Chapitre 8 : Vision de rêve
Ruisselant d’eau chlorée, Dante se hissa sur le bord de l’immense piscine d’intérieur. Vêtu d’un simple maillot prêté par Elwis, il soupira en rejetant ses cheveux en arrière. Cela provoqua des ronronnements de la part des femmes autour de lui, s’exhibant dans des bikinis vulgaires.
Eclairés uniquement par des plafonniers, créant une ambiance solaire, ils n’en restaient pas moins enfermés sous terre, avec des murs reproduisant des tableaux de plages sablonneuses. Dante alla chercher sa serviette, lâcha un juron en voyant une donzelle à la place.
-Vous allez bien, monsieur Thurston ? minauda-t-elle en ondulant sans raison.
-Jusqu’à présent, en tout cas.
Il attrapa son jean – gracieusement offert par Elwis- l’enfila sans se sécher, avec une grimace. Bon sang, il détestait enfiler un pantalon en étant encore mouillé. Il allait lui falloir une heure avant d'étre à l'aise, maintenant.
-Vous partez déjà ? pleurnicha la bimbo, suivit par toutes les autres écervelées agglutinées autour de lui.
-J’ai mieux à faire.
-Oh… Je pourrais peut être vous aider…
Elle glissa ses doigts sur ses abdominaux dénudés, luisant d’eau. Cela lui arracha un frisson de dégout. Il était sur le point de la détruire d’une simple parole quand un hurlement retentit.
-Hélène !
*
Pourquoi, pourquoi, mais pourquoi avais-je commis une telle folie !? Comment avais-je pu oser vouloir lire un livre en plein soleil !?!
Bon, d’accord, songeai-je en faisant sauter le cran de sécurité de mon pistolet. Je ne pouvais pas m’attendre à ce qu’il pleuve des zombies avec un temps pareil. Et certainement pas dans les jardins de la Maison Balder !
Encerclée par une vingtaine de morts-vivants à moitié décomposés, dont l’odeur de pourriture saturait l’air estival, je n’en menais pas large. Car aucun de ces poltrons de vampires ne pointait le bout de son nez pour m’aider, me laissant me débrouiller seule avec leur futur dégénéré.
-Emparez-vous d’elle ! hurla l’un d’eux, tout en postillonnant une nuée de vers. Si on l’a elle, on aura Thurston !
-Allez-vous faire voir! beuglai-je pour masquer mon dégout de ces postillons vivants. Je ne vous laisserais jamais Dante !
Ils foncèrent sur moi, avec leur grâce désarticulée de zombies. J’ouvrais le feu, sans l’ombre d’une hésitation. Un crâne explosa dans une gerbe verdâtre, un deuxième suivit. Puis des mains décomposées m’attrapèrent par les épaules, m’immobilisant lâchement. Je me débattis comme une furie…
Alors, une vision de rêve m'apparut. Etais-je morte ? Etais-je au paradis ?
Dante venait de faire exploser la tête d’un zombie à bout portant, avec un fusil à pompe. Son torse nu luisait d’eau, faisant ressortir ses abdos et ses pectoraux d’aciers. Ses cheveux, lissés en arrière, mettaient en valeur ses yeux bleus, son jean à moitié fermé soulignant sa taille, ses jambes, ses…
-C’est pas le moment de baver, Hélène, ricana-t-il en éclatant la tête du mort derrière moi.
Des éclats et des gouttelettes suspectes m’éclaboussèrent, me faisant grimacer.
-Bon sang, Dante ! C’est…
Ma phrase s’acheva dans un borborygme. Un zombie avait tenté de prendre mon amant de vampire en traitre, cherchant à souiller le tableau fantasmatique qu’il représentait.
-Ils sont trop nombreux ! rugit Dante en m’attrapant par le poignet, pour m’arracher à la prise de trois d’entre eux. Retourne dans le manoir !
Dos à dos, nous affrontions les zombies, jaillit d’entre les haies à l’entrée de la demeure. La volée de marches donnant sur la porte, encadrée par deux armures, n’était pas loin. Pourtant, nous nous trouvions incapables de l’atteindre.
-Fonce, j’ai dit !
-Je fais ce que je peux, je te signal !
-Ma Gâchette Fleurie fatigue ?
Cela lui valut un coup de coude dans les côtes. Les zombies prirent son « ouch » pour un accès de faiblesse. Ils sautèrent tous en même temps en avant… Dante me repoussa violemment en arrière, me faisant faire un vol plané. Je m’écrasai comme une mouche sur la porte d’entrée du manoir, m’écroulai sur le sol, le souffle coupé. Un « bzzz » bourdonnait à mes oreilles.
La vache, il avait vraiment la force d’un taureau !
Avec un gémissement, je me remis debout, crachai du sang. Je m’étais mordue la langue en tombant, en plus.
-Hélène !
Le rugissement de Dante me fit lever les yeux, juste à temps pour croiser ceux, laiteux, d’un zombie. Il se jetait dans les airs, tel un fauve prêt à attraper sa proie, ses doigts en serres pour déchiqueter ma peau…
Cette vision de cauchemar disparut brutalement. Percuté en plein vol par Dante, il fut projeté contre l’une des armures d'ornement. La pièce de musée tomba en morceaux dans un fracas assourdissant, le heaume venant rouler jusqu’à mes pieds.
Saisissant la lanière de cuir à la manière d’un lanceur de poids, Dante pivota sur lui-même, faisant siffler le casque dans son sillage. Il percuta de plein fouet le crâne d’un autre zombie, qui explosa tel un fruit trop mure, éclaboussant ses comparses. Ils se retrouvèrent bien vite mêlés à la fureur de Dante. Quand un grondement retentit à côté de moi, je n’eus tout d’abord pas la présence d’esprit de reculer, tant j’étais stupéfaite par la violence de mon amant.
Crocs sortit, utilisant le casque dégoulinant de sang comme un fléau, il faisait un carnage dans les rangs ennemis. Ses muscles se contractaient sous la vitesse de ses mouvements, m’hypnotisant littéralement.
Puis des ongles ébréchés se plantèrent dans mon cou, déchiquetant ma peau. Une bouche, aux filets de baves coulant entre les dents, exhala une haleine fétide, me faisant sentir l’odeur de ma propre mort… Le zombie finit cloué à la porte, une épée séparant sa tête de son corps. Cet accès de violence était-il dû au sang dans ma bouche ?
Dante s’agenouilla devant moi, la pointe de ses canines dépassant sur sa lèvre inférieure.
-Tu saignes.
Ses doigts frémissaient, preuve de sa lutte contre lui-même. Inconsciemment, je m’humectais les lèvres, le faisant frissonner de la tête aux pieds.
-Tu es carrément torride.
*
Après la scène de violence à laquelle elle venait d’assister, il ne c’était pas attendu à une telle réaction de sa part. Bon, d’accord, elle avait toujours eu tendance à l’adorer dans son époque mauvais garçon, mais là…
… si elle se contenta d’un baiser vorace, il ne l’aurait jamais cru capable d’oublier le cadavre juste derrière elle, ni même ceux l’entourant. Sans parler des résidus les recouvrant tous les deux. En revanche, lui eut beaucoup de mal à s’arrêter à cet échange piqueté du sang auréolant sa douce langue.
Un grondement dépité lui échappa. Néanmoins, le goût de son sang, aussi succin soit-il, réussit à rétracter ses crocs. Délicieux…
Bien décidé à l’entrainer dans leur chambre, il l'entraina à l’intérieur du manoir… Et se retrouva face à un couloir bondé de vampires aux yeux écarquillés, se massant pour échapper au carré lumineux, découpé sur le sol, par la porte d’entrée.
-Il peut aller au soleil…
-Il les a tous tué…
-C’est un Dieu !
-Non, un Saint !
-C’est notre évolution ! rugit Elwis en repoussant ses ouailles, un sourire victorieux transfigurant son visage pâle.
Tout ces yeux inhumains, dans le noir, faisaient penser à une nuée de chauve-souris. Pourtant, quand Dante s’avança, la main d’Hélène fermement bloquée dans la sienne, ils s'écartèrent, révélant le passage jusqu’à leur chef exalté.
-Ton sang nous rendra plus fort, mon fils.
-Vous n’êtes pas mon père.
-Comprends nous, Thurston ! s’exclama Elwis. Nous avons besoin de ton sang pour continuer à vivre. Tu es la clé de notre avenir !
Dante leva son index pour s’opposer fermement à cette idée, puis vit tous les regards braqués sur lui. Ce n’était pas vraiment le moment de refuser.
-Je vais devoir en discuter avec Hélène, finit-il par dire.
*
-Qu’est-ce que tu entends par là ?
Assise sur le rebord de la fenêtre, je le fixais sans comprendre. Agité depuis notre sortie de la douche –devenue coquine après le décrassage, zombie oblige-, il ne cessait de se passer une main dans les cheveux, provoquant une explosion de mèches à moitiés sèches.
-Tout d’abord, tu as parfaitement conscience que j’ai massacré un demi contingent de zombies à moi tout seul, simplement à cause de l’odeur de ton sang ?
-Oui.
-Oui ?
Son air dubitatif me fit glousser. Il était craquant, avec ses cheveux en l’air, ses crocs pointant sur sa lèvre inférieure. Il avait refusé de boire mon sang, de peur de me laisser anémiée. C’était si attentionné.
-Enfin, bref. Je ne sais pas pourquoi ils veulent me mordre, mais je veux savoir si cela ne te pose pas problème, à toi.
Je fronçais les sourcils.
-Pourquoi cela me dérangerait-il ?
-Ben… Tu n’as pas remarqué que pour nous deux, c'est extrêmement sexuel, quand je te croque ?
Le rouge me monta aux joues. Les termes étaient faibles, pour décrire à quel point cela me faisait perdre la tête. Rien que d’y penser, je…
-Oui, et alors ? lançai-je platement, à l’inverse de mes pensées bouillonnantes. Nous sommes amants, rien d’autre.
Mécontent, il serra la mâchoire. Après tout, il avait lui-même définit les termes de leur relation. Il n'avait pas le droit de se plaindre.
-Pour toi, peut-être.
-Cela ne change rien, grommelai-je en détournant les yeux des siens, accusateurs. Tu veux mon avis ? Fais ce que tu veux. C’est ta vie, pas la mienne.
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