés, s'étaient approchés du jardin et avaient tous parfaitement entendu les dernières paroles du rouquin.

Hermione sentit son visage s'embraser. Des sifflements retentirent et elle se cacha à demi dans le dos de son mari.

Molly fut la première à venir les féliciter, pleurant déjà à chaudes larmes.
Ginny lui sauta au cou, poussant des cris stridents d'exaltation.
Arthur fut plus réservé, mais non moins ravi.
Mr et Mrs Granger se contentèrent de les étreindre longuement, tout bonnement comblés.
Harry et Ron l'étreignirent en même temps et ils restèrent ainsi enlacés de longues minutes, partageant son bonheur sans échanger un mot.

Les aînés de la famille Weasley les charrièrent avec leur bonne humeur habituelle et jamais Hermione ne fut plus heureuse qu'en cet instant.

Parce qu'ils avaient vécu le pire, affronté les ténèbres les plus épaisses, les ombres les plus effrayantes, mais que, malgré tout, ils s'en étaient sortis.

Et elle se fit la promesse que, dorénavant, elle profiterait de chaque seconde que la vie lui offrirait.

Qu'ils en profiteraient tous les deux, entourés par leurs enfants et leurs familles.

Jusqu'à la fin des temps.

_______________________________________________________

Pour information :

Hermione et Fred auront eu quatre enfants :
- les jumelles, Léonie George Weasley et Agathe Jean Weasley.
- un petit garçon prénommé Hugo Arthur Weasley.
- une dernière petite fille prénomée Eylena Ginny Weasley.

Après la naissance des jumelles, Bill et Fleur ont accueilli deux petites filles, Victoire et Dominique, de seulement dix mois d'écart. Charlie et Percy ne sont pas encore mariés à ce moment de l'histoire. Ginny et Harry sont mariés et attendent leur petit James Sirius.
Ron fréquente une ancienne camarade de Poudlard, qui n'est pas Lavande.

En tout cas, j'espère que cette histoire vous aura plu. J'ai eu beaucoup de mal à l'écrire, puisqu'une longue pause sépare le début de son écriture et sa fin, mais j'espère en tout cas avoir réussi à vous séduire, à vous avoir fait pleurer et rire tout au long des chapitres !

Cela m'a personnellement fait beaucoup de bien de l'écrire et de voir que, malgré les années, j'étais encore capable de mener un projet à son terme ! Qui sait, peut-être qu'un jour je parviendrai à écrire ma propre histoire...

Merci en tout cas, pour tout.