CHAPITRE 29

Le retour à la meute s'est déroulé dans le silence, chacun plongé dans ses pensées les plus profondes. Malgré la tension créée par le marquage, l'atmosphère n'était pas lourde. Notre lien, bien que perturbé, semblait se maintenir, comme une trace indélébile dans nos esprits. J'avais eu un aperçu de son monde, de la personne qu'il était devenue à travers les épreuves qu'il avait traversées. Cette proximité bouleversante avait tissé entre nous un lien inexplicable qui dépassait les limites de la réalité. Pourtant, à présent, il semblait impossible de retrouver cette connexion, un mur invisible s'était érigé entre nous. Je savais qu'il avait eu accès à mes souvenirs les plus sombres et douloureux, mais j'ignorais ce qu'il avait pu voir et ressentir. Mes propres souvenirs, empreints de tristesse et de désespoir, semblaient bien fades à côté de la complexité de son vécu.

Les murs des huttes de la meute sanglante se dressèrent devant nous et cela coupa court à mes pensées. Weiss s'abaissa me permettant de sauter par-dessus lui pour atterrir avec agilité sur le sol.

Selena s'avança vers nous d'un pas déterminé, scrutant attentivement chacun de nous du regard. Ses yeux parcoururent rapidement le visage de Weiss avant de se poser intensément sur moi, comme si elle cherchait à percer une énigme invisible. Chaque détail de son regard révélait une profonde réflexion, comme si elle tentait de décrypter les liens invisibles qui nous unissaient. Son expression oscillait entre la curiosité et une pointe d'inquiétude, mais rapidement ses sourcils se froncèrent sous l'effet de la colère naissante.

— Dit moi que tu n'as pas fait ce à quoi je pense, cria-t-elle à l'égard de Weiss.

Ses mots résonnaient dans l'air, chargés d'une accusation implicite qui laissait planer un lourd silence autour de nous. Elle porta ses mains sur son front en repoussant ses cheveux en arrière.

— Évidemment que tu l'as fait, elle pue ton odeur ! ajouta-t-elle d'une voix empreinte de frustration et de déception.

D'un geste brusque, Selena se tourna vers moi, ses yeux lançant des éclairs de colère contenue. Son regard perçant semblait chercher une explication, une justification à cette situation tendue qui venait de se créer. Je sentais le poids de son accusation peser sur mes épaules.

Je tentai de trouver les mots, mais ma voix resta bloquée dans ma gorge, tandis que je peinais à comprendre la source de sa colère. Pendant ce temps, Weiss s'avança vers elle, le visage crispé et le muscle de sa mâchoire tressautant avec une intensité qui reflétait sa colère naissante.

— Fais attention à tes paroles, n'oublie pas à qui tu t'adresses, rétorqua Weiss d'un ton terriblement calme, sa voix imprégnée d'une autorité glaciale qui fit frissonner l'atmosphère déjà tendue.

— Pourquoi as-tu fais ça ? murmura-t-elle d'une voix chargée d'incompréhension et de reproche. Tu risques de la tuer, de vous tuer tous les deux.

— C'est moi qui ai pris cette décision, Selena. Nous n'avions pas d'autre alternative, les Amarokić ne nous ont pas laissé le choix, expliquai-je doucement puis, en lui montrant nos deux corps j'ajoutai: regarde, nous sommes tous les deux en vie.

Elle ferma les yeux un bref instant, et lorsque ses paupières se relevèrent, une expression de tristesse avait envahi son visage. Elle fixa intensément Weiss.

— J'espère que tu sais ce que tu fais Weiss, lui lança-t-elle avant de se métamorphoser de disparaître dans les bois.

֎

Malgré la chaleur ambiante de la pièce, le lit était si froid que des frissons ne cessaient de parcourir mon corps, je me tournais et me retournais de plus en plus nerveusement, cherchant désespérément une parcelle de chaleur pour enfin trouver le sommeil qui me fuyait. Je tentais en vain de me pelotonner sous les couvertures, mais rien ne parvenait à apaiser ce froid qui semblait s'ancrer en moi.

Pour ne rien arranger à cela, je n'arrêtais pas de penser à Selena. Sa colère me déconcertait et je peinais à comprendre ce qui avait pu la mettre dans un tel état. C'était la première fois que je la voyais avec de tels émotions, ses yeux brûlant de rage et ses mots acérés résonnaient dans ma tête. J'étais perdue, désemparée face à cette soudaine situation. Chaque détail de l'altercation me hantait, je voulais tout comprendre, saisir les raisons de sa colère et trouver un moyen de réparer les choses.

A bout de nerfs, je soupirai et me retournai une fois de plus dans le lit. Alors que j'allais me lever pour chercher une autre couverture, la porte de la chambre s'ouvrit et la marque sur ma poitrine me brûla.

Sans même avoir besoin de lever le regard, je sentis instantanément la présence de Weiss. Ses cheveux étaient en désordre et les cernes légères sous ses yeux révélaient une certaine fatigue. Les premiers boutons de sa chemise blanche étaient négligemment défait et malgré cela il était à coupé le souffle. Sa présence avait le pouvoir de chasser le froid qui m'envahissait, laissant place à une chaleur réconfortante.

Il se dirigea avec une démarche assurée à travers la chambre, ses pas résonnant légèrement sur le sol. Arrivé de l'autre côté du lit, le matelas s'affaissa sous son poids alors qu'il prenait place à mes côtés. Surprise, je me redressai vivement, cherchant à dissimuler toute émotion qui aurait pu transparaître sur mon visage. Mes lèvres s'entrouvrirent pour exprimer ma surprise, mais se refermèrent aussitôt lorsqu'il prit la parole avant moi.

— Si tu ne réfléchis pas un peu moins, tu ne pourras pas t'endormir. Tant que tu resteras éveillé ce vacarme infernal dans ma tête ne s'arrêtera pas, dit-il d'un ton à la fois taquin et sérieux.

— Je t'ai interdit d'entrer dans ma tête ! répliquai-je, tentant de masquer le trouble que ses paroles avaient provoqué en moi.

Il fit mine de ne pas m'entendre, ses bras étaient croisés derrière sa tête, affichant un air détaché et nonchalant.

— La nuit risque d'être longue si tu compte rester assise comme ça ! Me dit-il, rompant le silence.

Résignée, je me rallongeai en me rapprochant du bord du lit. Je serrai la couverture autour de moi, c'était la première que je me retrouvai dans son lit avec lui. Depuis le début, il avait toujours veillé à passer la nuit ailleurs qu'avec moi, mais désormais, cette habitude semblait révolue, me laissant face à une nouvelle réalité à laquelle je devais m'habituer.

Malgré mes efforts, le sommeil me fuyait et la proximité de Weiss à mes côtés ne faisait qu'aggraver la situation. Soudain, sans que je m'y attende, son corps se rapprocha du mien, son bras entourant ma taille pour me rapprocher de lui. Son parfum m'envahit instantanément, tandis que la chaleur de son corps semblait se transmettre au mien.

— Dors Layla, me dit-il doucement dans un murmure. Demain, nous partons pour le territoire des Amarokić. J'ai reçu une lettre de leur part nous invitant à les rejoindre. Nous devrons nous rendre chez eux, ils ne viendront pas, m'annonça-t-il.

Je restai sans voix, glacée par cette nouvelle. Mes doigts se posèrent instinctivement sur ma cicatrice, c'étaient ce qu'ils voulaient voir, s'assurer que Weiss m'avait bien marquée et que j'étais toujours en vie. Une vague de peur m'envahit, tandis que je me demandais ce qui pouvait bien nous attendre là bas.

Je pris une profonde inspiration, me promettant de ne pas laisser la peur me paralyser.

֎

Weiss était posté près de la porte, m'attendant avec impatience. Sous son bras, il tenait des objets qui se dessinèrent clairement à mesure que j'approchai.

— C'est pour toi, me dit-il simplement en me les tendant.

Je l'ai pris ne revenant toujours pas de ce que j'avais entre les mains. Le carquois était en cuir, souple et résistant, avec des coutures minutieusement faites à la main. Les motifs gravés étaient complexes et détaillés, représentant un loup et une femme à ses côtés. Je réalisai alors que ces images étaient censées nous représenter.

Les flèches à l'intérieur du carquois étaient également impressionnantes. Elles étaient impeccables, avec des pointes acérées, chacune d'entre elles était parfaitement alignée à l'intérieur.

Quant à l'arc il était magnifique travaillé dans un bois ancien et poli à la perfection.

Je relevai les yeux vers lui, émue. Ses yeux noir me scrutait avec impatience, ses sourcils légèrement froncés, attendant une réaction de ma part qui ne venait pas. Son regard était à la fois interrogatif et attendrissant, et je sentis mon cœur battre plus fort en réalisant à quel point j'étais touchée par son geste.

— Les tiens se sont perdu en forêt la dernière fois, alors j'ai pensé que...commença-t-il.

Sans même attendre qu'il termine sa phrase, je me précipitai pour lui sauter au cou, passant mes bras autour de lui. Le contact de son corps chaud contre le mien m'apporta un sentiment inexplicable. Son parfum emplissait mes sens et je fermai les yeux, ressentant chaque battement de son cœur résonner contre le mien.

— Merci...merci beaucoup, tu ne sais pas à quel point ça me rend heureuse, dis-je dans un murmure.

Je m'éloignai précipitamment de lui, réalisant soudainement mon geste. Mes joues s'embrasèrent sous la chaleur de l'embarras et je baissai les yeux, sentant son regard peser sur moi. Un frisson parcourut mon échine lorsque je fis un pas en arrière pour mettre de la distance entre nous. Je me maudissais intérieurement pour mon manque de contrôle, regrettant d'avoir laissé mes émotions prendre le dessus. Soudain, son doigt vint se glisser sous mon menton afin de relever mon visage. Mes yeux rencontrèrent les siens.

— Ne me remercie pas, me dit-il doucement. Layla, je veux que tu m'écoutes attentivement et que tu me fasses la promesse de ne faire confiance à personne là-bas. Nous serons sur leur territoire, ne t'éloigne pas trop de moi.

— Je te promets de rester près de toi et de faire attention à qui je m'adresse, murmurai-je.

Il posa un regard scrutateur sur moi pour être certain que j'avais bien assimilé ses propos.

— Et surtout, ne révèle jamais qui tu es vraiment.

La gorge nouée, je hochai la tête d'un geste affirmatif alors qu'il laissait son bras retomber le long de son corps.

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