V. Parmi les étoiles
Mon cher poète,
Si vous lisez cette lettre, c'est qu'il fort probable que je vous regarde depuis les étoiles, en ce moment même. Mais ne vous inquiétez pas, cet endroit ne m'est pas obscure. Surtout lorsque nous savons tous les deux ma passion pour ces astres, mais aussi la fâcheuse habitude de me loger dans vos yeux étoilés.
J'ose espérer qu'entre cet instant où je vous écris, et le moment où vous la lirez le temps passera pour une éternité. La grippe prend possession de moi à chaque seconde et mon corps trop âgé ne pourra gagner une telle bataille. Mais je ne peux concevoir de vous quitter pour de bon.
Je me doute, qu'en tant que poète mes mots vous traverseront comme des épées tranchantes dans votre cœur déjà meurtri. Je n'ai ni votre plume, ni votre talent et encore moins votre romantisme qui vous caractérise si bien. Mais je sais ô combien les mots ont davantage d'importance que n'importe quoi.
Vous m'avez épousé il y a de cela presque soixante-quatre ans et je me souviens encore du soir où nous nous sommes regardés.
Vous m'avez offert et dédié beaucoup de poèmes, Léonard. Mais aucun d'eux n'a jamais été aussi merveilleux que lorsque vous avez posé vos yeux sur moi. Votre regard sur moi qui, comme vous aimez l'écrire, se baladait sur les touches du piano. Puis sur mes doigts en longeant mes bras et mes épaules pour se poser sur mes joues aussi rouges qu'un coup de soleil.
Je crois que c'est comme ça que je décrirai votre présence dans ma vie : vous avez été mon Soleil. Et bien que j'ai conscience de la froideur dont je peux faire preuve, vous avez réussi grâce à votre douceur et votre intelligence, à me prouver que l'Amour vaut tout, et encore plus lorsqu'il vient d'un être cher.
Vous le savez comme je le sais, notre admiration pour l'un et l'autre n'a cessé d'exister au travers de nos soixante-trois ans de mariage. Et je n'ai cessé de vous aimer, malgré toutes les épreuves que nous avons pû traverser, aussi difficiles étaient-elles. L'idée que l'un de nous ai à vivre sans l'autre m'est insupportable, et elle l'est d'autant plus si je suis celle qui est amenée à disparaître en premier. Parce que je préférais endurer cette douleur plutôt que vous, vous qui avez déjà affronté le deuil avec tant d'injustices.
Je tarde à terminer d'écrire cette lettre, parce que je sais que ce sont les derniers mots écrits que je vous adresse et que chacun d'eux brûlent mon cœur avec tant de sadisme que je vais finir par y succomber.
J'espère ne pas vous causer trop de peine, Léonard. Mon cœur est à vous, ne l'oubliez jamais.
Je vous aime, mon amour.
Jeanne
23/04/1887
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Alors qu'avez-vous pensé de cette scène ?
J'avoue que j'ai un petit pincement au coeur pour mes deux p'tits vieux :') j'espère que vous avez aimé ce très petit chapitre !
N'hésitez pas à me laisser votre avis, je lis avec grand plaisir !
A vendredi ! <3
Lauren
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