~5~ Renald
Le docteur sortit du taxi aérien en regardant l'immense place donnant sur l'hôpital dans la cité de Geredon chez lui, dans le royaume de Delaria.
-Mon Dieu, ne put-il s'empêcher de dire en constatant l'immense foule qui s'était pressée devant le bâtiment, formant une masse informe plutôt qu'une longue fille d'attente. Tous se mettent à tousser, ils ont beau avoir des mouchoirs, les plus fortunés des masques, mais ce sont bien des tâches noires que l'on distingue. Un sang pollué.
-56 Xandors, Monsieur, et dépêchez-vous, j'aime pas trop traîner ici, ce virus peut nous toucher à tout moment !
-Aux dernières nouvelles ce n'est pas un virus comme les autres, répondit-il machinalement, ne pouvant pas s'empêcher de regarder la scène. Le vrai mal est cette pollution et c'est uniquement l'air lui-même qui nous contamine non une personne.
-Z'êtes médecin ? En tout cas je préfère pas prendre de risques, j'ai d'autres vols à faire, donnez moi le prix, c'est tout ce que je demande !
-Oui, oui, lui dit-il en fouillant dans ses poches, lui donnant une infime partie de l'argent que lui avait donné Alistair Ormond.
Une fois le chauffeur partit, il se retourna devant l'hôpital de Geredon. Son hôpital. Là où il avait passé une part importante de sa vie. L'hôpital l'avait forgé. C'est grâce à lui qu'il avait pu saisir l'importance de chaque vie humaine. C'est aussi là qu'il avait tissé des liens. Des collègues devenus amis. Il ne pouvait laisser ainsi sa vie. Pas comme ça. Pas en m'enfuyant vers un voyage doré. En sauvant ma peau. Comme un lâche, en somme. Alors il s'avança lentement puis il finit par un pas rapide, déterminé. Renald écarta les hommes, femmes, enfants qui s'y trouvaient pour s'avancer vers l'entrée.
-Mais vous vous prenez pour qui ? Lança l'un d'eux, s'apprêtant à se jeter sur lui.
Renald s'aperçut avec frayeur que les veines de l'homme qui l'avait apostrophé étaient noirs. Celui-ci était en sueur et ses yeux roulaient follement dans ses orbites.
Une femme s'écria alors :
-Je le reconnais, il est médecin, il travaille ici, laissez-le passer !
L'ancien médecin hocha furtivement la tête avant que la foule ne s'écarte, lui faisant une allée vers les portes de l'hôpital. Celles-ci, vitrées, étaient fermés. Il toqua alors vivement, espérant croiser le regard d'un collègue?
-Alors, docteur, on a perdu les clefs ? Lui cria un homme d'une soixantaine d'année, le visage boursouflés et mangé par des pustules. Les veines de ses yeux étaient complètement noires, rendant le contact visuel avec cet homme déstabilisant.
-Mais c'est parc'qu'il est pô docteur, voyons ! S'énerva une vieille femme dont Renald n'aurait pu lui donner d'âge tellement son visage était parcouru de rides. En tout cas elle n'a pas l'air très contente, pensa-t-il comiquement.
-Docteur mon cul ! Faisons-lui la peau ! Hurla une personne qui fut rejoint par d'autres personnes, l'allée se refermant de plus en plus.
Mais ouvrez cette porte nom de Dieu, paniqua Renald en donnant de grands coups sur la vitre avant qu'un infirmier qui couraient dans le couloir s'arrêta pour ouvrir automatiquement les portes. L'ancien médecin se précipita dans l'atmosphère suffocante de l'hôpital avant que les vitres ne se referment d'un claquement de doigt.
-Renald..., pâlit l'infirmier qui avait couru à lui.
-Feneck, content de te revoir, mon vieux ! Les Delarians ont bien changé depuis la dernière fois, ils étaient sur le point de me réduire en bouillie !
-Renald tu...
-Et où est Korinne, pourquoi il n'y a personne à la réception ?
Keneck regarda sa montre soupira et lui dit :
-Korinne nous a lâché, elle a plus donné de signes du jour au lendemain, et m'est avis que personne ne veut travailler à l'hôpital maintenant, elle n'a pas de successeur et on est tous débordé, c'est pire... Beaucoup pire qu'avant, soupira-t-il en regardant à nouveau sa montre.
-Heureusement que je suis là, alors !
-Non, non, Renald tu pars au plus vite, prends les sorties de secours pour éviter de retrouver la foule.
-Mais...
-Renald. Fenneck ferma les yeux en tendant ses mains comme pour se contenir. Tu es... recherché. Des soldats et des gens... assez douteux sont venues et ils voulaient recueillir des informations sur toi. Ils disaient que cela rendrait un grand service à l'Empire. Ecoute je sais... on sait que tu t'es échappé de prison après avoir été condamné pour haute trahison...
-Fenneck tu penses bien que...
-...Mais je me fous de ce qu'ils ont dit je te fais confiance, je sais que tu voulais alerter l'Empire sur la pollution mais t'es recherché Renald, tu peux plus revenir ici comme ça même si ton aide serait précieuse. Alors oublie nous, oublie ta famille pour un temps et part maintenant, d'accord ?
Le visage de Renald exprimait le plus profond désespoir mêlé à de l'incompréhension avant de finalement hocher la tête.
-Passe par les sorties de secours c'est plus sécurisé, tu les connais maintenant je te fais pas visiter.
L'ancien médecin posa sa main sur l'épaule de son collègue avant de conclure :
-Merci. Merci pour tout.
-Allez maintenant va. J'ai des patients qui m'attendent, dit-il d'un air amusé.
Celui-ci couru alors vers les portes de sorties situé derrière l'accueil. Il soupira un bon coup avant de les ouvrir. La lumière l'inonda tellement qu'il dû se protéger de sa main. Quand ses yeux s'habituèrent à cette forte luminosité. Bon, je vais pas voler une des voitures de ce parking, c'est pas que je ne suis plus médecin que je perds mes valeurs. Il traversa alors l'immense terrain remplies de voitures à terre avant d'atteindre le trottoir en attendant un taxis. Renald dû attendre pas moins de 10 minutes avant que l'un d'eux daigne s'arrêter en se mettant à sa hauteur.
-Où est ce que je vous emmène, monsieur ?
Il monta d'abord dans la voiture avant de sortir les papiers que lui avaient donné Alistair. Sur l'un d'eux figurait l'adresse de son nouveau logement. Je pourrais aller voir ma fille. Cela fait tellement de temps. J'ai pas envie de finir mes jours en prison ou en tant que fugitif sans revoir son visage. Puis il se ravisa. Non, trop dangereux pour elle et on ne se parle plus depuis trop longtemps.
-Il faudrait aller à l'extrême Sud de Delaria dans un village nommé Metenor, la cité la plus proche est celle de Hix à 50 lieues.
Le chauffeur le regarda longuement dans le rétroviseur avant de déclarer :
-Cela fera un coup élevé pour un très long voyage. Monsieur dispose-t-il de 120 Xandars ?
-Oui, bien sûr.
-Alors je préfère les avoir de suite, comme une garantie pour un bon voyage, si monsieur n'y voit pas d'inconvénients.
-Très bien, très bien, dit-il nerveusement en sortant son portefeuille pour comptabiliser ses billets.
Puis le vaisseau partit, lancé telle une flèche rejoignant les autoroutes aériennes. Le voyage faisait en tout pas moins de cent lieues qui avec un taxi pouvait être fait en 4 heures sans compter les pauses mais le chauffeur savait faire passer le temps :
-C'est terrible ce qu'il se passe, monsieur. Cette époque me fait regretter de ne pas avoir choisi un métier plus utile. Voyez-vous avec ce virus cette pollution que sais-je. Il soupira avant de rajouter : Si j'étais médecin, j'aurais pu être utile à tous ces gens mais non j'ai honteusement fui ces 12 ans d'études.
-Oh mais vous rendez également beaucoup service en transportant du monde ! Lui fit-il remarquer, pensant à son escapade.
-Vous croyez ? Lui demanda-t-il en le regardant dans le rétroviseur intérieur. Tant mieux si je vous rend là un service important. Remarquez ça peut sauver des vies de fuir ces cités infestés de malades ! Ricana-t-il.
-Je ne fuis pas, dit-il nerveusement. Et puis... Ca n'est pas contagieux. En tout cas aux dernières nouvelles c'est la pollution qui tuent directement, on a trop fantasmé sur une épidémie mais ce n'est pas exactement ça. Un virus aurait un vaccin. Là le seul vaccin viable c'est d'arrêter cette foutue pollution qui nous tue tous.
Après l'avoir sagement écouté, le conducteur lui demanda intrigué :
-Vous êtes médecin ? Vous avez l'air de vous y connaître.
-Oui, répondit-il machinalement avant de se rattraper. Enfin je l'étais mais ça n'a plus aucune importance.
-Pourtant ça n'est pas les médecins qui manquent vous pourriez vous présenter n'importe où on vous prendrait monsieur. Monsieur... ?
Tu es un fugitif, se rappelât-il.
-Zelmane, répondit-il après une pause. Et tu es aussi un très mauvais menteur. Et vous ?
-Barionomane. Oui je sais c'est long mais je ne serais pas offusqué si vous l'oubliez. Je pense que c'est ce que voulaient mes parents, qu'on m'oublie ! Dit-il en riant franchement.
Renald sortit de la poche intérieure de son manteau un dessin représentant sa fille. C'était lui qui l'avait dessiné. Quand mon travail n'avait pas encore prit entièrement ma vie, pensa-t-il amèrement. Elle a 12 ans sur cette photo. Si belle et insouciante. Des cheveux blonds étincelants, des yeux bleus pétillants de vie et un sourire qui voulait croquer chaque instant de vie. A l'époque on était encore complice, dès que mon travail était terminé on passait notre temps ensemble on... On vivait. Je me souviens très bien le jour où je l'avais dessinée. Elle ne pouvait pas tenir en place. Elle gesticulait sans arrêt, riant en me faisant des grimaces avant de se jeter sur moi pour me déconcentrer. Tant bien que mal, j'ai su lui faire son portrait et je me rappellerais toujours de cette émerveillement qu'elle a eu quand elle a vu ce dessin. Elle était époustouflée et... fière. Elle était fière de son père. Mais c'était il y a dix ans de cela, pensa-t-il amèrement en remettant le dessin dans sa poche. Je suis devenu trop absent par mon travail alors qu'elle grandissait si vite. Je ne la reconnaissais plus.
L'ancien médecin s'endormit alors. Il ne fut réveillé que lors de la fin du trajet par le chauffeur.
-Monsieur Zelmane, on est arrivé, vous pouvez descendre !
Renald émergea avant d'observer le milieu dans lequel ils se trouvaient. Des montagnes escarpées sur lesquelles poussaient tant bien que mal des immeubles modestes de deux ou trois étages avec d'autres bâtiments. A leur pied de part et d'autre d'un fleuve s'entassaient des immeubles qui semblaient anciens, d'un autre temps avec une toiture et au rez-de-chaussée des magasins. Aucun gratte-ciel, aucun bâtiment qui me fasse tordre le coup pour observer où il finit. Il y avait même une place avec en son centre une fontaine où se dressait une statue d'un homme qui faisait trois fois la taille habituel. Il avait une couronne de cornes et tendait les bras vers le sol comme pour accueillir les habitants de ce village. Il y a même une église ? Moi qui croyait que ça n'existait plus que dans les livres d'Histoire. Décidément, Alistair m'a choisit un village situé hors du temps.
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