Chapitre 24
Lorsqu'elle arriva au camp, ses cheveux dégoulinant dans son dos et ses vêtements trempés, on la dévisagea. Elle tremblait encore et ses lèvres avaient pris une teinte violacée. Mais à la place d'avoir l'air inquiets, les plumes d'argent avaient plutôt l'air dégoûtés. Vivement, elle porta la main à sa joue et ses doigts rencontrèrent une écaille. Elle baissa les yeux au sol, honteuse. Gabin, qui la tenait encore, jeta un regard méprisant à la foule qui les fixait.
- Il n'y a rien à voir ! déclara-t-il.
Il la conduisit jusqu'à l'espace dédié au douche. Il posa les mains sur ses épaules, soucieux.
- Je vais aller te chercher des vêtements chauds. En attendant, tu peux te laver, tu as des algues dans les cheveux.
Sur-ce il partit et la laissa seule. Elle s'engouffra dans une cabine et laissa l'eau froide couler sur sa peau. Elle ressentait un sentiment de malaise, comme si d'un moment à l'autre tout pouvait s'écrouler autour d'elle. Elle avait l'impression que le sol tanguait et qu'il allait s'écrouler sous ses pieds. Elle dû se mordre la lèvre pour retenir ses larmes. Il fallait qu'elle soit forte. Elle sortit enroulée dans une serviette et attrapa des vêtements propres que Gabin avait pris soin de poser sur une chaise. Alors qu'elle retournait dans sa cabine pour se changer, elle remarqua une présence auprès d'elle. Mitsuki.
- Tu n'as pas à avoir honte. Au contraire. Si tu utilises tes pouvoirs c'est pour notre bien à tous. Tu peux être fière de toi.
Myosotis haussa les épaules et resta muette. Elle fit un pas pour entrer dans la cabine et la petite la suivit.
- J'aimerais rester seule. Déclara-t-elle d'une voix sourde.
Mitsuki fit non avec la tête.
- S'il te plait. Insista Myosotis.
- Pas question que je te laisse seule. Tu cours un grand danger, je l'ai vu.
Voilà qui n'était pas pour la rassurer. Néanmoins, elle s'efforça de rester impassible.
- Ce n'est pas en me changeant que je risque quoi que ce soit.
- On ne sait jamais ce qui peut nous tomber dessus.
Au prix d'une longue discussion, Mitsuki la laissa enfin se changer tranquillement.
Elle revint toute propre et toute sèche auprès des autres. Elle n'avait jamais paru aussi frêle et fatiguée, même le jour de son arrivée. Elle tomba sur Blizzard, ou plutôt Anaïde, qui d'une manière ou d'une autre avait été mise au courant de l'évènement qu'elle avait vécu. Sans la prévenir, d'un coup, elle la prit dans ses bras et la serra fort contre elle.
- Je ne veux pas que tu deviennes comme moi. Lui murmura-t-elle à l'oreille.
Elle hocha mollement la tête et se détachèrent. Au loin, Gabin discutait avec Anémone, sûrement pour que celle-ci évite de lui poser des questions. Myosotis n'avait pas envie de parler. Elle voulait juste partir d'ici le plus vite possible. Mitsuki ne tarda pas à les rejoindre. Elle ne clignait presque pas les yeux pour ne pas cesser de fixer Myosotis.
- Je vais bien. Soupira-t-elle, bien que ce fut faux.
Elles allèrent s'installer dans un coin à l'abri des regards pour manger.
- Ce soir, on construit le bateau, en vitesse. Dès qu'il fait un peu sombre, on le met à l'eau et on part. Ca ne peut plus attendre. Murmura Myosotis.
Les deux filles hochèrent la tête.
- Alors c'est pour ce soir... dit Mitsuki d'un ton songeur.
Ce soir sa vie reprendrait court. Ce soir elle aura le courage de grandir à nouveau. Gabin s'assit à côté d'elles, en tailleur, en croquant dans une pomme. Myosotis les observa, tous assis autours d'elle, un sourire absent aux lèvres. Ils avaient tous, sans exception, été séparés de leur famille de leur plus jeune âge. Mais en les regardant, ainsi réuni, elle réalisa qu'elle venait enfin de retrouver sa famille. C'était eux.
Ils attendirent la nuit pour partir couper du bois. Gabin avait volé des outils pour pouvoir construire le bateau. Ils se dirigèrent vers un endroit reculé de la forêt, où les loups ne venaient que rarement. Cependant, Mitsuki émit une objection.
- On est beaucoup trop loin de la mer. Le bateau va être lourd à porter.
Gabin et Myosotis échangèrent un regard interrogateur.
- Qu'est-ce qu'on fait ? Si on se rapproche de la mer, nous avons plus de risques de tomber sur les loups. Demanda-t-elle.
Il passa une main dans ses cheveux et soupira.
- Au point où on en est, on n'est plus à ça près. Dirigeons-nous vers l'océan.
Les filles hochèrent la tête à l'unisson et suivirent son conseil. Ils commencèrent leur laborieux travail. Très vite, les frèles bras de Mitsuki la firent trop souffrir pour qu'elle continue. Quand à Myosotis et Blizzard, il est vrai qu'au bout d'une heure, elles avaient de plus en plus de mal. Néanmoins, motivées comme elles étaient, elles se serrèrent les coudes et redoublèrent d'effort. Au bout de deux heures, ils avaient coupé assez de bois. Ils assemblèrent maladroitement les morceaux entre eux. Ce n'était pas très solide, mais Gabin assurait que ça flottait parfaitement et qu'ils pouvaient sans problèmes faire la traversée. Pendant ce temps là, Mitsuki taillait dans les branches des rames. Quand soudain, un grognement les fit frissonner tous les trois. Myosotis avait l'impression de connaitre ce son par cœur maintenant. Elle se retourna et se trouva face à un loup. Automatiquement, comme par réflexe, elle grogna à la manière de l'animal. Celui-ci inclina son museau et partit aussi vite qu'il était apparu.
Pour une fois, elle s'était bien vite débarrasser d'un danger.
Seulement, ce n'était pas ça le réel danger...
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