~36~ Kandall
Des centaines de vaisseaux encerclaient la péninsule où se trouvait la cité de Térébor, à quelques lieux seulement de Kandall. A côté du président d'Alcatram se tenait Sotrace que Kandall avait fait roi de Verradien et qui était également son général en chef des armées. Terkenbec scrutait nerveusement l'horizon, lui qui était devenu roi de Midor de la même façon : en ayant eu les faveurs de Kandall. Porltan Torcatram regardait quant à lui son cousin, inquiet. Starken, un de ses plus anciens soldats et restant toujours discret, avait gravit les échelons un à un pour devenir son plus fidèle lieutenant.
-Mes amis, je crois qu'il est l'heure de déclencher l'ultime bataille, déclara d'un ton solennel celui qui s'était imposé comme chef de l'Alliance tout en scrutant Terebor à travers la vitre du vaisseau.
Aussitôt, Starken appuya sur une commande : un bruit semblable à une lourde trompette résonna à travers le ciel de Paumos. Le signal était lancé, tous les vaisseaux quittèrent leur poste pour s'avancer d'une démarche lente vers la capitale de Xandora. Kandall se dirigea alors vers une salle annexe où se trouvait une femme ligotée à une chaise qui malgré les coups et la fatigue n'avait rien perdu de sa beauté.
-Scrute bien ce qui se passera, ce sera une date clé dans l'histoire. Tu verras à quel point tu n'as pu réaliser ce que tu souhaitais. Sans ta traîtrise on aurait pu régner ensemble. Quel gâchis, dit-il d'une pointe de dégoût non sans amertume à cet autre avenir.
-L'histoire ne retient que les vainqueurs, dit-elle à voix basse comme seul commentaire.
-Comment ?
-C'est ce que mon père aimait à dire, si l'on s'en fit à cela, on ne retiendra pas le nom de Follet dans les générations futures.
-Oh si Alaigne. Les gens sauront toutes les ignominies que vous avez fait. Ils s'en souviendront pour ne pas répéter les mêmes erreurs. Ton père a perpétué un génocide sur Atlantiss, il a commit des massacres sur Darkatras. L'histoire le retiendra comme un monstre, sois en sûr j'y veillerais. C'est lui qui a déclenché cette guerre. La mort de mon père n'était qu'un prétexte, rajouta-t-il comme pour lui-même.
-Es-tu si réellement triste ? Le questionna-t-elle en tendant la tête vers lui.
-Comment ose-tu ?
-C'est par sa mort que tu t'installeras peut-être sur le trône de Xandora. C'est par sa mort que tu règneras peut-être pour installer ta politique écologique. N'est-ce pas ce qu'aurait souhaité le défunt Aldresdan ?
-Je t'interdis de prononcer son nom !
-Tu penses sincèrement que tu bâtiras un avenir meilleur ? Regarde autour de toi, ces Rois que tu as toi-même couronné, tu penses révolutionner les choses mais tu reproduis à l'identique le schéma qu'ont tracé ceux qui ont régné avant toi !
Kandall leva aussitôt le poing et s'apprêta à la frapper mais il s'arrêta juste avant, constatant le sourire malicieux sur celle qui l'avait trompé.
-Non, dit-il en rabaissant son poing, je ne suis pas un roi ni un empereur, ce sera à la population d'en décider. Mon rôle consiste à leur en donner les clefs.
-J'ai hâte de contempler ce spectacle de mes yeux, s'écria-t-elle en le voyant faire demi-tour pour quitter la pièce. Une nouvelle ère commencera ! Le temps se comptera depuis ta glorieuse victoire ! Puis elle partit d'un rire.
En arrivant dans la salle de contrôle, il remarqua tout de suite les visages inquiets.
-Que se passe-t-il ? Demanda-t-il, oubliant aussitôt les tracas que lui avait causé Alaigne Follet.
-Sur les gratte-ciels on dirait que... commença Sotrace, les yeux plissés à l'horizon.
-Ce sont des canons, le coupa Porltan. Mon cousin, ils ont incrusté des canons dans certains gratte-ciels.
Kandall accouru aussitôt pour contempler par lui même. Sur une trentaine de tours au moins qui faisaient barrage devant le palais de Térébor, on pouvait discerner que leur peau avait été enlevé à certains endroits, ne révélant que la structure. Calé entre des poteaux et poutres en acier, le nez des canons sortait par intervalle, dressé vers le ciel. Vers nous. Mon dieu que faire. Tous le regardait, attendant sa réaction.
-Ils prennent la population en otage, dit finalement Portlan, ce que tous n'osait dire à haute voix. Si on les détruit, on massacre des millions d'innocents.
-Je sais que ça a toujours été la ligne rouge à ne pas franchir, lui dit-il comme pour lui rappeler qu'il n'avait pas changé sa ligne de conduite.
-On ne vaudrait pas mieux qu'eux si on commettait les mêmes massacres !
-Mais que doit-on faire alors ? S'impatienta Terkenbec.
-Dois-je donner l'ordre aux vaisseaux de s'arrêter ? Demanda Sornac, s'efforçant d'être impassible.
Le conseil que lui avait alors donné Alistair lui revint alors en mémoire : "La population n'est pas votre ennemi. Elle l'est que si vous lui tirez dessus." Il essayait de me prévenir, comprit-il. Dois-je me résoudre à renoncer ? Après tant d'efforts, tant de sacrifice, faire demi-tour et tourner le dos à l'ennemi ? C'est là ce que l'histoire retiendra ?
-Kandall, plus le temps passe, plus nous serons à porté de tir de ces canons... fit remarquer Portlan.
-Je sais. Nous faisons demi-tour, suffisamment loin pour être dans une zone de sûreté.
-Mais nous n'allons pas abandonner ! S'emporta Sotrace. Il faudra bien mettre hors d'état de nuire ces canons !
-On pourrait assiéger la cité, bloquer toute circulation. D'ici un mois, elle sera contrainte de se rendre, avança son cousin.
-Plus le temps passe et plus notre armée est décimée, la maladie ronge nos rangs, ce sera un avantage à l'ennemi qui compte sur ces remparts improvisés ! S'exaspéra Sotrace.
-Starken a vu le sang noir se répandre parmi nous, déclara Starken jusque ici silencieux. Un mois et la moitié de nos soldats ne sera plus en état de se battre.
-Je prends acte de ce que vous avez dit. Il ne m'apparaît qu'une solution si l'on veut gagner vite : contourner la cité et les attaquer par les côtes !
Chacun se regarda alors, attendant une autre suggestion mais devant le mutisme général, Kandall fit signe à Sotrace de transmettre les ordres. Au moment où les vaisseaux entamaient leur manœuvre, une explosion se fit sentir.
-Nous avons perdu un de nos vaisseau ! S'écria le général en chef en se précipitant dans la salle. Nous sommes dans leur porté !
-Vite, dépêchons de partir d'ici ! Déclara Kandall, quelque peu effrayé par la puissance de ces canons.
Quelques minutes plus tard les vaisseaux furent lancés à pleine puissance.
-Tu ne trouverais pas ça étrange qu'ils n'aient pas prévu qu'on les attaquerais par la mer ? Demanda son cousin, inquiet.
-Le palais borde la mer, ils ne peuvent pas le défendre de la même façon. On dit "ils" alors que cette idée vient de cette envoyée des enfers...
-Ne parle pas comme ça de la vieille religion....
-Elle est démoniaque, Porltan, prendre la population en otage, quel souverain ferait ça ? Elle veut régner sur des cendres ?
-Elle sait qu'elle a perdu, lui dit-il. Elle veut tomber en entraînant le plus de monde possible. Y compris toi.
-Elle ne nous aura pas, répliqua-t-il en lui posant une main sur son épaule. Sois-en assuré !
C'est alors qu'une nouvelle déflagration se fit entendre. Alertés, ils demandèrent à faire revenir les généraux. Quand Kandall vit le visage blême de Sotrace, il sut qu'il allait avoir la réponse à la question : "Ont-ils prévu qu'on attaquerait par la mer ?"
-Une flotte nous a prit par revers, impossible de leur échapper !
-Nous sommes coincés entre eux et les tours de canons ! Comprit Terkenbec, qui faisait un effort visible pour ne pas céder à la panique.
-Sont-ils nombreux ? Demanda-t-il.
-Légèrement inférieurs aux nôtres mais ils nous forcent à reculer vers la cité !
-Ils ont envoyé toute leur armée dans cette mission ?
-D'après les insignes sur les vaisseaux, c'est bien la flotte de Nysteria que l'on a en face de nous !
-Seigneur, ne pu s'empêcher de lâcher Porltan.
-Ils ont encore leur armée principale bien au chaud à Térébor, constata Kandall d'un soupir.
Alors que les tirs redoublaient d'intensité, Kandall les encouragea :
-Nous ne nous laisserons pas faire et combattrons jusqu'au bout, surtout gardons nos positions, ne reculons pas !
Pendant des heures, le combat fit rage. Malgré les précautions voulu par l'Alliance, les dégâts sur les civils furent considérables. De nombreux vaisseaux, aussi bien nystériens que ceux des alliés chutèrent sur les bâtiments. Les incendies gagnaient à chaque instant en intensité, si bien que les fumées obscurcirent le ciel, rendant difficile le repérage de l'ennemi. Pour un vaisseau de l'alliance qui tombait, trois de la flotte de Nysteria faisaient de même. Mais la flotte ennemi avançait si bien que la flotte de Kandall se retrouva de nouveau à portée de tir des canons de Térébor. Et alors le massacre commença. L'alliance devait répliquer aux assauts de Nysteria tout en évitant les tirs des canons qu'elle avait dans le dos. Le rythme était insoutenable, d'autant plus que Kandall avait donné l'ordre formel de ne pas tirer sur les tours. Les vaisseaux se faisaient donc abattre comme des vaches dans un abattoir, sans aucune résistance.
-On tombe comme des mouches ! Hurla Sotrace pour couvrir le bruit des assauts.
Même dans le vaisseau principal, le plus imposant jamais construit, les tueries se faisaient entendre comme si elles se passaient sous leurs oreilles. A travers la vitre, Kandall voyait la fumée des incendies au sol qui glissait vers Térébor. Le vent, comprit-il. Notre seul secours.
-Donnez l'ordre de poser nos vaisseaux au sol ! Lui cria-t-il.
-Nous ne nous rendons pas ? Demanda Sotrace, inquiet.
-Non mais le combat au sol est la dernière chose que nous pouvons faire. La fumée des incendies nous couvrira même jusqu'au palais ! Les canons des tours ainsi que les vaisseaux ne pourront se permettre de nous attaquer au risque de faire effondrer leurs propres infrastructures !
-Es-tu sûr de cela ? Demanda Portlan, un sourire aux lèvres.
-Nous n'avons plus le choix, lorsque nous sommes aveugles, la meilleure chose à faire est de s'affronter au corps à corps !
-Je savais que tu prendrais les bonnes décisions, lui dit-il souriant. Nous nous battrons côte à côte.
-Nous le ferons à la manière d'Alcatram, à pieds l'épée dans la main. C'est comme ça que nous vaincrons l'ennemi !
Kandall était fier de finir cette guerre ainsi. Non coincé dans un vaisseau mais sur le champ de bataille à guider tout un peuple, comme l'auraient fait ses ancêtres. Père, j'aimerais tellement que tu sois là pour nous voir triompher, Porltan et moi, pour nous voir appliquer ta cause, ce pour quoi tu t'es battu et ce pour quoi tu es mort. Il en était toujours dans ses pensées lorsque quelques instants plus tard, la coque arrière de leur vaisseau fut déchiquetée dans un bruit assourdissant. Kandall et tous ceux qui se trouvaient à côté de lui furent projetés vers l'avant. Une lumière aveuglante les engloutit par la suite.
Quand il reprit connaissance, il se retrouvait à terre, coincé entre les décombres, un morceau de métal lui bloquant les jambes. La tête en sang et à moitié assourdis par le bruit, il émergea doucement. Autour de lui, des cris et des soldats qui couraient dans tous les sens. L'un d'eux le repéra.
-On a trouvé Torcatram ! Cria-t-il, demandant de l'aide. D'autres accoururent alors et soulevèrent dans un effort commun la tôle qui le bloquait.
-Vous n'avez rien de cassé, monsieur le président ? Vous pouvez remuer vos jambes ?
-Oui, ça va ça va je peux marcher...
-Je crains qu'il serait plus sage qu'on vous...
Kandall s'agrippa alors à lui et lui demanda froidement :
-Où est mon cousin, Porltan Torcatram ?!
Devant le visage paniqué du soldat, il se mit lui-même à fouiller les décombres de cette immense carcasse, bientôt rejoint par toute une troupe. C'était un vaisseau qui aurait pu contenir le volume de plusieurs gratte-ciel à lui tout seul. Chercher une personne parmi ses restes était une tâche ardue. Mais Kandall n'aurait pas continuer le combat sans trouver son cousin. Alors les soldats se mirent à chercher, sachant que pour l'instant ils étaient couverts par la fumée mais que les vaisseaux ennemis n'allaient pas tarder à se poser pour continuer le combat. C'est alors qu'un des soldats cria. Kandall se précipita vers la source de cet appel et manqua de chuter quand il le vit. Porltan. Son visage émergeait des décombres. Une main sortait également, comme pour montrer le ciel d'où ils avaient chuté. Des barres de fer lui transperçaient le torse. Il avait les yeux fermés, le visage couvert de suie. Il semblait presque apaisé, comme si tout s'était passé si vite qu'il n'avait eu le temps de penser à la mort, le sourire aux lèvres, la dernière image que son cousin avait eu de lui vivant.
C'en fut trop pour lui. Il tomba à genoux sur la ferraille, ignorant la douleur. Ignorant les soldats qui faisaient cercle autour de lui. Starken se joignant à eux, ému par cette scène qui s'offrait à lui et la perte douloureuse de Kandall. Pour ce dernier justement, c'était un monde qui s'écroulait. Le dernier vestige d'un passé nostalgique. Le dernier de sa famille qui gisait devant lui. Il n'aura pas eu le temps de lui dire au revoir. Il n'aura pas pu lui laisser des derniers mots, comme sa nièce et son père avant lui. Ils sont maintenant tous morts dans cette guerre. Il avait connu énormément de pertes jusque là, mais dorénavant il avait le sentiment d'avoir perdu tout ceux qui lui étaient chers. Ne restait plus qu'une armée qu'il avait crée. C'est pour eux qu'il se battait ? C'est pour eux que sa famille et l'immense majorité de son peuple devaient mourir ? Un peuple qui n'avait cessé de lui faire obstacle. Il s'était juré de pleurer ses morts une fois la guerre remportée. Le chagrin était insurmontable, il essaya alors de le couvrir, de le cacher par une émotion qui serait plus forte encore. Pour l'heure ne lui venait que la colère. Alimenté par la haine absolue qui déferlait tout sans retenue. Il se redressa après avoir caressé le visage de son cousin et se retourna vers Starken.
-Visez les tours, lui dit-il simplement avant de le dépasser et de fendre la foule qui s'écartait à son passage.
Son fidèle lieutenant s'attarda un instant sur le visage de Porltan puis fit demi-tour et alla répéter l'ordre. La plupart des soldats sortaient de leurs vaisseaux pour se préparer à un affrontement à terre en rang serré. Les autres restèrent dans ces machines de combat et s'élevèrent. D'abord doucement, puis l'un d'entre eux tira à bout portant un missile sur un des canons d'une tour. Celui-ci n'eut même pas le temps de répliquer que la structure interne du gratte-ciel, touchée, fit ployer celui-ci qui s'effondra sur lui-même dans un vacarme assourdissant, noyant les hurlements des habitants. Une partie de la tour alla percuter une voisine qui telle un effet domino l'éventra également dans une pluie de feu. Kandall ne rendit pas le regard à ses soldats qui, inquiets, se demandaient s'ils devaient se réjouir ou non. A travers la fumée céleste ils purent voir comme un éclair puis le vaisseau de l'alliance alla s'effondrer au sol non loin de là. Un autre canon s'en était chargé. Désormais pour lutter contre leur survie, une cinquantaine de vaisseaux répliquèrent. Par delà le dôme de fumée qui s'était formé, Kandall pu voir des rayons de lumières qui révélaient une tour en feu à un instant puis un vaisseau laissant une traînée pour disparaître derrière les décombres à un autre.
-Certains vaisseaux de Nysteria repartent vers le ciel pour attaquer les nôtres ! Hurla un lieutenant qui venait à lui.
Se retournant, Kandall ordonna de fondre vers ces vaisseaux pour les éviter de décoller. Il alla se précipiter vers eux quand un bruit sourd le fit se retourner. A travers un paysage poussiéreux, il distingua une flotte filant à travers les tours. L'armée de Paumos, pensa-t-il en serrant les dents.
-Ils ne nous viseront pas au risque de détruire leurs propres tours ! Clama-t-il pour encourager ses troupes restées auprès de lui qui se retrouvaient nues devant ces machines de guerre.
C'est alors qu'ils virent nettement un canon de l'un d'entre eux se diriger vers le sol, vers eux. Il comprit, comme tous les autres, que leur position terrestre n'allait en rien les épargner. Certains se mirent alors à courir, n'obéissant qu'à leur survie. Puis les missiles plurent. C'était un véritable déluge qui remontait l'avenue où se trouvaient les troupes de Kandall. La terre se souleva alors pour remonter vers le ciel, tout cela jusqu'à arriver à quelques pas du chef de l'alliance avant qu'il se fasse engloutir par le chaos. Mais les attaques n'étaient pas allées plus loin. Les vaisseaux de Paumos s'étaient arrêtés quand ils virent une tour s'abattre sur leur première ligne, touché par un vaisseau de l'alliance. Ils voulurent alors s'éparpiller mais ils étaient trop bas et se retrouvèrent piéger entre des rangées de gratte-ciels. Toute la première ligne fut alors balayée par cette tour avant qu'elle ne vienne s'écraser de tout son long dans l'avenue, créant un barrage entre les deux armées.
Les soldats des multiples armées de l'alliance s'étaient alors arrêtés dans leur course afin de se retourner, espérant voir un signe de leur chef de guerre. L'un d'eux finit alors pas s'approcher timidement vers l'endroit où la terre avait été retournée par les missiles. Il put distinguer après s'être un temps adapté à cette poussière qui affaiblissait la vue d'un corps dans ce qui pouvait s'apparenter à un cratère.
-C'est Kandall ! Hurla-t-il à ceux restés derrière. Aussitôt tous finirent par accourir pour faire cercle autour de lui. Son corps était à moitié mangé par la terre mais il restait intact, comme préservé.
-Doit-on continuer la guerre ? Demanda un soldat tout en regardant le corps.
-Finissons ce que l'on a commencé, lui répondit une voix.
Elle venait de ce corps qu'ils croyaient vide. Mais un esprit avait résisté. Difficilement, mais sans l'aide de personne, Kandall se releva, leur montra à tous qu'il avait été comme miraculeusement épargné. Certains le regardèrent comme une figure mystique, quasiment divin. "Il est revenu d'entre les morts", entendit-il dirent certains, se rappelant quelques passages de la vieille religion d'Alcatram.
-Le feu de l'ennemi ne pourra stopper nos valeurs, leur dit-t-il. Il retira alors son épée qu'il gardait toujours sur lui pendant les batailles et désigna les vagues contours du palais de Térébor au lointain. Nous irons les chercher jusque dans leur terrier s'il le faut ! Puis il pointa sa lame vers le ciel en feu et clama : Pour une nouvelle ère ! Pour un nouvel âge !
Ses soldats, enivrés par ces paroles, levèrent à leur tour leur poing vers le ciel. Kandall tourna alors son épée vers la tour effondrée qui les protégeait de l'ennemi et fonça dans un cris de guerre, accompagné par la moitié de l'armée de l'alliance. Tandis que le reste tirait sur les vaisseaux de Nysteria posés au sol et affrontaient leurs soldats, Kandall et les siens partaient dans un affrontement au corps à corps, traversant les ruines de la tour enflammée qui leur barrait la route. Sur leur passage des cris de personne en deuil ou blessé résonnaient, mais les soldats, dans une folie guerrière, ne les entendaient ni ne les voyaient. Il couraient, enjambaient ou marchaient sur des corps qui parfois n'en étaient pas encore, certains se faisaient même prendre dans la structure qui s'effondrait toujours. Mais malgré tout ça, ils continuaient, traversant les flammes, serpentant à travers les carcasses des vaisseaux ennemis pour arriver sur leur champ de bataille. L'ultime bataille.
Les soldats de Paumos avaient à peine quitter leur vaisseau qu'ils se faisaient embrocher par des guerriers aussi bien alcatramiens, kratagniens, midoriens et bien d'autres encore. La vision dans les deux camps étaient quasiment nulle. Il y avait tellement de poussière, les tours au loin se faisant encore abattre, que l'on ne voyait l'ennemi que quand il pouvait nous toucher directement. Parfois on tuait un homme sans même savoir dans quel camps il se situait. La boucherie était totale. Kandall criait à ses soldats d'aller de l'avant, de tuer les pourritures de l'empire mais on ne l'entendait à peine, entre les explosions et les hurlement de ceux qui agonisaient. La peur de la mort avait totalement quitté Kandall, remplacé par une haine et une ivresse du combat. C'est par le combat qu'il retrouvera son salut. C'est par la mort de ses ennemis que tous seront vengés. Comme beaucoup de ceux qui couraient contre les soldats de Paumos, la pensée et la raison n'étaient plus la même qu'avant. Il ne restait que des instincts presque bestiales, qui vous faisaient sentir encore plus vivant. Vous n'étiez plus le même que celui qui n'avait pas encore combattu la mort. Et vous ne le redeviendrez sans doute plus.
Un souffle de feu s'était fait ressentir. D'autres explosions. A travers ce paysage orangé, Kandall distingua le vaisseau de leur chef de guerre. Plus imposant, plus décoré que les autres bien que la suie le recouvrait. D'une rage folle, il se précipita alors vers ce nouveau but. Arrivé à sa hauteur, il vit des soldats qui sortaient encore de l'appareil, secoués par cette explosion et ce paysage apocalyptique. D'un geste précis, il égorgea les deux premiers qu'il trouvait et qui n'avaient pas eu le temps de l'apercevoir. Puis il pénétra dans le vaisseau. Là quatre soldats l'attendaient et se précipitèrent à sa rencontre. Ne pouvant tous l'affronter en même temps, il pu en transpercer un avant se se faire repousser par le deuxième. Tombant au sol, il réussit à parer son coup. Mais un autre voulu le transpercer au flanc. Il réussit alors à baisser la lame de son premier adversaire pour bloquer le coup qui aurait pu lui être fatal. Il eu alors le temps de se redresser et profita de cette déstabilisation pour plonger sa lame dans celui qui attendait son tour. Les deux derniers se précipitèrent alors vers lui et une fois encore, il para avec son épée avant d'effectuer un geste sec vers le sol ce qui fit tomber l'épée d'un de ses adversaires. Ce dernier voulu la récupérer mais il lui coupa net la main. Il s'effondra alors au sol en hurlant. Le dernier qui était en état de se battre sortit alors un pistolet et le visa.
-Au diable les bonnes manières, lui dit-il d'un visage serré. Peu importe comment je tue le roi de l'alliance du moment que tu meurs pour stopper ces horreurs !
-Suffit ! Clama une personne qui s'approchait derrière lui. Élégamment vêtu, il était grand et mince. Mais aussi jeune avec un visage imberbe, presque enfantin.
C'est donc lui leur chef de guerre ? S'étonna-t-il.
-Ce sera un plaisir de me charger moi-même de l'homme qui a causé tant de soucis à temps de pauvres gens ! Reprit-il.
-J'ignore comment tu as accédé à un tel poste, répliqua Kandall en souriant. Mais j'ignorais qu'ils recrutaient même jusque chez les enfants !
-Hydro, enchanté, dit-il comme s'il n'avait pas entendu sa remarque acerbe.
Il dégaina alors une magnifique épée avec des filaments dorées de son fourreau avant de jeter celui-ci et de se mettre en garde. Son soldat arrêta alors de viser Kandall et d'une grimace quitta le vaisseau pour s'engager sur le champ de bataille. Le fils Torcatram se jeta alors sur Hydro qui para son coup avant de le contourner et de l'attaquer à son tour. Kandall fut impressionné et pensa qu'il l'avait sous-estimé. Les coups s'enchaînèrent alors d'un rythme particulièrement effréné. Le premier à montrer des signes de fatigue sera le premier à tomber, pensa-t-il en redoublant ses attaques d'intensité. Mais ce fut Kandall qui recula à chaque coup porté contre lui. Hydro réussit même à lui taillader son épaule et le sang commença à couler, ce fut au tour de son torse puis sa joue avant qu'il le vise aux jambes. Là Kandall s'effondra mais garda son épée dans un geste défensif. D'un geste de mépris, Hydro l'envoya valser en dehors du vaisseau. Il retomba lourdement sur le bitume qui s'était chargé de sable. Là, la vision en était brusquement réduite. A mon avantage, pensa-t-il d'un sourire avant de se précipiter vers un corps étendu non loin pour lui saisir son épée. En se redressant difficilement, il vit que Hydro avait perdu sa trace.
-Je me réjouis de voir quelqu'un qui sache manier l'épée à Xandora, lui dit-il.
Ce dernier se retourna brusquement vers lui et d'un geste de l'épée voulu l'atteindre mais Kandall ayant anticipé se décala légèrement et le transperça sur sa partie désarmé. Hydro laissa alors tomber son arme, s'agrippa alors à lui et voulu lui dire quelque chose mais seul du sang sortit de sa bouche. S'en apercevant, il cessa alors de résister et la mort le rattrapa. Kandall le regarda alors, toujours agrippé à lui, sa figure enfantine s'en faisant encore plus ressentir. D'un soupir, il le laissa tomber au sol et continuer sa course effrénée vers l'avant, fauchant ceux sur son passage. Derrière lui, ses soldats finissaient de massacrer l'armée au sol de Nysteria tandis que ses vaisseaux faisait chuter une à une les tours de Térébor au prix de lourds sacrifices humains. Mais Kandall, en chef de guerre absolu, avançait toujours de l'avant avec ses hommes, affrontant au corps à corps les derniers des soldats de Paumos et prenant rapidement le dessus.
Les civils quant à eux, ne savaient s'ils devaient se réfugier dans leur tour quitte à ce que celle-ci se fasse canarder par les vaisseaux de l'alliance, ou tenter de sortir quitte à se retrouver en plein milieu du champ de bataille où la suie était telle qu'un soldat qui passait, ne pouvant vous distinguer, décidait de vous éliminer pour ne prendre aucun risque. Mais Kandall avait le regard tourné vers le palais de Térébor, vers l'impératrice Oswalda Asterian qui il en était sûr regardait également dans sa direction. Il en ignora même la pluie qui commençait à tomber. Ce n'était néanmoins pas de l'eau mais de la cendre. Une pluie de cendre se faisait ressentir.
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