Chapitre 14

Ce ne sont quelques secondes après le départ de l’hôtesse que Caden entre dans la chambre. Son visage est sérieux et du coin de l’œil, je le regarde s’asseoir sur le lit. Aucune émotion trahit son visage et je me demande comment je vais pouvoir m’échapper de cet être. Cela risque d’être impossible, mais je dois essayer.

Toujours sans bouger, je le regarde se mordre la lèvre inférieure, puis son regard se pose sur mon corps. Il ferme les yeux un moment et je vois ses narines s’étirer. Que fait-il ? Ce dernier fait une grimace avant de pester :

        —        Tu empestes le monde d’ailleurs, il gâche ton parfum, c’est aberrant.

        —        Je suis censée avoir quelle odeur ?

        —        De lavande et d’un couché de soleil.

        —        J’ignorais qu’un couché de soleil pouvait avoir une odeur.

        —        Ce n’est pas une odeur a proprement parlé. Tu ne peux pas comprendre, tu…

        —        Ne viens pas de ce monde, je le coupe, je sais.

Un son grave provient de sa gorge, mais ne dit pas un mot. Je ne viens pas de ce monde, cela est un fait et je m’en échapperais, s’en est un autre. Je suis certaine que Sebastian va me retrouver et je garde espoir. Je ne peux pas rester ici…

        —        Tu devrais enfiler tes nouveaux vêtements, l’odeur serait moins horrible.

        —        Vous pourriez avoir l’amabilité d’être un peu plus poli.

        —        Dit celle qui me traite de monstre…

        —        Ce n’est pas ce que vous êtes ? Je croyais que ce monde était régi par des animaux.

Il se lève d’un bond et son corps se retrouve à quelques centimètres du mien. Caden me toise du regard. Croit-il me faire peur ? Certes, je le crains un peu, mais je ne me laisserais pas faire. Ce qu’il peut être ou ce qu’il peut me faire ne pourra pas jamais me faire aussi mal d’être loin de celui que j’aime.

        —        Tu crois tout savoir, n’est-ce pas l’humaine, crache-t-il, tu viens bien plus de ce monde que tu le crois. Tu devrais faire attention à qui tu t’adresses. Ton sang réagit à nos lois, comme tout être qui en porte. Tu ne feras pas la différence. Maintenant, changes-toi, avant que je le fasse moi-même.

        —        Retournez-vous, je le lui ordonne, je…

        —        J’en ai déjà vu amplement. Il n’est pas différent des autres corps. Cependant, vu que je suis fatigué et que je me tarde de dormir, je vais me retourner.

Il se retourne, mais ce dernier est toujours trop près. Dans son dos, je soupir avant de changer en vitesse. Il est inutile que je m’attarde qui sait ce que scélérat pourrait bien me faire. Une fois terminée, je me racle la gorge et ce dernier s’installe sur le lit et tapote la place à ses côtés. Je hausse les sourcils en croisant les bras contre ma poitrine. Il est hors de question que je partage un lit avec lui. Caden lève les yeux au ciel en soupirant. Si ce dernier croit que je vais lui rendre la tâche facile, il fait erreur sur ma personne.

        —        Il est hors de question que je dorme avec vous. Pesté-je.

        —        Fait ce que tu veux, moi, j’ai besoin de sommeil. Dors à même le sol, si cela t’arrange.

Je grogne tel un chat et je m’apprête à prendre un oreiller et une couverte dans le lit pour m’installer, mais Caden m’attrape le poignet en disant :

          —        Qu’est-ce que tu fais ?

          —        Je m’installe au sol…

          —        Ah non, non. Sois-tu dors avec moi soit c’est au sol avec rien. Je suis un monstre, pas vrai ?

Encore une fois, je pousse un grognement de frustration. Caden croit vraiment qu’il va gagner ? Il rêve. Je me couche au sol en essayant de trouver une position confortable. À cet instant, je ne regrette pas la nuit dans la grange de Sebastian. Les bottes de foins étaient bien plus commode qu’un parquet de bois.

        —        Bonne nuit bichette.

        —        …

        —        Ah, j’oubliais. Inutile d’essayer de t’enfuir, la porte est fermée à clé et elle est dans un endroit que tu n’oseras jamais toucher.

Il éteint ensuite la lumière. Cela me prend interminable avant de trouver le sommeil.

******

Lorsque je me réveille, j’ai des courbatures. La nuit a été longue entre les ronflements de Caden et les bruits sous le plancher. Je suis certaine que cette auberge abrite des rats sous leur toit sans le savoir Un frisson de dégoût parcours ma peau en imaginant des rongeurs qui courent partout sur moi. Je me secoue la tête en chassant cette idée de la tête. Je me lève en constatant que Caden est assis sur une chaise et un plateau de fruit déposé à ses côtés. Il mange des raisins un par un en m’observant. Ce dernier semble amusé, ce que je ne suis pas.

          —        Bien dormi ?

          —        Impeccable.

Ce qui est totalement faux. J’ai à peine dormi. Je n’ai pas besoin de beaucoup d’heures de sommeil, mais là c’était trop peu.

        —        Tu veux manger avant de reprendre la route ? Les autres ont déjà mangé et nous attendent.

Mon ventre gargouille, mais je résiste à l’envie de manger. Il pourrait être empoissonnée, non ? Cela est absurde. Caden n’en mangerait pas, si ? Je secoue la tête et ce dernier hausse les épaules avant de se lever. Dommage. Cela parait tellement délicieux.

Je lève les yeux vers mon kidnappeur qui ouvre la porte – sans clé ? Quoi ? Il s’est joué de moi ? Comment a-t-il pu ? Je tourne sept fois ma langue dans ma bouche et préfère me taire. Je lui emboite le pas, essayant de trouver une issue. J’aperçois une porte derrière le bar, mais je ne passerais pas inaperçue. Je ne peux me dérober de cet endroit sans être vue.

Nous arrivons près de Kildan et de mon père qui semble s’être étrangement remis de ses blessures. Je fronce les sourcils. Il se tient droit. Hier, encore, ce dernier ne pouvait à peine marcher. Que s’est-il donc passé cette nuit ? Que se passe-t-il vraiment entre ces deux individus ? Les mots étranges qu’ils ont prononcés dans le sous-sol de notre grange en est-il pour quelque chose ?  

        —        Les chevaux sont prêts. Annonce Kildan. Je me suis assuré qu’ils avaient bien mangé.

        —        Bien.

Nous sortons de l’auberge et je m’aperçois qu’il y a que trois chevaux. Je fronce les sourcils. Pourquoi ? Kildan s’approche de moi, lorsque Caden choisit sa monture. Une jument totalement noire et la crinière frisée. C’est une belle bête. Kildan croise ses bras sur son torse avec un sourire en me disant tout bas :

          —        Vous ne croyiez tout même pas que vous auriez un cheval à vous toute seule ?

          —        Je… Je ne vois pas de quoi vous parler, je rétorque, pourquoi père en a un s’il est un déserteur ?

          —        Parce que certaines choses sont différentes.

          —        Je ne montrais pas avec lui.

          —        Vous n’avez guère le choix.

Avant même de répliquer, on m’attrape par la taille et on me glisse sur le cheval. Mon dos est plaqué contre le torse de Caden. Je sens une chaleur émaner de lui. Un être constitué normalement n’en dégage pas autant. Même Sebastian n’en dégage pas autant. Est-ce tout les gens de ce monde qui peuvent faire cela ? Je ne me souviens pas de père, pourtant. Est-ce une particularité propre de ce dernier ? Dois-je vraiment le savoir ? Non, je n’en ai pas envie. Je veux seulement que ce cirque s’arrête, mais je suis loin de connaître la fin.

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