La première pensée qui me vint, lorsque mes yeux s'ouvrirent, fut qu'aujourd'hui, je parlerai avec Mike et Luke. Un sourire étira immédiatement mes lèvres en pensant à ces derniers.

La joie et la curiosité étaient au rendez-vous et remplissaient mon coeur : qu'avaient-ils à nous dire ? Comment allaient-ils ? Autant de questions qui me taraudaient l'esprit.

Je me levai tout en réfléchissant. Je jetai un regard à Alice. Elle était parfaitement réveillée, mais elle s'était cachée sous son oreiller à l'instant même où j'avais allumé la lumière.

Je me préparai rapidement, tout comme Alice, avant de descendre prendre mon petit-déjeuner. Alice et moi venions à peine de nous installer qu'Emma nous sauta dessus, accompagnée par Lucie et Antoine :

— John m'appelle aujourd'hui ! s'écria-t-elle, en sautillant.

S'il y avait bien des qualités que j'admirais grandement chez Emma, c'étaient bien-sûr sa bonne humeur et sa joie permanentes.

— Nous aussi ! s'exclama Alice.

      Nous discutâmes de nos correspondants avec enthousiasme, jusqu'à ce que la sonnerie retentisse, nous rappelant que nous avions une longue journée de cours, avant de leur parler... Heureusement que nous étions vendredi, car avec le décalage horaire, il sera vingt-deux heures pour nous et seize heures pour eux.

🎶🎶🎶

La journée s'était enfin terminée, elle s'était déroulée lentement, comme si le temps avait décidé de se moquer de nous.

Après notre dîner, Alice et moi étions remontées et attendions que le temps se décide enfin à avancer. Nous discutions tout en écoutant Green Day, Nirvana et Paramore, de quoi ravirent Luke et Mike.

Mon ordinateur était déjà prêt, connecté et allumé. Des bougies aux fruits rouges étaient disposées tout autour, répandant une douce chaleur et une sensation de bien-être dans la pièce. Je me sentais projetée des mois auparavant, lorsque j'avais, pour la première fois, parlé à Mike et Luke.

Ce qui était incroyable, était le temps que j'avais mis à m'attacher à eux. A savoir, à peine quelques jours. Peut-être parce que nous partagions énormément de points communs ? Habituellement, il me fallait du temps pour devenir amie avec des personnes.

A l'inverse, je tombais rapidement amoureuse. Excessivement rapidement. Le meilleur -ou pire- exemple était Thomas. Quelle erreur. Inutile de préciser qu'à présent, j'étais prudente, et que cette « histoire » m'avait servi de leçon. Quand je pensais que j'avais échangé mon premier baiser avec lui... J'en étais dégoûtée... Enfin, il n'avait pas pris la peine de me demander, la première fois.

J'avais toujours pensé que mon premier amour serait « vrai » et long. Eh bien, je m'étais lourdement trompée. Voilà une preuve que l'amour rend aveugle, ou du moins son ébauche.

Alice m'avait d'ailleurs dit que je trouverai beaucoup mieux que Thomas. Je lui avais fait remarquer que ce n'était pas ma priorité. On m'avait toujours répété que le premier amour était inoubliable ; le mien l'était, mais de manière dépréciative. Peut-être que je pouvais considérer cela comme un « faux » amour ? Car, c'était comme cela que je me le représentais, et cela ne me blessait pas.

Dans tous les cas, ce n'était absolument pas ce qui m'intriguait le plus. La personne qui attisait ma curiosité et à laquelle je pensais souvent, était bien-sûr Luke. Comment Lise et Thomas pourraient tout connaître ? J'avais du mal avec ce point-là. Mike, Caitlin, je pouvais comprendre. Mais eux !

Je devais admettre que ce qui m'inquiétait le plus n'était pas vraiment le fait qu'ils savent, mais qu'ils s'en servent contre Luke. J'avais toutes les raisons de penser que cela pourrait arriver.

Alice s'efforçait de me rassurer sur ce point :

— Non, ils ne lui feront aucune remarque !

— Comment peux-tu en être sûre ? rétorquai-je

— Ils l'auraient déjà fait, déclara-t-elle, simplement.

Elle marquait un point.

— Qui te dit qu'ils n'attendent pas le moment opportun ? répliquai-je

— On les remettra à leur place comme il se doit, si cela devait arriver, répondit Alice, sûre d'elle.

J'hochai la tête, priant pour que cela n'arrive jamais.

— Il va bientôt être vingt-deux heures ! se réjouit Alice, changent de sujet

— Enfin ! m'exclamai-je

— Ils ne nous reste que quelques minutes à patienter !

     Ces « quelques minutes » me parurent durer une éternité. Enfin, l'écran de mon ordinateur s'alluma, affichant un appel entrant de Mike. Je m'empressai d'accepter, tandis qu'Alice trépignait d'impatience à côté de moi.

Les visages heureux de Mike et Luke apparurent sur l'écran :

— Bonjour la France ! hurla Mike, nous explosant littéralement les oreilles

— Mike, calme-toi ! m'écriai-je, presque aussitôt 

— Il est impossible à calmer. On sort de deux heures de sport, pourtant, expliqua calmement Luke.

— Notre exposé de sciences t'a bien calmé, mon petit Lukey ! lança Mike, avant tu étais intenable !

Luke haussa un sourcil :

— Petit ? Je suis plus grand que toi !

Mike l'ignora et me dit :

— On avait un exposé de sciences aujourd'hui, et nous sommes passés en premier ; cela a bien calmé Luke !

L'intéressé leva les yeux au ciel et ignora, à son tour, son ami :

— Quoi de neuf, les filles ?

— Emilie s'est faite remarquer par Monsieur Heub parce qu'elle était dans la lune, s'empressa de répondre Alice.

Ils se mirent à rire :

— Si tu savais le nombre de fois que cela m'est arrivé ! s'écria Mike

— Non, l'interrompit Luke, entre deux rires, toi tu t'endors en cours ! Par contre, Em, continua-t-il, avec un sourire moqueur, tu m'étonnes car tu es...

— Ne dis rien, le coupai-je, précipitamment, quoiqu'un peu amusée

— Je voulais juste te faire remarquer que tu es tellement discrète en cours qu'on te remarque peu...continua-t-il, moqueur

Mike et Alice s'étouffèrent à moitié.

— Tu es exactement comme moi, lui rappelai-je, blasée

— Moins...

Il affichait toujours son air taquin.

— Elle a raison, tu es presque invisible, en classe, lui fit remarquer Mike, en riant très fort

— Faites moins de bruit ! intervins-je, je vous rappelle que chez nous il n'est pas seize heures mais vingt-deux heures !

— Ne t'inquiète pas, les surveillant sont durs de la feuille ! me rassura Alice

— Eh bien, heureusement, car vous risquez d'hurler dans les minutes à venir, reprit Luke

— Oui, car on a une grande nouvelle à vous annoncer, continua Mike

Alice et moi les regardâmes, impatientes :

— Dis-leurs, déclara Luke, dans un sourire

— D'accord, John s'est cogné contre une porte vitrée et a dû aller à l'infirmerie ! s'écria Mike

— Non, pas cela ! rétorqua Luke, en tentant de transformer son rire en énervement, tandis qu'Alice et moi essayions de ne pas nous esclaffer trop bruyamment.

Une fois que nous fûmes tous calmés, Luke reprit :

— Plus sérieusement, vous allez pouvoir participer à notre projet de lycée ! Nous avons participé au vôtre et vous participerez au nôtre !

— Ce n'est pas une comédie musicale, mais un spectacle qui réunit des chants, des danses, des sketchs, etc..., énuméra Mike.

Alice se leva d'un bon et se mit à courir dans la pièce, chuchotant des hurlements de joie, ce qui amena de nouveaux fous rires. Quant à moi, j'essayais de me contenir, mais peine perdue ! J'avais, moi aussi, hurlé à voix basse. Inutile de préciser que de grands sourires illuminaient nos visages... La perspective de participer me rendait toute euphorique.

Je sursautai en surprenant le regard de Luke sur moi, et presque instantanément, mes joues commencèrent à chauffer. Ses yeux bleus brillaient, mais d'une étrange lumière, et il souriait, l'air ravi. Gênée, je détournai les yeux vers Mike, qui me fixait d'un air amusé.

— Y a-t-il un thème particulier ? questionna Alice, remise de ses émotions

— Oui, le cinéma ! répondirent-ils, d'une même voix

— Qu'allez-vous chanter ? demandai-je, calmée

— Eh bien, Introducing Me et I see Fire, expliqua Luke, on s'est précipité pour prendre ça !

— Introducing Me ? relevai-je

— C'est extrait de Camp Rock 2, non ? questionna Alice, c'est tout mon collège !

— Oui, répondis-je, mais, continuai-je, en riant, ce ne serait pas la chanson où il est question de fromage sur les pizzas et d'orteils ?

— Bien-sûr ! répondit Mike. Notre but est de faire rire...

— Vous réussirez !

— Je filmerai, annonça Alice, malicieusement

Je souris à Alice, les imaginant chanter I like cheese but only on pizza !

— Et toi, Emilie, tu vas faire des solos dans Happy Day avec Caitlin ! m'informa Mike, guettant ma réaction.

— Quoi ?! m'écriai-je, surprise

Avais-je bien entendu ? Caitlin avait le gospel dans le sang, mais moi...

Mike se tourna vers Luke :

— Je t'avais dit que ça lui plairait.

Luke haussa les épaules. Il arborait son sourire au coin et me fixait d'un air amusé. Je le regardai un court instant, avant de me tourner vers Mike.

— Ce n'est pas de ma faute ! s'empressa de se défendre Mike. Notre professeur a demandé à Caitlin de faire des solos et elle a accepté à condition de le faire avec quelqu'un ! Et, notre professeur nous a demandé si nous connaissions quelqu'un qui pourrait chanter avec Caitlin. C'est alors que Luke a parlé de toi ! m'expliqua Mike

— Luke ! Tu n'aurais pas pu citer Alice ? protestai-je, et il n'y a pas que moi !

— Non, mais tu me remercieras ! me rétorqua-t-il, et puis, ajouta-t-il, moqueur, Alice aussi devra chanter...

— Mais, c'est une chanson très difficile, et je ne sais pas si...

— Tu y arriveras, m'interrompit-il, avec un sourire, aie confiance !

J'hochai la tête, dubitative. J'étais mal placée pour chanter du gospel ; je n'avais pas la voix pour.

— Et puis, le meilleur reste à venir, lança triomphalement Luke, on a fait écouter ta voix à notre prof' ; on lui a montré les essais que tu as fait pour la comédie, tu sais les premières versions, avant l'enregistrement ! Après, elle ne pouvait plus refuser !

— QUOI ?!

Je le toisai d'un air ennuyé tandis que lui affichait le même sourire que le chat du Cheshire. Je reportai mon regard sur Mike.

— Je n'ai rien à avoir là-dedans ! me contrecarra dans la foulée Mike

J'ouvris la bouche pour répondre mais fus coupée par Alice.

— Quelle chanson vais-je devoir chanter ? demanda-t-elle, la mine suspicieuse

— Sûrement Fame, répondit Mike, avec Caitlin, précisa-t-il.

— Bien, c'est beaucoup plus facile que Happy Day !

Elle n'allait pas s'y mettre aussi. Luke et Mike se mirent à rire.

— Est-ce que vous voudriez faire un duo ? demanda Mike

— Dites-nous rapidement, les places partent vite, ajouta Luke

— Evidemment ! nous écriâmes simultanément Alice et moi.

— Bien, on vous inscrit, alors !

— Et réfléchissez au titre, conseilla Luke.

Alice et moi acquiescèrent.

— Peut-être qu'on devrait faire quelque chose tous ensemble, proposa Mike, je veux dire, avec le groupe.

— Il faut y réfléchir ; pourquoi pas tout simplement reprendre une chanson ? suggéra Luke. Une personne chante, et les quatre autres jouent la mélodie !

— Oui, j'en parlerai à nos professeurs dès lundi ! se réjouit Mike.

L'éventualité de jouer et de chanter en groupe me réchauffait le coeur et me faisait oublier toutes mes interrogations sur Luke. Ce dernier semblait très heureux et réjoui. Je voyais ses yeux scintiller, et jamais l'expression « des étoiles dans les yeux » ne m'avait parue aussi vraie.