Il se penche sur Thorn, qui étudie une traduction de la plus haute importance. Du moins le Lord de Lux le croit il. Lui sait que l'ex-intendant ne percera jamais son secret ainsi. L'effondre chant des armes... l'effondrement des arches viendra d'abord.

Il scrute le visage impassible de Thorn. Son corps se raidit davantage (la faute à sa jambe, ce corps malingre se meut beaucoup moins aisément qu'il y a trois ans. Un pli creuse ce visage austère et impassible. Il s'efforce de ne pas songer à Ophélie. Pourtant, il espère toujours qu'elle l'attend sur Anima. Il chasse ces songes ridiculement puérils de son esprit, cela le retard dans son travail, et rien ne l'horripile davantage que la rêverie. Il ne peut pourtant s'en empêcher, cela se voit.

Il ricane. Comme c'est attendrissant. 

Il sort du Mémorial, et poursuit sa promenade jusque dans les jardins de Pollux. Il observe la jungle multicolore qui s'étend à perte de vue, écoute le gargouillement des fontaines et respire l'atmosphère quasi-suffocante propre à Babel. 

Bientôt, tout ça disparaîtra. C'est le début de la fin, ou la fin du début. 

Il contemple la jeune fille au sol, endormie,  quasiment dissimulée parmi les hautes herbes. Bientôt, on la retrouvera, elle ne se souviendra de rien, comme prévu. La pièce maîtresse de l'échiquier. Elle est amnésique, mais il ne doute pas qu'elle mettra vingt à la fille... fin à la vie de Thorn quand elle saura. Et cela ne devrait pas tarder, c'est une jeune femme pleine de ressources. Mais cette violence, propre à son père, le répugne. il ne doit pas la détourner de sa  mission originelle. 

Il sourit intérieurement. Il attend avec impatience le moment de sortir des coulisses et d'entrer en scène... mais ce moment n'est pas arrivé. Pas encore.