Chapitre 17
"Comment as-tu fait pour entrer dans le corps de Ciel ?"
"C'est une longue histoire, qui se traduit par un coup de chance inespéré, lança Irène en s'asseyant à leurs côtés. En fait, elle est plutôt courte.
_ Pourquoi es-tu ici ? demanda Ciel. Tu n'as pas à t'inquiéter pour moi. Hannah ne mangera que l'âme d'Aloïs, pas la mienne.
_ Justement, ce n'est pas pour toi que je m'inquiète."
Le brun accusa le coup. Aloïs releva la tête et croisa les yeux francs de sa fiancée. Elle se mit face à lui et expliqua :
"Je ne suis qu'une menteuse doublée d'une lâche. Je ne veux pas que tu meurs. Je veux que tu vives heureux. Ecoute, j'ai appris plusieurs choses en venant vous secourir, et... Je ne veux pas que tu meurs en gardant ces souvenirs. Et puis, sans toi, sans Ciel ou Niina... Je ne pourrai jamais vivre heureuse. Je ressens de l'amour pour toi. Par le genre d'amour auquel tu peux penser, mais un amour fraternel. Alors s'il te plaît, si tu m'aimes vraiment, rompt ton pacte avec Hannah."
Irène le savait, cette dernière phrase était celle d'une traîtresse. Elle jouait avec ses sentiments, mais elle le devait. Elle ne supporterait pas de perdre de nouveau une personne qui lui était chère. Elle réprimait à grande peine les larmes qui menaçait de couler et Aloïs la prit tendrement dans ses bras, touché par son discours. Il lui offrit un sourire triste :
"C'est le seul moyen de revoir Lucas.
_ Alors j'ai une idée."
"Hannah !" murmura Ciel dans les bras de la démone.
Il ouvrit les yeux et jeta un regard sur Sebastian et Claude, avant de reporter son attention sur le corps sans vie d'Irène.
"Où sont Niina et Vladimir ?
_ Ils ont dit qu'ils avaient une mission de la plus haute importance, et ils sont partis.
_ Je vois, murmura le comte en se tournant vers Hannah. Je veux faire un pacte avec toi.
_ Vous en avez déjà fait un, Maître.
_ Là, c'est Irène qui parle. Je veux faire un pacte avec toi ! Je vais pactiser avec Aloïs, et au lieu de dévorer son âme, je te la donnerai. Acceptes-tu les termes de ce contrat ?
__ J'accepte, fit Hannah au étonnement de tous. Mais je ne libérerai Ciel que lorsque je saurais quel démon aura son âme. Et pour cela, rien de mieux qu'un combat à mort."
"Un combat à mort ? répéta Irène.
_ C'est ridicule, soupira Ciel. S'ils savaient."
Un long silence s'ensuivit et Irène finit par chuchoter :
"J'ai tellement de questions à poser. Ciel, est-ce que... Tu as retrouvé tes souvenirs ? Est-ce que j'en fait parti ?
_ Oui, acquiesça Ciel, j'ai retrouvé tous mes souvenirs. Et tu en fais parti. Je me souviens que lorsque nous étions enfants, nous nous amusions toujours à nous rouler dans l'herbe, même si ta mère te grondait à chaque fois.
_ Alors, tu te souviens de ma mère ? demanda Irène d'une voix blanche.
_ Oui, tu lui ressembles beaucoup. Je me souviens qu'à sa mort, tu n'es plus jamais revenu au manoir. Comme si tu nous avais oubliés...
_ Ce qui est exactement le cas. Je ne me souviens plus de vous. J'ai oublié une partie de ma vie. J'ai oublié la vie que je menais avant la mort de ma mère. Comment est-ce possible ?" murmura la jeune fille en se prenant la tête entre les mains.
Elle ferma les yeux et soupira. Je dois retrouver mes souvenirs. Que c'est-il passé ? Sans prévenir, les ténèbres la noyèrent.
De l'eau. Plein d'eau. Une petite fille entourée d'eau. Elle essaya de remonter à la surface, mais une main l'en empêcha et l'enfonça un peu plus. Au moment où tenir sa respiration devenait impossible, on la ramena à la surface. Deux inspirations et on la replongea dans l'étendue glacée. Le cauchemar recommença encore et encore, jusqu'à ce que la petite n'en puisse plus, jusqu'à ce qu'elle abandonne. Elle arrêta de bouger et se laissa couler.
Irène ouvrit les yeux et prit une grande inspiration, comme si elle était restée en apnée pendant toute sa vision.
"On a voulu me noyer" lâcha-t-elle d'une voix étranglée.
Ciel et Aloïs la regardèrent, inquiets, mais Irène ne s'en préoccupa pas. Elle ferma une nouvelle fois les yeux, prête à retomber dans une nouvelle transe, mais Aloïs l'arrêta :
"Arrête Irène ! C'est trop dangereux.
_ Mais je dois savoir ! Je dois essayer ! J'ai essayé de retrouver mon souvenir le plus lointain et c'est celui où je tiens ma mère morte dans mes bras. Ne m'empêche pas de le faire !"
Irène souffla et se sentit transporter.
Une petite fille aux cheveux ébènes jouait avec des poupées, aux pieds d'une jeune femme, assise au coin de la cheminée. Celle-ci regardait l'enfant, les yeux brillants d'amour, en caressant son ventre rond. La petite finit par s'allonger en demandant :
"Chante-moi une chanson s'il te plaît !"
La jeune femme éclata de rire et prit sa fille dans ses bras. Elle se mit à chanter :
"Un petit oiseau qui s'était envolé
Affrontait vents et marées
Avec cette petite phrase dans ses pensées
Si Dieu me coupe les ailes, où pourrais-je aller ?"
La petite fille applaudit, lorsqu'on la saisit par l'arrière. Elle se retourna, surprise, et poussa une exclamation de joie :
"Père !"
L'enfant se jeta dans les bras de Claude et s'écria :
"Je suis tellement contente de vous revoir ! Votre absence a été tellement longue.
_ Et j'en suis désolée mon ange. Mais me voilà de retour.
_ Avez-vous des noms à proposer ? demanda la fillette en touchant le ventre de sa mère.
_ A voir ton sourire, j'imagine que tu en as déjà, s'amusa Claude en soulevant sa fille.
_ Elle s'appellera Alice, déclara-t-elle fièrement.
_ Et si c'est un garçon ? la taquina sa mère en se levant.
_ Il s'appellera Aloïs. C'est joli Aloïs, vous ne trouvez pas ?
_ Si mon coeur, s'esclaffa la femme. Va jouer un peu, je dois parler à ton père."
La fillette acquiesça et laissa les deux adultes seuls. Claude sourit en regardant l'enfant.
"Notre fille s'embellit un peu plus chaque jour, ma chère Judith.
_ Mais elle me fait un peu peur, soupira sa femme. Irène a parfois des comportements étranges.
_ Que fait-elle ?
_ Elle mord.
_ Mord ? répéta Claude. Comment ça ?
_ Elle me mord moi, et lorsqu'elle voit les marques qu'elle m'a faite, elle éclate en sanglot et me supplie de la pardonner, avant de recommencer de plus belle le lendemain."
Elle montra au démon les marques violacées sur ses bras.
"Est-ce normal pour une enfant de cette âge ? s'inquiéta Judith. Elle n'a que cinq ans, peut-être qu'elle ne comprend pas vraiment ce qu'elle fait ?
_ Ou peut-être qu'elle est jalouse de l'enfant que tu portes ? C'est une façon comme une autre de se faire remarquer.
_ Mais elle a l'air d'être tellement impatiente d'être grande soeur !
_ Les humains sont difficiles à comprendre, et les enfants encore plus, la rassura Claude. Montre-lui que tu l'aimes autant que ton enfant à naître.
_ Notre enfant" corrigea Judith en l'enlaçant.
Ils échangèrent un baiser tendre, et éclatèrent de rire en voyant la grimace de dégoût qui s'affichait sur le visage de leur fille. Irène les regarda avec de grands yeux avant d'éclater de rire à son tour avec ses parents, heureuse et épanouie.
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"Que se passe-t-il ? s'inquiéta Claude en regardant sa femme faire les cent pas dans le salon.
_ Irène est de plus en plus ingérable, gémit Judith en se tournant vers lui. Elle prend la colère pour des choses futiles, et devient de plus en plus incontrôlable. Les domestiques m'ont donné leurs démissions hier soir et sont partis ce matin. J'ai peur d'elle. J'ai peur de ma propre fille."
Judith baissa la tête, les larmes aux yeux.
"Que dois-je faire ?
_ Va la voir, tenta Claude, et demande-lui pourquoi elle le fait.
_ Tu viens avec moi ? murmura Judith.
_ Tu es beaucoup plus proche d'elle que moi. Vas-y, je t'attends."
Judith hocha la tête et sortit de la pièce. Plusieurs minutes plus tard, un hurlement de terreur résonna dans la maison et Claude se dirigea vers le cri inquiet. Il venait de la chambre d'Irène. Le démon ouvrit la porte et esquiva de justesse la fillette, qui grogna et se jeta sur lui. Il l'attrapa par le cou et se figea en croisant ses yeux rubis. Il lança un regard dans la chambre et ses yeux se posèrent sur le corps sans vie de sa femme. Par automatisme, il serra le cou de l'enfant pour l'empêcher de bouger, mais des cris suppliants le stoppèrent :
"Père, arrêtez ! Vous me faites mal."
L'enfant le regardait, ses yeux bleus brillants de larmes.Elle avait l'air si fragile, si innocente. A cette pensée, le démon prit la petite fille dans ses bras et ils finirent par se retrouver face à un lac. Irène regardait la scène, les yeux écarquillés.
"Pourquoi sommes-nous ici Père ?"
Claude serra des dents et plongea la fillette dans l'eau, avant de la ressortir quelques secondes plus tard. Il recommença plusieurs fois, et lorsque la brunette cessa de bouger, il la porta jusqu'au manoir. Il l'allongea sur le sol et lui murmura :
"Tu n'as jamais eu de père. Ta mère s'est effondrée dans tes bras, tu ne l'as pas tuée. Tu n'as rien fait. Il ne te reste plus que ton oncle comme seule famille. Plus personne ne tient à toi. Je te laisse la vie sauve, un démon te protégera, je t'enverrai des domestiques, mais ne t'attends pas à plus de ma part. A partir d'aujourd'hui, tu n'es plus ma fille."
La petite fille ouvrit les yeux et regarda le corps de sa mère :
"Mère, mère ! Réveillez-vous !"
Trop occupée à secouer sa mère, elle ne remarqua pas l'araignée qui s'éloignait.
"Irène ! Irène !"
Des larmes coulaient le long des joues de la brunette et Aloïs la serra dans ses bras. Elle balbutia :
"J'aurais pu avoir une famille.
_ Qu'as-tu vu ? demanda Ciel. Qui a tué ta mère ?
_ C'est moi. J'ai tué ma propre mère."
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Moi : Et voilà un nouveau chapitre d'écrit avec un gros flashback sur le passé d'Irène ! Mais je me demande si je vais réussir à garder le rythme de 2 chapitres par semaine, parce que le brevet est dans moins d'un mois, et qu'il faut que je révise.
Niina : Parce que tu commences à réviser ton brevet dès maintenant toi ?
Moi : Non, il est probable qu'une semaine avant le brevet, je me dise "Et si je commençais à réviser ?" Mais bref, ma vie n'intéresse personne. Je tenais juste à vous remercier toutes (ou tous) pour vos votes, vos commentaires et vos lectures sur ce livre. Et je tiens à remercier aussi NinonTuaillon , c'est grâce à elle que cette histoire n'est pas encore partie en steak (ou pas trop). Je vous adore ! <3
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