Chapitre 6

En se réveillant, Irène sentit sa tête sur quelque chose de dur. Elle releva la tête et s'aperçut qu'elle avait dormi sur les genoux de Ciel. Gênée, elle se redressa vivement en balbutiant :

"Désolée."

Ciel haussa les épaules, comme si cela lui importait peu, mais il sentit ses joues rougir. Il se sermonna intérieurement, pendant que Sebastian secouait la tête, amusé par la réaction des deux adolescents.

"Vous avez reçu de nouvelles lettres, annonça-t-il en leur lançant leur enveloppe.
_ De la Reine, murmura Irène. Que veut-elle ?
_ Une histoire de rançon, lut Ciel. Le fils unique de Lord Ackroyd a été enlevé. On demande une rançon de 5000 livres.
_ Rien que ça ? se désola Irène. Une vie humaine en vaut tellement plus.
_ C'est plutôt l'âme qui en vaut plus, fit Sebastian.
_ Si vous le dites. Nous allons donc devoir prendre le train. Youpi."

Elle se leva et lança à Lucian :

"Prépare-moi mes bagages. Nous avons un train à prendre."

"C'est immense !" remarqua Irène en regardant autour d'elle.

Une dizaine de trains attendaient au bord du quai que l'on ait fini de monter les bagages, et les passagers. Perdue dans sa contemplation, elle percuta un homme qui portait une boite en bois. Celui-ci lâcha la boite, et Irène s'excusa aussitôt en l'aidant à soulever la boîte :

"Je suis vraiment désolée, minauda-t-elle. Je suis tellement maladroite. J'espère que je ne vous ai pas fait mal.
_ Non, ça ira", fit l'homme, qui ne pouvait se mettre en colère devant une telle bouille d'ange.

Ciel et Sebastian restaient sans voix devant la performance de leur compagne. S'ils avaient su qu'elle possédait un tel talent d'actrice. Même Ciel aurait pu difficilement la gronder. Mais Irène revint aussitôt à la charge :

"Qu'y a-t-il dans cette boîte ?
_ Une momie, répondit un prêtre qui était près d'eux.
_ Une momie ? répéta la jeune fille, intéressée.
_ En ce moment, les antiquités égyptiennes sont à la mode en Angleterre, expliqua Ciel.
_ J'adore l'Egypte ! confia la jeune fille avec des yeux rêveurs. J'ai envie de voir les pyramides et le désert ! Ça doit sûrement être très joli là-bas.
_ Vous pourrez y aller un jour", assura Sebastian.

Irène baissa la tête, soudain déprimée.

"Si mon mari l'accepte.
_ Ton mari ? s'exclama Ciel. Tu es mariée ?
_ Fiancée, corrigea l'adolescente. Juste fiancée."

Irène soupira et entra dans le train, sous les yeux désolés de ses compagnons. Ciel se posait plein de questions sur la jeune fille, et en même temps, il la plaignait. Elle avait dû se sentir extrêmement seule. Même si Vladimir avait été là pour elle, il y avait des milliers de choses que le valet ignorait sur sa maîtresse. Au moins, Ciel avait Sebastian. Le garçon se promit d'être plus à l'écoute de sa compagne... Avant de secouer la tête. Depuis quand se préoccupait-il des sentiments des autres ? Il entra dans le wagon et se glissa dans son compartiment où Irène les attendait déjà.

"Je m'ennuie.
_ Le train n'a même pas encore démarré, remarqua Ciel.
_ Ça va être long."

Jamais la jeune fille n'aurait pu imaginer qu'un voyage en train serait aussi ennuyeux. Excédée, elle finit par se lever et glissa :

"Je vais marcher un peu.
_ Nous t'accompagnons", décida Ciel en suivant la jeune fille.

Ils déambulèrent parmi les wagons jusqu'à arriver à un endroit un peu particulier. Des banquettes étaient positionnés un peu partout, et les gens parlaient de tout et de rien. Irène manqua de tomber en se prenant les pieds dans un sac.

"Attention ! réagit un vieux japonais en la fusillant du regard.
_ Excusez-moi, rougit la vicomtesse. Je suis vraiment désolée.
_ Ce n'est rien, rassura une petite femme japonaise. Il est têtu.
_ Alors là, nous avons affaire à des personnages bien étranges, souffla Ciel.
_ Plus que toi et ton diable de majordome ? grimaça Irène.
_ Vous voulez des boulettes de riz ? demanda la japonaise en tendant une assiette à la jeune fille.
_ Ça ira merci.
_ Les Asiatiques n'apportent que le choléra, s'emporta un des hommes.
_ Comment ça ? Ce n'est pas vrai !"

S'ensuivit alors une bagarre générale, où tout le monde criait pour couvrir les beuglements de l'autre. Ennuyée, Irène grimpa sur une des banquettes et hurla à s'en briser la voix :

"Vous allez arrêter oui ? Posez vos derrières sur vos banquettes et calmez vos ardeurs !"

Les occupants du wagon obtempérèrent en silence et Irène redescendit de sa banquette, en tapotant sa jupe.

"Enfin un peu de calme.
_ Calmez-vous un peu ! fit un homme qui entrait dans la pièce. Je sais que vous vous inquiétez sûrement, mais sachez que le criminel qui est dans ce train est attaché et surveillé par des hommes compétents."

Et la panique se propagea dans le wagon. Les personnes se précipitèrent vers la sortie, écrasant le pauvre homme qui était entré dans la pièce. Irène remonta sur sa banquette et hurla une nouvelle fois :

"Il ne va rien se passer alors revenez vous asseoir ! Et dans le plus grand calme !"

Les fuyards revinrent, comme l'avait demandé Irène, écrasant une nouvelle fois l'homme qui se trouvait par terre. Irène l'aida à se relever en s'excusant :

"Les gens de nos jours, vraiment, il n'y a plus de respect dans ce monde de brutes."

Ciel haussa les sourcils en voyant la jeune fille jouer l'ange auprès de l'homme. Même si elle ne souriait pas, une sorte de douceur émanait d'elle, comme un puissant sortilège.

L'homme rougit et Sebastian appela son maître :

"Il est l'heure de déjeuner.
_ Déjeuner sans moi, lança Irène, soudain hésitante. Je vais... Me reposer."

Elle fila en vitesse vers les compartiments, et Ciel fronça les sourcils. On aurait dit qu'elle avait le diable à ses trousses.

Cette expression convenait très bien au cas d'Irène. Elle tenta de se retrancher dans son compartiment, mais Claude y était déjà. Elle soupira et s'assit face à lui :

"Le comte Trancy est là ?
_ Non."

Un mélange étonnant de soulagement et de tristesse s'installa dans le coeur de la jeune fille. Elle essaya de chasser ce sentiment, en vain. Je ne comprends pas, pensa la vicomtesse ne regardant ses mains. Pourquoi de la tristesse ? Est-ce que je me serai attachée à lui ? C'est ridicule, j'ai à peine eu le temps de lui parler. Je dois me tromper.

"Le comte Trancy vous attend toujours vous savez ?
_ Je suis désolée, mais la Reine avait besoin de moi.
_ Je vois, murmura le majordome. Mais que faites-vous avec Ciel Phantomhive ?
_ C'est... Mon compagnon d'aventure. Je ne sais pas si ce terme existe, mais nous faisons équipe pour satisfaire la reine."

Irène finit sa phrase avec une pointe de défi, et le majordome secoua la tête.

"De toute manière, mon maître vous attendra chaque jour jusqu'à ce que vous daignez lui rendre visite."

Claude sortit, en laissant une Irène perdue, et en proie à la confusion des plus extrêmes.

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