Chapitre 20 : La traversée

     Il tapait cet épouvantail à n'en plus finir. Coup après coup, son épée de soldat s'abattait dans toutes les directions sur ce pauvre mannequin d'entraînement aux arts de combat, fait de bois et de paille. Dans la cour de combat, derrière la taverne de Labulat, le garçon s'adonnait à des exercices physiques plus ou moins avancés pour affronter les monstres qui croiseraient son chemin à l'avenir. Les bruits répétitifs de sa lame contre le bois résonnaient dans le village et commençaient à réveiller les habitants aux alentours encore couchés. Cependant, Lucas ne daignait pas s'arrêter de sitôt. Sous le soleil levant se reflétait son fer dans un éclat luisant, il profitait des heures matinales avant de se préparer à la plus grande mission de sa vie. Elle lui était tombée dessus sans prévenir, sur un coup de tête. Le blond en avait assez de rester constamment dans l'ombre en attendant que les choses passent. Désormais l'âge de sagesse passé, il était adulte et se devait de prendre des décisions lui-même.

     Son choix était fait, il n'irait pas travailler ce jour-là. La Taverne devrait se passer de lui pour plusieurs jours même. Loin d'être un professionnel des voyages, il faisait du mieux qu'il pouvait pour se préparer à ce qu'il pensait être une grande aventure de sauvetage à travers le monde. Membre d'une famille brisée, il avait choisi de partir pour sa mère. Sa mère, et aussi par-dessus tout cette fille qu'il n'arrivait pas à se sortir de la tête. Il pensait à elle jour et nuit, il voyait son regard dans ses songes et entendait sa voix dans la brise. Le blond ayant perdu espoir en sa famille, il se raccrochait à elle et sa beauté qu'il trouvait inégalable. C'était cette même jeune femme qu'il savait désormais en danger de mort, et qu'il cherchait donc à retrouver pour la protéger du mal qui l'épiait dans l'ombre constamment. Stann, son père, avait fui. Et de ce fait, il l'avait libéré de l'obéissance qu'il lui imposait par soumission. Lucas voyait désormais son paternel comme un véritable inconnu cruel qui n'éprouvait aucun amour pour sa famille. L'homme avait toujours été très solitaire et égoïste, et depuis peu, il était allé trop loin. C'était pour cette raison que Lucas avait décidé de faire changer les choses à son échelle s'il en avait le pouvoir.

     Le jeune homme ne cessa guère ses nombreux coups d'épée quand bien même il avait aperçu une silhouette s'approcher à sa gauche. Il l'observa avec indifférence, une neutralité qu'il n'avait pas l'habitude de montrer en face de son aîné. Son frère, Leo, avait visiblement décidé de lui adresser la parole de nouveau, ce qui l'étonnait beaucoup après leur précédente dispute. Mais les choses avaient bien changé à Labulat depuis qu'Alan s'était enfermé dans un cercle de corruption insurmontable. Les habitants du village s'apprêtaient à partir, dans un désespoir assumé par tous. La prospérité de l'endroit fut perdue. Leo s'inquiétait pour son avenir et celui de son amante, d'autant plus que sa famille fragmentée commençait à le ronger. À sa manière, il avait décidé de retrouver son petit frère pour tenter de reformer des liens avec lui qui pourraient peut-être compenser ceux qu'il avait perdu avec son père. C'était inconscient, mais on ne pouvait pas séparer des frères indéfiniment.

- Je me jetterai sous le pont de Tabanta si tu penses pouvoir t'améliorer en faisant ce que tu fais, s'exclama Leo qui se moqua des activités de Lucas.

     Au même instant, il trancha définitivement la tête du mannequin en bois, à force de frapper au même endroit. Cela eut pour conséquence d'alourdir l'atmosphère, le timide et discret Lucas depuis toujours semblait avoir bien disparu.

- Au moins je tente de passer à l'action, répondit ce dernier qui posa son épée contre le mur en face de lui.

- Tu es en guerre toi maintenant ?

     Il ignora l'agressivité inutile de son frère et ses moqueries. Le temps des chamailleries était révolu pour lui, Lucas fit preuve de maturité et mit de côté tout ce dont il reprochait à son interlocuteur.

- Je crois que l'on doit parler, Leo.

- Ça y est tu t'es enfin décidé à ouvrir la bouche sur ce qu'il se passe ?

- Tu es venu pour quoi à la base ?

     Il n'obtint aucune réponse, mais il profita de la présence de son frère pour tenter de le raisonner et de l'embarquer avec lui dans ses projets ambitieux. C'était venu subitement à lui, comme un déclic dès l'instant où Stann avait attenté à la vie d'Alan. Lucas savait son père violent, mais ne le pensait pas capable de commettre un meurtre. Depuis cette soirée, le blond avait drastiquement changé sa manière de voir les choses, c'était comme si la déesse l'avait désigné pour passer à l'action.

- L'heure est grave, affirma le cadet. S'il te plaît soit coopératif, ça passe bien au-dessus de nos différends. Je ne te demande pas qu'on se réconcilie, j'ai simplement besoin d'alliés, de renforts. Alors cesse de me regarder comme le petit frère innocent.

     Dans un long soupir, Leo le laissa s'expliquer sans qu'il ne l'interrompe, mais il garda une expression fermée, désabusée. Sa grande curiosité présente depuis toujours l'incitait à en savoir plus, même s'il fallait qu'il laisse Lucas prendre les rennes, ce qu'il n'aimait pas en temps normal, en tant que grand frère. Il se pensait plus fort, plus grand, et avec plus d'expérience. L'aîné voulait garder une certaine supériorité vis-à-vis de lui qu'il voyait perdre durant cette conversation.

- Je ne reconnais plus notre père depuis qu'il nous a laissé pour son voyage sur une mer inconnue, débuta Lucas. Je ne sais pas ce qu'il a découvert là-bas, mais c'est un autre homme depuis qu'il est réapparu ici soudainement, avec des morceaux d'oreilles manquants, sans même qu'il nous explique pourquoi.

     Le goût de l'exploration de Stann prenait souvent le dessus sur sa famille, dans un égoïsme dont il avait toujours fait preuve. Mais cette expédition en solitaire avait été celle de trop. Depuis celle-ci, le père était devenu mystérieux, violent, et se taisait sur toute sa vie en dehors de leur maison familiale. Leo n'avait jamais eu son mot à dire sur cette histoire, et il évitait de s'en mêler du fait de la pression que lui faisait subir Stann s'il osait lui poser des questions trop intrusives. À partir de ce jour où le blond avait laissé parler ses interrogations, il ne refit plus la même erreur qui lui avait coûté quelques hématomes.

- Tu comprends que quelque chose ne tourne pas rond là-dedans non ? insista le petit frère.

- Pourquoi il te frappait ? rebondit Leo.

     C'était ce qui l'intriguait le plus, la relation aux violences cachées qu'entretenait son paternel avec le cadet. Cela lui rappelait de mauvais souvenirs mais Lucas n'avait plus rien à cacher désormais, il lui divulguerait tout.

- Il m'obligeait à me rapprocher de Lysia pour qu'un jour, elle rentre dans notre maison afin qu'il puisse la capturer, ou je ne sais quoi... Je l'ai invitée à mon anniversaire, je tentais des approches absurdes qui m'ont fait perdre une certaine dignité, mais je n'ai jamais réussi à faire ce qu'il me disait. Les coups étaient des simples...

- ... punitions... anticipa l'aîné.

     Leo ne parvenait pas à croire que leur vie était aussi manipulée et dirigée par leur père depuis plusieurs mois. Un père absent régulièrement de leur maison qui réussissait à leur imposer des décisions non discutées même sans être présent. Il y avait de quoi révolter le frère qui comprenait petit à petit que quelque chose n'était pas normal dans tout cela.

- Ce n'est pas possible, renonça-t-il d'admettre. Qu'est-ce qu'il chercherait bien à faire en s'emparant d'elle ?

- Tu ne te demandes jamais pourquoi il cherchait toujours à déménager ? C'est toujours lui qui avait le dernier mot sur les décisions familiales, et comme par hasard, on atterrit ici après être parti d'Elimith et Écaraille. Nous sommes ici à Labulat. Là où vis Lysia.

     Tout commençait à prendre sens dans son esprit. Les intentions de l'homme chauve étaient devenues enfin plus claires. La seule interrogation qui lui restait était le « pourquoi ».

- Si nous sommes ici, c'est entièrement pour elle, trancha Lucas.

     Lysia était donc la raison de tout ce qu'ils étaient ici. Leo grogna en comprenant que cette fille qui lui causait des problèmes depuis son arrivée avait un lien avec sa famille depuis ce jour. Lui qui pensait enfin être tranquille sans la croiser, il se trompait sur toute la ligne... Qu'avait-elle de si particulier pour autant attirer l'attention et susciter l'intérêt de tous, même de leur père ? Un mystère qu'il aurait aimé résoudre en s'adressant à la première concernée, de nouveau, même s'il la détestait et elle ne coopérerait pas.

     L'aîné regarda autour de lui, ce silence matinal n'était plus paisible. Les habitants peinaient à sortir de chez eux désormais, les rues étaient vides. Leo ouvrit les yeux bien que cela fût difficile pour lui de l'avouer, mais son frère avait raison, ce n'était pas chez eux ici. De plus, la situation critique du village leur laisser penser qu'ils n'avaient tout simplement rien à faire en ces lieux. Sa relation avec le blond n'avait jamais été parfaite, très loin de là même. Ce n'était pas maintenant qu'il commencerait à fournir des efforts pour l'améliorer, néanmoins il l'écoutait car il jugeait aussi la situation importante.

- Il est sous les ordres de personnes plus hautes placées, expliqua Lucas qui poursuivit, des personnes qui ne vivent pas en Hyrule. C'est tout ce que je sais. Et depuis que Lysia et Arthur sont partis, où est notre père ? Disparu de ces terres, et je ne pense pas que ce soit un hasard.

- Tu veux dire qu'il se rend au même endroit qu'eux ? comprit le frère.

- C'est une certitude.

     Leo comprit instantanément le plan de son frère et avait déjà la réponse à sa demande de le rejoindre. Il n'avait aucune idée de la manière de s'y prendre, par où partir, rien. C'était d'une difficulté bien trop élevée qui les mettraient en danger de mort.

- J'ai besoin que des personnes m'accompagnent pour l'arrêter, déclara Lucas après un silence de réflexion poussée.

- Pourquoi j'irai me mêler à ça quand on parle de Lysia ? rétorqua son interlocuteur. Je me fiche complètement de celle-là, elle ne te laisse peut-être pas indifférent, mais moi elle m'a bien fait comprendre ce que je valais, et à plusieurs reprises. Je ne veux plus voir cette abrutie.

- Si tu ne le fais pas pour elle, fais-le au moins pour maman, Leo.

     Le grand frère n'avait pas vu les choses dans cet angle. Molie, leur mère, était la plus aimante des mères à leurs yeux, et il était d'accord pour affirmer qu'elle ne méritait pas les coups que son mari lui donnait. L'occasion d'enfin pouvoir se révolter et d'agir contre la violence de Stann était peut-être sur le point de naître. Il donnerait tout pour la revoir sourire comme autrefois... Lucas remarqua sans difficulté qu'il avait atteint émotionnellement son aîné se forçant de rester de marbre malgré tout. Il haïssait son père, la gifle qu'il lui avait délivrée devant tout le village avait été la goutte de trop, ce n'était pas l'envie de se venger qui lui manquait.

- Notre père l'a détruite, enchaîna le blond, elle ne sait plus qui elle est, ni ce qu'il est devenu. Pour sa protection, nous devons faire en sorte qu'il ne mette plus la main sur notre mère. Quand il aura accompli ce qu'il a à faire, il reviendra et l'obligera, nous avec, à partir avec lui, comme il le fait depuis des années maintenant. Nous devons nous assurer qu'il ne reviendra pas cette fois.

     Cela consistait à quoi ? Le tuer ? L'emprisonner ? Leo était le premier à détester Stann, mais il ne se sentait pas capable de tuer son propre père si c'était ce que Lucas insinuait. Non, pour lui, il n'y avait aucun moyen imminent qui leur permettrait de se libérer de son emprise sur eux.

- C'est un plan bidon, déclara-t-il, il n'a jamais aimé maman, ni même nous. Tu ne peux pas aimer quelqu'un et lui faire subir ce qu'il lui fait subir. Pourquoi est-ce qu'il reviendrait après ça ?

- Parce que nous avons toujours été ses parfaits esclaves à son service.

- Qu'est-ce que vous faîtes ? s'invita soudainement une voix en fond.

     Derrière le dos de son amant, Medy prit part à la conversation dont elle n'était pas directement concernée. Elle ne traînait jamais loin de lui, il fallait s'en douter. En attendant qu'on l'intègre dans le fil de la discussion, elle s'agrippa à Leo par derrière sans le prévenir. D'une humeur à être envahissante, le moment était mal choisi pour déranger les deux garçons, même si l'aîné s'abstiendrait de lui dire.

- Lucas veut retrouver Lysia, expliqua Leo.

     Le cadet trouva ce résumé de la situation très peu pertinent et faussant ses véritables intentions. C'était bien trop simple de lier ses désirs de partir à la recherche de la nièce du chef avec un vilain chagrin d'amour qui n'avait pas lieu d'être... De plus, le blond trouva cela très déplaisant de devoir raconter toute cette histoire à cette fille qu'il n'appréciait guère. La rousse donnait son avis sur la moindre chose et sur des sujets dont elle n'avait pas à se mêler, Lucas n'hésiterait plus à lui dire ses quatre vérités en face si elle commençait à trop l'agacer.

- Ça ne m'étonne pas, il est amoureux de cette garce ! s'exclama la jeune femme avec rancœur lorsqu'elle songea à la blonde partie en voyage.

     Lucas ignora cette remarque déplacée qui tendait vers de la moquerie immature. Il adopta une voix faible pour faire comprendre à la nouvelle arrivée qu'elle n'avait pas à entendre ses dires.

- Je n'y arriverai pas tout seul... insista-t-il en s'approchant de son frère.

      Le serveur de la Taverne ne voyait devant lui que son seul espoir de parvenir à ses fins. D'une grande humilité, il se savait trop faible pour combattre les ennemis qu'il rencontrerait sur son chemin. Son départ à la recherche de Lysia ne dépendait que de la décision que prendrait son grand frère, loin d'encore coopérer. Cependant, Medy intervint une seconde fois avant même qu'il puisse lui répondre, sans même s'adresser à lui en personne, il n'y avait que son compagnon à qui elle parlait dans ces moments-là, elle ne voyait que lui et personne d'autre.

- Qu'est-ce qu'il veut Leo ?

- Que tu dégages une bonne fois pour toutes ! vociféra Lucas qui ne la supportait plus.

      Indignée par ce qu'elle venait d'entendre, l'Hylienne se détacha de son amant et se recula en jetant un regard dévastateur à Lucas, désormais énervé. Il n'avait pas pu retenir ses mots, Medy était devenue trop intrusive. Mais Leo ne tarda pas à prendre le parti de la jeune femme en arrière qui savait qu'il lui ferait office de bouclier contre les attaques verbales du blond.

- Tu t'emportes avec tes idées suicidaires, arrête un peu ! Je vais te dire ce qu'on va faire plutôt au lieu d'aller chercher la merde. Tu vas prévenir maman de préparer ses affaires, on se casse d'ici dans trois jours, maximum, là où ce salaud ne nous retrouvera jamais.

- Et où tu veux aller encore ? Il finira par nous retrouver un jour, tu ne vas faire que retarder le problème !

- Dans ce cas s'il nous trouve, il aura affaire à moi !

     Sur ces mots, il fit volte-face. Leurs échanges s'étaient une nouvelle fois terminés par des disputes, et tout était la faute de Medy ! C'était elle qui causait les ennuis dans la fratrie, Lucas en était persuadé dorénavant. Sans l'aide de son frère, il ne pouvait se décider à partir retrouver Arthur et Lysia et était condamné à rester bloqué à Labulat et suivre le mouvement des habitants qui se préparaient à l'exil. Un élan de désespoir s'empara du cadet qui pensait décidément être dépourvue de la moindre capacité à faire bouger les choses. Qui était-il à jouer les héros, pensait-il égaler les feux chevaliers protecteurs de la famille royale ? Quelle ironie... Il réussissait juste à se mettre tout le monde à dos quand il avait besoin de renforts pour l'accompagner.

     Leo et Medy disparurent derrière le bâtiment de la Taverne avec des rires niais qui leur ressemblaient que trop, le laissant seul dans ses pensées. Cette frustration en lui ne faisait que s'agrandir, sa petite rébellion du jour avait échoué. Lucas devait se décider à repartir travailler pour de bon et oublier sa soif d'héroïsme, il irait servir des plats communs comme tous les jours depuis son arrivée à Tabanta, il servirait les derniers villageois encore assez d'humeur pour manger. Néanmoins, il gardait bien en tête que si leur père était prêt à tuer au grand jour pour récupérer Lysia, il finirait par mettre la main sur elle et son compagnon de route, et qui savait ce qui leur ferait subir comme atrocités.

OoO ~ II ~ OoO

     À une vitesse ahurissante, le bateau sheikah fendait les vagues de cette mer inconnue. Les poissons fuyaient à l'arrivée soudaine de cette invention remarquable capable de les découper en deux s'ils se trouvaient au mauvais endroit de la coque. Le bateau traçait sa route en ligne droite, sans que le vent ou une quelconque intempérie ne le fasse dévier de sa trajectoire. Les moteurs émettaient des bruits sourds qui se confondaient dans l'agitation de l'eau. Preuve de la puissance énergique nécessaire au bon fonctionnement des mécanismes intelligemment développés pour contrer les imprévus marins de source naturelle. Si un navire pouvait traverser cette étendue bleue, c'était bien celui-ci. Aucun autre moyen de transport n'était plus rapide.

     Lysia respira cet air frais de l'océan qui parvenait jusqu'à ses narines. Cet air si pur et épargné de toute pollution maléfique comme en Hyrule. Ce fut en contemplant l'horizon qu'elle ne pensait pas pouvoir admirer plus beau paysage dans sa vie. Un ciel teinté des couleurs du crépuscule avec son coucher de soleil sublime, visible à tribord, venait embrasser le bleu lointain de la mer apaisée. Se priver de cette vue en restant cloîtré dans son royaume aurait été une véritable déception. Le monde était bien plus grand qu'ils ne le pensaient, Hyrule n'était qu'un royaume parmi tant d'autres contrées... La jeune femme était toute excitée à l'idée de découvrir de nouvelles terres et de nouvelles choses, mais elle ne le montrait pas. Elle se trouvait à la pointe du bateau, tout devant, les cheveux au vent. Debout et parfaitement droite en tenant sa lance fétiche qui reposait sur le plancher, elle observait avec fierté les ondulations de l'eau défiler sous ses yeux puis se faire avaler par la vitesse de leur véhicule. Lysia ferma les yeux pour ressentir toute la profondeur de cette sensation de survoler la surface de l'eau comme un oiseau. Un sentiment de liberté précieux qu'elle chérissait tant.

     Plus aucune terre au loin, nulle part. La blonde était perdue dans un océan avec son compagnon qui se trouvait aux commandes du bateau, bien en arrière de celui-ci. La vérité était qu'il se contentait d'observer ces différentes lumières qui clignotaient de part et d'autre du tableau de bord, il ne prétendait aucunement diriger le bateau. Cependant, Impa leur avait enseigné quelques bases primordiales qu'il avait fait l'effort de retenir en cas de problème. Car si sa vie et celle de Lysia reposaient sur un simple contrôle automatique de leur véhicule, ce n'était pas très rassurant... D'autant plus qu'ils ne savaient même pas combien de kilomètres ils devaient parcourir pour rejoindre une rive. Néanmoins, Arthur s'était pris au jeu et trouvait le moment très agréable. Il regardait avec un grand sourire son amante contempler la mer. Celle-ci ne tarda pas à le rejoindre derrière les commandes.

- Si ça ce n'est pas digne d'une grande aventure ! affirma la blonde.

     L'épisode du moldarquor avait presque déjà été oublié. Arthur gardait une certaine inquiétude sur leur destination, impossible à déterminer sur une carte, mais le sourire de la jeune femme lui suffisait à continuer de croire en l'avenir.

- Je te sens dans ton élément, pas vrai ? supposait-il.

- Carrément !

     Le bonheur de Lysia le touchait beaucoup sur le moment, il savait que c'était une vie qu'elle aimait, mais il conservait sa sombre histoire qu'elle lui avait contée bien ancrée dans son esprit. Il ne savait pas par quel miracle elle réussissait encore à retrouver des sourires sincères sur ses lèvres avec son lourd passé, là était toute l'admiration qu'il lui portait. Songer à l'origine de sa blessure lui briserait toujours le cœur.

- Tu sais, j'ai repensé à ton histoire de la dernière fois... avoua le brun, ça me travaille beaucoup.

     Lysia se tourna vers lui. Elle lui était reconnaissante de l'attention profonde dont il faisait preuve envers elle. Avec le temps, se souvenir de terribles expériences, garder en tête des traumatismes, tout cela finissait par devenir une habitude et on ne se lamentait plus de son vécu, on l'assumait ou le cachait au monde. L'Hylienne savait l'horreur qu'on lui avait fait subir, et quand bien même elle pouvait rechuter dans des phases plus tristes, elle restait heureuse de se trouver là où elle était ce jour-là. Derrière son dos et en enroulant ses bras autour de sa taille, elle posa sa tête sur son épaule et se frotta à lui.

- Je voulais te préserver de tout ça, j'avais peur de t'en parler, dit Lysia d'une petite voix. Mais maintenant, je me sens vraiment libérée de savoir que quelqu'un comme toi est au courant et que je peux profiter de ton soutien quand j'en ai besoin.

- Ce sont des choses qu'on ne peut pas oublier, soupira le garçon en regardant l'horizon. Je ne pourrai pas oublier.

- Tu ne vas pas en faire des cauchemars, j'espère ? Je m'en voudrai...

- Ne t'inquiète pas pour moi.

     Il lui délivra un baiser sur la tempe et recouvrit ses mains des siennes, Lysia resserra son emprise sur lui. Elle gardait une envie prononcée de conserver un contact physique avec lui pendant plusieurs minutes encore, pour se reposer et humer son parfum. S'il y avait bien un endroit où elle pouvait profiter de dorloter le jeune homme à l'extérieur, c'était bien ici, isolé au beau milieu d'un océan et à l'abri des regards. Arthur appréciait cette proximité avec elle, cependant il souffla en balayant du regard le tableau de bord devant lui.

- Tu comprends quelque chose à tout ça toi ? Je fais mon capitaine de navire depuis tout à l'heure mais je ne connais pas l'utilité du moindre bouton... C'est bien trop complexe.

     Loin d'être une experte en la matière, elle ne lui partagea que ses hypothèses en pointant la partie gauche des commandes. La technologie sheikah était fascinante mais absolument pas ergonomique pour les personnes qui n'y connaissaient rien.

- Eh bien tu vois, je pense que cette partie sert aux contrôles manuels, donc tu n'as pas à t'en préoccuper pour le moment. En revanche à droite, c'est là où on doit se concentrer, ces boutons servent à économiser l'énergie en réduisant notre vitesse, et ceux-ci doivent permettre de nous arrêter. Par Hylia, c'est bien moins intuitif qu'une carte, tu as raison...

     Il aurait été bien plus simple de prendre en notes les enseignements d'Impa, car aucun mode d'emploi n'était fourni... Mais tout cela n'avait finalement que très peu d'importance pour Lysia sur le moment, la jeune femme se perdait dans ses pensées.

- À quoi tu penses ? lui demanda Arthur qui l'avait remarqué.

     Leur joue était collée l'une à l'autre, la blonde ne pensait pas être aperçue en train de s'égarer dans des pensées qu'elle gardait précieusement pour elle.

- Rien, rien du tout... assura l'Hylienne un peu gênée.

- Je l'ai vu dans tes yeux, tu n'oses pas me dire quelque chose, avoue !

- Mais pas du tout, il n'y a rien.

- Oh que si, je le sens, l'embêta Arthur.

     Il se retourna et la chatouilla quelques instants au passage pour se retrouver face à elle. Prise par surprise, Lysia eut le réflexe de se reculer et fut forcée de rire de la situation. Ses mains voulaient capturer celles de son amant pour l'empêcher de continuer ses taquineries. Lorsqu'elle y parvint, elle le poussa légèrement en arrière.

- Arrête ça, je divague c'est tout... dit-elle.

     Tout à coup, il s'empara de ses hanches et l'embrassa sans prévenir sur la bouche d'un doux baiser posé délicatement sur ses lèvres. Le garçon n'avait pas réfléchi et avait agi sur le moment, pensant que cela pouvait plaire à sa compagne. Lysia haussa les sourcils tout en profitant pleinement de ce qu'il venait de se produire. Sa respiration durant cet instant de contact témoignait d'un amusement certains qu'elle ressentait. Le baiser émit un son de claquement bref et aigu significatif au moment de retirer leurs lèvres.

- Monsieur prend ses aises... remarqua la blonde.

- J'essaie, du moins.

     Ce baiser inattendu lui avait beaucoup plu, la blonde eut des frissons dans tout son corps, elle aimait se faire surprendre ainsi par l'Hylien qui devenait de moins en moins timide. De plus, le cadre était romantique. Soleil couchant, mer à perte de vue... Lysia était très sensible à ce genre de choses même futiles si bien qu'elle en oublia le bruit sourd des moteurs à proximité. Ces éléments étaient importants pour elle car ils alimentaient cette flamme passionnelle dans un couple. L'initiative d'Arthur eut d'ailleurs pour conséquence de réveiller une envie singulière dans l'esprit de Lysia qui rougissait. Elle se mordillait les lèvres à l'idée de tenter ce à quoi elle songeait de faire. Mais qui ne tentait rien n'avait rien...

- Peut-être que je suis un peu fatiguée, avoua la voyageuse en baissant les yeux sur les vêtements du brun.

     L'Hylien tenait son amante près de lui avec ses mains sur ses hanches. Une certaine atmosphère romantique commença à naître entre les deux jeunes gens. Ils tenaient un contact visuel fort qui leur démontrait une envie évidente de la part des deux amants de passer un peu de temps collés l'un à l'autre, à juste se regarder amoureusement. La blonde sentait son compagnon s'ouvrir davantage, être plus à l'aise durant ces moments précieux, elle voulut profiter de cette occasion qu'elle trouvait plutôt originale. Une fois leur deuxième baiser terminé, Lysia posa une main contre la poitrine d'Arthur avant d'esquisser un sourire malicieux en songeant à quelque chose qui ne la laissait pas indifférente depuis bien longtemps. Elle tenta de le faire comprendre à l'aide d'une approche sophistiquée.

- Je vais aller me reposer un peu à l'intérieur, dit-elle presque sur le ton du murmure en relevant les yeux.

- D'accord.

     Lysia se redressa et resta immobile, son cœur s'était emballé avant même qu'il ne prononce le moindre mot. Cependant, cette simple réponse ne sembla pas la satisfaire, le brun n'avait visiblement pas compris ce à quoi elle faisait référence. Pourtant selon elle, cela coulait de source... Les signes étaient plutôt évidents, non ?

- Là c'est le moment où tu proposes de me rejoindre.

- Oh oui bien sûr ! se rattrapa-t-il. Hum...

     Il se racla la gorge et exagéra une réponse qui fit hoqueter un rire à la jeune femme aux pommettes rouges, sensible à la situation.

- Je peux venir avec vous, ma douce dulcinée ?

- Allez bouge tes fesses petit malin, dit-elle pour se retourner en vitesse et cacher ses rougeurs.

- J'arrive dans cinq petites minutes.

     Souriante, elle hocha la tête sans rien dire et s'éloigna en lui jetant un regard dans lequel des braises pourraient brûler pour l'éternité. La lancière ne s'était jamais sentie aussi émoustillée qu'en ce moment même. Ce n'était pas explicable, il s'agissait d'une sensation venue subitement en embrassant le garçon plusieurs fois d'affilée. Celui-ci comprenait qu'une certaine excitation entraînait son amante jusqu'à la chambre du dessous. En effet, elle sautillait en descendant les marches qui menaient au pont du bateau, en se retournant vers lui par moment, mains jointes, pour lui remontrer ces mêmes yeux remplis de désir et même d'un peu de gêne. Le brun la trouva très touchante et séduisante, son visage exprimait un large bonheur grâce à ce qu'elle espérait qu'il se produirait entre eux, dans les prochaines minutes. Une fois en bas, elle pénétra dans la pièce fermée, juste sous les pieds d'Arthur. Voilà qu'elle attendant ce moment depuis plusieurs jours maintenant, s'en voulant même parfois de songer trop souvent à cela.

     En réalité, l'apprenti capitaine de bateau n'osait pas rejoindre son amante dans la chambre. Il sentait une vague de stress l'envahir dès l'instant où il comprit que Lysia ne souhaitait pas en rester à de simples baisers. C'était nouveau pour lui, en avait-il envie ? Oui, mais se sentait-il capable d'être à la hauteur des préjugés qu'il se faisait sur la question ? Peut-être pas. Cependant Arthur avait bien compris que son binôme ne demandait rien de plus qu'un moment intime, cela lui faisait plaisir. Il resta donc quelques instants à tergiverser devant le tableau de bord, cette angoisse n'avait pas lieu d'être et il savait que la blonde lui aurait dit la même chose. Se priver d'aller la rejoindre pour si peu était stupide, Lysia était bien la seule fille avec qui il était capable de forger une telle intimité. Après tout, le brun avait seulement besoin de se préparer à cette nouvelle expérience en se retrouvant seul. Il prit donc la décision de descendre les quelques marches et de s'avancer vers la porte de la chambre en prenant une grande inspiration.

     Arthur pénétra enfin dans la pièce dans laquelle on l'attendait. C'était un petit endroit clos sans aucune fenêtre, la température y était donc plutôt élevée. Les murs étaient faits de planches de bois, ornées de lignes et de dessins sheikahs brillants d'un bleu éclatant qui servait de lumière artificielle à cette petite chambre de repos. L'ambiance était très particulière dans cette couleur, il y avait un côté rassurant mais aussi très froid, avec tout de même une âme qui s'en dégageait. Quelques meubles usés remplissaient l'espace, et au centre, un lit double qu'ils avaient pris soin de préparer avant leur départ en mer afin de dormir convenablement dans des draps propres fournis par Impa. Cela n'empêcherait pas un potentiel mal de mer qui s'inviterait mais c'était mieux que rien.

     Au centre de ce lit, attendait patiemment Lysia qui se trouvait être allongée sur le dos en regardant avec un grand sourire son compagnon débarquer dans la pièce. Elle avait les bras et les mains qui lui couvraient le ventre et telle ne fut pas la surprise d'Arthur de constater que la blonde s'était déjà dévêtue, ne portant désormais plus que des sous-vêtements de couleur blanchâtre, faits d'un tissu soyeux et épais. Il écarquilla les yeux en voyant son amante. Même s'il l'avait déjà vue presque nue la nuit précédente, cette fois-ci était différente de la dernière. Le contexte n'était pas le même.

- Lysia ? s'étonna le garçon de la voir déjà dans cette tenue.

- Alors, tu viens ? lui demanda-t-elle avec une grande délicatesse avant de lui faire un discret clin d'œil.

     Cette invitation additionnée au fait de l'apercevoir ainsi lui procura un sentiment qu'il ne pouvait dénier. En effet, il était bien obligé de s'avouer qu'il aimait voir le corps de Lysia dénudé, et que la tournure que prenait déjà la situation lui plaisait bien. Ce fut avec timidité qu'il s'approcha du lit et s'assit sur son bord, près de la jeune femme qui gardait son sourire apaisant. Arthur perdit ses mots lorsqu'il tenta de lui faire un compliment.

- Tu es... vraiment très jolie, je...

- Merci, dit-elle gaiement.

     Le voir perdre ses moyens l'amusait, l'Hylienne aimait le séduire pour observer ses réactions. Elle avait pour but de détendre son amant et de lui faire gagner confiance en lui. Elle connaissait sa grande peur du regard des autres, il était temps qu'il s'en défasse avant qu'Arthur soit capable de prendre davantage d'initiatives. Lysia posa sa main contre celle du garçon à plat sur le matelas.

- Sois pas timide voyons petit ourson, n'aie pas peur, c'est juste moi tu sais. Je ne suis pas là pour te juger. Dis-moi ce que tu as sur le cœur, ce que tu as envie de partager avec moi, on peut en discuter.

     Il débuta une suite de mots incompréhensible avant de retrouver le silence. Par Hylia, que c'était difficile de formuler ce que l'on ressentait... Sortir de sa zone de confort n'était pas une mince affaire. Pour l'aider une fois de plus dans sa prise d'initiative, elle lui fit une proposition intéressante. Il ne suffisait que d'un simple déclic pour qu'Arthur ose être lui-même et avouer ses envies, elle savait qu'il en était capable.

- Tu veux venir retirer mon sous-vêtement ? suggéra gentiment Lysia qui comprenait son stress. Tu peux si tu veux, je n'y vois aucun problème.

     Cela eut le mérite de le faire rire, bien que nerveusement. Le couple s'amusa de la situation dont il n'avait pas encore l'habitude. À vrai dire, Lysia ne pensait pas prononcer une telle phrase à voix haute un jour. Retirer ce qu'il lui restait sur la poitrine, c'était une entrée en matière plutôt efficace... Ils avaient tous les deux les yeux pétillants, et Arthur comprenait petit à petit qu'il était en droit de regarder le corps de son amante et de s'approcher de plus près. Son angoisse finit par disparaître en partie.

- D'accord, répondit le brun à sa proposition, mais tu sais, je ne sais pas comment m'y prendre, je n'ai pas l'habitude de ce genre de choses.

- Je suis la première fille que tu vas voir toute nue tu veux dire ? Ça me plaît beaucoup.

     Le jeune homme s'assit en tailleur sur le lit. D'un geste hésitant finalement guidé par Lysia, il put poser une main entre le cou et la poitrine de celle-ci. Il sentit sa peau lisse et chaude sous sa paume moite. C'était une sensation très agréable, mais il n'osa pas encore bouger un seul doigt de sa position initiale. La voyageuse ferma les yeux un instant pour profiter de ce contact à cet endroit de son corps. Dans ses songes et son imagination qui prévoyait déjà la suite des événements, elle sentit tout à coup la main d'Arthur se mouvoir et descendre doucement sur son torse, passant ainsi sur ses seins plusieurs fois d'affilée, au-dessus du tissu blanc. Lysia sentit quelques papillons naître dans son ventre lorsqu'elle rouvrit les yeux et hoqueta un rire tant elle fut heureuse de cette initiative enfin prise par son amant.

- Je m'en fiche que tu ne saches pas comment t'y prendre. Tu crois que je sais moi peut-être ? Ce n'est pas ça qui m'intéresse.

     Elle plongea ses iris dans ceux du jeune homme en lui démontrant bien une sincérité profonde dans ce qu'elle lui avait dit pour le rassurer. Lysia le voyait un peu réservé, il venait de retirer sa main de sa poitrine qui avait déjà été une grande épreuve qu'il venait de passer. Elle ne souhaitait pas non plus trop le brusquer trop vite. L'objectif était avant tout de le détendre et relâcher la pression inutile.

- Je ne veux qu'une seule chose pour le moment, déclara la blonde.

- Qu'est-ce que c'est ?

     Aussitôt, la jeune femme chercha la main d'Arthur pour la replacer sur sa poitrine une nouvelle fois, faisant comprendre qu'elle voulait continuer sur cette lancée. Son désir était si élevé qu'elle ressentit une poussée d'adrénaline qui la faisait respirer plus intensément. Lysia gardait les lèvres décollées de quelques millimètres, elle n'avait fait qu'imaginer ce moment et ne pensait pas le vivre aussi rapidement. Son cœur lui disait de relâcher toute pression, toute retenue et tout blocage. Il la poussait à formuler ses envies comme elles lui venaient, car ce cadre de puissante confiance forgée depuis des années et qui était instaurée par les deux Hyliens le permettait. La blonde ne passa pas par quatre chemins, elle ne pouvait plus retenir ses mots.

- Je te veux toi, c'est tout. Je veux que ce soit toi qui me grimpes dessus et qui m'embrasses. Là maintenant.

     Un silence durant quelques secondes. Arthur lui souriait et était réceptif à sa demande. Il hocha la tête et commença à se déshabiller le haut de son corps pendant que son amante repositionnait ses mains pour cacher son ventre, parfaitement attentive et satisfaite de la vision que lui offrait le garçon. Il retirait vêtement par vêtement les couches qui recouvraient son buste.

- Dans ce cas, je ne vois pas comment refuser... lui répondit le garçon qui se prêta enfin au jeu.

      Il n'eut pas de gêne à dévoiler sa peau nue de son ventre et de ses pectoraux étant donné qu'il avait soigné Lysia ainsi. Cependant, cette dernière prit le temps d'observer le corps de l'Hylien avant de le regarder d'un grand sourire et en se mordillant la lèvre, ce qui lui suscita une certaine excitation. Arthur avait une corpulence relativement normale et ne possédait pas de muscles très apparents sur son torse et ses bras. Un fait envers lequel tous les deux restaient très indifférents. L'attirance physique était néanmoins présente, pas besoin de grosse musculature pour satisfaire la blonde qui n'aimait que très peu ce genre de corps, l'amour effectuait le travail.

- Allez viens par-là, lui dit-elle sans lui laisser le choix.

      Lysia l'invita à la rejoindre d'encore plus près lorsqu'elle forma un passage évident entre ses deux jambes pliées de moitié qui s'écartèrent avec lenteur, lui indiquant ainsi le chemin à prendre pour venir l'embrasser. Elle était prête à oublier son environnement et profiter pleinement de ce moment intime unique. Arthur se fraya un chemin timide entre ses cuisses pour se retrouver par-dessus son corps presque nu, il était en position de gainage. Petit à petit il remonta son bassin, ses hanches, son ventre et sa poitrine pour enfin atteindre le visage passionné de son amante. Leurs lèvres se positionnèrent à quelques centimètres les unes des autres, ils sentaient leur souffle leur caresser le visage. Lysia patienta encore quelques instants avant le baiser. Celle-ci parcourut simultanément le torse du brun à l'aide d'une seule main, laissant l'autre camoufler sa cicatrice abdominale. Elle savait qu'elle était en charge de donner le rythme des préliminaires et cherchait donc à tester le désir de son compagnon pour voir sa réaction. Elle cherchait également à savoir quand viendrait le moment où il se sentirait poussé d'un seul coup par son excitation accumulée, ce qu'elle attendait par-dessus tout. Pour ce faire, elle faisait glisser le bout de ses cinq doigts sur la peau du jeune homme, de haut en bas en passant par son dos, le tour avec beaucoup de subtilité et de sensualité. Lysia aimait garder de l'élégance et une certaine retenue avant de se laisser aller. La sensation procurée par ses doigts était d'ailleurs très agréable, Arthur ne pouvait que l'admettre. La sentir le toucher lui faisait de l'effet.

     Il sentit ensuite cette douce petite main remonter jusque ses omoplates et pénétrer son cuir chevelu. Les yeux de la blonde remontèrent également pour se dévoiler à lui, elle approcha sa bouche entrouverte de celle d'Arthur, ferma les paupières et attendit ainsi, le laissant faire le premier pas tout seul. Le garçon ne perdit pas plus de temps lorsque soudainement, il l'embrassa. Étonnée de cette réactivité qui lui faisait plaisir, elle gémit de surprise un instant avant d'effectuer une vive pression plus prononcée sur les lèvres de son amant. Leur baiser dura de longs instants, il venait d'enclencher le premier engrenage qui donnerait l'impulsion aux suivants. Les deux amoureux se retirèrent pour s'échanger un sourire, puis ils réitérèrent leur action une seconde fois, pendant que Lysia s'emparait de la nuque du brun. La suite fut de plus en plus rapide, avec une succession de baisers qui s'enchaînèrent tous avec une cadence qui s'accélérait. Arthur fit dévier ses lèvres chaudes sur la joue, le cou, et l'épaule de la jeune femme dont le souffle s'entendait. Dans la nuque dénudée de Lysia, il humait son parfum et cela l'apaisa davantage. Lorsqu'il chercha à entremêler ses doigts avec les siens, il sentit tout à coup une résistance au niveau de la main qui était restée sur son ventre pour le cacher. Il se redressa aussitôt en comprenant ce qu'il se passait. La blonde n'arrivait pas à laisser sa blessure à l'air libre, pensant que cette partie de son corps alimenterait un rejet de la part du garçon qui irait contre ce moment de passion qu'elle appréciait tant.

- Donne-moi tes mains ma Lysia, lui demanda Arthur à l'aide de sa bienveillance vocale, tu es si belle avec ta cicatrice, n'aie pas honte de me la montrer.

     Perplexe et silencieuse, elle hésitait mais ses mots l'avaient touchée. Sa cicatrice la répugnait elle-même, comment accepter de lui montrer de son plein gré ? Malheureusement, cette marque indélébile faisait pourtant partie d'elle et Lysia devait apprendre à l'accepter. Sa confiance envers Arthur eut finalement le dernier mot, elle finit par retirer ses mains de son ventre recouvert de cette peau où était dessinées des traces de brûlures importantes, sur tout son abdomen. La blonde commença à avoir le regard fuyant de par la honte qui remplaçait son excitation. Qui voudrait voir le corps d'une fille marquée ainsi ? Ce n'était pas esthétique, et ça ne donnait pas envie de la toucher, pour sûr... Seulement, Arthur lui caressa tendrement les cuisses et observa cette cicatrice. Il posa ensuite ses mains dessus en prenant soin de ne pas faire mal à la concernée qui regardait le mur sur le côté.

- Je suis fier de toi, déclara-t-il.

     Pour pallier ce mal-être qui la gagnait, le brun se pencha en avant, approchant sa tête de l'abdomen de la jeune femme pour y délivrer une suite de baisers sur toute la surface de la cicatrice. Celle-ci n'était pas commune, certes, mais elle était loin de le repousser, il comptait le faire comprendre à la concernée. Elle était surprise des actions du jeune homme fougueux.

- Arthur... que... bégaya Lysia qui se laissa faire.

     Elle prit un temps pour observer la tête de l'Hylien juste sur sa blessure. Une vision qu'elle ne serait pas près d'oublier car cette preuve d'amour lui allait droit au cœur. Les lèvres de son amant lui chatouillaient le ventre plutôt sensible à ce genre de choses. C'était une sensation qu'elle ne ressentait pourtant jamais au niveau de sa cicatrice. Il venait de lui faire découvrir quelque chose de nouveau. Lysia en profita quelques secondes en fermant les yeux, soufflant plus intensément.

- Est-ce que tu... est-ce que tu me désires même comme ça ? s'enquit-elle de savoir pour se rassurer.

- Bien sûr, fit Arthur sans la moindre hésitation.

     Cette réponse lui procura un soulagement profond, elle avait besoin de l'entendre pour enfin relâcher la pression et retrouver son état d'esprit propice au désir charnel. Elle fit donc abstraction de ce qu'elle pensait de son physique pour un temps. La blonde défit ses quelques petites tresses dans ses cheveux pour les lâcher complètement et les étaler partout sur son oreiller douillé. Elle posa ses petits élastiques qui lui servaient à se coiffer près de ses vêtements recouvrant les quatre coins du lit. Une fois installée comme elle le désirait, Lysia appela son amant à la dénuder davantage.

- Enlève-moi ça, s'il te plaît, dit-elle en parlant de ce qui soutenait encore sa poitrine.

     Arthur accepta volontiers, il prit le tissu concerné et le souleva pour le retirer en passant par la tête de la jeune femme. Le brun découvrit petit à petit ce qui se cachait dessous avec une grande curiosité. Il se retrouva ensuite avec un sous-vêtement féminin dans les mains, pendant qu'elle lui avait dévoilé deux seins, d'une forme relativement ronde et de petite taille, pointant vers le ciel. Elle ne portait désormais plus qu'une culotte avant la nudité totale. Se retrouver ainsi l'un face à l'autre leur fit un effet notable.

- Touche vas-y, insista Lysia qui attrapa sa poitrine de ses deux mains pour montrer l'exemple.

     Il l'agrippa par les jambes afin de la tirer légèrement vers lui avant de caresser et malaxer les formes de Lysia, heureuse mais pensive tout de même. Arthur embrassa ses seins avec vigueur de tous les côtés, sans omettre de toucher celui qu'il ne recouvrait pas de ses baisers à l'aide de sa main libre. Cette fougue utilisée sur elle s'accentua tant que cela tira un gémissement aigu de satisfaction à l'Hylienne. Elle avait rêvé de ce moment qu'elle vivait sans vraiment y croire complètement.

     Ce fut lorsqu'il eut terminé ses batifolages sur sa poitrine que le brun remonta vers le visage de son amante pour l'embrasser de nouveau. Il s'appuya davantage sur son corps lorsqu'elle sentit la présence évidente d'Arthur sur une de ses cuisses. Ce dernier continua de s'échauffer avec elle dans des successions de soupirs et de respirations saccadées relatives au plaisir qu'ils prenaient tous deux à se sentir l'un contre l'autre. Le garçon se lova dans les bras de Lysia qui s'enroulèrent autour de lui. Il resta ainsi le temps de quelques instants. Une tendre pause. Elle sentait cette bienveillance essentielle dans les gestes de son partenaire, cela lui permettait de tout oublier, cette confiance accordée était la clé de son plaisir.

- Retire-toi ce que tu penses de toi de la tête, lui murmura-t-il à l'oreille. Ce n'est pas vrai. Tu es une très charmante jeune femme que j'aime par-dessus tout, ton corps et ton esprit sont sublimes. C'est ça la vérité.

     Lysia fut émue, elle passa une main le long de son dos masculin et descendit jusqu'à ses lombaires.

- Je n'ai jamais ressenti autant de choses d'un coup, avoua-t-elle.

- Moi non plus...

     Tout à coup, la blonde fit comprendre son intention en s'accrochant d'une puissance ferme au pantalon d'Arthur dont l'adrénaline ne cessait d'augmenter à chaque main de Lysia s'approchant de près ou de loin de son entrejambe. Elle lui fit son expression espiègle et plissa les yeux.

- Mon cher compagnon, si tu pensais rester aussi habillé que ça, c'est pas de chance. C'est à ton tour, allez !

     Ils basculèrent sur le côté puis Lysia prit les devants pour changer la donne. Elle lui retira son pantalon pour le jeter par-dessus le lit. Tous les deux en sous-vêtements, elle l'incita à s'allonger sur le dos pendant qu'elle le chevauchait afin de prendre sa place. Dans sa position, assise sur lui avec une posture bien droite, elle pouvait admirer le torse d'Arthur et le toucher comme bon lui semblait. Une impression de contrôler la situation qui était intéressante. La blonde passa plusieurs fois ses paumes le long du flanc du garçon, presque en train de rêver tant il se sentait bien entre les mains de sa bien-aimée.

- Tu es très mignon quand tu fermes les yeux, déclara-t-elle en s'amusant.

     Arthur sourit tout en restant dans ses pensées en train de profiter de l'instant présent. La jeune femme aimait prendre soin de lui ainsi, le bécoter, le câliner, et lui apporter un peu de réconfort. Elle le savait discret sur ses tourments quotidiens, et le passé qui lui suivait aussi de son côté. Il préférait toujours ne pas en parler pour éviter d'être encombrant auprès des autres. La disparition de sa famille n'était pas une chose facile, Lysia gardait toujours un peu de peine pour lui, elle ressentait le besoin de faire ce qui était en son pouvoir pour lui faire oublier un temps toutes ces choses sinistres. Le tout à l'aide d'un moment de vie et d'amour simple mais puissant en émotions. Elle posa avec délicatesse ses lèvres sur son front avant de lui murmurer :

- J'ai beaucoup pensé à ce genre de moment depuis notre premier baiser, peut-être que c'est trop tôt pour continuer sur cette lancée ? Si tu ne te sens pas prêt, il n'y a aucun problème tu sais.

     Arthur n'eut pas besoin de réfléchir très longtemps et la rassura, il savait bien de quoi il avait envie, ce n'était pas quelque chose qu'il pouvait ignorer à ce stade.

- Tu m'as mis plutôt à l'aise alors je suis prêt, si toi tu es toujours d'accord bien sûr.

- J'attends avec impatience que tu me retires le reste du tissu que je porte encore, ça te va comme réponse ?

     Ils rirent.

- Par Hylia, ton cœur bat très fort... constata le brun qui posa sa main à l'endroit.

      Elle étala sa poitrine sur la sienne avant de se nicher elle aussi dans sa nuque. Son cœur martelait car ils approchaient du fameux moment scellant leur amour pour toujours. Lysia voyait cela comme un gage de fidélité ultime, l'adultère étant totalement proscrit de ses principes. De ce fait, bien qu'elle n'en doutât pas une seconde, elle voulait s'assurer qu'elle faisait le bon choix et avait donc besoin une dernière fois d'être rassurée. Car dans leurs successions effrénées de baisers et plus, elle lui offrirait sa virginité.

- Ce sera toi pour toujours, n'est-ce pas ?

     Toujours animé par sa grande bienveillance et sa compréhension, il s'empara de ses joues rougies par la chaleur de la pièce.

- Pour toujours oui. C'est promis.

     Ses mots sonnèrent comme un départ de course. L'Hylienne se sentait encore monter d'excitation, elle l'embrassa instinctivement pendant de cinq secondes d'affilée alors que l'instabilité de la mer vint les perturber un temps, mais cela n'avait même plus d'importance. Il n'y avait plus que ses désirs primaires et profonds qui parlaient.

- Alors vas-y, fais-moi tout ce que tu veux... lui ordonna-t-elle.

     Ce fut dans des yeux brûlants de désir qu'ils continuèrent leurs affaires personnelles en parfaite intimité dans cet océan sans fin. Avec la grande attention qu'ils se portaient mutuellement, ils s'expliquèrent avant tout comment fonctionnait leur corps et quelles choses il était préférable de faire et de ne pas faire. Le binôme privilégiait une communication importante, et ils n'avaient jamais passé un aussi bon moment de leur vie suite à cela. Ils s'aimaient depuis toujours. Depuis le jour de leur rencontre alors qu'ils n'étaient encore que des enfants à ce soir-là, nus dans un lit, tout avait toujours été simple entre eux. Leurs échanges, leurs jeux, il n'y avait aucune prise de tête car une alchimie particulière leur permettait de se comprendre et s'apprécier dès le début de la relation.

     Le couple passa près de trente minutes dans la chambre du bateau sheikah jusqu'à la nuit tombée. Sans même voir le temps passer. Ils étaient plongés dans une bulle increvable les séparant du monde extérieur. Ils avaient bien le droit à cela après autant d'efforts... Arthur et Lysia découvraient une nouvelle intimité qu'ils apprirent à connaître et vivre ensemble, sans le moindre jugement de leur part. La lumière bleue tamisée de leur pièce passait sous la porte et illuminait le pont du navire plongé petit à petit dans l'obscurité nocturne. En pilote automatique, la machine fusait toujours en ligne droite sans réfléchir, son autonomie était impressionnante. Grâce à elle, les deux voyageurs étaient loin de penser à leur destination, ni même au fait qu'à l'extérieur, une tempête se préparait depuis peu à l'horizon. Elle était noire et un rideau de pluie descendait jusqu'à la mer au-dessous. Et malgré toute la haute technologie du bateau, ils fonçaient droit dedans.

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