𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚟𝚒𝚗𝚐𝚝-𝚜𝚎𝚙𝚝
Bonne lecture !
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Il ne fait sûrement pas si froid dans la salle principale du poste de police de Richwood, dans l'Ohio.
Hotch et Rossi ont relevé leurs manches jusqu'aux coudes, Garcia se balade avec une robe débardeur sans aucun problème, Morgan n'a qu'un pauvre t-shirt à manches longues, et Emily et JJ portent de fines chemises ouvertes d'au moins trois boutons.
Allongé sur deux chaises collées l'une à l'autre, Spencer garde les yeux fermés en essayant de se tourner pour ne pas avoir la lumière jaune du plafond en pleine figure. La veille, en partant de son appartement, il a enfilé un débardeur, un t-shirt, une chemise, un pull, un autre pull, et un gilet épais boutonné sur le devant. Il frissonne encore un peu, comme toujours depuis des semaines. Son miroir lui a renvoyé une image à peu près convaincante, et si Spencer n'avait pas parfaitement su ce qui se cachait là dessous, il n'aurait jamais imaginé des côtes apparentes et un ventre creusé.
Le silence de la pièce est agréable. Ça lui donne envie de sourire vaguement.
La présence d'Aaron Hotchner a toujours eu le don d'imposer le silence : les fantômes se taisent, gardent leurs distances, et ne viennent plus lui crier dans les oreilles. Il peut rester ainsi, allongé sur les chaises dans un coin de la pièce, et écouter discrètement les conversations diffuses sans bouger.
Il n'a pas remué un orteil depuis vingt-quatre minutes et vingt-sept secondes.
— J'ai jamais réussi à faire ça, soupire Rossi.
Sa voix n'est pas très forte, alors il se trouve forcément à plus de six mètres de lui. Même les yeux fermés, Spencer sait que l'homme est assis devant l'un des bureaux, un mug de café brûlant à la main.
— Faire quoi ?
Prentiss se retourne vers lui, le timbre de sa voix change légèrement. Sa question est sincère.
— Faire une petite sieste. Je trouve pas ça naturel.
Malgré la frustration que cela leur procure, ils sont tous obligés d'attendre. Quelques policiers non indispensables sont rentrés chez eux, mais la plupart sont encore dans la pièce, dispatchés aux quatre coins.
Spencer sent sa cravate glisser sur le côté de son torse. Il sent sa montre, trop lâche à son poignet, qui s'est coincée sur l'un des boutons de son gilet.
Un soupir s'échappe de ses lèvres. Il grogne :
— Je suis parfaitement réveillé, mais pour votre gouverne le sommeil polyphasique est complètement naturel, très répandu dans le monde animal, et hautement bénéfique.
Spencer déglutit en se redressant lentement. Son dos le fait souffrir, tout comme ses jambes pleines de crampes qu'il n'arrive pas à faire partir même en buvant toute l'eau présente dans le distributeur à côté de lui. Quand il frotte doucement ses yeux, son regard croise celui de Hotch, debout devant le tableau.
Il essaye de ne pas le soutenir trop longtemps, mais c'est difficile.
Spencer sait qu'ici, l'homme en costume est Aaron Hotchner et qu'il ne va jamais faire le moindre commentaire déplacé. Il pourrait éventuellement le convoquer dans son bureau à leur retour à Quantico pour lui parler du fait que Spencer ne parle presque plus avec le reste de l'équipe, qu'il passe son temps à faire des siestes dans l'avion, ou à n'importe quel autre moment de libre propice à une discussion. Il pourrait lui parler de ça, et de ça uniquement. Pour le moral de l'équipe, la coalition.
Son boss n'a rien à lui reprocher.
Aaron, en revanche, aurait sûrement plus de choses à dire.
Sur le fait que Spencer fait toujours tout ce qu'il peut pour éviter de se déshabiller, pour garder au moins un pull et cacher la misère, sur le fait que ses cernes sont creusés et noirs et qu'il boit plus que la limite acceptable de café. Sur le fait qu'il semble plus impatient, plus silencieux, plus renfermé.
Sur le fait que quand ils se voient, Spencer insiste pour faire ça rapidement : un coup en douce et il remonte son pantalon pour repartir sans même s'être éloigné de son sac plus de quelques minutes. Il sait très bien qu'Aaron n'a pas envie de ça. Pas tout à fait, en tout cas. Une relation casuelle et moins sérieuse lui va sans doute parfaitement, mais Aaron Hotchner a besoin d'un peu de chaleur et de quelques paroles.
Pouvoir regarder un film. Partager un repas. S'endormir avec quelqu'un.
Spencer détourne le regard, et baisse les yeux sur l'ongle de son pouce. Il s'est cassé. Du sang coule le long de son doigt. Spencer n'a rien senti du tout, et sans faire attention ou sans même penser à se laver les mains, il porte son doigt à sa bouche.
Au même moment, Jennifer les ramène à l'enquête en soupirant :
— Bon, ça fait six heures. S'il a encore tué, il ne laisse plus la porte de devant ouverte.
Spencer secoue la tête pour se réveiller. Le calme est si agréable qu'il a juste envie de se laisser partir.
Il résiste, pourtant. Jusqu'à la fin de l'enquête. Dans l'avion, sur le chemin de retour une bonne quinzaine d'heures plus tard, il s'autorise à se recroqueviller dans son siège. Fermer les yeux, profiter de la présence de Hotch qui fait fuir les revenants, et enfin s'accorder trois longues heures de sommeil ininterrompues.
Quand Spencer rouvre les yeux, personne ne semble faire attention à lui.
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Des bisous !
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