Chapitre 20

Créativité et magie


– Debout les tourtereaux !

Noria se cambra et s'étira bruyamment. Sa main heurta le visage d'Allen, derrière elle. Elle se retourna et rougit en le voyant planter ses yeux dans les siens. Paralysée quelques instants, le cœur battant la chamade, bien trop surprise pour dire quoi que ce soit. Il était resté avec elle toute la nuit, et pour la première fois, elle se rendit compte qu'elle venait de dormir avec un homme à ses côtés. Rouge de honte face à ses amis qui se rendaient dans la prairie pour manger.

– B–Bien dormit ? demanda Allen.

Noria aurait aimé rester seule avec lui. Cet instant semblait féérique. Jamais elle n'avait vécu un moment aussi intime. Et elle se sentait si bien. Reposée, en paix. Tout ce qui lui taraudait l'esprit depuis des jours disparut en quelques secondes. Un simple laps de temps où leurs pupilles se rencontrèrent. L'espace d'un instant, son regard descendit sur ses lèvres, désireuse d'y poser les siennes. Elle se les mordit et se retint, alors que son corps bouillonnait d'envie. Mais la peur de ne pas pouvoir lui offrir ce qu'il voulait l'obsédait. Elle risquait toujours de mourir dans les mois à venir, et pour cela, elle refusait d'aller plus loin.

– Oui, très bien même. Et toi ? demanda-t-elle simplement.

Il acquiesça d'un léger mouvement de tête, un sourire aux coins des lèvres. Ils ne purent néanmoins profiter bien longtemps de ce moment. Gavion arriva en trombe et appela tout le monde à le rejoindre au milieu de la clairière, malgré l'estomac grondant de Noria.

Ozia apporta quelques fruits à l'ensemble du groupe. Noria en profita pour croquer dans la peau moelleuse d'un Obrocot, ce fruit jaune au jus garni de vitamine. Un beau ciel bleu agrémenté de quelques nuages blancs envahissait la région. Un vent frais soufflait dans la plaine, jouant avec la cime des arbres de la forêt qui se trouvait à quelques mètres d'eux. Ce temps agréable lui remonta le moral, alors qu'elle entendit les oiseaux pousser leurs cris.

– Bon, nous allons commencer notre premier cours ! leur dit Gavion en tapant dans ses mains.

Noria rapporta son attention sur le sage. Ses amis murmurèrent entre eux, ne comprenant pas ce qu'il comptait faire. Après qu'il leur ait demandé de s'assoir, Gavion commença son explication que Noria avait déjà entendue.

– Je vais vous expliquer comment fonctionne la magie Titanique. Qui a été dans une académie pour contrôler son élément ?

Hormis Hirelda et Noria, tout le monde leva la main. Les deux jeunes femmes s'étonnèrent d'être les seules dans ce cas. Pour Allen, Noria connaissait déjà un peu de son parcours. Il lui avait plusieurs fois expliqué qu'il était allé dans l'académie du vent pendant deux ans, sur les cinq années de cursus, afin d'apprendre les bases de la magie. Depuis, il savait l'utiliser un minimum en combat.

– Bien ! Qui a été à l'académie d'Elekya ?

Toutes les mains se baissèrent sous le regard amusé de Gavion.

– Je m'en doutais un peu... ricana-t-il. Alors il va falloir que je vous explique.

Il se racla la gorge et resta silencieux quelques secondes. Il chercha ses mots pour savoir par où commencer, puis se lança :

– Comme vous le savez, lorsque nous gravons la rune de l'élément d'un Titan, leur énergie nous est directement envahie, quelque soit l'endroit où l'on se trouve. À l'académie, ou avec moi, vous avez appris à utiliser cette magie pour manipuler votre élément. Jusque-là, tout le monde suit ?

Les amis de Noria opinèrent. Noria savait qu'ils allaient être surpris lors des prochaines révélations.

– Eh bien sachez que vous pouvez faire bien plus que ça.

Gavion avait réussi à capter toute leur attention. Il prononça le mot « Valum » et claqua des doigts. Une aura verte émana de son corps, puis des racines sortirent du sol pour s'entremêler et constituer un corps. Petit à petit, sous le regard ébahi des Titanomanciens, un loup de racine prit forme à ses côtés. Mais il n'était pas d'une taille normale, non, au contraire, ils faisaient bien dix fois la dimension de ces créatures. La tête levée vers l'animal qui se mit à hurler, ils restèrent bouche bée.

– Comment avez-vous fait pour invoquer une créature de cette taille si rapidement ? demanda Ozia, curieuse.

Gavion ricana.

– C'est bien là ce que je vais vous enseigner. Tu vas commencer Ozia.

Elle se montra du doigt en observant un à un ses compagnons.

– Moi ?

Gavion acquiesça. Il se déplaça à ses côtés, tout en faisant disparaître l'animal.

– Écoutez bien. Il existe un moyen pour de modeler la magie comme vous le souhaitez, puis de mémoriser ce que vous faites dans votre esprit. Il suffira ensuite de lui associer un mot ou un geste pour l'invoquer rapidement.

Noria sourit devant les regards perplexes de ses amis. Elle avait eu du mal à comprendre elle aussi, mais Gavion n'était pas un fin pédagogue. C'est pourquoi il préférait un exercice pratique.

– Ozia, tu vas déverser ton énergie devant toi et lui donner une forme de lance. Celle que tu veux. Ce procédé laisse libre cours à ta créativité.

Sans vraiment comprendre, elle suivit ses instructions à la lettre. En plaçant ses paumes vers le sol, elle laissa son aura se déverser devant ses jambes croiser. Elle usa de sa concentration pour diriger le flux afin de former un zigzag pourpre d'énergie, faisant référence à un éclair.

– Comme ça ? demanda-t-elle, le visage tordu d'une grimace.

– J'avais dit d'être créatif... C'est tout ce qu'il te vient à l'esprit ?

Elle pesta, puis déforma sa création pour en faire autre chose. Elle affina la poigne et l'allongea, jusqu'à ce qu'elle prenne la forme d'une lance. Ensuite, elle dessina le manche en forme de longs pics légèrement ondulé, mais coupant comme un rasoir. Ozia souffla, alors qu'elle concentrait tous ses efforts dans cette entreprise.

– Bien ! Ça ressemble à quelque chose maintenant ! On dirait encore une arme d'énergie, mais tu pourras la peaufiner.

Ozia fronça les sourcils.

– Comment ça ?

Gavion montra le manche du doigt.

– On voit encore les filaments d'énergies. Si tu la rends plus compacte, on n'arrivera même pas à la différencier d'une arme en métal. Mais tu n'es pas assez entrainée pour ça. Restons-en là. Maintenant, tu vas déverser ta magie à l'intérieur, sans grossir ton arme, pour qu'elle soit plus puissante. Dirige ton flux à l'intérieur.

Ozia s'employa de faire ce que lui demandait le Sage. Après quelques essais infructueux, elle parvint à augmenter la puissance de son arme. Elle luisait de plus en plus intensément, mais Gavion voulait qu'elle y mette quasiment toute sa force à l'intérieur. Presque épuisée, la respiration haletante, Ozia s'arrêta. Ses bras tremblaient sous la puissance de son arme, alors qu'elle essayait de la maintenir intacte avec ce qui lui restait de magie.

– Super ! félicita Gavion. Donc là, tu as une lance qui lâcherait tout ton pouvoir électrique que tu as mis à l'intérieur une fois sa cible atteinte. Maintenant, comme tu dois le comprendre, tu ne peux pas l'utiliser en combat vu le temps que tu as mis pour la concevoir. Donc, tu vas la mémoriser dans ton esprit, et pour l'invoquer rapidement, tu vas lui associer un mouvement ou un nom. Le nom est plus facile pour un débutant. Alors ?

Ozia leva un sourcil, alors que des gouttes de sueur coulaient le long de son visage fin.

– Euh... Lance de foudre ?

Gavion soupira en roulant des yeux.

– Heureusement que je vous ai dit d'être CRÉATIF !

– Lance de feu purificateur ! tonna Kain. Foudre hurlante ! Ou...

– La ferme ! cria Ozia. Bon, j'ai trouvé. Je fais quoi ?

Gavion lui sourit.

– Tu vas mémoriser tout le procédé dans ta tête. Imagine-toi faire appel à cette magie rien qu'en disant son nom, puis dirige le flux dans un coin de ton esprit.

– Quoi ? demanda Ozia.

Noria connaissait cette méthode. Il lui avait déjà enseigné, mais la mémorisation était le plus difficile, non seulement à pratiquer, mais à expliquer aussi. De plus, elle n'avait commencé qu'en fabriquant une petite sphère de terre. Là, il entrait déjà dans les exercices pratiques les plus coriaces.

– Essaye de faire disparaître cette lance pour la faire apparaître dans ton esprit, dans un coin de ta mémoire, avec ce nom, expliqua Gavion.

Ozia ferma les yeux et tenta l'expérience. Pendant plusieurs minutes, il ne se passa rien, mais après quelques dizaines de minutes, la lance disparut dans un nuage d'énergie, et Ozia relâcha toute sa concentration dans un dernier soupir. Elle reprit sa respiration et essuya la sueur de son front.

– Je crois que j'ai réussi !

– Montre-moi, ordonna Gavion.

Ozia, sûre d'elle, se leva et se mit face au groupe. Elle tendit la main sur le côté, et prononça le mot : « Lancéclair ». En un rien de temps, la même lance apparut dans sa main sous les cris approbateurs de ses compagnons. Par contre, sa magie disparut subitement et elle tomba à genoux, le souffle court. Allen courut la rejoindre pour l'aider. Elle semblait totalement épuisée.

– Alors je donne un 0 pour le nom, déclara le Sage. Franchement, ta créativité quand même... Pour une alchimiste, c'est naze... Par contre, 10 sur 10 pour la pratique !

Allen aida Ozia à s'allonger.

– Qu'est-ce qui m'arrive ? demanda-t-elle, le corps tremblant.

– Alors, ça, c'est parce que tu as épuisé plus que ton aura. Tu n'as plus aucune magie en toi.

– Quoi ?

Gavion, amusé, se leva.

– En construisant ton arme, tu y as mis quasiment les trois quarts de ta puissance. Quand tu invoques une technique mémorisée, elle te ponctionne l'aura que tu y avais mise. Comme tu n'avais plus qu'un quart, elle t'a pris le reste. Ta technique sera donc moins puissante.

– Et vous ne pouviez pas me le dire avant ? se plaignit Ozia.

– Non, répondit-il simplement en haussant les épaules. De toute façon, tes compagnons vont faire la même chose.

Noria observa Allen, Hirelda et Kain pratiquer cet exercice difficile. Pendant ce temps, Ozia restait assise à côté d'elle, la respiration toujours compliquée. Noria la rassura, elle qui avait déjà vécu tout ça, sa magie allait revenir après un peu de repos. Après ça, Allen fut le plus créatif de la troupe. Quoi de si surprenant pour un écrivain en herbe ? Il concentra son vent pour former une page de livre, très tranchante, et la mémorisa. Une fois debout, il en fit apparaître des centaines autour de lui. L'appellation « feuille tranchante » lui valut un autre zéro en créativité, sous les rires amusés de Noria. Tout aussi épuisé, Allen se laissa tomber. Noria le rejoignit pour l'aider à s'écarter du terrain d'exercice et le posa délicatement sur l'herbe fraiche.

– Ce n'était pas facile... murmura-t-il.

Noria acquiesça.

– Je sais. Repose-toi.

Kain jouait avec l'eau. Il essayait lui aussi de créer un animal avec son élément, mais Gavion lui suggéra quelque chose de plus simple. Cela demandait beaucoup d'entrainement et son niveau ne permettait pas de créer une telle créature. Kain maugréa, mais se résout à concevoir une sphère d'eau qu'il s'amusa à rendre extrêmement chaude. Il l'appela « Ignisphère », gratifié d'un trois sur dix pour le nom. Comme les autres, Kain s'épuisa en en lançant partout dans la clairière, brulant l'herbe au passage.

Hirelda fut la dernière. Contrairement aux autres, elle n'avait pas envie de créer une magie offensive. Elle fabriqua un énorme bouclier de terre haut de quatre mètres pour protéger toutes les personnes qui lui étaient chères, sobrement appelé : « barrière ». Un mot simple qui lui permit d'obtenir la brillante note de moins dix sur dix.

Une fois épuisés à son tour, tous les Titanomanciens se trouvaient au sol, la respiration haletante. Les heures passaient et Noria sentait la faim tirailler son estomac. L'entrainement durait depuis un certain temps maintenant, et les élèves avaient tous besoin de repos. Noria s'apprêtait à se lever pour faire le repas, mais des racines sortirent du sol autour d'elle. La terre se fissura et craqua. Prise aux dépourvues, elle n'eut pas le temps de lancer un sort et les lianes s'enroulèrent autour d'elle, puis la guidèrent au-dessus de Gavion. Le Sage ne lésinait pas. Les liens la serraient si fort qu'elle lâcha un cri de douleur sous le regard courroucé de ses compagnons.

– Noria ! hurla Allen. Gavion, que faites-vous ?

Celui-ci arborait un air mauvais. Son sourire ne prédisait rien de bon.

– Passons au deuxième exercice, voulez-vous ?

Noria voulut répliquer, mais des racines la bâillonnèrent immédiatement. Prise au piège, elle ne pouvait qu'assister au combat qui se déroulait sous ses yeux. La peur la submergea, alors que ses liens resserraient leur étreinte, lui arrachant un cri étouffé. Ses amis se relevèrent en vitesse, prêts à se battre, mais avait-il une chance face à un adversaire aussi puissant ?

– Alors ? Qu'allez-vous faire pour sauver votre amie ? demanda Gavion.

Allen fut le premier à charger tête baissée. Malgré la fatigue, il usa de sa magie pour alléger sa nouvelle lame à deux mains. Des racines sortirent du sol pour l'attaquer et il les évita avec brio, mais Gavion avait plus d'un tour dans son sac. Lorsqu'il prononça les mots « règne d'épines », des pics de terre sortirent brusquement de la terre. Allen arrêta sa course alors que l'attaque se rapprochait de lui. Il pesta et recula de plusieurs bonds en arrière. Gavion secoua la tête et serra les liens de Noria un peu plus.

Son sang circulait difficilement. Les larmes aux yeux, elle souffrait alors que sa respiration devînt de plus en plus compliquée.

– Mauvaise idée. Je vous rappelle que vous êtes épuisés. Votre énergie va mettre plusieurs heures pour revenir à son maximum.

– Lâchez là ! s'énerva Allen.

– Non, répondit simplement Gavion en se grattant la tête. Je vais vous apprendre à ponctionner l'énergie des Titans.

Tout le monde haussa les sourcils. Les liens de Noria se détendirent un peu, lui permettant de respirer normalement.

– Il va falloir vous canaliser sur votre tatouage, lui seul permet la connexion avec votre Titan d'origine. Concentrez-vous et projetez votre esprit dans celui-ci. Lorsque vous entrerez en contact avec le Titan, vous le sentirez. Ensuite, aspirer son énergie pour la faire vôtre.

Allen s'énerva davantage.

– D'accord, mais lâchez Noria ! On peut très bien le faire sans la mettre en danger.

Gavion réfléchit un instant en leva la tête.

– Euh... C'est plus drôle comme ça.

La réponse poussa Allen à s'élancer sur le sage. Ce dernier invoqua des loups de terre d'un claquement de doigts. Les Titanomanciens se défendaient comme ils pouvaient, mais il en venait toujours plus et Noria savait qu'ils n'avaient aucune chance. Leur épuisement leur faisait faire des erreurs qui leur coutaient des blessures. Ozia se retrouva avec une morsure qui dégoulinait de sang et Hirelda avec des griffures sur les jambes. Kain, lui, prenait des coups via les racines de Gavion. Leur cri de douleur résonnait à travers la clairière, tandis qu'aucun d'eux n'arrivait à s'approcher du sage.

À bout de souffle, ils se replièrent tous ensemble pour élaborer une stratégie. Gavion, las d'attendre, soupira longuement.

– Bon, on va passer à la vitesse supérieure.

Les liens autour de Noria se resserrèrent brusquement. Si fort, qu'elle ne pouvait même plus respirer. Ses cris étouffés par les racines ne parvenaient que brièvement à ses amis. Le Sage prononça le mot « Carvaro ». Une gigantesque plante sortie du sol derrière lui. Ses feuilles gracieuses s'étalèrent sur les côtés, puis un bourgeon s'étira vers les cieux, bien au-dessus de Noria. Lorsqu'il éclata, une tête de fleur carnivore apparut. Sous les yeux horrifiés d'Allen, la plante goba Noria sans la moindre hésitation.

– Gavion ! Arrête ça ! hurla Allen.

Il haussa simplement les épaules.

– Elle a faim.

Allen serra les dents, bien conscient qu'il ne pouvait rien contre lui. Il reprit son calme, alors que les loups l'empêchaient de passer, et chercha une solution. Impossible de demander de l'aide à ses amis qui s'élançaient déjà au secours de Noria. Personne ne réfléchissait et l'affrontement était bien trop désordonné pour gagner.

Le jeune homme se remémora les paroles de Gavion. C'était leur professeur, et personne n'écoutait ses recommandations, même s'il allait beaucoup trop loin dans son exercice. Allen ferma les yeux et se concentra sur son tatouage, malgré les appels à l'aide d'Hirelda. Après quelques instants, son esprit s'envola loin de son corps, happer à travers le monde. Il sentit brutalement la présence du Titan de l'air, ainsi que toute son énergie qui semblait infinie. Allen s'apprêta à lui en voler, quand une présence tenta de prendre le contrôle de son être. Allen pesta et le repoussa, déterminé à ne pas abandonner Noria. La colère du Titan était perceptible, mais rien ne pouvait l'arrêter. Il n'allait pas laisser Noria mourir !

Il rouvrit les yeux. Son tatouage brillait d'une forte lueur, alors que toute sa magie perdue venait de regagner son corps. Mieux encore, elle s'agrandit, comme si sa réserve d'aura venait de doubler. Il s'élança avec toute sa force vers la plante. Il fit un bond, et à l'aide de sa magie du vent, s'élança à une vitesse faramineuse. D'un coup d'épée, il coupa la tige de la plante. La tête disparut dans un nuage d'étoile verte, et Allen aperçut Noria qui chutait, débarrassée de ses liens. Il sauta de nouveau, l'attrapa, puis retourna vers ses amis.

Il la posa délicatement au sol, encore endormie. Rassuré de la voir vivante, Allen poussa un soupire de soulagement.

– Bravo ! Tu as réussi ! s'exclama Gavion en l'applaudissant.

Allen se leva et s'avança vers lui, le visage déformé par la colère. Il se mit en position de combat.

– Je vais vous aider à lui faire sa fête, déclara-t-il à l'intention d'Hirelda et Kain.

Gavion ricana.

– Je ne crois pas, non.

Il prononça les mots « dômes du carnage » et des racines sortirent du sol pour former un immense dôme autour de lui. Allen n'eut pas le temps de passer au travers que ses amis disparaissaient derrière cette structure. Il essaya de la percer de sa lame, mais rien à faire, les racines étaient bien trop résistantes pour ça.

***

Les blessures d'Hirelda n'arrangeaient pas leurs affaires. Marcher réveillait les blessures à ses jambes et elle ne savait ce qui l'attendait dans ce dôme. D'abord le noir total, puis des plantes sortirent des parois pour illuminer le nouveau terrain de combat à l'aide de leur spore., tel de petites étoiles scintillantes pleuvant sur le terrain de combat.

– Bon, à vous d'y parvenir, déclara Gavion. Et vous n'avez pas toute la journée. Ça a beau être jolie toutes ces lueurs, c'est un poison lent qui va inhiber votre magie et vous tuer à petit feu. Assez douloureusement, je dois avouer.

Hirelda pesta et serra les poings. Elle voulait faire comme Allen, mais comment ? Un regard vers ses compagnons, les yeux déjà fermés pour se concentrer. À force de respirer les spores, sa gorge se mit à bruler chaque fois qu'elle avalait sa salive. Elle se mit à tousser la main devant la bouche et du sang s'échappait déjà de sa gorge. Le cœur battant la chamade, elle comprit que leur Sage ne cherchait pas à les ménager. Il était prêt à tout leur apprendre à augmenter leur puissance.

Des lueurs des couleurs associées à leur élément apparurent au niveau de leur tatouage. Hirelda vit une brume émaner du corps de Kain et Ozia, puis les deux Titanomanciens ouvrirent les paupières. Ils s'élancèrent sur le Sage et jetèrent conjointement leurs deux attaques dévastatrices. La lance et une sphère d'eau bouillante se mêlèrent, provoquant une explosion électrique destructrice lorsqu'elle frappa Gavion de plein fouet. La foudre couplée à l'eau détruisit le dôme d'un seul coup pour leur permettre de se retrouver à l'air libre.

– Il ne reste plus qu'Hirelda... annonça Gavion, sans trace de la moindre blessure.

Kain et Ozia, bouche bée, restèrent pantois face à leur adversaire. Mais Gavion réfléchissait à la pousser à bout.

– Je sais ! dit-il en tendant une main en l'air.

Sans crier gare, des racines sortirent du sol pour emprisonner tous les combattants. Gavion tendit une main menaçante vers Noria. Hirelda, sentant le danger, courut la rejoindre, mais cela semblait trop tard. Allen hurla, mais il n'arrivait pas à se libérer de ses entraves. Gavion forma une mini météorite au-dessus de lui lorsqu'il prononça le mot « météore ».

– Voyons voir si tu es assez rapide, ricana-t-il.

Hirelda, déjà devant Noria, vit le météore s'élancer vers elle à grande vitesse. Pas le choix, jamais elle ne pourrait arrêter une telle attaque, aussi elle utilisa le même procédé que ses compagnons pour tenter de ponctionner le pouvoir de son Titan. Elle ferma les yeux et envoya son esprit jusqu'à lui. Malgré la colère de l'être en question, elle réussit à happer son énergie et à l'utiliser pour former son bouclier de terre.

Lorsque le météore la heurta, une puissante déflagration se produit, soulevant un épais nuage de poussière. Les Titanomanciens scrutèrent la scène, impuissants, avec des yeux ébahis. Lorsque le vent chassa les particules de terre, Hirelda était toujours debout, les jambes flageolantes, la respiration saccadée, le bouclier fêlé en plusieurs endroits. Incapable de le maintenir en place, sa magie de volatilisa et elle tomba genoux à terre.

L'exercice terminé, Gavion libéra tout le monde et se hâta de rejoindre le groupe. Il leur tendit à chacun une fiole. Ozia écarquilla les yeux.

– Attendez... C'est un élixir de Feleden ?

Il opina.

– Buvez, ça ira mieux.

***

Après le réveil de Noria, les Titanomanciens s'assirent autour de Gavion. Ils ne lui avaient pas encore pardonné de les avoir pris au dépourvu de cette manière. Malgré ses excuses, Allen continuait de le maudire d'avoir osé porter la main sur Noria. Mais cette dernière ne lui en tenait pas rigueur. Grâce à son intervention, ses amis étaient maintenant plus fort. Grâce à ça, ils pouvaient affronter plus sereinement ce qui les attendait.

– C'était ça votre manière de ponctionner de l'énergie ? s'énerva Hirelda. Vous auriez pu nous l'apprendre autrement !

Gavion croisa les bras, songeur. Il secoua la tête, puis leur expliqua tout.

– Il existe deux moyens de ponctionner l'énergie d'un Titan. La première, c'est celle que vous venez de vivre. Lorsque vous êtes proche de la mort, il est plus facile d'aller se servir rapidement en énergie pour tenter de se sortir d'une impasse. La deuxième est... plus dangereuse.

Le dernier mot laissa un silence implacable sur le groupe.

– La deuxième est par la méditation, continua-t-il. Ça a l'air gentil comme ça, mais lorsque vous le faites, vous entrez en contact avec le Titan. Et je suppose que vous avez senti leur colère. Imaginez, ils dorment depuis des millénaires et nous les empêchons de se réveiller en ponctionnant leur magie. Le problème de la méditation, c'est qu'ils sont capables d'entrer dans notre esprit.

– J'ai eu cette impression, avoua Allen. J'ai dû le repousser...

Gavion claqua des doigts en direction du jeune homme.

– Exactement ! Et tu as fait ça grâce à une sorte de bouclier mental. Le problème, c'est que ce bouclier se recharge lentement après chaque méditation. Par exemple, pour moi, je ne peux refaire cet exercice qu'une fois tous les dix ans.

– Dix ans ? s'exclama Ozia.

– Vous, vous pourriez le faire plusieurs fois dans la semaine, je pense, supposa Gavion. Mais votre esprit n'est pas assez résistant pour ça.

Sur ses mots, tout le monde réfléchit à la leçon qu'il venait d'apprendre. Noria connaissait déjà cette technique qu'elle avait apprise plus jeune, mais l'utiliser lui avait volé plusieurs années de sa vie en aggravant sa malédiction. Depuis, elle ne pouvait plus réitérer l'expérience.

– C'est déjà arrivé qu'un Titan gagne face à un Titanomancien en méditation ? demanda Hirelda.

Une question pertinente qui surprit Noria. Tout le monde la dévisagea avec surprise. Elle fit une grimace, mais se concentra sur la réponse de Gavion.

– Effectivement... Il n'y a pas si longtemps, un Titanomancien de feu à exploser. Oh ! Et un d'eau est devenu complètement fou. Mais il y a eu beaucoup d'autres cas.

Noria fit la grimace, imaginant ce pauvre homme exploser d'un seul coup.

– Bon ! Reprenons notre route ! ordonna Gavion.

Sur ces mots, les élèves suivirent le Sage jusqu'à la caravane pour se diriger vers le domaine de Noria, après un entrainement qui les avait secoués à tous les niveaux.


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