Chapitre 10 : Chéri !?
-J’ai bien envie de fuir avec toi, et de les laisser se débrouiller tout seuls.
Dante planta sa cuillère dans sa glace, dégouté à la simple idée de manger. Un OGM ! Il ne se remettait toujours pas d’être un fichu OGM, créé par un cinglé pour être son clone ! Le pire, c’était qu’il comprenait parfaitement sa façon de penser…
-Ce n’est pas ce que nous sommes en train de faire, là ?
Hélène lui piqua sa cuillerée de glace, avec un petit sourire.
-Non, là, je me fais pardonner de t’avoir entrainé dans cette galère, rétorqua-t-il.
Effectivement, ils venaient de faire les magasins, en utilisant sa carte bleue –apparemment, Manneville avait réussi à faire les papiers affirmant qu’il était toujours vivant-. Oh, il n’avait pas tout dépensé en vétements affreusement coûteux, contrairement aux habitudes de ses stupides conquétes. Non, cette fois-ci, il avait passés des heures avec la femme de ses rêves à l'intérieur de librairies, à choisir des kilos de livres pour sa tendre bibliothécaire. Heureusement, ils étaient partis de la Maison Balder depuis le matin, histoire de se débarrasser de ces sangsues allergiques au soleil.
-Tu as été pardonné à l’instant où tu es revenu à la vie, Dante.
-Tu es un ange, murmura-t-il en se penchant par-dessus la table.
Il l’embrassa tendrement, émerveillé d’en être enfin arrivé là, avec elle, sans être repoussé par sa peur. Elle avait toujours eu des difficultés avec son amour inconditionnel. Mais désormais, elle c’était aperçu qu’elle était pareille. Il était temps.
-Tu as un goût de glace, gloussa-t-elle. Oh, au fait. Tu as réfléchi à où se trouvaient les informations ?
-Je ne vois toujours pas où elles peuvent se trouver. Il faut dire aussi que pour moi, la chose la plus importante au monde c’est toi. Pas des données sur l’évolution des vampires en prédateurs encore plus dangereux.
-Tu veux dire aussi dangereux que toi…
Il sourit à son ton. Décidemment, elle c’était réconciliée avec son coté « mauvais garçon », hérité de son cinglé de père, pour l’aimer tel qu’il était maintenant. Un vampire… Il l’était depuis moins de trois jours, mais cela lui paressait aussi naturel que respirer.
-Je voudrais passer chez Manneville, histoire de voir où il en est avec les papiers. Après, on retourna à la Maison des Balder. On leur fera croire que l’on a cherché les documents partout.
-Ok.
-Tu as ton pistolet ? demanda Dante en attrapant les kilos de livres, pour les amener à leur voiture de sport –gracieusement empruntée aux vampires-.
-Avec tous les malades qui nous en veulent ? Évidemment, mon tendre mort de garde.
-Gâchette Fleurie.
-Je te déteste.
Ils se chamaillèrent ainsi jusque dans le parking à l’air libre. Dans cette zone de La Garde, des centaines de magasins se cumulaient au même endroit, avec, à cet heure de l’après-midi, presque personne avant le rush de dix-sept heure trente. Pas une poussette, pas un chat, rien.
Aussi furent-ils particulièrement surpris de se retrouver encerclés en plein milieu du parking, par une trentaine d’humains armés de fusils d’automatiques.
-Éloigne-toi de la fille, sale sangsue !
*
Ok, des chasseurs de vampires.
Alerte, j’avais déjà mon pistolet à la main, prête à en faire usage. Proche de Dante, je le sentais tendu, prêt à en découdre. Purée, ils nous avaient chassé au lance-roquette, pas plus tard qu’il y avait deux jours ! Je ne m’en remettais toujours pas.
-Eloigne-toi d’elle !
Hein ? Ils voulaient me séparer de Dante ? Encore des gens qui voulaient me prendre en otage pour pouvoir le manipuler. Ils n’étaient pas vraiment différents des zombies, en fait.
Attentive, je les dévisageai tour à tour. Armés jusqu’aux dents, avec plusieurs pistolets, des poignards, des gilets par balles. Tous à la mine patibulaire. Il y en avait même un qui ressemblait à mon mari, et un autre à…
-Papa !?
-Thurston ?
-Lévine !?
-Hélène !?
-Chéri !?
Nous venions tous de nous reconnaitre, stupéfaits.
Mon mari avaient les yeux à deux doigts de jaillirent de leur orbites, la mauvaise humeur de Dante grimpa en flèche, et moi… Je fis face à mon père. Grand, blond, ridé, dans la force de l’âge, Bernard de Vallois m’adressa un regard dur, un fusil à pompe pointé en direction de mon mort de garde. Comme les autres chasseurs, un peu perturbés par la tournure des évènements.
-Ecarte-toi de ce monstre, ma puce. Papa s’en occupe.
-Il a raison, Hélène. Fuis avant qu’il ne te morde !
Je me tournai vers mon mari. Vêtu d’un baggi et d’un t-shirt, sa peau noire contrastait avec ses yeux bleus, d’habitudes si doux, si gentils, si…
-Je vous interdis de tuer Dante !
-C’est un vampire, Hélène ! Recule !
-Je sais, bougre d’âne ! Papa, pose ton arme !
-Il est dangereux !
-C’est mon amant, bordel, foutez-lui la paix !
Heu… Je n’aurais peut-être pas dû dire ça à mon mari.
A peine eu-je prononcer ces malheureuses paroles qu’il ouvrit le feu. La balle explosa la crâne de Dante. Une gerbe de sang fleurit dans l’air, il tomba lentement arrière, au ralentit dans mon esprit. L’horreur de cette fameuse nuit, où il avait été tué par Jason, me rattrapa soudain.
-Non !
Lâchant mon arme, je me précipitai vers Dante. Immobile, les pupilles fixes, il ne respirait plus. Non… Non, non, non, non ! Pas encore une fois ! Pas une seconde fois ! Il ne pouvait pas encore mourir ! J’avais besoin de lui ! J’avais… J’avais…
-C’est pour ton bien, ma chérie, fit Lévine en me tirant loin du cadavre. Il avait pris possession de ton esprit pour te faire croire de mauvaises choses. Tu es sauvée.
Je levais les yeux sur lui. Mon mari depuis des mois. Mon amant, mon amour, mon petit travailleur à la mairie.
Un chasseur de vampire, travaillant avec mon taré de père.
-Je vais te buter !
*
Trois heures plus tard, je me réveillais attachée à un lit. Dans une chambre ressemblant à s’y méprendre à celle de ma maison d’enfance, à Toulon. Je tentai de me redresser, jurai en tirant sur mes liens. C’était quoi ces conneries ?
Et puis, comment en étais-je arrivée là ?
Oh non… Dante…
Les larmes roulèrent sur mes joues, brûlantes. Je l’avais encore perdu…
-Tout va bien, ma puce ?
Je sursautais en apercevant mon père, assit sur une chaise près de moi. Les traits tirés, il avait mauvaise mine, marquant un peu plus ses rides. Bernard de Vallois. Mon père. Ici, devant moi. Misère… Comment en étions-nous arrivés là ?
-Détache-moi.
Il hésita. A sa décharge, je leur avais fait passer un sale quart d’heure.
-Tu en vraiment redevenu ma fille ? Car tu as essayé de tuer Lévine, je te signal.
-Détache-moi… Papa…
Ce simple mot le fit céder. La minute suivante, j’étais assise en tailleur sur mon lit d’enfance, d’humeur massacrante. Quelque chose n’allait pas, mais pas du tout, dans cette histoire.
-Tu peux me dire depuis combien de temps tu chasses les vampires ? grondai-je en massant mes poignets endoloris.
Mon père se passa une main nerveuse dans les cheveux. Dans le couloir longeant ma chambre, je pouvais entendre des bottes claquer sur le carrelage, signe d’une patrouille. Une patrouille ? Combien de chasseurs se trouvaient-ils entre ces murs ?
-A vrai dire, je suis le chef de la Cellule Française. Ce depuis tes quatre ans.
-Quoi !?!
Mon exclamation ne le fit même pas sursauter. Mon cœur, en revanche, cherchait à s’arracher de ma poitrine.
-Alors c’est quoi, cette histoire à la mairie !? Et pourquoi Lévine est avec toi !? Pourquoi avoir tué Dante ?! Tu as intérêt à tout me dire !
Il leva les mains devant lui en signe d’apaisement, finalement surpris par ma fureur. Je la ravalais difficilement, à l’instar de mes larmes. Je le détestais ! Je l’avais toujours détesté, en fait. Maintenant, je le haïssais ! Toute ma vie était à revoir ! Un immense mensonge !
-Lévine est un de mes hommes, m’expliqua-t-il, de sa voix rocailleuse. Je l’avais envoyé te protéger, dans ta vie de tous les jours. En tant que fille de Bernard de Vallois, tu allais forcement être prise pour cible.
Mon cerveau s’enrailla légèrement.
-Que… Que… Lévine était mon garde du corps ? Mais c’est mon mari ! Oh non… Ne me dit pas qu’il m’a fait sa demande pour…
-… Te surveiller de plus près ? En fait, il est devenu ton petit ami pour ça, mais après, il a agi de son propre chef.
-Oh mon Dieu ! m’exclamai-je en sautant du lit. Oh mon… Oh… Je… Je suis fille et épouse de menteurs cinglés et fous de la gâchette !
Je me mis à faire les cent pas, incapable de tenir en place entre le lit à froufrou et ma commode recouverte de licornes en plastique. Mon père ne savait plus où se mettre, se dandinant d’une fesse sur l’autre, mal à l’aise. Depuis ma naissance, je ne l’avais jamais vu ainsi.
-Ne le prend pas comme ça, ma puce…
-Ne le prend pas comme ça !? Ne le prend pas… Tu te fous de ma gueule !? Mon mariage est basé sur un mensonge !
-Non… Pas du tout, Lévine te…
-Je t’aime de tout mon cœur, Hélène.
Je pivotais vers la porte, frappée du poster de Twiligth. Mon mari se tenait dans l’encadrement, inquiet, les traits plus marqués que de coutume. Nom de… Avec ses yeux empli de tristesse, il aurait presque pu m’y faire croire.
-Tu m’aimes de tout ton cœur ?! beuglai-je. Alors pourquoi ne rien m’avoir dit pour ton travail de chasseur de vampire ?! Pourquoi m’avoir laissée seule à l’enterrement de Dante ?! Purée, si tu étais resté avec moi, rien de tout cela ne se serait passé !
-J’ai reconnu Jason, de la Maison Balder ! se défendit-il. Que voulais-tu que je fasse, quand un de tes amis a été assassiné par un vampire ?! Je me suis précipité auprès de ton père pour faire mon rapport, et organiser une protection !
-Ha ouais ? raillai-je en posant les poings sur mes hanches. Ça a trés bien marché, mon chéri. J’ai juste été agressée deux fois par des vampires, tes collègues chasseurs ont faillis me carboniser avec un lance-roquette et le clan des vampires hésite toujours entre me prendre pour otage et me laisser tranquille.
-Comment…
-Oh, tu es surpris ? Eh bien je vais t’en apprendre une bonne : sans Dante, je serais morte à l’heure qu’il est !
-Il t’a menti, à cause de ses pouvoirs, il a…
-Dante est vampire depuis moins de trois jours, pauvre cloche ! Il ne sait même pas de quoi il est capable ! Alors tiens-toi à carreau, sale traître ! Parce que le menteur de l’histoire, c’est toi !
Les poings serrés, il me toisa. Sous sa peau noire, les muscles de ses bras jouaient, tant il luttait pour se maîtriser. Et dire que je l’avais épousé. En tant qu’employé de mairie.
-Tu peux parler de ce salaud au passé, Hélène, gronda Lévine, la bouche réduite en une fine ligne. Il est bel et bien mort, cette fois.
Je soupirai, refoulai une nouvelle fois mes larmes, ma tristesse… Et sursautai en entendant un gémissement, à l’extérieur de la maison.
-Je suis restée inconsciente combien de temps ?
-Ne change pas de sujet, Hélène !
-Ta gueule, Lévine ! Papa ! Réponds-moi !
-Heu… Trois heures. Pourquoi ?
J’allais me poster devant la fenêtre. Le crépuscule tombait, n’augurant rien de bon au travers de ses rayons cramoisis.
-Vous êtes-vous au moins posé la question de comment je m’étais retrouvée dans cette situation ?
-Hein ? Ils t’ont enlevés, c’est tout…
-Bande de ralentis ! explosai-je en leur désignant ce qui marchait sur la pelouse de mon enfance. Dante et moi sommes poursuivis par des zombies !
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