Chapitre 19


Jeno et Jaemin filèrent dès qu'ils mirent les pieds dans la ville, laissant les deux omégas seuls. L'ambiance de la ville heurta Dejun de plein fouet et il fronça le nez. La meute lui avait appris à se servir de son odorat, chose qu'il ne savait pas faire avant, et si cela était plutôt agréable ne forêt, il en était tout autre en ville. Il percevait les odeurs d'essence, chimiques, et tous les parfums qu'un humain pouvait posséder. Le brunet éternua à plusieurs reprises et il mit la manche de sa chemise devant son nez pour improviser un filtre.

— Qu'est-ce qui t'arrive Dejun ?

— Ça pue c'est horrible, grimaça le comptable. Tu n'as pas ce problème ?

Jungwoo haussa les épaules, visiblement bien moins affecté.

— L'habitude. Ce n'est pas très agréable, mais je viens depuis des années donc je m'y suis habitué. Bon, ça me chatouille quand même la truffe, mais ça va, tant qu'on ne rentre pas dans une parfumerie ou un truc du genre, je peux gérer.

Dejun subit une nouvelle quinte d'éternuements et il grimaça. Il devait retourner à Séoul dans quelques jours, mais sa nouvelle sensibilité risquait d'être problématique. Le tissu de la chemise permettait de filtrer un peu l'air, même si cela ne faisait pas tout, mais ce n'était pas très pratique. Il devait se balader avec la main sur le nez, ce qui non seulement attirait l'attention, mais le gênait également. Jungwoo rit joyeusement de son malheur avant de l'attraper par la main et de l'attirer à sa suite. Le brunet se laissa faire sans poser de question et le plus jeune les fit entrer dans une pharmacie.

L'odeur presque aseptisée des lieux soulagea le nez de Dejun qui prit une profonde inspiration, il avait l'impression de réapprendre à respirer. Jungwoo l'entraina dans les rayonnages et le comptable fut étonné de voir qu'aucun prix n'était affiché.

— Tu veux une odeur en particulier ?

Le brunet tourna son attention vers son ami et pencha légèrement la tête, il ne comprenait pas la question qui semblait sortir de nulle part.

— Pour quoi faire ?

— Pour une huile essentielle. Tu pourras la mettre juste sous ton nez, ça te permettra d'éviter le reste des senteurs de la ville. C'est une astuce qu'on utilise les premières fois qu'on vient ici, on a tous un peu de mal à s'habituer au départ. Toi, c'est un peu la même chose au final. T'es adulte, mais tu apprends à peine à te servir tes sens de loup, de ce point de vue là tu es un peu comme un louveteau, sourit Jungwoo.

Dejun pointa la petite zone sous ses narines, perplexe.

— Ici ?

— Juste là oui, après on ne peut pas mettre toutes les huiles essentielles parce que certaines réagissent mal au contact direct avec la peau, mais il y en a quelques-unes de sympas assez puissantes pour camoufler la puanteur ambiante.

Dejun hocha la tête, avec quelques explications il comprenait mieux. Il entreprit alors de regarder les rayons pour trouver un parfum qui lui plairait pendant que Jungwoo lui racontait des anecdotes de son adolescence. Jeno, Jaemin, Lucas, Renjun et lui avaient visiblement accompli leur lot de bêtises non seulement à l'intérieur de la meute, mais également à la ville. Dejun n'était pas étonné et il écouta son ami parler avec le sourire.

— J'aime bien celle-ci.

— Je me disais aussi, ricana le frisé.

— Qu'est-ce qui te fait rire ? Ça sent bizarre ?

La bouche de Jungwoo se tordit en un rictus amusé et il tourna le flacon pour que l'aîné puisse lire l'étiquette. Dejun se sentit rougir jusqu'à la racine des cheveux et il récupéra la petite flasque d'un mouvement un peu brusque ce qui fit rire son ami.

— Il y a une cinquantaine d'odeurs et celle que tu choisis c'est le cèdre. Avoue que c'est très drôle !

Dejun marmonna qu'il ne voyait pas ce qu'il y avait d'amusant, mais ne parvint pas à se résoudre à reposer le flacon. En plus d'avoir des propriétés apaisantes et purifiantes, cette huile lui rappelait Johnny. Un petit sourire aux lèvres, il resserra ses doigts sur le petit objet. Jungwoo passa son bras autour de ses épaules en riant innocemment.

— T'es trop mignon Dejun. Je comprends totalement que le chef craque pour toi, t'es comme un petit cookie au chocolat juste sorti du four.

Le comptable n'était pas certain de comprendre la comparaison, mais il décida de ne pas insister. Les bizarreries de Jungwoo faisaient partie du charme de l'oméga. Ce dernier s'illumina brusquement et reprit la main de Dejun pour le guider dans un tout autre rayon qui ne manqua pas de faire rougir le plus vieux.

— Qu'est-ce que tu fabriques ? murmura le brunet en tirant sur la manche de son ami.

Jungwoo lui tira malicieusement la langue en attrapant une petite boite.

— C'est pour ton bien mon petit Dejun.

— Du viagra ? s'étouffa l'autre.

— Si le chef ne t'a pas encore sauté dessus c'est certainement parce qu'il doit avoir un petit dysfonctionnement, ça devrait le résoudre, éclata de rire Jungwoo. Une petite pilule et pouf ! Tu ne vas pas dormir de la nuit.

Le visage du comptable se mit à rivaliser avec la couleur des tomates les plus mures. Il subtilisa la boite de comprimés à Jungwoo et la fourra brusquement à son ancien emplacement. Il se décomposait de gêne tandis que son ami riait comme une baleine, incapable de reprendre son souffle tant il rigolait.

— J'espère que tu vas t'étouffer avec de l'air, maugréa le plus vieux.

Son corps n'avait pas l'air décidé à redescendre en température et il était bien incapable de savoir s'il s'agissait de la honte qu'il ressentait ou de ses chaleurs qui se manifestaient. Dans la crainte que ce soit la seconde option, Dejun se rendit vers le comptoir et demanda une boite d'inhibiteurs. Lui qui avait prévu de ne pas en prendre pendant ses vacances, il préférait finalement jouer la sécurité et ne pas avoir ses chaleurs en plein milieu de sa sortie avec les plus jeunes.

Jungwoo le rejoignit pour régler et Dejun fronça les sourcils.

— Excusez-moi, vous êtes sûr du montant ?

— Qu'est-ce que vous voulez dire ? rétorqua sèchement le pharmacien.

Le brunet enfonça la tête dans les épaules, embarrassé.

— C'est juste que je prends ces cachets depuis des années et sur Séoul je les paye à peine la moitié de ce prix-là, je me demandais s'il n'y avait pas eu une erreur...

La carnation du pharmacien changea et il bafouilla quelque chose avant de regarder son ordinateur. Il tapota sur quelques touches rapidement avant d'afficher un sourire commercial.

— Mes excuses, il semblerait que j'avais scanné deux fois le produit à la place d'une.

Dejun hocha la tête, un peu perturbé. Il y avait un manque de naturel dans cette situation qu'il lui était impossible d'ignorer, tout comme il ne pouvait que remarquer le silence de Jungwoo. Ils sortirent une fois que le comptable eut réglé ce qu'il devait et Dejun soupira de soulagement en appliquant deux gouttes d'huile sous son nez.

— Tu es bien silencieux Jungwoo, tu réfléchis à ta prochaine bêtise ?

Le jeune oméga fit la moue et ne répondit qu'une fois qu'ils furent éloignés de la pharmacie.

— Tu n'as pas trouvé ça bizarre ? Dès que tu as dit que tu venais de Séoul, le prix a changé. J'en avais entendu parler, mais c'est la première fois que je me retrouve dans cette situation. Je suis dégouté et en même temps en colère... Pas contre toi hein ! Mais contre eux, ces loups de la ville qui nous méprisent.

Dejun posa une main sur l'épaule de son ami et le guida jusqu'à un petit café. Ils s'installèrent dans un renfoncement éloigné du bar offrant une agréable vue sur l'extérieur. Un serveur vint prendre leur commande et la leur apporta peu de temps après. Jungwoo s'était renfrogné et cela peina Dejun qui préférait le voir joyeux et plein de vie.

— Tu veux m'en parler ?

Le plus jeune fit la moue et prit une gorgée de sa limonade.

— Franchement, j'adore ma vie avec la meute et je n'en changerai pour rien au monde, alors quand je vois comment les autres nous traitent, ça me donne des envies de meurtres.

— Tu penses qu'il l'a fait exprès à la pharmacie ? s'étonna Dejun.

Jungwoo hocha la tête et l'autre écarquilla les yeux. Il avait bien senti que la situation clochait, mais il n'aurait jamais pensé à cette raison-là.

— Tu as bien vu qu'il n'y avait pas de prix d'affichés pas vrai ? C'est parce qu'ils adaptent selon si on vient de la ville ou de la meute. Ils nous font payer beaucoup plus cher pour nous dissuader de venir ici, parce qu'on est que des animaux prenant parfois forme humaine pour eux. Ils ne nous considèrent pas comme des humains.

— C'est de la discrimination, s'offusqua Dejun.

— Ouais, mais tu sais, il y a beaucoup de choses que tu ignores encore. Le chef a essayé de te faire voir le positif de la meute parce qu'il tient à toi et je sais pas si c'est conscient ou pas, mais il veut certainement te faire rester. Si tu vois les aspects sombres de la vie parmi nous, peut-être que tu auras moins envie de rester. Enfin, moi c'est comme ça que je le comprends.

Le brunet pinça les lèvres et joua avec la paille dans son verre. Il se doutait qu'on lui cachait des choses, il n'était pas naïf à ce point, mais ça lui faisait mal au cœur. Il était blessé d'apprendre comment son ami était traité par les autres et peiné que Johnny n'ait pas assez confiance en lui pour lui confier ses secrets. Dejun s'était fait une raison, il était attiré par l'Alpha, plus qu'il ne l'avait jamais été par quiconque et il se trouvait stupide de penser ça, mais il était persuadé d'avoir trouvé son compagnon. Il aurait aimé que Johnny pense pareil que lui et qu'il croie en lui.

— Pourquoi est-ce que vous ne faites rien ? Je ne comprends pas pourquoi Johnny n'a pas encore trouvé de solution. Il veut pourtant tellement vous protéger et que vous soyez bien...

Jungwoo grimaça.

— Oui alors... on ne lui en a pas parlé. Il a déjà énormément de choses à faire et ce n'est pas la priorité. C'est chiant, ça nous coûte cher, mais on peut faire avec. Le grand chef a besoin de se concentrer sur des choses beaucoup plus graves pour la sécurité de la meute.

— Graves à quel point ?

— Désolé Dejun, je pense que ce n'est pas à moi de t'en parler. Je t'en ai déjà trop dit, le chef va me tuer s'il apprend que je t'en ai dit autant. Disons que si le chef n'était pas là et qu'il ne faisait pas ce qu'il fait actuellement alors la meute n'existerait peut-être déjà plus. Si on suit ses règles, on ira bien, mais... il y a des risques à être membre de la meute, mais personnellement je pense que ça en vaut la peine. C'est ma famille et c'est déjà un peu la tienne pas vrai ? Tu seras toujours le bienvenu parmi nous, peu importe que tu décides de partir ou de rester à la fin de tes vacances.

Les larmes montèrent aux yeux de Dejun qui se servit du bout de la manche de sa chemise pour les essuyer. La déclaration aussi inattendue que spontanée de Jungwoo l'avait rendu tout émotif. Il se posait beaucoup de questions, il n'avait pas envie de partir, mais il ne savait pas s'il avait le droit de rester. Il avait peur que Johnny ne veuille pas de lui sur le long terme, il ne pouvait s'empêcher d'avoir peur. Plus que tout, il ne voulait pas briser l'équilibre de la meute et pour ça il devait être accepté par tous ses membres, ce qui l'amenait à introduire un sujet dont il souhaitait parler depuis plusieurs jours à Jungwoo.

— Je ne sais pas si je resterai ou pas, c'est tellement soudain. Je n'avais pas du tout envisagé ça quand je suis arrivé. J'ai ma vie qui est à Séoul, mais en même temps je me suis tellement attaché à vous, j'ai l'impression de vous connaitre depuis des années. Sauf que si je reste, est-ce que tu n'en souffriras pas ?

— Comment ça ?

— Si je reste, murmura Dejun, Lucas m'en voudra. Il me déteste et j'ai conscience que c'est à cause de moi qu'il s'est éloigné de toi, de Jeno et de Jaemin. Je ne veux pas que tu le perdes à cause de moi, je ne veux pas vous rendre malheureux. 







Nda :
Hello ! 
J'espère que ce chapitre vous a plu, que cette histoire continuera à vous plaire, et je vous remercie sincèrement pour votre soutien, que ce soit par le biais de vos lectures, de vos votes ou de vos commentaires !
Dalion~ Kiss :3

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