Chapitre 11


         — Oui, toutes les fois que je le faisais.

— Et comment c'était ?

— Bien, je suppose, je ne sais pas comment décrire. Je n'ai pas vraiment l'expérience. Et vous ?

— Bien, je pense également. Cela m'aidait à m'endormir. Je pensais vraiment que vous seriez le premier. Je ne voulais pas de ces gamins d'école. Je comprends mieux maintenant pourquoi vous sembliez plus développé, plus mature que les autres de votre âge.

Je m'allonge à nouveau sur le dos. Mes confessions me libèrent, mais j'aurais vraiment aimé que tout cela se passe comme nous l'avions prévu. J'ignore ce qui m'attend dans l'autre monde. Comment vais-je être traitée. Comment survivrais-je là-bas ? Toutes ces questions se bousculent dans ma tête, mais je dois passer outre pour le moment.

Les doigts de Sebastian qui se nouent aux miens et je souris. Oui, j'aurais aimé qu'il soit le premier. Doucement, de sa main libre, il tourne mon visage vers lui. Ce dernier me semble si tourmenté, mais si doux à la fois. Sebastian approche son visage et ses lèvres effleurent les miennes. Entre deux baisers, il souffle :

— J'aurais aimé l'être. Vous ne savez pas à quel point, il m'est douloureux d'essayer de ne rien ressentir.

— Alors, laissez vos émotions prendre le dessus.

— Je ne peux pas...

Il m'offre un dernier baiser avant de me laisser aller contre sa poitrine et essayer de trouver le sommeil. Frustrée, j'écoute les battements de son cœur qui m'apaise et je finis par m'endormir beaucoup plus tard.

****

Lorsque je me réveille, il fait déjà jour et le coq des Hunt chante déjà depuis un moment. En sursaut, je regarde autour de moi. La grange. Oui, je me souviens. Sebastian est toujours endormi et je sais que je ne peux pas rester là. À toute vitesse, je descends l'échelle et croise le regard amusé de Gérard. Il ne dit rien et me laisse filer. Ce dernier va supposer des choses que nous n'avons pas faites, mais je sais que cet homme n'en parlera à personne. Nous sommes deux amis qui ont dormi ensemble.

Je cours aussi que je peux pour être à la maison avant tout le monde. Je sens que mère est déjà debout, vue de son excitation pour le bal. Je dois donc trouver une excuse pour être sitôt levée. Je passe donc vers le poulailler. Heureusement, la cuisinière n'est pas passée ce matin pour cueillir les œufs. Je prends donc le panier accroché au mur et commence à soulever les poules.

Ce n'est pas avec une grande surprise que mère me surprend dans la cuisine l'air sévère. Sa fille bien-aimée ne fait qu'à sa tête encore une fois et cela lui déplait.

— Pour l'amour de Dieu, Jennyfer, où étiez-vous ?

Et je mens encore une fois.

— Je n'arrivais pas à dormir, mère, et je suis allée chercher les œufs. Je suis tellement excitée par le bal que j'ai eu de la difficulté à trouver le sommeil. Pardonnez-moi, mère.

— Hmm... Je me réjouis que le bal vous excite autant que moi. Vous allez prendre un bain de lait dans votre chambre.

— Un bain de lait. Ce n'est pas un peu trop, mère ?

— Rien n'est de trop pour le bal. J'oubliais. Si vous voyez votre père, dites-lui que je dois prendre la voiture ce soir.

Je hoche la tête. Suis-je la seule personne qui est censée de savoir où il se trouve ? Néanmoins, lorsque je croise Jerry dans les escaliers, je lui demande de préparer la voiture sous ordre de mère ce qu'il fera dans la journée. Dans ma chambre on y a préparé la robe et les boudins pour me coiffer. Je soupire. J'appréhende ce moment. Cependant, contre toute attente. Je dois attendre qu'après le repas du midi pour prendre ce fameux bain de lait aromatisé de quelques pétales de roses. Willa à quant même tenu à me laver mes cheveux en prétextant à mère que je possédais une chevelure épaisse et qu'il n'aurait pas été sec pour la soirée. Elle avait gain de cause.

Je me glisse enfin dans ce bain où je dois rester presque deux heures. Absurdité. Mère veut que le lait pénètre dans tous les pores de ma peau. Allongée dans la baignoire, je demande à Willa :

— Est-ce vraiment nécessaire tout cela ?

— Cela aide votre peau à s'hydrater. Vous l'avez tellement mal menée ces derniers jours que cela vous sera bénéfique. Votre mère à raison.

— Je ne l'ai pas si mal mené, je ronchonne, ce n'est pas comme si j'allais me marier ce soir.

— Vous n'avez donc jamais prêté attention au bal. Pour les mères cela est l'occasion pour trouver un prétendant pour leur fille, souhaitant les marier avant la fin de l'année.

— Vous y avez déjà songé, au mariage ?

— Je suis qu'une servante, mademoiselle Hasting, je ne pourrais jamais faire de grand mariage. Si cela venait à arriver, cela serait modeste tout au plus.

— Tout le monde a le droit au bonheur, Willa, tout le monde.

— Et je suis certaine que vous ferez une magnifique mariée, mademoiselle. Et ce garçon de ferme n'est-il pas plaisant à regarder, me taquine-t-elle.

— Willa ! je m'exclame.

— Ne me dites pas que vous ne l'avez jamais regardé ? Il est si musclé comparé aux autres jeunes hommes de son âge.

— Je n'ai jamais prêté attention à cela. Sebastian est mon ami...

— Et votre mère ne veut pas que vous ayez une quelconque relation avec le fermier. On a tous écouté son monologue une dizaine de fois. Il ne reste pas agréable à regarder.

Bien sûr que je l'ai regardé. Trop souvent même. Assez, pour connaitre, tous les grains de beauté sur son corps et comment ses mains ont travaillés si dur. Oui, j'ai jalousé les filles qui le regardait un peu insistante. Oui, je voulais être à la place des jouvencelles du peuple qui peuvent épouser n'importe qui. Je les jalouse encore. Je sais que je ne devrais pas l'être, mais je l'ai désiré tellement de fois. La nuit dernière, je voulais vraiment le sentir plus près de moi. Je sais que je ne le verrais plus après ce soir. Je serais dans ce monde que je ne connais pas, tandis qu'il sera ici, à jouer le garçon de ferme, comme sa mère lui a enseigné.

— Allez, mademoiselle Hasting, il est temps que vous sortiez du bain.

Je me lève tranquillement et sors de la baignoire de cuivre. Chaque chambre en possède une, père ne voulait pas que tout le monde puisse prendre la même et la trimballer partout en égratignant le plancher.

Une fois sèche, j'enfile un peignoir et m'assois à la coiffeuse. Willa me coiffe au lieu de Judith qui ne se sent pas bien. Je croise les doigts pour elle dont ils puissent sauver l'enfant. Je soupire.

Je me regarde dans la glace en me demandant qu'ai-je de si exceptionnel ? J'ai les mêmes cheveux noirs que père qu'aucun de mes frères n'a hérité. J'ai également ses yeux verts. Drôle de mélange. Cependant, j'ai la forme de bouche en cœur de mère et son nez. Comment sont les femmes dans ce monde ? Je ne cesse d'y penser. Je suis tellement dans mes pensées que je ne rends pas compte que Willa a terminé ma coiffure. Mes cheveux sont peignés en forme de chignon. De grosses boucles et des petites se regroupent sur le côté de droit descendant à la mi-poitrine. J'aime ce qu'elle a fait. Je n'ai pas l'habitude d'avoir ce genre de coiffure. Je me contente le plus souvent à mes cheveux au vent ou à des nattes.

Willa me donne mes collants que j'enfile sans les déchirer, puis je me lève pour mettre une chemise. Je me tourne en m'agrippant au baldaquin du lit afin que Willa attache et sert le corset. Mon souffle se coupe, lorsque celle-ci donne quelques coups pour le resserrer davantage. Ma poitrine est remontée, j'ai l'impression qu'on ne voit que cela. La robe blanche dentelée d'un petit vert émeraude est d'une beauté. Je crois que c'est la plus belle que j'ai de ma garde-robe. Willa attache les rubans assortis à cette dernière, mes souliers blancs sont un peu grands, mais je ne rencontrerais aucune difficulté à danser. Nous sommes prêts. La femme devant moi essuie des larmes aux coins de ses yeux me voyant ainsi vêtue.

— Vous êtes ravissante, mademoiselle Hasting. S'exclame-t-elle, je suis si fière de vous.

Je lui offre un sourire sincère. J'ai le cœur lourd de la quitter. Je ne peux pas lui dire que c'est la dernière fois que nous nous voyons. Avant de descendre, je griffonne sur un morceau de papier une phrase que je plie soigneusement pour le mettre dans mon petit sac. Cela est juste une sortie de secours.

Nous rejoignons le reste de ma famille dans le hall. Mère et Judith ont les larmes aux yeux. Mes frères ne me regardent pas vraiment avant l'arrivée de Brandon qui me complimente. Pour la première fois, Gregory ne vient pas, il reste aux côtés de sa fiancée qui a beaucoup de mal. Pour couronner le tout, Jerry décide à la dernière minute de rester au cas où notre belle-sœur se sentirait mal. Mère ne dit rien, ils sont assez grands pour choisir de ne pas y aller. Cela est donc les jumeaux, Brandon, mère et moi qui prenons la voiture afin de nous rendre au bal. L'angoisse commence.

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